Faut-il donner raison au réseau ?

Mille-feuilles à tendance séditieuse.

Faut-il donner raison au réseau ?

Messagepar jipé » Mardi 13 Jan 2009 16:05

Faut-il donner raison au réseau ?
 

La discussion sur le fonctionnement en réseau s’est développée dans une partie du mouvement militant d’extrême gauche : certains alter mondialistes, le DAL, SUD, RESF tendent à s’inspirer de cette conception. Bien que marginale dans les milieux libertaires, le syndicat CNT-AIT de Toulouse tente de la promouvoir. De prime abord, les arguments donnés semblent répondre aux préoccupations libertaires. Devant l’essor d’internet, la méfiance qui s’est développée vis à vis des organisations, ce concept semble séduisant pour une catégorie de personnes, souvent déçue par les organisations « classiques » et désireuses d’agir sur des sujets précis, sans toutefois prendre des engagements plus avant. S’interroger sur le fonctionnement en réseau, connaître son origine et construire une réflexion autour de ce thème, n’est donc pas un effort totalement inutile pour les militants anarcho-syndicalistes et anarchistes.
 
Les arguments des libertaires pro réseau.
Le point de départ de la réflexion développée par le syndicat de Toulouse est assez classique : le mouvement anarcho-syndicaliste ne se développe pas comme nous le souhaiterions. Le postulat avancé est que l’un des freins à son développement tiendrait dans sa conception de l’organisation jugée archaïque (« héritée du XIX° siècle »)[1], les anarcho-syndicalistes doivent donc s’interroger sur « la forme d’organisation la plus adaptée à sa réalité actuelle ».
Le fédéralisme libertaire est rapidement assimilé aux formes d’organisations centralistes. Son fonctionnement serait « mécaniste » et vertical (« un rouage entraîne les autres, le flux  monte et « descend » en suivant ces rouages ») tandis que le réseau supprimerait la « centralisation ».
L’objectif affiché est donc de pourvoir les anarcho-syndicalistes d’une organisation capable de « potentialiser, de rendre plus efficace l’action » des syndicats.
Quels sont donc les avantages avancés ? Le réseau permettrait une plus grande « autonomie » des syndicats. L’organisation serait débarrassée des « coquilles vides » puisque « chacune de ses unités ne commence à exister qu’à partir du moment où elle est fonctionnelle ». D’ailleurs, comment entre-t-on dans le réseau ? « On peut penser que le minimum sera l’activité réelle préalable ». Qui reste dans le réseau ? « Lorsqu’une unité n’a pas le potentiel minimum pour continuer à fonctionner, elle disparaît en tant que structure (…) Pour rester dans le réseau en tant que syndicat, l’activité de terrain (et les cotisations) doivent être validées périodiquement par l’ensemble du réseau. La participation à la vie du réseau, c’est à dire l’échange permanent avec toutes les autres unités fonctionnelles, doit être effective ».
Enfin, le réseau permettrait d’éviter « les possibilités de prises de pouvoir » et assurerait « la liberté » et « l’autonomie » de chacun.
Avant de répondre sur le fond, il est intéressant de savoir d’où vient cette idée de réseau et qui en sont les instigateurs.

Les origines de l’idée de réseau et ses implications.
A l’origine, le fonctionnement en réseau ne semble pas être une idée émanant des milieux anarchistes, loin s’en faut. Pascal Quidu a réalisé une fiche fort enrichissante sur l’ouvrage de deux sociologues qui se sont intéressés à cette question : « Le nouvel esprit du capitalisme » [2]. Non sans malice, Pascal Quidu souligne que ce travail critique sur le réseau a été salué par le jury du 7° grand prix du livre de management et de stratégie, organisé par le journal l’Expansion. C’est que le capitalisme a toujours su lire les travaux dignes d’intérêts de ces détracteurs, mêmes les plus acerbes, pour affiner ses stratégies…
Face aux critiques formulées à l’encontre du capitalisme dans les années 60, les élaborateurs du discours managérial ont conçu de nouvelles références à partir du début des années 90. « L’entreprise est organisée en réseau, ensemble de liens entre des points, liens qui sont plus ou moins durables et facilement ajustables. Toute entreprise doit se développer, développer son réseau (…) ». L’organisation en réseau –qu’ils nomment la cité- se veut donc « un modèle de justice, à l’aune duquel il est toujours possible de comparer les pratiques (…) Elle comprend donc forcément une codification des épreuves qui vont déterminer les niveaux de grandeurs (…) et en particulier, l’état de « grand » par opposition à l’état de « petit ». »² Cette conception réhabilite les thèmes récurrents de l’idéologie libérale : l’esprit d’entreprise et la réussite des éléments les plus dynamiques, la loi du plus fort.
Ainsi : « le « grand » est un « mailleur », sous entendu de réseaux. Par antithèse le « petit lui est un « tueur » de réseau ». Loin de remettre en question le pouvoir effectif, le réseau le conforte tout en lui rendant une virginité, sous l’argument de l’autonomie et par l’absence d’institutionnalisation. Le réseau réhabilite la loi du plus fort, il « favorise les conduites égoïstes, fondées sur l’opportunisme. Celui qu’on nomme le « faiseur » s’appuie sur les autres sans qu’il ne se sente aucune obligation de réciprocité, renforçant les asymétries au sein du réseau. Il transgresse un principe fondamental de la cité par projet, celui de la confiance puisqu’il ne s’acquitte pas des diverses dettes qu’il contracte (…) La référence à la conduite du faiseur donne une idée de la nature de l’exploitation dans un monde connexionniste : « la réussite et la force des uns sont dues, en fait, au moins partiellement, à l’intervention d’autres acteurs dont l’activité n’est ni reconnue, ni valorisée ». Le pouvoir appartient donc aux structures les mieux organisées et détenant le plus de moyens, celles qui peuvent avoir des relais fidèles dans le réseau : « On ne peut espérer bouger, se déplacer dans le réseau, donc être partout à la fois que si l’on dispose dans chaque coin dudit réseau de représentants (« doublures ») qui eux ne bougent pas. Ils contribuent à ce qui fait la richesse des grands (mobiles) sans que cela soit reconnu ».
 
