Georges Darien, éléments bibliographiques

De l'Assiette au beurre à Rapaces...

Georges Darien, éléments bibliographiques

Messagepar michel » Jeudi 27 Déc 2007 19:35

Je mets ici les quelques références que j'ai sous la main sur Georges Darien pour ceux qui s'interresseraient à cet écrivain, et en particulier quand ça cause d'antisémistisme (cf discussion commencée ici http://cnt.ait.caen.free.fr/forum/viewt ... c&start=80 )

Image

D'abord la préface de Jean-Jacques Pauvert (mars 94) à l'édition omnibus de tous les romans de Darien, intitulée Voleurs ! (bouquin réédité d'ailleurs, si vous cherchez de la lecture pour le coin du feu). 10 pages assez intérressantes (c'est Pauvert qui a sorti les textes de Darien de l'oubli dans les années 50 et ce -on y reviendra - grace en particulier à Jarry) mais pas un mot sur l'antisémitisme supposé de Darien. Par contre Pauvert glisse que Auriant, le biographe de Darien - le seul à l'époque- est lui antisémite. Mais je n'ai pas lu cette bio pour voir si Auriant calque ses phantasmes sur son suje d'étude.
J'en profite pour reproduire deux extraits de La Belle France, cités par Pauvert

Si le nom français ne doit pas être à jamais rayé de l'histoire, il faut que la France des Nationalistes trouve demain devant elle la France des Juifs, des Protestants, des Intellectuels et des Cosmopolites, c'est-à-dire la France de la Révolution...


(pas mal pour un "antisémite" non ?)

La cause de la liberté de la femme, qui est celle de l'espèce
humaine (... j La prétention des hommes à une grande supériorité
sur les femmes est simplement grotesque. Leur immense vanité les
empêche de voir que cette supériorité consiste à placer un carcan
au cou d'un être qui leur met à son tour des menottes aux poi-
gnets ; après quoi ils n'ont plus qu'à tourner en rond...
Dernière édition par michel le Jeudi 27 Déc 2007 21:23, édité 1 fois.
michel
 

Messagepar michel » Jeudi 27 Déc 2007 21:23

La revue L'école des Belles lettres (de la maison d'édition du même nom) a un dossier Georges Darien dans son numéro 13 de juin 1995. Au sommaire :

- Georges Darien, impossible romancier de P. Masson, sur les différents thémes récurrents des romans de Darien
- Littérature et anarchie à l'époque de Darien de A. Pessin, l'histoire habituelle, RAS
- l'oeuvre romanesque : descripion chapitre par chapitre de tous les romans
et surtout "Situation de Georges Darien" de Anne-Marie Duranton-Crabol, qui au début raconte comment les deux romans de Darien ayant pour fond la Commune (Bas les coeurs et l'Epaulette) restituent bien l'air du temps de l'époque. Après elle cause vite fait de deux des principaux thèmes des romans de Darien (l'antimilitarisme et la bourgeoisie) on tombe sur le couplet "darien antisémite de gauche". L'élément central - deja resorti dans la discussion dans l'autre sujet - est que dans Bas Les Coeurs y'a un personnage qui est juif, édenté et avec un "nez d'israelite" (tremblez !!) et dans Le Voleur y'a un perso qu'est juif et qui se révéle génial dans le maniement de l'argent !!!! Voila qui clot toute discussion !! Plus sérieusement Anne-Marie ouvre sa démonstration sur les mots suivants :
Reste à analyser ce que Jean-François Revel, dans sa préface à la réédition de La Belle France, qualifiait de "travers réactionnare parfois répugnant" : l'"antisémitisme récurrent" de Georges Darien

Elle parle de la premiére réédition du pamphlet de Darien, chez JJ Pauvert (1965).
Image
Or que lit-on dans la préface de Revel :

On voit quel mélange d'idées justes, d'hypothèses confuses et de conjectures délirantes peuvent parfois agiter la cervelle de Darien, où cohabitent volontiers un sens démocratique incorruptible et des travers réactionnaires parfois répugnants, tel son antisémitisme intermittent. Là encore, du reste, il est contradictoire: il reproche aux nationalistes français d'être antisémites tout en tombant lui-même à d'autres moments ce vice.


