fédéralisme et planification

Sommier théorique et affinités idéologiques !

Messagepar goldfax » Jeudi 22 Déc 2005 10:54

Un truc qui m'étonne et qui a à peine été abordé, sauf quand Lucien parlait de fordisme... La division du travail !
J'ai lu un truc du genre, telle usine fera les pièces pour telle autre usine... Faut-il préserver cette division du travail géographique ?
Je vois que beaucoup d'entre nous est passé à côté, alors que ce sujet s'inclut effectivement dans la discussion. Je pense que supprimer la division du travail sur ce plan enlèverait pas mal de tâches planificatrices. Je prends l'exemple de l'automobile, qui a illustré ce truc que j'ai lu : pourquoi une usine ne fabriquerait-elle pas elle-même toutes les pièces au lieu de conserver les restes du capitalisme ? Le fordisme, c'est la spécification des tâches, tant au niveau humain qu'à celui de l'entité "usine". Il faut abattre la division du travail pour en arriver à un fédéralisme réel et à une planification amoindrie.
La question des matières premières, c'est autre chose...
goldfax
 

Messagepar Paul Anton » Jeudi 22 Déc 2005 13:34

Tu as parfaitement raison de soulever cet aspect du problème. La construction et le développement d’une économie communiste libertaire supposent la fin de l’opposition entre le travail manuel et intellectuel. Cela revient à poser actuellement la part du travail matériel et immatériel :

Travail matériel : j’appelle travail matériel ce qui concerne la fabrication d’un objet dans la mesure où l’on intervient dans le procédé : une voiture, une tondeuse, un ordinateur, un meuble…

Travail immatériel : l’instituteur, l’infirmière, l’assistance sociale..., ces catégories socioprofessionnelles interviennent dans la reproduction et la réparation de le force de travail (étant une partie du capital social),

Dans le courant de l’autonomie française, on appelait ça la psychologisation du mode de production (voir la revue « camarades »)
"Salut Carmela, je suis chez FIAT ! Je vais bien... Si, si, nous pouvons parler tranquillement, c'est Agnelli qui paye !"
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Messagepar pseudo fixe » Vendredi 23 Déc 2005 6:24

Absolument, la division du travail, voilà bien encore une question à laquelle il y aurait quelque urgence à s'attaquer. On entend parfois tout et son contraire chez les anars lorsque le sujet est évoqué. On peut penser l'économie sans trop s'occuper du travail, mais les conséquences en seraient lourdes. L'anarchisme (du passé) qui a pensé le travail était pris entre désir d'émancipation d'un coté et sacralisation du travail (de la fonction productive) de l'autre. Rien n'a bougé depuis. Pourtant il est évident qu'une société communiste verra sur la question du travail surgir des tensions permanentes vers la reconstitution de privilèges (meme sans bureaucrates). Les solutions au forceps adoptées par certains pays "communistes" ont montré leur efficacité sur certains aspects, mais c'est d'une utilité mineure pour des anarchistes (et puis le PS aussi fait de la revalorisation, alors...). Le professeur d'université libertaire est-il ok pour aller de temps à autres récurer les égouts ? Pour certains oui, pour d'autres... (et les raisons d'un "non", si charmantes ou savantes puissent-elles etre, risquent de peu intérésser celui qui manie la pioche au fond de sa mine).
pseudo fixe
 

Messagepar Paul Anton » Vendredi 23 Déc 2005 9:40

pseudo fixe a écrit:Les solutions au forceps adoptées par certains pays "communistes" ont montré leur efficacité sur certains aspects, mais c'est d'une utilité mineure pour des anarchistes (et puis le PS aussi fait de la revalorisation, alors...).


:?: :?: :?:

Je ne vois pas trop ce que tu veux dire. :shock:
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Messagepar goldfax » Vendredi 23 Déc 2005 9:48

C'est sûr que cette question risque de poser des problèmes... Cela signifie qu'il y a du travail à faire sur les consciences. Personnellement, je pense que dans certains cas, la nécessité contraindra les gens à se mettre à deux types de travaux : manuels et intellectuels, à se rendre polyvalents. Il faut que je réfléchisse à un exemple...