Le réseau est-il compatible avec l’idéologie anarchiste ?
Il n’est pas question ici de prêter des intentions libérales aux promoteurs libertaires du réseau mais il est évident que nous sommes tous influencés par le monde qui nous entoure, ce qui n’est pas toujours une bonne chose. Il convient de savoir si le réseau peut nous être utile ou pas.
En premier lieu, soulevons une question sur le fondement même de la réflexion des libertaires pro-réseau : les difficultés que rencontre aujourd’hui l’anarchosyndicalisme seraient liées à son mode d’organisation archaïque, centralisateur et où les prises de pouvoirs sont possibles.
Le texte « Militer en réseau » souligne fort justement que l’anarcho-syndicalisme a adopté – et adopte toujours – différents types d’organisations. Leur point commun réside dans un principe qui est à la base de notre pensée : le fédéralisme libertaire. Confondre la forme que revêt une organisation, dans un contexte donné, et le principe qui l’inspire, n’est pas acceptable. Le réseau, ce n’est pas le fédéralisme et, s’il faut vraiment lui trouver une alternative, alors l’honnêteté voudrait que l’on explique sérieusement ce qu’on lui reproche : en quoi le fédéralisme libertaire est-il centralisateur ? En quoi l’autonomie des syndicats est-elle mise en cause dans une organisation reposant sur la libre association ? Les valeurs, les idées et les décisions communes sont acceptées par les syndicats parce qu’ils le veulent et parce qu’ils en sont les décideurs. A coté des campagnes nationales, les syndicats sont libres, dans le cadre des accords communs, de prendre leurs propres initiatives, qui irait nier cette évidence de toujours ? Si la critique se résume à ça, c’est bien maigre.
Notre organisation est-elle archaïque ? Peut-être, mais encore faudrait-il dire en quoi ? Notre syndicalisme n’est peut être plus un vecteur satisfaisant, les anarcho-syndicalistes font le pari du contraire, nous avons peut être tort, peut être pas.
La question du pouvoir est inhérente à tout type d’organisation, et c’est l’un des grands mérites de la pensée anarchiste que de l’avoir mis en exergue. C’est la raison pour laquelle le fédéralisme libertaire que nous pratiquons se dote d’un cadre défini qui offre des armes de contrôle aux syndicats. Notre fonctionnement permet de neutraliser les tentatives de prises de pouvoir… du moment que nous assumons nos responsabilités à la base, dans nos syndicats. En revanche, la disparition des délégués élus, mandatés et révocables ne garantit en rien la disparition du pouvoir, au contraire, elle permet aux mieux organisés de se substituer à eux, sans aucune légitimité, ni aucune contrainte.
Autre réserve essentielle, l’anarcho-syndicalisme a pour prétention de préfigurer la société que nous appelons de nos souhaits. Outre l’absence de contrôle du pouvoir, le réseau favorise une compétition entre les syndicats et une légitimité au mérite (celui qui semble faire le plus est le plus légitime) difficilement compatible avec les valeurs de solidarité et d’entraide que nous défendons. Le syndicat qui est jugé comme pas suffisamment actif sort du réseau et la faute semble lui incomber. Mais que fait-on des situations que vivent les compagnons que nous exclurions ainsi, ferions-nous mieux qu’eux à leur place ? Sur quel critère se font les adhésions, les exclusions : qui décide vraiment ? Et une question fondamentale est passée sous silence, pourtant cruciale pour toute organisation qui compte se développer : si certains copains n’arrivent pas à développer leur syndicat face au système capitaliste, qu’avons nous fait, et qu’avons nous oublier de faire, pour les aider ?
 
