squat rue Basse

Manifestations, assemblées générales, actions en cours... les luttes en normandie !

squat rue Basse

Messagepar lucien » Lundi 11 Juil 2005 20:45

Quelqu'un a des nouvelles ?
Des squatters risquent l'expulsion
Ils occupent depuis cinq mois une maison de la rue Basse

Une procédure d'expulsion vient d'être engagée contre huit squatters logeant de façon illégale dans une propriété de la rue Basse. Voilà cinq mois, ils ont investi une maison inoccupée depuis 35 ans. Et ont peu à peu rénové les lieux. Ils risquent d'être délogés lundi.

L'huissier leur donne deux jours pour quitter les lieux. Les squatters de la rue Basse doivent déménager avant lundi matin. Sous peine d'être délogés par la force au petit jour. La maison occupée - une demeure cossue du début du siècle et laissée à l'abandon depuis 35 ans - est la propriété de la société Caps, qui y logeait autrefois des ouvriers. Les nouveaux occupants y vivent en toute illégalité depuis cinq mois et la procédure d'expulsion, lancée il y a deux mois, arrivait vendredi soir à son terme.

Image

Doudou, Spike, Daniel, David, Franck et leurs trois autres compagnons ont investi la maison en janvier. La nature y avait repris ses droits, le jardin garde encore aujourd'hui des allures de forêt amazonienne. « Une des premières choses que nous avons faites, en arrivant, a été de débroussailler, raconte Daniel, originaire de Caen. Il y avait des ronces partout, le jardin était impraticable. »

C'est l'un des voisins qui a fourni le matériel, content de retrouver un peu de luminosité dans sa propriété. Dans la maison, qui tombait en ruine, les jeunes ont tout nettoyé. Et se sont aménagé des chambres qui, à défaut d'être confortables, restent vivables. Les meubles ? « De la récupération, des petites choses trouvées aux encombrants. Si vous savez ce que l'ont peut trouver... »

Seul le rez-de-chaussée, muré de l'extérieur, a été laissé en l'état. Pour l'eau, les squatters vont s'approvisionner dans un immeuble situé 50 m plus loin, alors qu'un autre voisin leur propose aussi de les dépanner.

Résignés, les six hommes et les deux femmes disent vouloir partir « sans violence ».

« On va discuter tous ensemble et voir ce qu'il y a de mieux à faire. Si on trouve un recours d'ici à lundi, tant mieux. Sinon, on partira tranquillement avant de se faire dégager par les forces de l'ordre », poursuit Daniel. Le problème reste pour eux de retrouver rapidement un autre logement. Beaucoup ont fait des demandes à la mairie, grâce au Fonds de solidarité logement (FSL). Demandes qui n'ont pas abouti jusqu'ici.

Aude BLACHER [O-F samedi 9 juillet 2005]
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Messagepar Anartoka » Lundi 11 Juil 2005 22:02

Justement j'était en train d'en parler avec un ami par mail et on avait pas de nouvelle non plus.

demain ds ouest france peut-être :idea:
C'est de reculer que de trop philosopher.
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Messagepar lucien » Lundi 11 Juil 2005 22:45

Anartoka a écrit:demain ds ouest france peut-être :idea:

J'espère pouvoir bénéficier d'une autre source que l'"Ouest"...
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Messagepar anti-k » Mardi 12 Juil 2005 12:13

ce qui est intéressant c'est de voir comment les squatteur(euses) de la rue basse s'arment de "recours". Sinon qui a prévenu ouest? eux?

Peut-être que ses expériences multiples et d'essences diverses de squats vont ouvrir le champ des possibles en ce qui concerne le logement. des pratiques et des idées qui feront peut-êtreleur chemin.

a noter qu'il exite des squats depuis longtmeps sur caen mais que depuis quelques mois sous leurs formes multiples ils ont pris une visibilité.
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Messagepar Anartoka » Mardi 12 Juil 2005 12:28

Je ne sais pas comment la journaliste est arrivé chez eux et je ne la connais pas non plus, c'est plutot nathalie hamon qui fait se genre d'article (jeune - précarité ..etc.). Ce qui me surprend, c'est qu'ils ne voulaient être médiatisé, ils voulaient resté discret pour tenir le plus longtemps possible

En tout cas, il y a eut procès au TGI

Après quand j'étais passé au squat, j'ai oublié de parler de la notion juridique. Et je pense qu'ils n'avaient aucune nouvelle non plus. Je me souviens qu'ils se foutaient un peu de ce lieux car ils avaient déjà repéré des dizaines de grosse baraque vide dans l'agglomération caennaise.