Deja Anne-Marie c'est pas bien de copier, mais si en plus on est pas capable de copier correctement, alors ou va-t-on ? Venant d'un gauchiste né comme Revel, on se doute bien ce que doivent être les "conjectures délirantes" de Darien.... D'ailleurs, fidéle à lui meme, Revel nous averti à la fin de la préface qu'il a coupé 1/5 du texte du bouquin contenant des théorie sur l'"économie politique" et le "socialisme marxiste". Ben tiens.... Merci papa Revel de nous épargner l'horrible contagion marxiste... (La Belle France est rééditée en entier dans le recueil Omnibus Voleurs !. Je n'ai pas lu cette version d'ailleurs).
Sinon, à part cette phrase en l'air de Revel, aucun élément tangible pour l'instant. Je reviendrai sur d'autres pistes quand à l'origine de la rumeur d'antisémitisme....
michel
 

Messagepar michel » Mercredi 16 Jan 2008 18:19

Ha j'oubliais, Anne-Marie nous cause aussi des accointances de Darien avec la revue Terre Libre, notoirement antisémite, on y reviendra.

Sinon tout un numéro (33 et 34, 1987) de L'étoile Absinthe, édité par la société des amis d'Alfred Jarry, est consacré à Darien. Pourquoi ? Parcequ'apparement Jarry avait énormement apprécié Biribi et Le Voleur, et les fait figurer (dans deux versions successives) dans la bibliotheque de son Faustroll. Pauvert, grand lecteur de Jarry, ce demandait ce qu'était ce Voleur de cet inconnu Darien. Puis il le trouve chez un bouquiniste, le lit, et l'amméne à imprimer le lendemain ! Sinon rien de renversant dans cette publication.

Plus intérressant est le "Goeorges Darien" de David Bosc aux éditions Sulliver. Un ouvrage assez érudit sur l'oeuvre de l'auteur. On y retrouve encore l'inérable duo Revel-Pauvert en plein exercice de n'importe quoi

Darien était encore à Londres durant l'Affaire, et ne se fit pas entendre. On peut toutefois gager du camp qu'aura choisi, en silence,
l'auteur du premier pamphlet contre les antisémites, contre Drumont, son parti, sa séquelle (japhétique, à l'exclusion d'Arthur Meyer) et les
soutiens cléricaux dont le tout bénéficiait. Les Pharisiens, 1891. Un livre qu'à ma connaissance aucune histoire de l'antisémitisme ne mentionne, pas plus que ne l'évoquent les études sur E. Drumont. Et c'est justement au dos de l'une d'elles que se peuvent tutoyer les cimes du n'importe quoi : Edouard Drumont ou l'anti-capitalisme national par E. Beau de Loménie. En quatrième de couverture, un texte signé J.-J. Pauvert et J.-F. Revel nous apprend que Drumont était «antisémite comme Darien, Barrès, un certain nombre de socialistes et beaucoup de Français de tous bords à l'époque». Ben voyons.


Notons aussi ce passage a propos de l'"atheisme religieux" judaïsant :

C'est d'autre part, et plus fortement encore, dans le judaïsme que Georges Darien découvre les principes les plus aptes à libérer l'individu, à permettre sa réalisation: "d'où vient, chez le Juif, cette précocité de pénétration? Je ne lui vois qu'une seule cause : l'observation par l'Israélite, d'une règle morale en même temps qu'hygié
nique, qui lui permet de contempler le monde sans aucun trouble, de conclure et d'apprendre à raisonner avec bon sens; tandis que le jeune
chrétien, sans cesse dans les transes, passe son temps à faire des confidences aux médecins et à consterner les apothicaires. »Ce passage du Voleur, sans aucun doute inspiré par la lecture de Bernard Lazare (L'antisémitisme, son histoire et ses causes, 1894), est éclairci un peu plus loin: cette règle morale, hygiénique, est fondée sur le respect de soi. Et c'est parce qu'il ne se respecte pas que le chrétien peut être asservi, sacrifié et dépossédé. Le Christ incarne pour Darien le refus
d'une vie libre et la mise entre parenthèses de tout ce par quoi l'homme est homme ....
michel
 

Messagepar michel » Dimanche 20 Jan 2008 17:33

Bon on termine en beauté avec du très loud : les 450 pages de la thèse de Valia Gréau "Georges Darien et l'Anarchisme littéraire". Toute la thèse a pour but de mettre à jour les liens exacts entre Darien et le mouvement anarchiste, pour les amateurs il y a de la matière !
Mais je vais me concentrer sur un paragraphe intitulé "Une dérive vers l'extrême-droite ?" (notez le ? huhu). Un des arguments pour "prouver" que Darien aurait été un antisémite (notoire !) est sa participation à la revue antisémite Terre Libre. Or que nous apprend Valia Gréau :

