par Lambros » Lundi 13 Aoû 2012 18:42
Article intitulé "Et Maintenant ?", extrait du Monde Libertaire numéro 1673, du 17 au 23 mai 2012...
En gras les passages favoris....
Hollande vient d’être élu président de la République. On peut trouver cela « bien », moins pire, mal… et en rester là ! À une posture morale pavée de litanies et de liturgies.
On peut également analyser l’événement et ses conséquences, histoire d’essayer d’anticiper les choses à venir, et, fort de cette analyse, développer une stratégie adéquate.
Dans un mois, les législatives.
En règle générale, ce type d’élection donne une majorité parlementaire au président élu. Ce devrait être le cas comme jamais encore. Pourquoi ?
Avec ses presque 18 % (mais 35 à 40 % dans beaucoup d’endroits), le Front national est en situation d’imposer des triangulaires dans 150 à 200 circonscriptions. Ici, là et ailleurs, le FN va se retrouver en tête devant un socialo. Que va faire la droite ? Se maintenir et faire gagner le socialo, ou, ici et là, commencer, en catimini, à prendre langue ? Même cas de figure pour la droite. Ici, là et ailleurs, le FN va se retrouver en deuxième position derrière la droite. En se maintenant, cela ferait passer le socialo. Certains, à droite, vont être tentés de commencer à prendre langue. Ici, là et ailleurs, le FN va se retrouver en troisième position. Là encore, en se maintenant, ça ouvre un boulevard aux socialos. Et, donc, certains à droite, vont être tentés de…
En clair, le FN va faire imploser l’UMP, car s’il est clair qu’une partie de la « droite populaire » (Sarko s’est aligné sur ses valeurs qui sont quasi celles du FN) va passer des débuts d’accords avec le FN, il est tout aussi clair que la fraction gaulliste et centriste de l’UMP va refuser cela. Le futur « camarade » Bayrou parie également sur ce scénario, car, ainsi, il pense récupérer les transfuges centristes de l’UMP. Ajoutons à cela la guerre des chefs (Copé, Fillon, Bertrand, Juppé, Raffarin) pour le contrôle de l’UMP, et il est aisé d’anticiper sur les faits à venir.
Après les législatives, qui vont se traduire par une gigantesque vague rose, l’UMP va se retrouver en lambeaux, et le FN comme le nouveau centre de gravité de la droite. Ce sera le début de la conquête du pouvoir car, c’est connu, dans ce pays, il y a une majorité de gens qui se retrouveront dans les valeurs d’une droite et d’une extrême droite unies.
Tout cela aura lieu dans cinq ans, dans dix ans ou dans quinze ans. Mais cela aura lieu.
En tout cas, ce ne seront pas les socialistes réformistes, ni les front de gauchistes, ni les écologistes qui enrayeront le processus. Tous ceux là ont fait le choix de gérer le capitalisme en le moralisant. Or, même moralisé, le capitalisme continuera à nous en envoyer plein la gueule : misère, exploitations, oppressions, pillages, spéculations…
Alors, que faire ? Nous qui ne sommes qu’une poignée de centaines.
Quelques idées, en vrac.
Réfléchir, formuler et populariser au plus vite un projet de société détaillé, crédible et désirable. J’ai bien dit un projet de société détaillé, crédible et désirable. Pas formuler uniquement des principes. La propriété collective des moyens de production, comment ? Quels services publics qui ne soient pas des valets de l’État ? On supprime les prisons, les HP… mais comment on gère la dangerosité sociale ? On supprime l’armée, mais comment on organise le peuple en armes ? On désarme unilatéralement, mais comment on fait si… ? Doit-on interdire le marché ou le confiner dans un espace réglementé par le politique ? Suppression de l’argent (pour le remplacer par quoi ?) ou une banque du peuple comme le proposait Proudhon ? Et qu’est-ce qu’on fait par rapport à l’Europe actuelle, à la mondialisation, au nucléaire, à la guerre civile en Syrie, à l’intolérable chinois, russe, américain… ? Et par rapport aux saloperies de lapins qui bouffent les carottes de ma vieille mère ?
Grandir très vite en nombre. En grand nombre. Bientôt 100 groupes. Demain, 1 000. Après-demain, 10 000…
Initier une unité du mouvement libertaire. Une union sur l’essentiel respectueuse des diversités des uns et des autres.
Initier des alliances sur l’essentiel avec nos voisins politiques les plus proches.
Appliquer cette stratégie dans les syndicats, les luttes, la vie sociale et culturelle.
Œuvrer pour la fédération d’un maximum d’alternatives en actes dans un sens libertaire, et, pour ce faire, s’y impliquer.
Refuser l’électoralisme sur les bases du système électoral actuel. Mais, proposer un système électoral libertaire et autogestionnaire. Dans la vie de tous les jours. À l’usine, au bureau, dans la cité… et au niveau politique. Mandat impératif comportant néanmoins une dose de confiance pour gérer l’imprévu. Contrôle des mandats non en permanence (c’est intenable au niveau d’un pays), mais fréquemment et régulièrement. Définition d’une démocratie libertaire, d’une représentativité libertaire… renvoyant aux calendes grecques et aux poubelles de l’Histoire l’arnaque de la démocratie bourgeoise et de sa conception de la représentation. Définition d’un État de droit libertaire…
Bref, ou bien nous avons vocation à changer la société et le monde, et il convient de s’en donner les moyens, ou bien nous restons bien au chaud dans des postures culturelles et religieuses sans perspective sociale.
C’est à nous de choisir !
Jean-Marc Raynaud
L'émancipation des chrétien-ne-s sera l'œuvre de Dieu lui même.