http://www.vie-publique.fr/decouverte_instit/approfondissements/approf_105.htmDroit du travail et droit au travail
Si la création puis l'affirmation d'un droit du travail sont assez anciens, le débat sur un droit au travail est, lui, plus récent.
Du droit du travail...
Au début du XIXesiècle, la majorité des penseurs et des hommes politiques considèrent la mise en place d'un droit du travail comme quelque chose d'inutile et de dangereux. Dangereux en raison du coût d'une telle innovation, qui pèserait sur les entreprises françaises, les désavantageant par rapport à la concurrence étrangère ; inutile car le contrat de travail doit être la loi entre le patron et ses travailleurs : or, puisqu'il est négocié, un contrat ne peut désavantager l'une des parties. « Qui dit contractuel dit juste » est l'un des adages qui expriment cette conception bien ancrée alors. Pourtant, force est de constater que le contrat de travail est déséquilibré, entre un employeur aux moyens financiers et intellectuels importants, et un salarié qui n'a pour seule richesse que sa force de travail.
C'est pourquoi on va peu à peu s'aviser de reconnaître certains droits aux travailleurs. La première date importante est 1841 avec le vote d'une loi limitant à huit heures la durée de travail journalière des enfants.
L'année 1864 marque une étape sur le plan des droits collectifs : la grève cesse d'être un délit, même si elle peut encore justifier un licenciement. L'année 1874 est importante à deux titres : d'une part une loi protégeant les jeunes filles au travail est votée, d'autre part on crée l'Inspection du travail. Les syndicats sont reconnus en 1884. Peu à peu, un certain nombre de droits sont conquis, à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, dans un ordre sans logique apparente et de manière quelque peu disparate.
En 1936, avec le Front populaire, une grande étape est franchie : limitation à 40 heures hebdomadaires de la durée du travail, octroi à tous les salariés de 15 jours de congés payés, création de délégués du personnel élus, chargés de faire connaître à la direction de l'entreprise les revendications des salariés.
La Libération est l'occasion d'autres conquêtes. En 1945 sont créés les comités d'entreprise qui, outre la gestion d'oeuvres sociales et culturelles au profit des salariés et de leurs familles (spectacles, colonies de vacances...), permettent à des représentants des travailleurs d'être informés sur le fonctionnement et les résultats de l'entreprise. Le préambule de la Constitution de 1946 reconnaît le droit à la santé, le droit à la protection sociale, le droit d'adhérer au syndicat de son choix, la non discrimination dans l'emploi...
En 1956, le Parlement vote la troisième semaine de congés payés.
En 1968, à l'issue des événements de mai, la loi reconnaît le droit aux syndicats de déployer leur action à l'intérieur même des entreprises (ce qui était auparavant strictement interdit), grâce à des délégués syndicaux spécialement protégés par le code du travail.
En 1982, les lois Auroux donnent un nouvel élan au droit du travail, d'abord en mettant en place une cinquième semaine de congés payés (la quatrième datait de 1969), ensuite en obligeant direction et syndicats à débattre chaque année des conditions et du temps de travail dans l'entreprise, enfin en réduisant à 39 heures la durée hebdomadaire des entreprises.
Enfin, la dernière conquête est récente : la majorité élue en 1997 a voté une loi réduisant à 35 heures le temps de travail hebdomadaire.
Telles sont, rapidement résumées, les grandes dates du droit du travail.
au droit au travail ?
En revanche, la question du droit au travail demeure toujours au stade du débat juridique et politique. Le droit au travail avait, il est vrai, été affirmé dans le préambule de la Constitution de la IIeRépublique, en 1848. Certes, le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 dispose également que : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi ». Certains ont pu voir dans ce membre de phrase posant en principe le droit au travail, l'inspiration socialisante du préambule de 1946. Quoiqu'il en soit, la majorité des commentateurs a toujours considéré qu'une telle disposition ne pouvait être d'application directe, et, notamment, ne pouvait en aucun cas être invoquée telle quelle devant un juge. Le débat a repris une certaine vigueur à la fin des années 1970 et au début des années 1980, lorsque le taux de chômage a commencé à augmenter de manière inquiétante.
Néanmoins, le Conseil constitutionnel a coupé court aux interprétations les plus « jusqu'au-boutistes » de cet alinéa du préambule de 1946. En effet, dans une décision de 1983, il a énoncé que ce texte faisait seulement peser une obligation de moyens sur le législateur, à qui il appartient « de poser les règles propres à assurer au mieux le droit pour chacun d'obtenir un emploi en vue de permettre l'exercice de ce droit au plus grand nombre d'intéressés ». Les auteurs du préambule étaient d'ailleurs eux-mêmes conscients de la difficulté pour tout un chacun de trouver un emploi, dès lors qu'ils avaient prévu, dans un autre alinéa, que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler, a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence ».
Les créations du SMIG en 1950 puis du SMIC en 1973, de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) par une ordonnance de juillet 1967, et du Revenu minimum d'insertion par une loi de 1988, essaient de rendre le droit au travail possible et de pallier à ses imperfections.
http://www.vie-publique.fr/decouverte_instit/citoyen/citoyen_1_2_3_q11.htmExiste-t-il un droit au travail ?
Le droit au travail participe à la dignité de l'être humain et constitue une question récurrente en droit français.
Il a été affirmé pour la première fois, en 1848, par la IIe République qui créa, dans cette perspective, des Ateliers nationaux, permettant de fournir un travail aux chômeurs.
Ce droit au travail a été repris dans le préambule de la Constitution de1946, qui affirme : « Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi », et par notre Constitution actuelle.
Le droit d'obtenir un emploi ne s'entend pas comme une obligation de résultat, c'est-à-dire comme une obligation absolue de donner à tout chômeur un emploi, mais bien comme une obligation de moyens. Il s'agit, pour les pouvoirs publics, de mettre en oeuvre une politique permettant à chacun d'obtenir un emploi.
C'est d'ailleurs ainsi que l'a interprété le Conseil constitutionnel. Dans une décision de 1983, il a affirmé qu'il appartient au législateur « de poser les règles propres à assurer au mieux le droit pour chacun d'obtenir un emploi en vue de permettre l'exercice de ce droit au plus grand nombre d'intéressés ». C'est dans cette optique que s'inscrit l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE).
Ce droit au travail existe donc bien, mais sa portée juridique est très limitée. Par ailleurs, les difficultés économiques qui ont pesé sur l'emploi en France depuis les années 1970 ont rendu ce droit encore moins effectif.
Quoiqu'il en soit, un chômeur ne pourrait espérer trouver un emploi en saisissant un juge sur le fondement de ce droit au travail.
N'hésitez pas à consulter la page des Approfondissements.
Et pour le plaisir de s'offrir une petite "boutade" (surtout en ce moment cela vaut le coup, TCE oblige ) :
Droit de travailler, droit au travail ? Par Antoine Artous
Moi, je repasse plus tard....