Terre libre se défend toutefois dans, un premier temps d'ètre lié
avec la réaction. Zeev Sternhell date de novembre 1910 l'affirmation du
« caractère socialiste national et antisémite » du périodique de Janvion ; selon lui, dès la fin de l'année 1910, des rapprochements, se seraient opérés entre le groupe de Janvion et le mouvement de Maurras, mais en aucun cas le périodique de Janvion n'aurait été subventionné par l'Action française. Darien, qui envisage le syndicalisme comme un de lutte en faveur de la suppression de la propriété individuelle du sol, et qui ne partage pas les opinions antisémites de l'équipe de Terre libre, met fin à sa collaboration au bout de trois mois, soit avant le ralliement du Janvion à l'extrême-droite.


Or cette info tronquée permet maintenant de "prouver" l'antisémitisme de Darien. Tirer des conclusions péremptoires d'information éronée et la répeter jusqu'à ce qu'elle devienne une vérité partagée par tous, malheureusement le procédé reste fréquent...
michel
 

Messagepar lucien » Dimanche 20 Jan 2008 18:12

Je ne sais pas quoi en penser...
Le monde ne se compose pas d'anges révolutionnaires, de travailleurs généreux d'une part, de diables réactionnaires et de capitalistes cupides de l'autre.
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Messagepar michel » Dimanche 20 Jan 2008 19:45

heu de quoi ?
bon j'ai encore qq bouts de la thèse a mettre après j'arrête.
michel
 

Messagepar NOSOTROS » Dimanche 20 Jan 2008 23:40

perso, j'ai jamais compris pourquoi tout ce foin autour de gens comme Darien. Qu'il ait été ceci ou cela, bof ... Mais bon j'ai pas la fibre littéraire ni artistique, peut être qu'il ya qq chose de sensible qui m'échappe ...
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Messagepar michel » Mardi 22 Jan 2008 11:23

