Le chaos qui guette l'école

Mille-feuilles à tendance séditieuse.

Le chaos qui guette l'école

Messagepar anarced » Lundi 28 Déc 2009 22:52

De nouvelles méthodes de management sont apparues et se sont développées ces dernières décennies à l'Education Nationale avec la précarisation de l'ensemble des personnels, la suppression chaque année de dizaines de milliers de postes et le recours de plus en plus systématique aux enseignants vacataires. Ces transformations en profondeur du système éducatif imposées par les gouvernements successifs contre l'avis des enseignants et des lycéens génèrent aujourd'hui de graves dysfonctionnement: les tensions s'accroissent entre professeurs et élèves, entre l'administration et les professeurs, les violences se multiplient dans les établissements, des associations comme SOS Education en dressent la liste. A grands pas, le chaos s'installe.

Mais le chaos n'a pas sa place à l'école. Il faut de l'ordre et de la discipline dans les établissements scolaires pour établir une relation pédagogique entre les professeurs et les élèves pour que l'échange de savoir, l'éducation, puisse se faire. Cette discipline n'est pas une discipline militaire mais une discipline pédagogique qui ne s'établit pas avec des policiers mais avec des professeurs.

Cette discipline est celle qui permet aux professeurs d'enseigner dans de bonnes conditions et qui se fonde sur leur légitimité dans leur position d'éducateur. Cette légitimité s'appuie sur leurs études et la maîtrise de la matière qu'ils enseignent mais elle doit aussi être reconnue par les élèves. Lorsque cette légitimité est établie, toutes les méthodes pédagogiques sont efficaces. Par contre si cette légitimité est remise en question, alors aucune ne peut fonctionner.

Quand un professeur contractuel voit encore cette légitimité remise en cause après cinq ans d'expérience professionnelle et au bout de son 22ème contrat, par un principal peut-être guidé par quelques directives, que des réunions sont organisées dans son dos entre l'administration et quelques élèves et parents afin d'organiser son exclusion sous quelques prétextes tenus secrets, qu'une telle pratique n'est que le reflet de l'attitude de la direction de l'Education Nationale vis à vis d'une catégorie de son personnel, il ne faut pas s'étonner que les élèves aient ensuite recours à la même méthode contre leurs enseignants titulaires et exigent également l'exclusion de ceux-ci. Ils ne font alors que sagement réciter leur leçon bien apprise!

Preuve en est le cas de Madame Lespagnol, professeur d'anglais titulaire, dont on a parlé dans les journaux parce que ses élèves réclamaient sa tête en argüant qu'elle leur interdisait l'usage des portables en cours. Preuve en est encore cette très récente déclaration de l'UNI (actuellement en procès pour avoir tenu des propos homophobes sur les campus) qui appelle le gouvernement à exclure les enseignants grévistes (c'est en gras dans le texte):

« L’UNI-Lycée apporte son entier soutien au proviseur et appelle Luc Châtel, ministre de l’Education nationale, à exiger que des mesures similaires [exclusion du lycée] soient prises à l’encontre de tous les élèves bloqueurs. La même fermeté doit être employée à l’égard des enseignants qui prennent leurs élèves en otage. » http://www.uni.asso.fr/spip.php?article1485


L'absence de réaction des syndicats enseignants à ces déclarations et à ces pratiques est étonnante! La moindre des choses serait de dénoncer ce genre de dérapage. Aucun lycéen ne peut exiger l'exclusion d'aucun prof! Ce n'est pas leur rôle! Dénoncer des pratiques contre-éducatives, d'accord et on peut même les encourager dans ce sens, mais on ne peut pas les laisser réclamer des têtes comme dans les émissions de télé-réalité! Il est urgent de remettre chacun à sa place! Ce sont les élèves homophobes qui doivent être virés et non les professeurs grévistes.

Pourtant, l'administration donne l'impression à certains élèves ou parents d'élèves d'être leurs complices contre les enseignants et les exclut dans le mépris total de tous les droits des travailleurs. S'il est important que les élèves puissent se plaindre de leurs professeurs, il est en revanche inadmissible que les chefs d'établissement, l'Inspection et le Rectorat se servent de ce prétexte ridicule pour se débarrasser d'un professeur, parfois définitivement. Parce que si on laisse quelques groupes d'élèves et de parents faire la loi, alors tel prof se fera virer parce qu'il est noir, tel autre parce qu'il est juif, tel autre parce qu'il est homosexuel, tel autre parce qu'il est gréviste, etc.