Ensuite, je m'interroge si le SCAC et la mauvaise herbe non pas eut un effet sur le dernier point soulevé par anti-k
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Messagepar lucien » Mardi 12 Juil 2005 12:44

Anartoka a écrit:Ensuite, je m'interroge si le SCAC et la mauvaise herbe non pas eut un effet sur le dernier point soulevé par anti-k
... inversement, ceux-ci n'ont-ils pas développé l'agressivité des propriétaires, de la jutice et des forces de l'ordre contre les squatteurs(ses) ?

:arrow: Se méfier de la médiatisation et de ses conséquences...
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Messagepar Paul Anton » Mardi 12 Juil 2005 12:56

Il y avait un squat situé dans la rue du magasin à poudre vers 1997. 8)

Et puis, ne nous leurrons pas, nombres d’individus se foutent éperdument de la politique. Ne prenons pas nos désirs pour des réalités. :shock:

Quant aux médias:
les médias mentent :!: Ceci me rappelle un slogan de manif...
Moi, j'aime mieux la discrétion. :x
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Messagepar Anartoka » Mardi 12 Juil 2005 13:01

lucien a écrit:inversement, ceux-ci n'ont-ils pas développé l'agressivité des propriétaires, de la jutice et des forces de l'ordre contre les squatteurs(ses) ?


Là je peux répondre,

:arrow: Agressivité avec les propriétaires ?

Non, la DDE a été très correct, presque interessé, pas de pression ni de violance, ce qui leur plaisé pas, c'est qu'on était chez eux ;)

:arrow: Justice ?

Non, car c'est la justice qui permet de pouvoir rester/tenir dans un lieu.

:arrow: Forces de l'ordre ?

Un seul cas à signaler lors de la mauvaise herbe. Pas plus violent que ça... Je rajouterais que la police pour le squat rue basse, d'parès les occupants, ont été sympa ...
De plus, lorsque le huissier est venu à la mauvaise herbe accompagné de la police, celà (entre eux, en privé) légitimés presque le squat de la mauvaise herbe ....


Donc, je ne pense pas du tout que ces deux ouvertures soient négatives. D'autant que de plus en plus de monde passaient, s'interessaient, lisaient, discutaient....

De plus, je pense que ce fut une expérience à vivre et qui prouve la réalisation possible et réaliste d'espace autogéré, prix libre, démocratie direct, d'action direct.....
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Messagepar lucien » Mardi 12 Juil 2005 13:08

D'un autre coté, si on compare la rue basse et le scac ou la mauvaise herbe, l'absence de médiatisation ne semble-t-elle pas jouer en faveur de la durée ?

Les précédents squats étaient-ils médiatisés ? Duraient-ils plus longtemps ?

:?:
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Messagepar Paul Anton » Mardi 12 Juil 2005 15:06

Imaginons que le phénomène squat prenne trop d’ampleur. Que pensez-vous que fera l’Etat français ? Il avisera deux solutions pour l’endiguer ou l’enrayer : la répression ou la légalisation institutionnelle.
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Messagepar lucien » Mardi 12 Juil 2005 18:13

La légalisation institutionnelle des squats ?!

La répression, oui...

Peut-on faire un rapprochement avec les faucheurs d'OGM ? Ceux qui ont choisi la médiatisation de leur acte ne s'en sont-ils pas plus pris dans la g* ? Et pour quel impact politique ?!

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Messagepar Anartoka » Mardi 12 Juil 2005 18:15

On en peut pas comparer ces deux squats. L'un est un squat politique, l'autre est un squat d'habitation.

Pour la médiatisation, c'est à double tranchant:
- on médiatique pas et on risque une expulsion illégal (en même temps c'est plus un squat politique...)
- on médiatise et on créait un rapport de force comme pour les autres squats français, comme les 400 couverts avec des manifs à plus de 500 personnes.