toujours de Gréau

L'hostilité de Darien au dreyfusisme n'a d'égal que le dégoût que lui inspirent antidreyfuisards, nationalistes et militaristes. Aussi les reproches que de nombreux critiques adressent à Darien sur ses rapports avec l'extrême-droite doivent être nuancés. Son attitude vis-à-vis de l'antisémitisme est sur ce point fondamentale. Rappelons que le contexte en ces années 1900 est particulier. L'affaire Dreyfus polarise des positions politiques autrefois ambiguës et sépare distinctement la droite radicale de la gauche. L'antisémitisme devient sinon un monopole de la droite, du moins une idéologie clairement identifié au patriotisme, alors même qu'il existe un antisémitisme de gauche, souvent associé à l'anticapitalisme , des périodiques comme La Feuille de Zo d'Axa (1898) et L'Assiette au beurre dans la décade suivante gardent un ton antisémite. Qu'en est-il de Darien ? La proposition que lui fait Bernard Lazare, au début de l'affaire Dreyfus, indique que Les Pharisiens a été perçu comme une oeuvre attaquant sans ambiguïté l'antisémitisme. Cependant son attitude de repli lors de l'affaire, et ses relations avec Janvion, qui deviendra par la suite ouvertement antisémite, peuvent expliquer qu'un contemporain comme Charles Malato fasse un amalgame facile, en suggérant que Darien est antisémite : il écrit dans L'Ennemi du peuple que la franc-maçonnerie est « attaquée par les antisémites, par Janvion et par Darien ». Mais l'on ne peut se fier au témoignage de Malato, alors en querelle avec Darien. C'est du reste dans les colonnes de L'Ennemi du peuple que ce dernier critique l'usage du mot race. En fait, sur la question de l'antisémitisme, Darien cultive les paradoxes. Certains de ses propos peuvent être considérés comme antisémites, alors même qu'il dénonce l'antisémitisme des nationalistes dans La Belle France.
Les personnages juifs dans L'Epaulette et Gottlieb Krumm ne diffèrent pas de ceux des romans précédents de Darien. Dans L'Epaulette, de nombreux personnages fourbes sont des Juifs ou leur sont assimilés, tels Raubvogel et Issacar, qui apparaissaient déjà dans Le Voleur. Dans Gottlieb Krumm, les héros, des Allemands, qui ne sont pas juifs, font fortune en Angleterre en tirant parti du Système capitaliste. Seraphus Gottlieb Raubvogel de L'Epaulette porte d'ailleurs le même prénom que Gottlieb Krumm. Ces étrangers noyautent le pays, et leur habileté à faire fortune, comme la bêtise de leurs victimes, les rendent parfois sympathiques. La malhonnêteté est donc loin d'être l'apanage des Juifs, même s'ils sont généralement des filous dans les romans de Darien. Il y a donc un fond d'antisémitisme réel chez Darien, lié à l'anticapitalisme – largement répandu à gauche, en particulier chez les anarchistes. Il arrive parfois que le Juif personnifie dans son oeuvre le capital et l'usure – dans ses romans apparaît le cliché dit jeune homme confronté à l'usurier : c'est d'ailleurs aussi une façon pour l'écrivain de parodier le roman d'apprentissage. Mais il ne faut pas oublier qu'à ses yeux, les voleurs et autres escrocs sont placés au-dessus des prétendus honnêtes gens ; ils ont le mérite de se révolter, et de bouleverser l'ordre des choses.
[...]
Darien n'attaque pas les Juifs, mais la bourgeoisie capitaliste dont ils sont parfois les représentants. Dans Le Voleur,déjà, Darien s'en prenait au Juif lorsqu'il arrivait à ce dernier de soutenir l'État social au lieu de le combattre. En fait, il critique les Juifs lorsqu'ils s'associent à l'Eglise, ou lorsqu'ils contribuent à l'exploitation sociale. L'ennemi de Darien n'est pas le Juif, mais la bourgeoisie et l'Église catholique, accusée de diriger en sous-main la société française. Dans La Belle France, Darien affirme que l'Église se serait servie des Juifs, qui ont à leur tour exploité la société française. Et l'Église brûle maintenant ce qu'elle a érigé : elle désigne les Juifs comme les responsables du malaise social. Ce sont les cléricaux, aidés des nationalistes, qui ont créé l'antisémitisme.
[...]
Darien considère l'antisémitisme comme titi subterfuge nationaliste, et appelle à l'union des opprimés, qu'ils soient juifs, intellectuels ou protestants. À l'intransigeance réactionnaire doit répondre l'intransigeance libertaire.
[...]
A nouveau, sur- ce point précis, Darien partage la pensée de nombreux anarchistes. Émile Pouget par exemple écrit dans Le Père Peinard « L'antiyoupinisme est un sacré dérivatif, inventé pour servir de paratonnerre aux capitalos crétins » Comme on le voit dans cet extrait, Darien va plus loin en pensant que le juif peut également être un agent révolutionnaire aux cotés des intellectuels et des protestants. Il l'est involontairement en contribuant à détériorer l'état social, mais il peut aussi l'être de son plein gré. Le personnage d'Issacar, dans Le Voleur et dans LÉpaulette, incarne le Juif libertaire.
[...]
L'admiration de Darien pour la religion juive, présente à la fin de l'extrait précédent, intervient à quelques reprises dans La Belle France. Le protestantisme, religion libertaire, aurait été influencé par le judaïsme


Bref, on a quelqu'un qui écrit des pamphlets anti-antisémites, n'est pas raciste, qui admire la religion juive, qui dans ses romans présente des personnages juifs libertaires (et des usuriers non-juifs). Mais parceque d'autres personnages sont juifs et usuriers. Doonc Gréau elle-même nous dit que c'est de l'"antisémitisme réél", de l'"antismétisme de gauche". Alors moi je me pose les questions suivantes :

- si dans un livre il y a un juif qui est banquier on est antisémite ?
- on est antisémite de gauche ?
- on peut être antisémite de gauche et judaisant ?
- l'antisémisme de gauche tel que présenté est ce de l'antisémisme ?
- A qui finalement cela profite qu'on considére comme normal que le libertaires de la fin du 19e aient tous été antisémite ?

(je parle d'antisémitisme de gauche à l'époque, maintenant on sait bien de quoi et de qui il s'agit)

J'avais aussi lu une biographie de Reclus où l'auteure rappelait plusieurs fois qu'il était antisémite. Or le seul élément qu'elle avançait était que Reclus s'était embrouillé avec un usurier, qui était juif. Alors moi je me pose des questions.
Après c'est sur on peut, comme nosostros, être totalement insensible et ne pas voir ce qu'il y a de terrifiant à ce que maintenant soient considérés comme antisémites des gens qui se sont clairement battus contre toute forme d'oppression.
Après tout laissons dire que les Darien, Reclus, Makhno, Kronstadtiens étaient antisémites, après tout, qu'est ce qu'on en a a foutre hein ?
michel
 

Messagepar NOSOTROS » Mardi 22 Jan 2008 12:37

Vu comme ça, je n'avais effectivement pas compris. Tu as raison.