Pour conclure, si la question de notre développement est centrale pour tous les militants anarcho-syndicalistes, remettre en cause le fonctionnement de l’organisation ne semble pas avoir montré sa pertinence. Peut-être faudrait-il chercher ailleurs, notamment du coté de nos difficultés à nous inscrire sur le terrain des luttes de façon significative.
Est-ce que le réseau, sans résoudre nos problèmes, pourrait nous apporter quelque chose ? Nous en doutons et nous émettons de sérieuses craintes sur les dérives qu’il peut induire. Tout ce que permet le réseau de positif est déjà possible dans les cadres du fédéralisme, à la différence que le fédéralisme rajoute ceci : un socle commun et une solidarité entre les syndicats, là où le réseau ne prévoit que le développement de ceux qui en ont l’opportunité et les moyens.
Au chapitre des griefs, ajoutons simplement :
le réseau, c’est le développement en concurrence les uns des autres. On ne fonctionne qu’avec ceux avec qui l’on s’entend le mieux, ou qui ne disent rien parce qu’ils n’ont pas les moyens de fonctionner en autarcie.
Le réseau, c’est la division des énergies : lorsque l’on est concurrent, on ne s’aide pas. Le texte « Militer en réseau » est suffisamment éloquent en la matière. Nous reprochons ce manque d’humanité au système capitaliste, comment pourrions-nous le reprendre à notre compte ?
Le réseau, c’est imposer ses points de vues en traitant ceux qui ne sont pas tout à fait d’accord en adversaires. Le principe est destructeur et éthiquement injustifiable.
Le réseau, c’est la négation des positions communes. Nous sommes communistes anarchistes, est-il utile de développer ?
 
Jipé
 
1Les citations concernant les arguments des libertaires « pro-réseau » sont extraites d’un texte qui résume assez bien la production toulousaine : FRANCESITO, « Militer en réseau », consultable sur le site internet du syndicat de Toulouse.
 
2 BOLTANSKY Luc et CHIAPELLO Eve, « Le nouvel esprit du capitalisme », il est possible de consulter la fiche Pascal QUIDU sur le site : http//www.la-science-politique.com
jipé
 
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Messagepar douddu » Mardi 13 Jan 2009 17:16

Salut jipé

je ne sais pas s'il faut donner raison au réseau , ou du moins avec la caricature que tu en présente , parceque on pourrai écrire exactement la même chose au sujet des assemblées générales d'actionnaires de Total

Mais quand tu écris

C’est la raison pour laquelle le fédéralisme libertaire que nous pratiquons se dote d’un cadre défini qui offre des armes de contrôle aux syndicats. Notre fonctionnement permet de neutraliser les tentatives de prises de pouvoir…


Tu fais preuve d'un cécité impressionante car tu as pourtant vécu la scission de 1993 et tu sais que justement ce fameux mécanisme de controle de la base vis a vis du sommet , est parfaitement inopérant quand les mandatés sont malhonnêtes .

Par ailleurs , mais cela c'est un détail, la pauvreté de tes références historiques prête a sourire :

A l’origine, le fonctionnement en réseau ne semble pas être une idée émanant des milieux anarchistes, loin s’en faut


Comme si dans les sociétés primitives ou dans les groupes clandestins , par exemple , le mode de fonctionnement c'était des congrés tous les deux ans ........
douddu
 

Messagepar NOSOTROS » Mardi 13 Jan 2009 18:25

Curieuse façon de poser la question : personne n'a demandé à quiconque de donner raison à l'un ou à l'autre ?

Dans ce texte, deux arguments massifs sont développés
contre le mode de fonctionnement en réseau fédéral :

- Le réseau réhabilite la loi du plus fort (et notamment écraserait les "petits" syndicats)

et

- Le réseau, c’est imposer ses points de vues en traitant ceux qui ne sont pas tout à fait d’accord en adversaires


Or, par quoi commence ce texte ? par une remarque sur le fait que "Bien que marginale dans les milieux libertaires", un syndicat essairait de promouvoir ce mode de fonctionnement ...

Cette introduction nous en dit long sur le point de vue, la position à partir de laquelle parle l'auteur : il existe, dans le mouvement libertaire, une pensée majoritaire, dominante, quant au mode d'organisation, à laquelle se rattache l'auteur. Une pensée centrale, qui s'oppose à celle de marge. Et toute tentative de "promouvoir" (c'est à dire de diffuser l'idée) qu'un autre mode de fonctionnement serait possible, est immédiatement vécu comme une dissidence, une traitrise, et doit donc être traitée comme ce qu'elle est : une concurrence.

On a bien compris que cette concurrence n'existe que dans la tête de ceux qui jouissent de la position hégémonique (opposée dans leur esprit à celle qualifiée péjorativement de "marginale"), car ils ne souhaitent pas lacher les petits privilèges (en terme symbolique notamment) qui y sont rattachés. (c'est pour cela qu'on voit des syndicats de l'AIT se mettre à organiser, comme n'importe quel groupe du mouvement anarchiste en effet, des colloques "universitaires" avec des plumes du Monde Diplomatique et des experts officieux du mouvement ...)

On pourrait cependant s'interroger : pourquoi certains se sentent attaqués dans leur position dominante par une opinion pourtant marginale ? En quoi menace t elle leur centralité (même si ce n'est pas son objectif) ? Peut être précisément parce que la contradiction entre le discours affiché et cette position centraliste risque bien en effet d'exploser à leur figure, dès qu'il sera évident que le roi est nu ...