Après avec des si... les squats d'habitations sont plus ou moins tolérés depuis l'abbé pierre.
Et de là que les squats prennent de l'ampleur...

Les squats politiques étant des bastions publics d'insoumissions, d'anti-capitaliste, d'une alternative réaliste, uen vitrine politique. Il me semble bien evident que l'Etat français devra s'occupé du "problème".

Cependant, à mon avis, le squat est un acte d'insoumission, révolutionnaire, une action direct. Il permet de gangrener le systeme par l'interieur à l'inverse d'un affrontement frontal lors de manif (violente mai 68) et par là il est plus pacifiste...

Je dirais donc : Destroy the capital ! Squat the world

PS: même si je rêve d'une révolution de rue... en tout cas, c'est toujours mieux que de ne rien faire. Et cela peut-être un très bon "moyen" de propagande...

Il y a plein (je connaissais que rue basse mais il y en a d'autre) de squat à caen... imaginons qu'ils soient solidaire entre eux... ça ferait pas mal de monde ...
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Messagepar lucien » Mardi 12 Juil 2005 18:33

Anartoka a écrit:Il y a plein (je connaissais que rue basse mais il y en a d'autre) de squat à caen... imaginons qu'ils soient solidaire entre eux... ça ferait pas mal de monde ...
C'est surprenant que ça ne soit pas le cas : y'a plus qu'à !
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Messagepar Paul Anton » Mardi 12 Juil 2005 19:08

La légalisation institutionnelle s’est déjà produite en Italie. 8)

Pour ma part, je pense que la médiatisation n’est qu’un mirroir déformant, c'est-à-dire qu’elle dénature les faits en eux-mêmes, pour mieux altérer la rétroaction (il y a rétroaction lorsque l’effet par action stimule la cause). La médiatisation utilisée comme tactique temporaire, ne peut donc conduire qu’à ça, et au final à l’institutionnalisation. Pour un militant anarcho-syndicaliste, le rapport de force s’entrevoit par l’impact de sa pratique (et de sa théorie). Bref, un militant anarcho-syndicaliste dotée d’une expérience, qu’il acquière, doit devenir un propagandiste et un agitateur ayant l’intelligence des situations (comme le dirait un situationniste) :!: :twisted:
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Messagepar lucien » Mardi 12 Juil 2005 19:32

Paul Anton a écrit:La légalisation institutionnelle s’est déjà produite en Italie. 8)
Certes mais j'ai cru remarquer que nous étions en France, en 2005 (avec, fleur sur le gateau, sarko à l'intérieur...) : sommes-nous dans la même situation de répression de la contestation que dans ton exemple italien ?
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Messagepar Paul Anton » Mardi 12 Juil 2005 19:43

Tu as raison dans la mesure où chaque pays possède ses particularités (historique, économique, politique…).:wink:

En citant l’Italie, je souhaite attirer votre attention sur la trajectoire d’une partie de l’autonomie (Negri et ses rejetons : les désobéissants, les tuniques blanches).

:wink: :idea: :arrow:
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Messagepar anti-k » Mercredi 13 Juil 2005 11:26

retour sur plusieurs points concernant la squat:

La médiatisation: Nous avions pour notre part choisit avec beaucoup de réticence de médiatiser. Le but unique était qu'une intervention policière trop hard ne passe pas inaperçu. C'est pas chez les lecteurs de ouest-plouc qu'on va trouver des squatteurs.

Sur le fait d'attirer les flics sur les squats. On y a rapidement pensé. mais ce qu'on constatait à l'époque de l'ouverture du scac, c'est que des interventions sauvages avaient eu lieu depuis des années. Aujourd'hui il semble mettre plus de gants. Côté contact on en an noué avec un certain nombre d'autres squatteurs, plus ou moins fertils...