Toutefois, lorsque je parle de division du travail, cela peut également être dans un type de travail, notamment manuel. L'exemple de l'industrie : telle usine fabrique une pièce, telle autre une deuxième pièce, etc... De même à l'intérieur de l'usine, tel atelier ci, tel atelier ça... Cela va même à l'échelle planétaire : la Corée fabrique les composants électroniques des voitures, le Brésil fabrique la carosserie, l'Espagne les boîtes de vitesse, l'Arabie Saoudite l'huile de moteur, etc.
Je caricature un peu, ça fait mieux passer l'illustration...
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Messagepar riveira » Jeudi 29 Déc 2005 17:04

Intéressant de voir qu'il y a autant de divergence chez les sympath ou militants de la CNT sur cette question de la planification que dans l'ensemble du mouvement "communiste" au sens le plus large.

Sinon sur ça :

Dans le courant de l’autonomie française, on appelait ça la psychologisation du mode de production (voir la revue « camarades »)


J'ai un numéro de Camarades... pas très clair sur l'orientation, mais intéressant. Jusqu'au moment où on apprend que l'une des figures de ce groupe était Yann Moulier Boutang, ce libéral élitiste et pédant pro constitution européenne, gestionnaire de la revue Multitides, fer de lance de la droite des Verts, soutien de DCB ou Mamère.

L'opéraïsme a produit beaucoup de savante théorie sur le travail et l'aliénation capitaliste avant de retourner à l'apologie du caractère révolutionnaire du libéralisme.
:(
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Messagepar lucien » Vendredi 30 Déc 2005 13:37

Je relance la discussion, d'autant que mon message n'a pas du être bien compris. :wink:

:arrow: Une planification mondiale de l'économie ?

Si j'ai utilisé l'exemple absurde du bidon de pétrole, c'était pour rappeler la sur-consommation en ressources naturelles du mode de vie occidental, ce que personne ne remet en cause ici (quoi que !) ; mais je pense aussi que peu imaginent les conséquences d'une véritable répartition égalitaires des ressources, d'où ce bidon de pétrole annuel ;d'ailleurs, à partir de ce constat, pourquoi continuer à réfléchir sur le fonctionnement des usines automobiles ?!

Nous avons déjà eu ce genre de discussion sur le forum, où il était rappelé que sans pétrole, beaucoup des gadgets qui nous entourent ne pourraient plus être fabriqués. Je ne sais pas si c'est bien ou mal, mais la révolution dont vous parlez ne sera pas accompagnée d'une révolution technologique simultanée permettant de dépasser cette contradiction.

Ca peut rejoindre certaines positions d'Anartoka : la fin du pétrole peut accélèrer un processus révolutionnaire ; l'organisation d'une "économie" doit se faire avant tout au niveau local (et je ne crois pas que cela soit le cas aujourd'hui), d'autant (ça s'est mon point de vue) qu'il faudra sans doute se limiter aux ressources naturelles locales : l'autonomie énergétique est aussi une idée révolutionnaire.

:arrow: Réfléchir à une situation révolutionnaire

Lucien me surprend lorsqu'il dit qu'il est étonné que l'on puisse en etre à réfléchir à une situation révolutionnnaire, car je ne sais pas comment un révolutionnaire peut ne pas se placer dans une hypothèse révolutionnaire.

Je n'ai pas non plus dit qu'il ne fallait pas y réfléchir... Et je t'invite d'ailleurs à relire la charte de l'union locale :

Charte de l'Union locale a écrit:L'anarcho-syndicalisme fait sien le principe de pensée et d'action globale. Il propose de substituer à l'économie capitaliste, une économie socialisée et planifiée ; au mode politique étatique, quelque soit le régime, une organisation politique basée sur le fédéralisme libertaire ; aux idéologies autoritaires et de domination, une idéologie égalitariste ; de façon que s'accomplissent les droits de tous et de chacun, en tous lieux, afin de décider, contrôler sa vie et son environnement.

Mais je ne crois pas que la révolution consiste à faire un appliquer un programme pré-établi (a fortiori de centralisation de l'économie !) mais qu'elle passe d'abord par la prise de conscience des masses ; elles seules détermineront, dans les AG, conseils, soviets (!), l'orientation d'un mouvement de révolte : voilà pourquoi je m'étonnais que nous en soyions déjà là...

