par lucien » Samedi 12 Nov 2005 1:45
Le syndicalisme ne peut être neutre
"Le fait de proclamer la faillite des partis et de leur substituer les groupements naturels de classe que sont les syndicats, implique la nécessité absolue, pour le syndicalisme, de combattre tous les partis sans exception.
La neutralité des syndicats proclamée à Amiens en 1906, a été dénoncée, en novembre 1926, par le congrès constitutif de la CGT-SR.
Cette décision, très controversée à l'époque, même dans nos milieux, n'était pourtant que la conséquence logique de la substitution de la notion de classe à la notion de parti.
Il est à peine besoin d'affirmer que les événements actuels, qui démontrent avec une force accrue la carence totale des partis, nous font une obligation indiscutable, non seulement de rompre la neutralité à l'égard des partis, mais encore d'engager ouvertement la lutte contre eux.
S'il en était autrement, il serait inutile d'avoir prononcé la condamnation de l'Etat, démontré l'incapacité des partis à résoudre les problèmes dont le salut de notre espèce dépend.
La neutralité a donc vécu. (...)
Ce ne sont pas des chrétiens, des radicaux, des socialistes, des communistes qu'il s'agit de réunir dans un mouvement de classe, mais des travailleurs en tant que tels.
Nous leur demandons donc de cesser d'être des chrétiens, des radicaux, des socialistes, des communistes, réunis dans un groupement voué d'avance à l'impuissance, en raison de la diversité des idées de ses composants -ce qui est bien le cas actuellement- pour devenir des travailleurs, exclusivement des travailleurs aux intérêts concordants.
Nous les prions, en somme, d'abandonner les luttes politiques stériles pour les luttes sociales pratiques et fécondes ; de passer de la contestation de fait à l'action nécessaire ; de s'unir, sur un terrain solide au lieu de se diviser pour des fictions.
Pour ma part, je considère qu'une telle union, dont la fécondité est certaine, est une chose beaucoup plus facile à réaliser que de choisir le "bon parti", le vrai parti prolétarien, parmi tant d'autres.
Si les travailleurs avaient abandonné les partis à leur sort, s'ils les avaient combattus, ils ne seraient plus les esclaves du Capitalisme.
Depuis longtemps, ils seraient libres et s'ils veulent réellement le devenir, il importe qu'ils cessent de croire aux vertus des partis dits "prolétariens" qui comptent tant de bons et solides bourgeois dans leur sein et n'aspirent qu'à étrangler une révolution qu'ils n'appellent que dans la mesure où ils la savent inévitable."
Pierre BESNARD
(extrait de l'article sur le syndicalisme paru dans l'Encyclopédie anarchiste)