La médiatisation 2 : Ce qui me semble un brun craignos dans l'histoire, c'est que ça l'air de devenir mode pour les médias locaux. Des revues nous ont demandé de faire des articles, Rance 3 de faire un reportage. Ouest qui suit la question. je me méfie comme vous de la surmédiatisatin. Elle a son revers et ce qui était employé comme outil a toujours tendance à s'autonomiser...L'expérience Bové est à ce titre exemplaire, même si on est à des kilomètres de Bové...

la légalisation: d'accord sur la question italienne. Pour rappel le collectif pas dupes sort une brochure sur le negrisme et les tutte bianche dispo par ailleurs sur le net ( voir adresses dans le topic informatic). Le premier débat que nous avions organisé marquait clairement notre positionnement. Mais cependant la question est complexe, puisque j'ai en tête un squat français connus de longue date qui est semi-légalisé et qui est un lieu où l'autogestion et sa diffusion se pratiquent au quotidien sans répondre aux injonctions néo-réformistes sauce attac, negri et consorts. En tout cas sur caen, la question ne se pose pas dans l'immédiat.

Maintenat je suis un peu surpris que la question du squat déclenche tant de méfiance... Le risque d'institutionnalisation exite un peu partout : dans le syndicalisme (se réclamant-il de l'anarchisme - voir certaines dérives des vignoles-), dans les luttes sociales, etc.
le squat n'est pas pour le collectif qui lesd a ouvert une fin en soi mais un outil d'apprentissage de l'autogestion et de l'action directe (comme la lutte), un lieu de diffusion d'idées et de pratiques, un espace où il fait bon vivre (on en a souvent marre des lendemains qui déchantent), une TAZ pour remprendre Bey...

Que tout les squats n'aient pas cette dimension, certes, mais ils ont au moins le mérite de poser la question de la validité des formes légales bourgeoises et aujourd'hui de poser la question du coût du logement qui devient de plus en plus criante.

Anarkota me reprendra si il voit des objections...

En tous cas, cette expérience de squat sur caen a été pour moi riche à bien des égards : pour la rupture avec le légalisme qui s'y opère (même si on se défend juridiquement et c'est déjà un paradoxe), pour la capacité de diffusion qui s'y déploie, pour le plaisir qu'on y prend, pour l'expérience d'autogestion (avec ses confliits), etc.
anti-k
 

Messagepar Paul Anton » Mercredi 13 Juil 2005 12:18

LA CONTRE-REVOLUTION NEGRISTE EN FRANCE


Pourquoi publier une brochure autour des théories d’Antonio Negri , de sa branche activiste en Italie (les Tute bianche devenues Disobbedienti après Gênes en juillet 2001) et de ses acolytes français ? L’auteur d’Empire est peu connu ici, bien que certains de ses concepts comme précisément l’Empire ou le revenu garanti se répandent de plus en plus. Le fait est que ce vieux routier des cénacles universitaires élabore actuellement, avec tous ses disciples, ses associés et ses propagateurs, le programme de gauche du capital en proposant un kit alternatif à la subversion des plus instructifs puisqu’il nous parle à la fois des craintes de la domination et des réformes contre-révolutionnaires susceptibles d’endiguer une révolte qui parviendrait à se faire contagieuse, avant qu’il ne soit trop tard.

Si nous n’avons pas l’illusion de penser que des théories puissent influencer unilatéralement des mouvements, nous pensons par contre que celles de Negri correspondent aux intérêts de la domination, c’est-à-dire redonner une stabilité à cet “Empire menacé de partout”. A travers de nouvelles médiations (le pouvoir constituant et ses porte-paroles médiatiques), un contrôle social plus raffiné (revenu garanti et nouvelles technologies), des réformes économiques (un nouveau New Deal) et politiques (une “démocratie européenne”, de “nouveaux droits universels de citoyenneté”), les negristes tentent en effet de forger, malgré leur usage abscons du langage, de nouveaux outils préventifs pour garantir l’ordre social.

Les textes de cette brochure ont tous été écrits par des compagnons italiens et publiés soit directement là-bas, soit comme notes destinées à préciser la feinte radicalité dont les negristes sont parfois porteurs au-delà des Alpes : le “portrait craché” de Negri a été rédigé à l’occasion de la publication de la traduction de Barbari (livre italien qui analyse, critique et répond à Empire) aux Etats-Unis, où ses années de prison conféraient une aura au personnage, et l’article sur les pratiques des Tute bianche lors d’une manifestation à Rome a été écrit pour un journal parisien de précaires, au moment où ces bouffons en blanc -véritables balances para-institutionnelles- jouissaient d’une réputation de radicaux, notamment forgée par le réseau antifasciste libertoïde No Pasaran [1]. Nous avons simplement rajouté à ces différents textes un recueil de citations de negristes français extraites de publications qui se sont implantées ici dans les bonnes bibliothèques universitaires et dans les poches des partisans du prêt-à-penser qui fait intelligent. S’il reste tout un travail bien plus complet à mener sur toutes les conséquences pratiques du negrisme en Italie (dont la diffusion de la dissociation politique, le rôle de pacification sociale dans les villes à travers les centres sociaux, de constitution d’une base électorale pour une gauche italienne en faillite, d’auxiliaires de police lors des manifestations), revenons à présent sur les épigones français du théoricien de Padoue.