Ce texte, par le vieux principe classqiue du transfert (1) est un donc en effet un texte de combat, contre ce qui est vécu comme une agression : la parole autre, différente. il s'agit d'étouffer ce que certains voudraient promouvoir. (on comprend ici que les "petits syndicats" ne sont acceptés que dès lors qu'ils sont dans le centre et non dans la marginalité ...)

Dès lors toutes les tactiques de combat sont utilisées : la disqualification (le terme "marginal" est pour le moins péjoratif, du moins dans la tête de ceux qui rêvent d'être intégrés au "centre"), l'a-peu-près des arguments où les sophismes remplacent la réflexion, l'absence de références qui renvoient donc le lecteur à des arguments d'autorité à prendre ou à laisser (2), la minimisation de l'adversaire (réduit à "Toulouse" et faisant fi d'autres syndicats qui se retrouvent aussi dans cette notion. Cette "personnification" d'un problème global permet aussi d'ouvrir la porte à toutes les rumeurs et ragots sur le thème de la théorie du complot ... pour le second épisode peut être ?)

Cependant, il y a du vrai dans ce texte : l'anarchosyndicalisme est en effet marginal en France, dans toutes les CNT réunies, et il serait temps que ça change ... (ou pas dans un sens :-) ) Ce qui est rassurant c'est que la marge s'étend, et pas qu'à l'AIT ...

Quant au fait que la notion de réseau serait en fait inspirée du mode d'organisation du capitalisme, je renverrai à la Charte de Paris, le texte fondateur de la CNT AIT, qui explicite quel est l'esprit qui préside à l'essence du mode d'organisation des anarchosyndicalistes :

Comprenant toute la grandeur et toute la difficulté de ce devoir, le Congrès tient à affirmer que le syndicalisme doit, dès maintenant, remanier son organisation, compléter ses organes, les adapter aux nécessités - comme le capitalisme lui-même


j'insiste : comme le capitalisme lui-même

Si on suit le raisonnement de ce texte, le réseau c'est donc l'application stricte de la charte de Paris ... :-)

(A la rigueur, c'est justement la critique que certains opposent au syndicalisme (à commencer par la FORA d'ailleurs) : être un mode d'organisation formé à l'intérieur du cadre défini par le capitalisme, et donc incapable de le dépasser ... )

Enfin, si on utilisait les mêmes sophismes que ceux qui tiennent lieu de pensée à l'auteur, on lui ferait remarquer que les USA, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, etc ... sont aussi fédéralistes, que le fédéralisme est donc une vilaine invention étatique qu'il convient de rejetter absolument car utilisée par nos adversaires ! Mais je ne ferai pas cette insulte à son intelligence ... :lol:

(1)

accuser l'autre de ses propres turpitudes selon le bon vieux principe que la meilleure défense c'est l'attaque, et que plus c'est gros plus ça passe

(2) ainsi il est remarquable que si le liens est donné pour aller consulter un texte en faveur de la thèse avancée par l'auteur, en revanche ce n'est pas le cas pour le lien pour la thèse attaquée. C'est contraire à toute éthique de la discussion, même polémique ...
Dernière édition par NOSOTROS le Mercredi 14 Jan 2009 13:23, édité 8 fois.
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Messagepar Paul Anton » Mardi 13 Jan 2009 19:26

Souvenez-vous du débat que nous avions eu avec Great Ape en 2005 :

http://cnt.ait.caen.free.fr/forum/viewt ... highlight=

J'avais posté ceci :


Bref…

Je voudrais insister sur ces points également :

Un fonctionnement basé sur la démocratie directe suppose que l’individu ne soit ni mégalo, ni hyper narcissique, ni autoritaire et ni despotique.

Que dans la structure, il y ait une rotation des taches, un transfert et une collectivisation informationnelle, une mutualisation des savoirs, une formation de chaque membre et qu'il se dote des compétences nécessaires à un bon fonctionnement démocratique.

Voici quelques points….d’autres mériteraient sûrement d’être rajoutés….

Mais il me semble déterminant que ces points soient à l’œuvre.

S’est souvent leur carence qui pose problèmes et dans ce cas il n’y aura jamais aucune structure capable de fonctionner de façon cohérente selon ces principes démocratiques.

Le débat réseau – fédéralisme me parait se mordre la queue, tant ces concepts peuvent signifier la même chose, car ce qui est primordial est le contenu et l’intentionnalité qu’on y met. Vouloir réduire à un simple jeu de cause / effet me parait simpliste dans la mesure où quelque soit la théorisation la plus parfaite des régulations organiques, la capacité de l’individu a agir en adéquation (ou pas) avec nos principes demeure capital (ce qui sous entend d’être capable de se libérer de l’idéologie dominante).