Cependant, là où en ce qui me concerne je ferai une différence entre des personanges littéraires (tels que Darien) et des personnes ayant joué un rôle histoirque (comme Makhno oules Kronsdtatiens) c'est que les premiers ne sont pas dans le monde du réel. Ils sont dans le monde des mots, des idées. Alors que les second sont dans le monde des faits concrets.
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Messagepar Elinor » Mardi 22 Jan 2008 12:46

c'est que les premiers ne sont pas dans le monde du réel. Ils sont dans le monde des mots, des idées. Alors que les second sont dans le monde des faits concrets.


on ne peut pas opposer les deux comme ça, federica. le monde des idées s'inspire du monde concret, comme le monde des faits concrets se construit à partir d'idées exprimées par des mots. d'ailleurs un romancier a aussi une existence dans le "monde du réel" ! et bien souvent les militants font connaitre leurs actions et leur fonctionnement par des textes, qui rejoignent nécessairement le "monde des idées".
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Messagepar michel » Mardi 22 Jan 2008 13:31

NOSOTROS a écrit:Cependant, là où en ce qui me concerne je ferai une différence entre des personanges littéraires (tels que Darien) et des personnes ayant joué un rôle histoirque (comme Makhno oules Kronsdtatiens) c'est que les premiers ne sont pas dans le monde du réel. Ils sont dans le monde des mots, des idées. Alors que les second sont dans le monde des faits concrets.


oui mais l'antisémitisme est d'abord une idée glurp kofkof.
C'est certainement pour ça qu'on met plus de zèle à rappeler que makhno était un anti-antisémite radical, car effectivement comme il a été a un moment donné acteur, dans l'ukraine de l'époque, être ou ne pas être antisémite a immédiatement des repercussions reellements terribles....
c'est aussi pourquoi je ne m'étais pas penché sur ce genre de question concernant les intellectuels revoltuionnaires du 19e (de Marx à Reclus), considérant comme on voit partout que oui ben ils étaient tous antisémites, une fatalité avec laquelle il fallait bien vivre.
Puis on me cause de Darien, et le hasard veut que j'ai lu quasiment tous ses livres il y a une dizaine d'année. Et ca m'étonne. Alors je fouille un peu. Et je vois que ça ne repose sur rien.
Alors je me demande, qu'en est il vraiment ? Maintenant ma curiosité est aiguisée (attention, je ne nie pas qu'il y ait eu des anarchistes antisémites, Proudhon sembla avoir écrit des choses immondes à ce sujet).
Evidement ca n'est pas une question urgente, c'est pourquoi c'est dans la rubrique culture.
Ce pauvre Darien n'est qu'un pretexte, sinon j'aurais plutot présenté ses romans (qui sont excellents :P ) (j'en ai aussi profité pour lister les sources que j'avais sur le sujet que le hasard des années m'ont fait accumuler)
Donc si en passant des gens ont des infos sur ce sujet je suis preneur à l'occasion.
michel
 

Messagepar NOSOTROS » Mardi 22 Jan 2008 14:24

salut, rapidement

en fait ma contribution précédente a été un peu écourtée du fait d'une modification subite de mon environnement proche ... Je n'ai aps été jusqu'au bout de ce que je voulais dire:

je voulais dire que le fait que Darien se situe sur le plan des idées fait qu'l peut jouer sur les paradoxes, ambiguités etc ... que c'est même ce qui donne du sel dans les figures de style littéraire. Alors que quand tu es dans les faits, tu dois être tranché.

Il y a toujours eu autour du mouvement libertaire, des litterateurs (non péjoratif de ma part) pas tant attirés par l'idée anarchosteque par la liberté d'expression qui y règne et qui leur permet d'exprimer tous leurs "paradoxes" ou "contradictions" (pour nepas dire plus). Je pense par exemple à Rassinnier, qui n'a jamais été anar mais plutot socdem, mais qui a trouvé chez les anars un lieu où on lui permettait d'exprimer son point de vue révionniste au départ sous la forme de "paradoxes". (après, quand il a eu moins peur de dire ce qu'il avait à dire, qu'il a vu q'ilpouvait s'exprimer sans trop de craintes, il a été rejoindre son milieu naturel (l'extreme droite) pour exprimer franchement ce qu'il ne disait auparavant qu'à demi mot par procédé allusif).