Comme en Italie, où les negristes sont issus politiquement des groupes de l’Autonomie ouvrière de la fin des années 70 [2], une partie des negristes français était déjà active à la même époque dans la sphère de l’autonomie parisienne. Si on suit par exemple le fil rouge de la revendication pour “un revenu minimum garanti”, un Laurent Guilloteau (aujourd’hui activiste à AC !, dans la coordination Ile-de-France des intermittents du spectacle et membre du comité de rédaction de Multitudes) ou un Yann Moulier-Boutang (aujourd’hui aux Verts, professeur à sciences-po et directeur de publication de Multitudes) militaient déjà ensemble dans les premiers collectifs de chômeurs en 1978-79 [3] avant de promouvoir le revenu garanti au sein de la revue CASH (1984-1989) puis du Collectif d’agitation pour un revenu garanti optimal (CARGO, né en 1994, aujourd’hui dissous) avant de participer à la rédaction de dossiers sur ce thème dans Vacarme, Chimères ou Multitudes. C’est donc un travail de longue haleine qui a été entrepris pour le promouvoir, à la fois théorique en épuisant tous les arguments possibles -jusqu’à défendre la relance de la consommation [4]- et pratique, en s’investissant dans les luttes de chômeurs -jusqu’à signer un appel pour un revenu garanti stipulant que chaque bénéficiaire devrait s’engager à ne pas refuser plus de deux offres d’emploi (CASH) ou infiltrant AC ! à Paris par un activisme néo-léniniste forcené (CARGO)-. Finalement, cette longue marche des petits soldats du néo-keynésianisme et du contrôle accru de l’Etat a abouti à placer de petites louches de revenu garanti chez ...une partie de la mouvance libertaire organisée [5], toujours en quête de “mesures concrètes” à défendre à défaut de se fondre dans les révoltes subversives, ou chez les Verts, avant d’être réapproprié par une multitude jusqu’alors bien ingrate. Car c’est surtout la reprise du slogan “un revenu c’est du dû” par une partie du mouvement des chômeurs et précaires de fin 1997 qui fut leur plus grand succès, en terme de visibilité du moins (l’occupation de l’école Normale Supérieure le 14 janvier 1998 qui a débouché sur la première Assemblée de Jussieu le 19 janvier s’était de même faite sous les auspices d’une grande banderole rivée à la toiture proclamant “chômeurs précaires travailleurs étudiants / assemblée des luttes / revenu garanti pour tous”), parce que malgré leurs appels répétés à la gauche, ils n’ont toujours pas été entendus. Le gouvernement Jospin avait réglé la question en 1998 à coups de matraques et de miettes, mais il n’est pas dit que le réservoir d’alternatives que constituent les negristes reste toujours ainsi inemployé. La “dialectique avec les institutions” peut parfois prendre un peu plus de temps que prévu avant le retour de balancier.

Mais les braves promoteurs de la multitude ne perdent pas tout et poussent l’abnégation jusqu’à expérimenter la formule, puisque l’Etat, bon prince, veut bien parfois leur garantir un revenu. Certains forment par exemple les cadres de demain : Yann Moulier-Boutang est professeur d’économie à l’université de Compiègne et à sciences-politiques Paris, quand il n’est pas intervenant à l’ENA dans un “séminaire portant sur les mouvements sociaux et le terrorisme” (1985), à l’école d’architecture de Versailles (1993) et l’école supérieure des beaux-arts de Bourges (2000), ou consultant pour le Bureau International du Travail (1981-82), la CEE (1986) ou l’OCDE (1993-94). Pour ses recherches, il a été sous contrat des ministères des Affaires Etrangères, des Affaires Sociales, du ministère de l’Industrie et celui de l’Equipement [6]. Pour compléter ceci et certainement accélérer le mouvement du capital qui n’entend rien aux réformes que les negristes lui suggèrent si aimablement, il a été consultant pour la Commission de modernisation de la Confédération des Entreprises Marocaines et intervenant à leur journée du 11 décembre 1997 portant sur le “management de l’entreprise marocaine, réalités et défis”. Plus récemment (2004), il s’est rendu à une réunion du Centre des Jeunes Dirigeants (CJD), syndicat patronal, qui l’avait invité afin de “réagir à leur thème de rapport qui porte sur l’homme fluide”.