Pour finir, le réseau n’induit ou pas des rapports hégémoniques et impérialistes. Tout dépend des principes idéologiques qui le meuvent. En effet, il ne faut pas raisonner dans un cadre "inter structurel" mais "trans structurel", c'est-à-dire que les principes communs transversent et lient les structures. En ce sens, le réseau peut réguler des jeux de structures dans un cadre de solidarité et de respect mutuel. Croire que le fédéralisme basé sur le respect d’un accord majoritaire garantit la liberté d’une structure ne tient pas compte du fait que de nombreuses organisations ont utilisé l’accord majoritaire dans un jeu de domination, ni que le dit accord n’était conforme à leurs principes statutaires. En fait, une des taches du moment est de promouvoir un fonctionnement correspondant à la période et à notre finalité. De plus, un bon fédéralisme, c’est du bon réseau et un bon réseau, c’est du bon fédéralisme.
"Salut Carmela, je suis chez FIAT ! Je vais bien... Si, si, nous pouvons parler tranquillement, c'est Agnelli qui paye !"
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Messagepar NOSOTROS » Mardi 13 Jan 2009 19:43

A mon avis, Paul anton, il y a juste un biais dans ton texte : tu opposes réseau et fédéralisme. Or le réseau n'est rien d'autre que la plus haute expression du fédéralisme, dans l'état actuel des choses.
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Messagepar Paul Anton » Mardi 13 Jan 2009 21:05

Hum... La fin est claire

Le texte est sûrement bon à reprendre pour un approfondissement.
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Messagepar NOSOTROS » Mardi 13 Jan 2009 21:18

Oui, tout à fait !

En fait, le problème l'affirmation selon laquelle "le fédéralisme [serait]basé sur le respect d’un accord majoritaire". Or ceci n'est nullement le fédéralisme, comme on voudrait nous le faire croire. Ca c'est au contraire le centralisme (avec sa majorité et sa minorité).

Le fédéralisme est basé sur le respect d'accords communs, partagés entre tous. Ce qui change beaucoup de choses ...
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Messagepar ravachol » Mardi 13 Jan 2009 22:11

mais il faut bien arriver à un accord majoritaire pour fonctionner au sein d'une organisation. ce n'est pas du centralisme que de decider de campagnes nationales ou du contenu du pacte confederal.
à quoi bon se federer sinon?
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Messagepar wiecha » Mardi 13 Jan 2009 22:21

Salut,

Ce débat m'intéresse, mais serait-il possible d'avoir le texte auquel il semble répondre et qui défend l'idée du fonctionnement en réseau ( ou de mettre un lien sur l'endroit du forum ou il se trouve ? )
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Messagepar Paul Anton » Mardi 13 Jan 2009 22:33

Et bien le voici :wink: :