Je ne connais pas Darien ni son histoire, (je vais lire le topic juré) peut être se revendiquait il de l'anarchisme ? Ou bien était ce plutot quelqu'un qui se voulait libre ? Tous les "libertaires" ne sont pas forcément anarchistes peut être ?
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Messagepar michel » Mardi 22 Jan 2008 14:41

[incroyable cette comparaison avec rassinier alors que je m'acharne a montrer que darien n'a rien a voir avec l'antisémitisme et l'extreme droite]

je ne suis pas très friand du distingo entre anarchiste et libertaire...

effectivement darien est un ecrivain qu'on peut rapprocher du courant anarchiste (individualite ? de fait il etait tout seul), et bien que son soucis ai été de trouver des solutions collectives, on peut le voir comme un homme libre qui trouve des echos chez les anarchistes ( tout le monde n'est pas dans ce cas quelque part ?). Dans le sens ou il a devellopé des idées bien a lui sur la propritée du sol, ou d'autres sujets qui parraissent un peu alambiqué, effectivement on peu l'ecarter du mouvement anarchiste pur et dur.
A la fin de sa vie il a plutot fini dans le reformisme, en militant dans un truc appelée "georgisme" pour un impot unique sur la terre. On est très très loin de délires à la rassinier (on connait des copains qui finissent dans le "prosperisme" ou des choses comme ca par exemple, pas de quoi s'en relever la nuit).
Il y la these de greau qui indique qu'il etait vraiment tres proches des idees anarchistes, mais ce n'est pas ce qui m'interresse dans ce sujet, car on s'en fout un peu et effectivement qu'il ait ete ceci ou cela ne change rien à l'aspect litteraire de son oeuvre.
Par contre en tant qu'individu amalgamé a tort ou a raison au mouvement libertaire et taxé a priori d'antisémite ca me semble être un cas d'école.
Donc un anti-rassinier de ce point de vue.
On peut dicuter de Darien je ne sais pas si ca a un interet. Je prefererai savoir d'ou vient cette idée qu'a un moment donné on arrive a mettre tout le monde dans le sac de l'antisémisitme.

ps : il faut quand même dire que Darien a vécu les compagnies disciplinaires (Biribi), dans laquelle il est devenu (de son propre aveu) anarchiste et qu'il a toujours milité pour la fermeture des bagnes. On peut representer les écrivaisn comme des être éthéres éloignés de toute réalité, enfin il en est venu à ces idées par la souffrance de sa chair.
michel
 

Messagepar NOSOTROS » Mardi 22 Jan 2008 18:58

J'aurai du préciser que je ne souhaits pas associer Darien et Rassinier. Je ne connais pas le premier. Disons que c'est plutot par esprit d'escalier que cette discussin m'a amené à me poser cette question : comment se fait il qu'il y ait régulièrement dans les entourages du mouvement anarchiste des personnages qui laissent la place à des polémiques autour de leurs positions ambigues sur l'antisémitisme ? N'y a t il pas là quelque chose de structurel à notre mouvement pour que ce phénomène se retouve répété dans le temps et l'espace, et comment faire pour que les choses soient le plus claires possible. (je ne suis plus du tout dans la problématique Darien ici).

Tout ça à mon sens procède à la fois dela grande liberté qui règne dans le mouvement (chacun peut s'en revendiquer, on ne demandepas de certificat de baptème anar) et il y règne une grande liberté d'expression aussi. En plus la participation des individus est valorisée : quelqu'un qui prospoe untexte pour le canard, en général on ne le refuse pas (dès lors qu'il est dans le ton bien sur), même si on ne connait pas très bien la personnne.

Ca me fait penser à ce que disait un ancien rédacteur d'Espoir dans les années 70 :un gars correspondait de temps à autre avec le journal, leur envoyant des courriers sympas et même des propositoins d'articles pour le journal. Les articles étant pas mal, les copains les ont passé, et puis bon c'est très participatif le mouvement anar. Jusqu'au jour où ils ont découvert le même article paru dans un torche cul d'extreme droite. En fait il s'est averé que le mec était un antisémite. Bien sur les copains ont immédiatement rompus les liens, et dénoncés publiquement l'odieux personnage, tout en reconaissant s'être fait abusés de bonne foi. (le gars est maintenant un des principaux animateur de Rivarol et Présent ...)