Se plaindre contre des professeurs qui font mal leur travail, dénoncer des faits établis, des pratiques incorrectes, des violences, un problème d'alcoolisme, etc. est parfaitement légitime. Il est de notoriété publique que certains professeurs sont très mauvais et détruisent leurs élèves au lieu de les éduquer. Alors il est important de laisser les élèves s'organiser pour exiger une éducation de qualité. Cela est même d'un grand intérêt pédagogique puisqu'il s'agit d'apprendre la lutte solidaire contre l'injustice. Rien de moins!

Bien qu'il se sert malhonnêtement de ce prétexte pour exclure certains professeurs, c'est le gouvernement qui s'oppose en réalité à ce juste combat lorsqu'il envoie les CRS et la BAC réprimer les manifestations des lycéens qui s'inquiètent avec raison du démantèlement de leurs écoles. Ce 15 décembre à Lyon, devant le lycée Diderot, un lycéen est passé à côté de la mort en faisant une chute de dix mètres pour tenter d'échapper à la BAC qui le poursuivait pour l'arrêter... http://rebellyon.info/Quand-la-BAC-pous ... -a-se.html

Le grand bazar qui s'installe aujourd'hui à l'école est l'œuvre des gouvernements successifs qui, au prétexte de quelques économies budgétaires, se sont cru tout permis. Il faut penser au trouble qu'ils ont semé dans les esprits des élèves quand ils ont embauché puis jeté à la rue des professeurs contractuels ou vacataires en usant de méthodes dégueulasses, en affirmant leur incapacité quand ils en avaient plus besoin, sans préciser ce qui n'irait pas dans leur travail, ni leur laisser la moindre possibilité de se défendre. Ils ont montré aux élèves qu'on pouvait se débarrasser d'un professeur sans aucun motif alors que sous le coup d'une telle menace, aucun professeur ne peut faire son travail convenablement.

Alors il est grand temps de remettre de l'ordre et de la discipline dans ce grand bazar que des politiques irresponsables et des fonctionnaires vénaux sèment depuis beaucoup trop longtemps. Il faut stopper la série des « réformes » du lycée qui ne servent qu'à masquer la suppression des professeurs car sans eux, il n'y a plus d'école.




Un professeur contractuel mis au chômage après 22 contrats pendant 5 ans d'exercice

http://anarced.over-blog.org/article-le ... 65793.html
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Re: Le chaos qui guette l'école

Messagepar libertad » Mercredi 27 Jan 2010 14:42

Dans ce même sujet, je ressens le besoin de rajouter autre chose...
J ai autour de moi une jeune fille en 4ème, qui commence a savoir clairement ce qu'est l'anarchie, et qui est très bottée par le concept d ailleurs!, à nous demander "mais alors, les fous et les criminels, on les enferme pas?? parce qu'à l'école, en cours d'éducation civique, on nous a rabaché que le désordre dans le pays, c'est l anarchie[alors que c est le chaos!], que c est n importe quoi, avec tout le monde qui n en ferait qu a sa tete, on nous l a rabaché, qu'il y aurait des vengeances dans tous les coins de rues et que ce serait dangereux"
Apparemment, ça semble avoir été clairement mis dans la tête des plus jeunes, qui auraient pu éventuellement se poser la question pour plus tard, mais alors, que faire face a tout ça?
Diffusion idéologique?, on voit les débats que ça a engendré l an dernier ici même, avec la "dèche du midi" qui en rajoute une bonne couche...
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Re: Le chaos qui guette l'école

Messagepar anarced » Mercredi 27 Jan 2010 20:39

Il y a des dictionnaires. "Anarchie" est un mot polysémique, l'enseignant n'en a décrit qu'un aspect qu'il ne s'agit pas, à mon avis, de rejeter mais de compléter.
De toute façon, il faut toujours rester critique face à l'enseignement qu'on nous propose.
Mais pour revenir au chaos, on peut rappeler le programme annoncé par l'OCDE dans un rapport en 1996:

« [...] Si l’on diminue les dépenses de fonctionnement, il faut veiller à ne pas diminuer la quantité de service, quitte à ce que la qualité baisse. On peut réduire, par exemple, les crédits de fonctionnement aux écoles ou aux universités, mais il serait dangereux de restreindre le nombre d’élèves ou d’étudiants. Les familles réagiront violemment à un refus d’inscription de leurs enfants, mais non à une baisse graduelle de la qualité de l’enseignement et l’école peut progressivement et ponctuellement obtenir une contribution des familles, ou supprimer telle activité. Cela se fait au coup par coup, dans une école mais non dans l’établissement voisin, de telle sorte que l’on évite un mécontentement général de la population. »
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