Militer en réseau

En ce début du troisième millénaire, quelle est, pour l’anarchosyndicalisme sur le plan national la forme d’organisation la plus adaptée à sa réalité actuelle, à la situation générale dans laquelle il évolue et qui lui permette le meilleur développement ? Ce texte, est une contribution individuelle à ce débat.
MAIS QU’EST-CE QU’UNE ORGANISATION ?
Toute organisation repose sur un pacte entre des entités afin d’atteindre un but et suppose un mode de gestion de ce qui est mis en commun.
D’un point de vue anarchosyndicaliste, le pacte est librement consenti, modifiable aussi souvent que nécessaire. Il est théorico/pratique puisqu’il repose à la fois sur une théorie, une philosophie (l’anarchosyndicalisme) et sur une pratique (l’anarchosyndicalisme) qui ne doivent faire qu’un. Les entités concernées sont des structures fonctionnelles, de véritables cellules vivantes, qui conservent toujours leur liberté : les syndicats et les unions régionales de syndicats. Le but essentiel à atteindre est de réaliser une société libertaire. Cet objectif ne peut être atteint que par une politique de rupture avec tout "l’establishment". La résistance au quotidien se situe elle-même dans cette perspective. Le mode de gestion est de type fédéraliste. Il repose habituellement sur des assemblées générales ou des réunions de militants mandatés (pour la réunion en question ou pour des tâches précises sur des périodes plus longues). Ce qui est en commun à l’ensemble des syndicats est essentiellement de l’immatériel (idées, sigle, pratique de la solidarité, titres de journaux,...).
Il résulte de ce qui précède que plusieurs formes d’organisation anarchosyndicalistes sont possibles. D’ailleurs, la CNT (Espagne), la CGT-SR (France, années 30) ou la FORA (Argentine) ont eu des pratiques organisationnelles assez différentes, mais toutes reconnues par le mouvement anarchosyndicaliste international.
STRATEGIE ORGANISATIONNELLE...
Globalement, nous vivons encore actuellement sur une conception de l’organisation, héritée du XIXème siècle, qu’on pourrait qualifier de mécaniste (un rouage entraîne les autres, le flux "monte" et "descend" en suivant ces rouages). L’objectif de ce texte est de commencer à préciser ce que pourrait être une confédération anarchosyndicaliste utilisant un autre modèle organisationnel, celui du réseau. Dans cette perspective, la stratégie est avant tout de potentialiser, de rendre plus efficace l’action que le syndicat (en tant qu’entité fonctionnelle) mène là où il se trouve, et qui se concrétise par des actions de réflexion et de propagande et de résistance et d’impulsion. La conf-réseau postule donc nécessairement que chacune de ses unités ne commence à exister qu’à partir du moment où elle est fonctionnelle, c’est à dire qu’un travail militant de terrain se fait.
Il existe plusieurs possibilités pour qu’une organisation nationale rende plus efficace le travail militant des syndicats. Classiquement, par exemple, elle produit et met à disposition de ces derniers des affiches, des tracts rédigés et imprimés nationalement. Selon notre conception, puisqu’une conf-réseau regroupe des syndicats qui cherchent à avoir une réelle autonomie de réflexion, de décision, de gestion, de réalisation et d’action, le rôle de la structure nationale est tout autre. C’est d’aider les syndicats à devenir aussi autonomes que possible dans tous les domaines, de la conception du matériel de propagande à la réalisation pratique. Evidemment, tout cela n’irait pas sans poser des problèmes nouveaux, à la fois. Mais il existe des solutions.
... & QUESTIONS PRATIQUES
Une des questions que l’on peut se poser est de savoir comment se fera la mutualisation puisqu’il n’y aura plus de centralisation. Dans une conf-réseau, si un syndicat a une idée (de lutte, d’affiches, de texte ...), Il la communique à tous les autres syndicats membres (par bulletin, circulaire, Internet...). Si certains d’entre eux trouvent l’idée tout à fait à leur goût, soit ils s’adressent directement au syndicat qui a lancé l’idée pour la mettre en pratique ensemble, soit ils prennent l’idée à leur compte et l’affaire est réglée. Dans le cas où des syndicats la trouvent correcte mais améliorable, ils transmettent leur nouvelle proposition. Au "pire", si une idée ne supplante pas l’autre ou si la synthèse ne se fait, il y a plusieurs versions de la réalisation (de l’affiche, du tract..) ce qui, en soi, n’est pas gênant Si des syndicats trouvent l’idée médiocre mais compatible avec l’anarchosyndicalisme, ils peuvent exprimer leur opinion s’ils l’estiment utile, mais ils ne bloquent rien du tout. Enfin, si des syndicats la trouvent incompatible avec l’anarchosyndicalisme, ils le manifestent et l’argumentent. Le syndicat qui est à l’origine du projet et ceux qui étaient éventuellement intéressés peuvent se rétracter (s’ils estiment qu’ils ont été maladroits, qu’ils se sont trompés ...) ou persister, ce qui, suivant la gravité qu’accorderont au sujet les uns et les autres, peut donner lieu à un conflit.
Les arguments économiques qu’on peut opposer à cette démarche (il est moins cher, à l’unité, de tirer une affiche à un grand nombre d’exemplaires, par exemple) ont été vrais. Ils le sont beaucoup moins maintenant (du fait des nouvelles technique d’impression et de communication). La CNT-AIT dispose d’ailleurs d’une importante expérience dans ce domaine depuis des années (par exemple avec son réseau de presse). Par rapport aux inconvénients qu’entraînent une organisation centralisée (en particulier les possibilités de prise de pouvoir), le faible "surcoût" économique éventuel du fonctionnement en réseau n’est pas un argument recevable.
Beaucoup d’autres questions qui se posent (par exemple, la gestion des contacts extérieurs, les besoins en matière de solidarité...) peuvent recevoir des réponses du même type.
LA GESTION DU RESEAU
Les questions qu’une conf-réseau aura à résoudre pour se gérer elle-même sont au moins de 3 types :
1) Qui entre dans la conf-réseau ?
On peut penser que le minimum sera l’activité réelle préalable. Un individu, un groupe d’individus qui se reconnaissent dans ce qu’est la CNT-AIT commencera par militer avant de constituer un syndicat. En pratique, il se greffera sur un des syndicats constitutifs du réseau, pour pouvoir bénéficier de l’infrastructure, vérifier l’adéquation des idées des uns avec celles des autres ... Ce n’est que quand les choses sont un peu solides qu’un nouveau syndicat peut se constituer. Ce travail peut prendre, en fonction des réalités locales, des formes très diverses. Il doit cependant exister d’une façon ou d’une autre et c’est une des bases sur lesquelles se fait l’appréciation par le réseau. Si le constat est positif, avalisé par lui (dans une réunion nationale du réseau par exemple), l’adhésion sera avalisée.
2) Qui reste dans la conf-réseau ?
Pour qu’une confédération soit un organisme vivant, il faut que, lorsqu’une unité n’a pas le potentiel minimum pour continuer à fonctionner, elle disparaisse en tant que structure. Dans une logique de réseau, il n’y a aucun intérêt à garder des coquilles vides (il y a même des inconvénients). Le (les) militant(s) qui n’a plus d’activité réelle sur place se greffe sur un autre syndicat et vient le renforcer au lieu de rester isolé et de faire semblant. Dès que les forces le permettront à nouveau, le redéploiement aura lieu. Pour rester dans le réseau en tant que syndicat, l’activité de terrain (et les cotisations) doivent être validées périodiquement par l’ensemble du réseau. La participation à la vie du réseau, c’est-à-dire l’échange permanent avec toutes les autres unités fonctionnelles, doit être effective.
Bien sûr, le conflit peut surgir et le "gentleman agreement" sur lequel repose ce qui vient d’être écrit ci-dessus risque d’être mis à mal. Comment de tels conflits peuvent-ils être traités dans une conf-réseau ?
3) La gestion des conflits
Imaginons que le syndicat A ne soit pas d’accord (pour les raisons les plus diverses) avec le syndicat B. La première chose qu’il peut faire est bien sûr de discuter pour tenter de s’entendre. Si la situation est bloquée, il peut couper toutes ses relations avec B. Si les autres syndicats pensent et font comme A, alors B est rapidement mis hors du réseau, sans autre forme de procès. S’ils trouvent que c’est A qui a tort de se comporter ainsi et que c’est lui qui empoisonne les autres, ils coupent les ponts avec lui, et c’est A qui se trouve de fait rapidement hors circuit. Enfin, si les syndicats trouvent que le conflit entre A et B n’a pas de réelle importance, ils peuvent essayer de faire entendre raison à l’un ou/et à l’autre. Si A et B restent figés, et bien tant pis, il n’y aura pas d’échanges directs entre ces deux-là mais cela n’empêchera pas le réseau de continuer à fonctionner même si cela devient un peu "boiteux". Le réseau ne résoudra probablement pas tous les problèmes. Mais il pourrait dynamiser l’action des anarchosyndicalistes. Pour finir, soulignons, qu’au sens où on l’entend ici, il est tout à fait transparent pour ses membres, puisqu’il identifie clairement les unités fonctionnelles (des syndicats actifs), les procédures (la façon dont les syndicats communiquent entre eux), les contenus (ce qu’ils communiquent) et le degré de liberté et d’autonomie de chacun. La réflexion est loin d’être finie et le débat reste ouvert.