"La révolution n’est pas la révolution lorsqu’elle agit en despote et lorsque, au lieu de provoquer la liberté dans les masses, elle provoque la réaction dans leur sein."
M.B., un révolutionnaire...
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Messagepar riveira » Vendredi 30 Déc 2005 14:39

Je suis bien d'accord avec ce qu'avance Lucien sur la nécessaire relocalisation et l'autosuffisance énergétique comme condition de la souverainneté des gens sur leur vie et notamment sur "l'économie" (ou le système productif).

Par contre

Code: Tout sélectionner
Mais je ne crois pas que la révolution consiste à faire un appliquer un programme pré-établi (a fortiori de centralisation de l'économie !) mais qu'elle passe d'abord par la prise de conscience des masses ; elles seules détermineront, dans les AG, conseils, soviets (!), l'orientation d'un mouvement de révolte : voilà pourquoi je m'étonnais que nous en soyions déjà là...


Le problème c'est qu'il peut y avoir un moment de mobilisation des masses à la faveur d'une crise soudaine, et que l'état de conscience des "masses" sera celui de ce moment là. Il pourra être très faible, si, auparavant, de nombreuses luttes et de nombreux débats n'ont pas défriché un certain nombre de problématiques. En 36, la révolution se passe à un moment où la CNT a auparavant bien préparé le terrain : contre les curés, pour les droits des femmes, pour la socialisation de la production, des terres, le primat de la liberté face à l'oppression étatique. Sans cela, l'hégémonie stalinienne aurait été encore plus rapide.

Par exemple je ne suis pas en accord avec la stratégie politique des animateurs de la Décroissance, mais je trouve que leur travail est salutaire. Personne d'autre aujourd'hui n'est capable comme ils le font de révéler les contradiction du système technoscientiste, de ses impasses physiques (les limites des ressources) culturelles (l'appauvrissement de la liberté humaine)...

Et les débats qu'ils "sèment" permettent par ricochet de faire avancer la conscience de tous notament dans le mouvement communiste au sens large, qui reste en grande majorité, productiviste et scientiste, bien qu'il mette le "durable" et "l'antiproductivisme" à toutes les sauces (ah, la croissance durable du PCF !)

Essayer dès à présent de préciser ce que serait un système alternatif au capitalisme me semble utile. Personnellement j'ai besoin aussi de "croire" et pas seulement de réagir même si la révolte reste mon meilleur "moteur". :twisted:

Il faut prendre la juste mesure de l'effet repoussoir des expériences du "socialisme réel" dans le manque de radicalité des luttes actuelles.

Pour en revenir à cette idée que seuls les soviets seront souverains dans les mesures qu'ils décideront, comment être sûrs, qu'ils ne décideront pas de continuer à produire des consoles de jeux, des bagnoles chromées avec tunning incorporé, des baskets à air comprimé, des caméras de vidéo surveillance...

Nous devons aussi entammer une lutte culturelle contre la stupidité du mode de vie engendré par la marchandisation, l'accumulation...

C'est cette révolte globale contre l'ordre des choses qui me séduit dans la tradition anarchiste, par rapport à la tradition sociale-démocrate (donc aussi stalinienne et en partie trotskyste) qui se limite à la question de la répartition ou au management d'un même système productif, d'une même société industrielle et de consommation.

Dire dès à présent, dans les luttes, dans la propagande, qu'il ne faudra pas se limiter à changer de propriétaire mais qu'il faudra bouleverser toute l'organisation et les fins du travail est une façon de commencer à empêcher les bureaucrates de tout poils de réduire les luttes à un changement de personnel.

Quelle différence pour les peuples du sud entre une mondialisation uniformisatrice libérale, et une mondialisation planifiée bureaucratiquement avec une division géographique du travail conservée (voire amplifiée car "rationnalisée") -LO par exemple n'est pas loin de cette caricature- ?.
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Messagepar goldfax » Samedi 31 Déc 2005 15:14

Je suis d'accord avec la plupart des choses que tu dis.
Toutefois, lorsque tu dis :

Et les débats qu'ils "sèment" permettent par ricochet de faire avancer la conscience de tous notament dans le mouvement communiste au sens large, qui reste en grande majorité, productiviste et scientiste, bien qu'il mette le "durable" et "l'antiproductivisme" à toutes les sauces (ah, la croissance durable du PCF !)