Un autre exemple est celui d’Anne Querrien, membre du comité de rédaction de Multitudes et de Chimères, et qui non contente d’être membre de la CFDT, est également sociologue-urbaniste à l’université et rédactrice-en-chef des Annales de la Recherche Urbaine, éditée par le ministère de l’Equipement. Ce genre de parcours de conseiller du prince et collaborateur officiel des patrons ou de l’Etat trouve son modèle chez le maître lui-même, puisque les affres de l’exil en france entre 1983 et 1997 ont été adoucis pour Negri par des séminaires dispensés à l’Ecole Normale Supérieure, dans les universités de Paris VII et VIII ou au Collège International de philosophie, parallèlement à un travail de recherches sociologiques pour le compte de différents ministères et institutions. Depuis sa mise en semi-liberté en 1999 et la sortie d’Empire en 2000, il a publié pas moins de quatre livres en français et enseigne à nouveau à Paris, cette fois à la Sorbonne : le séminaire 2004-2005 a pour objet la “Transformation du travail, du pouvoir (s) et crise de la comptabilité nationale et d’entreprise”. Enfin, sa pièce de théâtre, Essaim, sera jouée en juin 2005 au théâtre de la Colline à Paris. On comprend dès lors mieux leur concept analytique à la base de la revendication pour un “salaire social garanti”, le “travail immatériel” qui veut que le capital nous exploite à plein temps même lorsqu’on ne lui est pas directement soumis comme salarié : tout le temps qu’ils ne passent pas à servir directement l’Etat comme fonctionnaires de la domination est tout de même employé à la consolider.

Tous ces efforts sont ensuite régulièrement récompensés, puisque le n°15 de leur revue Multitudes sur l’Art a reçu une subvention de la direction régionale des affaires culturelles (Drac) du ministère de la culture qui pourrait même être doublée “sur un numéro hors série qui pourrait être consacré à l’architecture et aux médias” (compte-rendu de l’assemblée générale de l’association Multitudes du 17 janvier 2004) et que “Yann [Moulier-Boutang] fait part d’un projet d’extension-relookage du site pour lequel nous aurions le soutien de la Direction des arts plastiques du Ministère de la culture” (compte-rendu de l’assemblée générale du 24 mars 2004). De même, l’ours de la revue Alice (n°2, hiver 1999), un des ancêtres de Multitudes, annonçait la perception d’une aide de la fondation Nestlé. On comprend également à présent mieux les notions de “contre-pouvoir” ou de “pouvoir constituant” répandues dans les numéros de Multitudes (créée en mars 2000 et faisant suite à Futur Antérieur, 1989-1998), “partie prenante du réseau mondial autour de Toni Negri et Michael Hardt et de leurs livres : Empire et Multitude” [7] : il s’agit d’être tout contre le pouvoir afin non plus de s’y substituer comme au temps où Negri ne jurait que par Lénine, mais de l’alimenter en réflexions riches sur le mouvement (on a pu par exemple croiser la branche activiste de Multitudes dans les luttes de chômeurs, des intermittents, autour des comités Persichetti ou Battisti), de servir de médiation entre la multitude et les ministères de l’asservissement, de constituer un contre-feu prêt à l’emploi afin d’aider à mater les révoltes non intégrables contre cet “Empire”. En somme, ce sont des auxiliaires entretenus par la répression en cas de besoin, si Gênes vous dit quelque chose.