Francesito
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Messagepar NOSOTROS » Mardi 13 Jan 2009 23:55

Ravachol, je copie colle ce que j'ai mis par aileurs, pour prolonger le débat :

A mon avis tu exprimes ici une des incompréhension majeure qui explique les dissensions. En effet, de ce que tu exprimes, je comprends que le rôle de la confédération est "la prise de décision".

Au contraire, dans le réseau nous postulons que le niveau de la prise de décision n'est pas la confédération, mais le syndicat. C'est aux syndicats que reviennent les initiatives et les décisions.
Penser que les décisions reviennent à un niveau supérieur, au dessus des syndicats, c'est ni plus ni moins du centralisme.

Comme toute décision revient, in fine, aux syndicats, cela implique en effet qu'il n'y a pas nécessairement unanimité quant aux décisions. Cela va dépendre du contexte, des moyens, des envies, voire des positions politiques.

Mais dans ce cas, qu'est ce qui permet de savoir qui est de la confédération, et qui ne l'est pas ? Qu'est ce qui fait le lien entre les syndicats, qu'est ce qui leur donne leur cohésion ? Ce n'est surement pas l'obéissance aveugle à un corpus législatif défini une fois pour toute.

Ce qui fait le lien entre les syndicats, c'est leur cohésion idéologique : le fait qu'ils partagent les mêmes grandes valeurs, et les mêmes grandes lignes politiques. Et là, pour le coup, il y a nécessairement consensus sur ce qu'est - ou pas - l'anarchosyndicalisme.

Le rôle de la Confédération n'est donc plus d'être un lieu de prises de décision, mais bien au contraire d'être un lieu d'échange et de confrontation, pour constamment affiner le lien idéologique qui unit les syndicats, s'assurer de sa consistance et de sa pertinence (et le faire évoluer si besoin). dans cette optique la confédération est le lieu où sont favorisés aussi les échanges pratiques et la soldiarité, chacun apportant sa pierre à l'édifice et chacun pouvant mutualiser ses savoir faires.
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Messagepar wiecha » Mercredi 14 Jan 2009 0:53

Merci d'avoir remis ce texte que j'avais en fait déjà parcouru, mais sans comprendre l'enjeu et le contexte.

Je suis entièrement d'accord avec le rôle de ce que vous appelez la "Confédération".

Sous d'autres formes idéologiques, c'est le sens de ce que nous avions défendu au temps d'AC! avant la scission, sans illusions d'ailleurs sur la possibilité de l'imposer à la bureaucratie gauchiste, dans la mesure ou celle-ci a évidemment choisi de faire imploser le mouvement pour éviter cette possibilité.

Là ou je ne crois pas du tout à la possibilité effective du fonctionnement que vous proposez, c'est sur l'aspect concernant qui est une "coquille vide " et qui ne l'est pas.

Parce qu'il est très difficile de définir ce qu'est l'"existence réelle" d'un collectif. Qu'est ce qu'"exister d'une façon ou d'une autre " ? Bien sur on peut donner des exemples précis de collectif ou de syndicat qui "existe " et de celui qui n'existe " pas du tout", mais au delà, sur quels critères globaux ?