Il ya encore eu la cas dans les années 2000, avec un gars, copain quasiment de trente ans de certains compagnons, qui s'est mis à nous fréquenter de plus en plus, pour avoir une tribune ou s'exprimer, ce qu'on lui laissait faire car on est plutot ouverts mine de rien. Jusqu'à ce qu'on se rende compte (assez vite cette fois) qu'en fait le mec jouait des "paradoxes" ou "ambiguités" sur la question israelo-palestinnienne pour nous entrainer dans une voie qui n'est pas la notre. Qaund il a été clair que ses positions étaient antisémites, nous avons annoncé publiquement notre rupture. Et depuis il nous poursuit d'une haine implacable (notamment sur le net) :-) Tant mieux !

Quelles conclusions en tirer ? A mon sens de ne surtout pas changer notre approche, de ne pas resteindre la liberté d'expression et de participation. Mais d'être vigilants et surtout de ne pas tolérer les ambiguités qui, par petites touches progressives, servent à des manipulateurs pour essayer de nous entrainer loin de notre base idéologique. Ce méfier aussi de cette instrumentalisation, sans tomber dans la parano...

Peut être que le fait d'avoir des positions très claires sur certaines questions (qui ne concernent pas que l'antisémitisme d'ailleurs ...) permet d'agir sur ces manipulateurs comme la lumière (ou l'ail ;-) ) sur les vampires...
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Messagepar michel » Mardi 22 Jan 2008 19:14

pour l'antisémitisme après-guerre, je discerne un peu mieux comment cela arrive. Par contre ma question n'est pas

comment se fait il qu'il y ait régulièrement dans les entourages du mouvement anarchiste des personnages qui laissent la place à des polémiques autour de leurs positions ambigues sur l'antisémitisme ? N'y a t il pas là quelque chose de structurel à notre mouvement pour que ce phénomène se retouve répété dans le temps et l'espace, et comment faire pour que les choses soient le plus claires possible.


ou il s'agit d'individus dans le milieu qui posent problème, mais bien du fait que, quand il s'agit de la fin du 19e, on a bien l'impression que c'est presque l'ensemble du mouvement libertaire qui fircotte avec l'antisémitisme. Il y a même une expression qui a été forgée (quand ?) : antisémitisme de gauche. Enfin moi c'est l'impression que j'ai.
Ce qui s'est passé c'est qu'on voit souvent des phrases genre "machin était antisémite comme beaucoup à l'époque, par exemple : " et suit une liste de nom. Or dans ces listes j'ai vu revenir plusieurs fois l'un d'eux, darien en l'occurence (mais ca aurait pu etre un autre). Or Darien n'est pas antisémite.
Alors qu'en est-il des autres ? D'ou viennent tous ces amalgames ? Si il y a eu des antisémites avérés, alors il faut clairement les isoler.



D'ailleurs il y a un autre aspect intérressant. On peut dire que tous les libertaires qui ont été pro-dreyfusards n'étaient pas antisémite. Certains s'en honnorent, comme Jean Marc Izrine, d'AL toulouse, dans son bouquin "les libertaires dans l'affaire Dreyfus" (comique-troupier presenté aux dernieres municipales sous l'étiquette Motivée-e-s). Or si on y réfléchi, ca revient à faire de l'"anarchisme de gouvernement" avec une alliance avec les forces républicaines du pays. Bref je me demande si cette partie du mouvement libertaire n'a pas autant d'interet que celle qui a voté chirac en 2002 ? Mais alors qu'en est-il des autres ? Je ne connais que la position de Darien, exprimée dans l'autre sujet (et la même de Janvion, mais lui antisémite avéré par contre...)

Peut être que le fait d'avoir des positions très claires sur certaines questions (qui ne concernent pas que l'antisémitisme d'ailleurs ...) permet d'agir sur ces manipulateurs comme la lumière (ou l'ail Wink ) sur les vampires...