Certains, plus ingénus sans doute, ont cependant dû s’exposer plus que nécessaire pour mieux co-gérer l’ordre de l’existant. C’est par exemple le cas de Giuseppe Caccia (un des porte-parole des centres sociaux du nord-est d’Italie et élu Vert au conseil municipal de Venise) ou de Yann Moulier-Boutang (directeur de Multitudes et membre de la Commission économique des Verts français). Le Professeur italien qui a théorisé la dissociation hier, lui n’a pas besoin de ces politicailleries-là, il expose directement sa contre-révolution de gauche aux dirigeants de multinationales et chefs d’Etat dans les colonnes de leur magazine, celui du Forum Economique mondial de Davos (WEF) [8] : « -32. La multitude fournit une deuxième source d’orientation des voix qui protestent contre l’état actuel de guerre et la forme présente de la mondialisation. Ces manifestants dans les rues, aux forums sociaux et dans les ONG présentent non seulement des griefs contre les échecs du système présent, mais encore de nombreuses propositions de réforme allant des propositions institutionnelles à la politique économique.
33. Il est clair que ces mouvements resteront toujours antagoniques aux aristocraties impériales et, de notre point de vue, c’est bien ainsi. Néanmoins, il serait dans l’intérêt des aristocraties de considérer ces mouvements comme des alliés potentiels et une ressource pour formuler la politique globale d’aujourd’hui.
34. Une version des réformes demandées par ces mouvements et quelques moyens d’incorporer la multitude globale comme force active sont indéniablement indispensables pour la production de richesse et la sécurité ».

Il n’est dès lors plus besoin de beaucoup en rajouter sur les intentions de ces petits Machiavel qui, lorsqu’ils théorisent pour la multitude lui présentent toutes les dominations et aliénations comme le fruit de ses propres conquêtes (voir “Barbares”, le premier texte de cette brochure), et conseillent aux puissants d’un autre côté de voir en elle des « alliés potentiels » à « incorporer » pour se renforcer. Prônant aux uns la résignation et la défense de l’ordre social puisque le capitalisme contient déjà en lui le communisme et aux autres une meilleure exploitation de cette formidable « ressource », ils se posent -eux- en meilleurs agents de la pacification comme garants de « la production de richesse et la sécurité ». Alors que ce monde techno-industriel d’exploitation, de domestication et de contrôle est plus que jamais à détruire -avec ses nuisances qui bouleversent jusqu’aux fondements biologiques de nos existences, de la génétique au nucléaire en passant par les pollutions-, en un temps où le pouvoir réclame sans cesse plus de participation individuelle et collective à sa propre servitude volontaire, à l’heure où on n’aurait d’autre liberté que celle de choisir la moins pire manière de crever, le negrisme et ses avatars garantistes, citoyennistes ou collaborationnistes est identifié pour ce qu’il affirme lui-même être : une idéologie qui rassemble des théoriciens de la domination et des flics sociaux dont le destin ne pourra être que celui que les insurgés réserveront à ces esclaves de tous les pouvoirs.

Trouvé sur le site de CNT-AIT Paris-Nord
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Messagepar Anartoka » Mercredi 13 Juil 2005 12:49

anti-k a écrit:Anarkota me reprendra si il voit des objections...


non aucune, pour la médiatisation, j'ai pas asser d'expérience pour pouvoir efficacement en jugé. Mais l'article du bonhomme libéré m'a quand même bien ouvert les yeux ;)
Ce qui me fait le plus chier avec cet article, c'est qu'il n'avait pas si tord que ça tout compte fait....

Je pense aussi qu'il faudrait d'abors faire connaitre la notion de squat "politique" dans le milieu militant. Bon là j'engage que moi et ça va faire raller ;) mais pourquoi pas un lieu ou d'autre syndicat... la cgt, fo, sud, cnt... puisse s'y investire à condition de garder des principes fort comme l'anti-capitaliste, démocratie direct, autogestion, prix libre...

Mais aussi lutter contre l'idée reçu : squat = toxico, sdf, etc...
C'est de reculer que de trop philosopher.
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Messagepar Léa » Mercredi 13 Juil 2005 13:30

Paul Anton a écrit:LA CONTRE-REVOLUTION NEGRISTE EN FRANCE
.../...
Trouvé sur le site de CNT-AIT Paris-Nord

Et toi tu balances ça, comme ça, pendant les journées d'été :lol:
Paris-Nord : Représente en Force ! :twisted:
Elu par cette crapule
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