En fait, je ne crois pas que cela fasse avancer la conscience de tout le monde... Certes le milieu "communiste" (au sens large, pas forcément littéral, car pour moi le PCF n'est pas communiste, mais social-démocrate...) évolue grâce aux débats, etc. Mais la masse des travailleurs, quant à leur conscience, évolue-t-elle de la même manière ?
Je pense qu'il faut être aveugle (et légèrement naïf... :? ) pour croire que la conscience des masses populaires avance. Je dirais même qu'elle recule et que nous avons un boulot de propagande immense à effectuer pour que cet état des choses évolue.
Débattre, c'est bien gentil, mais au niveau de la pratique, ce n'est pas terrible ! C'est seulement au travers des luttes et des contacts avec les couches populaires qu'on fera avancer les choses, ce n'est pas en discutaillant comme des avant-gardes "ultra-gauches" ou bolcheviks qu'on fera avancer le Schmilblick ! Comme tu peux le constater, je suis contre (comme la plupart des gens sur ce forum... :D ) toute forme d'avant-gardisme révolutionnaire. C'est à l'opposé d'une conception égalitaire et libertaire.
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Messagepar lucien » Lundi 02 Jan 2006 13:11

Hé hé ! :D
Suis bien content d'avoir relancé le débat et trouve comique le fait que :
- riveira nuance les propos de lucien (qui sous-entendaient pourtant tout cela - l'exemple du long travail de la CNT pré-36 est très pertinent !)
- goldfax nuance les propos de riveira (qui à mon avis ira aussi dans le sens de goldfax !).
On a finalement à peu de choses près les mêmes positions !
:wink:
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Messagepar lucien » Lundi 02 Jan 2006 13:34

Je l'avais oublié ! Riveira fait bien de le remettre d'actualité car il répond à certaines questions posées durant cette discussion. :)

:arrow: Quelques remarques sur le présent et l'avenir
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Oeucuménisme

Messagepar Federica_M » Lundi 02 Jan 2006 15:10

Quand Riveira nous dit :

"Pour en revenir à cette idée que seuls les soviets seront souverains dans les mesures qu'ils décideront, comment être sûrs, qu'ils ne décideront pas de continuer à produire des consoles de jeux, des bagnoles chromées avec tunning incorporé, des baskets à air comprimé, des caméras de vidéo surveillance...

Nous devons aussi entammer une lutte culturelle contre la stupidité du mode de vie engendré par la marchandisation, l'accumulation... "

Je crois que tous les militants de la CNT AIT souscrivent !

C'est d'ailleurs parce que nous ne fétichisons pas l'assemblée générale ou l'action directe que nous ne sommes pas syndicalistes révolutionnaires (lesquels pensent que l'action directe se suffit à elle même. Cf le texte de présentation des Vignoles où il est dit "laction comme idéologie" ) mais au contraire anarchosyndicalistes (c'est à dire en mettant aussi un contenu idéologique dans les luttes).

Et Riveira a tout à fait raison de dire que cette lutte idéologique est CULTURELLE (Le mot "culture" n'a bien sur rien à voir ici avec l'utilisation du terme qui est allègrement confondu par les confus de toutes part avec les activités liés à l'activité du spectacle ... ) C'est bien à une transformation du paragidgme (1) dominant que nous aspirons. La révolution ce n'est pas prendre le pouvoir mais changer le référent culturel.

Tout ça pour dire que je souscris avec Lucien quant à la proximité de tous ceux qui se sont exprimés jusqu'ici. Vive la mosaique de l'arc enc iel, pas seulement en rouge et noir :-)

(1) moi aussi je peux utiliser des mots que personne ne comprend, na !
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Re: Oeucuménisme

Messagepar lucien » Lundi 02 Jan 2006 15:29

Federica_M a écrit:C'est bien à une transformation du paragidgme (1) dominant que nous aspirons. La révolution ce n'est pas prendre le pouvoir mais changer le référent culturel.

(1) moi aussi je peux utiliser des mots que personne ne comprend, na !
Des mots que personne ne comprend, surtout mal orthographiés ! Ou alors était-ce une mise en application de ton discours par la transformation du paradigme ? :lol:
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Tournée générale !

Messagepar Federica_M » Lundi 02 Jan 2006 16:00

Bon, je crois que je suis bonne pour payer ma tournée la prochaine fois que je monte à caen ... :-)
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Messagepar goldfax » Lundi 02 Jan 2006 21:39

Content que ça te fasse rire !... :lol: :wink:
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