Si ta participation à cette discussion n'a d'autre but que de déboucher sur tes marottes habituelles ne compte pas sur moi pour te donner du grain à moudre.
michel
 

Messagepar lucien » Mardi 22 Jan 2008 23:26

De mémoire, dans Le Voleur, le personnage principal émet quelques espoirs dans le mouvement anarchiste et imagine s'y investir... avant d'abandonner rapidement l'idée en le considérant finalement de même valeur que le courant communiste ; on le regretterait presque, tant le personnage, son histoire et ses idées sont attachants (difficile d'affirmer de façon catégorique qu'il est antisémite)... car il s'agit bien, avant tout, d'un roman et non d'un positionnement politique. Doit-on refuser de lire les romans de Céline pour des raisons idéologiques (je laisse à michel le soin de démontrer ou non l'antisémitisme de ce dernier ! :wink:) ou certains romans policiers au prétexte que des personnages sont adeptes du meurtre ? Si on ne fait pas la part des choses en littérature, ça devient compliquer... Tout comme en politique, d'ailleurs (faut-il rejeter tout ce qu'a pondu Proudhon ?!)...
Je trouve par ailleurs intéressante la remarque de michel, constatant que sont "considérés comme antisémites des gens qui se sont clairement battus contre toute forme d'oppression" ; quand un personnage de Darien critique le "juif capitaliste" ou le "bourgeois catholique", n'est-ce pas là tout simplement une posture anti-autoritariste (religieuse, idéologique, économique), posture confirmée tout au long du roman, par un personnage effectivement clairement anti-autoritaire ?
Enfin, pour revenir à Darien, Le Voleur est un roman agréable à lire et les analyses critiques intéressantes que l'auteur fait de son époque m'incitent à attaquer L'Epaulette (qui se déroule - si j'ai bien compris - durant la Commune).
Le monde ne se compose pas d'anges révolutionnaires, de travailleurs généreux d'une part, de diables réactionnaires et de capitalistes cupides de l'autre.
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Messagepar NOSOTROS » Mardi 22 Jan 2008 23:33

Certes Michel, mais c'est très lié ... Ca a rapport à la liberté et à la façon d'en user, et aussi du rapport dialectique entre la liberté de l'individu et son rapport au groupe ...

L'avantage de l'artiste c'est qu'il est totalement libre. Après tout il ne s'insère dans aucun groupe social, seul son bon plaisir compte.

Le militant politique, c'est pas exactement pareil. Il n'agit pas seul.
Capitalismo delenda est
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Messagepar michel » Mercredi 23 Jan 2008 0:01

NOSOTROS a écrit: Ca a rapport à la liberté et à la façon d'en user, et aussi du rapport dialectique entre la liberté de l'individu et son rapport au groupe ...


Donc ca n'a bien aucun rapport avec le sujet.
De plus ce que tu dis n'a rien a voir avec ce que tu fais. Car les individus seuls qui sont ta cible préférée n'ont donc rien à voir avec aucun groupe par définition.
Et j'ai bonne mémoire que justement l'analyse des comportements individuels au sein et au nom de groupes a contrario de ceux-ci a bien été éludée.
Donc c'est toi qui voit. Moi je m'en fous.
Mais va pas chialer et changer de pseudo après.
Je ne repondrai à rien qui ne concerne pas le sujet stricto sensus.
michel
 

Messagepar peyo » Mercredi 23 Jan 2008 7:48

juste une question sur elysée reclus. lui aussi etait antisemite?
je l'ai entendu dire mais n'ai rien lu qui puisse corroborer ces dires.
peyo
 

Messagepar michel » Mercredi 23 Jan 2008 9:45

le peu que je sais est plus haut

lucien a écrit:De mémoire, dans Le Voleur, le personnage principal émet quelques espoirs dans le mouvement anarchiste et imagine s'y investir... avant d'abandonner rapidement l'idée en le considérant finalement de même valeur que le courant communiste ;


ha oui si je me souviens bien (c'est un peu loin tout ca) il va voir un espèce d'intellectuel anar qui se fait rosser par des ouvriers et il ne fait que dire "ils n'ont pas compris l'idée"' ou un truc comme ça.
Il y a eu une adaptation sympathique en film par Louis Malle (avec Belmondo !).

lucien a écrit:on le regretterait presque, tant le personnage, son histoire et ses idées sont attachants (difficile d'affirmer de façon catégorique qu'il est antisémite)... car il s'agit bien, avant tout, d'un roman et non d'un positionnement politique. Doit-on refuser de lire les romans de Céline pour des raisons idéologiques


encore une fois ce n'est pas vraiment ma question (j'ai lu tout Lovecraft héhé)


lucien a écrit: quand un personnage de Darien critique le "juif capitaliste" ou le "bourgeois catholique", n'est-ce pas là tout simplement une posture anti-autoritariste (religieuse, idéologique, économique), posture confirmée tout au long du roman, par un personnage effectivement clairement anti-autoritaire ?


tiens je n'avais jamais pensé au choses de cette façon... c'est assez clair...
michel
 

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