par Paul Anton » Jeudi 09 Mar 2006 21:16
« Je vois une génération entière qui travaille à des pompes à essence, qui fait le service dans des restos ou qui est l’esclave d’un petit chef dans un bureau. La publicité nous fait courir après des voitures et des fringues, on fait des boulots qu’on déteste pour se payer des merdes qui nous servent à rien. On est les enfants oubliés de l’Histoire. On n’a pas de but ni de vraie place, on n’a pas de grande guerre, pas de grande dépression. Notre grande guerre est métaphysique, notre grande dépression, c’est nos vies. La télévision nous a appris à croire qu’on serait des millionnaires des dieux du cinéma ou des rockstars, c’est faux. Nous apprenons lentement cette vérité et on en a vraiment, vraiment plein le cul.»
Tyler Durden
« Nous ne serons jamais aussi libres que pendant l’occupation »
A la suite du vote de la loi sur le C.P.E., un mouvement de grèves et d’occupations s’est propagé dans les facs et les lycées à travers toute la France. Rennes, Caen, Nanterre, Tolbiac, Jussieu, Lille, Montpellier, Pau, Tours et maintenant Rouen. Ce qui se propage, ou du moins ce qui nous contamine, ce n’est pas un penchant pour l’indignation mais l’intensité qui advient, parfois subrepticement, dans ces mouvements. A Nanterre, certains bloquent les gares, les autoroutes ; à Rennes, d’autres projettent des films ou défilent masqués par centaines la nuit. Ce qui est en jeu, ce que nous mettons en jeu, c’est un sabotage possible des rouages du quotidien, une réappropriation de cette jeunesse qui nous file entre les doigts. C'est-à-dire une certaine manière de répondre pied à pied et coup pour coup à la situation qui nous est faite.
Cette situation, nous l’avons comprise depuis un moment, c’est celle de la crise permanente. Ce qui reste de cette société va mal, et il nous faudrait tout accepter pour qu’elle se survive. Car finalement tout va mal mais tout est normal. A nous de tout faire pour trouver notre place sur l’échelle des vies de merde. Merci pour tout, on reviendra.
D’un côté, cette situation nous paraît à tous aussi fatale que détestable. De l’autre, nous avons été si minutieusement dépossédés de tout que plus rien ne nous retient de lui livrer la guerre qu’elle mérite. Nos parents ne nous sauverons plus, nos diplômes ne nous sauverons plus, cette société ne nous sauvera pas.
Finalement, parfaitement précarisés, nous n’avons désormais plus rien d’autre à perdre que les destins dont nous ne voulons déjà plus. Certains ont déjà parlé de la révolte des enfants perdus.
Evidemment, ce qui fera la force de ce mouvement anti-CPE, ce n’est ni l’indignation feinte des syndicats bien-pensants, ni le verbiage usé des organisations politiques dépressives, mais notre capacité collective à suspendre la situation normale pour en arracher les possibles. Laissons la misérable excitation militante à ceux qui s’en contentent.
Afin d’éviter les méandres bureaucratiques et les gémissements auto-complaisants, si courants dans les AG, nous proposons dès maintenant :
- La grève
- Le blocage de la fac
- L’occupation
Pour cela, il faut au plus vite constituer :
- Un comité d’Action (L’ineffectivité et l’ennui des modes de protestations habituels nous obligent à repenser l’Action Directe)
- Un comité d’Occupation (Afin d’organiser une réappropriation festive de notre cadre de survie)
- Un comité Décoration (Pour sortir, au propre comme au figuré, de la grisaille de notre quotidien)
"Salut Carmela, je suis chez FIAT ! Je vais bien... Si, si, nous pouvons parler tranquillement, c'est Agnelli qui paye !"