Donc en cas de conflit sur l'"existence ", ce sera immédiatement insoluble, et ce d'autant plus qu'on voit assez mal qui irait vérifier cette existence sur le terrain, sur quelle base, d'ailleurs son avis serait plus important que celui des gens qui pensent exister en tant que collectif.

Et puis tant qu'à tout faire évoluer, pourquoi au fait un réseau uniquement de ce que vous appelez "syndicats " ? Qu'est ce qui s'oppose à ce que des précaires s'organisent autrement , par exemple en collectifs fondés sur cette condition commune de précaires , en admettant qu'ils acceptent aussi l'ensemble du fonds idéologique ? Pourquoi l'union régionale et pas l'union départementale, je dis ça parce que pour pas mal de precairEs les politiques capitalistes et les résistancEs s'organisent aussi à ce niveau là.

Pourquoi la confrontation qui a lieu s'est elle articulée spécifiquement autour de cette notion de "réseau " ?
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Messagepar AnarSonore » Mercredi 14 Jan 2009 1:05

Il y a aussi ce texte-là:

FÉDÉRALISME ET RÉSEAU

http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=525

La coordination de ses activités est un problème fondamental pour tout groupe humain.

Au cours de l’histoire, différents modèles d’organisation ont émergé, mais, quelles qu’en soient les variantes, c’est un modèle hiérarchisé et centralisé qui domine actuellement la planète.

Ce modèle est en parfaite adéquation avec une société d’exploitation dans laquelle une poignée de dirigeants impose à la masse des plus faibles le maintien de ses privilèges en utilisant simultanément la violence physique (suivant les cas : guerres, famines, bavures policières, prisons, licenciements, camps, misère...) et la violence idéologique (médias, enseignement, "intellectuels" aux ordres, religions, publicité...). Du sommet de l’état à la cellule familiale en passant par les entreprises et les administrations, ce même modèle est tellement présent qu’il est inconsciemment intériorisé par les individus qui finissent par le trouver "naturel". Cette pression est tellement forte que même ceux qui aspirent à changer la société peuvent le reproduire.

LE FEDERALISME

Même s’ils n’échappent pas toujours à cette critique, il faut reconnaître qu’un des efforts constants des anarcho-syndicalistes et plus généralement des libertaires est de récuser ce modèle et de proposer des modes d’organisation qui permettent de conjuguer réflexion et action collective, progrès social et respect de chaque individu. Depuis plus d’un siècle, ils proposent en alternative le fédéralisme, c’est-à-dire un système qui repose sur la libre fédération entre elles des entités qui composent une société. Ce principe très général a déjà reçu des applications réellement intéressantes et sur une grande échelle à certaines périodes historiques -la Révolution espagnole pour n’en citer qu’une-, mais il mérite d’être approfondi, affiné, d’autant qu’il peut se décliner de façons très diverses. Une des questions qui se posent d’après nous aux anarcho-syndicalistes d’aujourd’hui est d’assurer une meilleure application de ce principe dans leur propre façon de s’organiser. En effet, les cadres organisationnels sur lesquels reposent habituellement leurs mouvements se sont figés voici plus de cinquante ans et sont de ce simple fait en-dessous de ce qu’ils pourraient être par rapport à l’évolution des concepts et des besoins. Pour nous, il ne s’agit nullement de "rénover" l’anarcho-syndicalisme au sens que ce mot a pris dans le vocabulaire politique (dans lequel "rénover" veut surtout dire vider une théorie de sa substance pour ne garder qu’une partie de son décorum), mais au contraire de régénérer les notions de base avec la volonté de donner aux idées et aux pratiques anarcho-syndicalistes la plus grande expansion. Loin des concessions que certains sont périodiquement tentés de faire pour être "reconnus" par la société dominante, pour "peser" sur elle, il s’agit pour nous au contraire de développer les moyens d’organisation qui permettraient de porter d’avantage la révolution dans son cœur.

LE RESEAU

Un des concepts que l’anarcho-syndicalisme peut utiliser pour pratiquer le fédéralisme est celui du réseau. Nous allons essayer dans ces quelques lignes d’apporter des éclaircissements sur ce que nous entendons par ce mot.

1_ Tout d’abord, qu’entendons-nous par organisation en réseau ?

L’objectif du fonctionnement en réseau pour une organisation anarcho-syndicaliste est de favoriser un mode d’organisation qui garantisse à chaque syndicat sa totale liberté d’expression et d’action tout en potentialisant la solidarité avec les autres.

La liberté d’action et d’expression (l’autonomie) de chaque syndicat, fonctionnant en assemblée générale de syndiqués, implique qu’aucune autre structure à quelque niveau que ce soit ne puisse avoir le moindre pouvoir de décision à la place du syndicat, même pour des tâches qui seraient qualifiées de "techniques". Ce qui n’est pas incompatible, loin s’en faut, avec le débat, la concertation, l’échange d’information, le partage de moyens.

La solidarité entre syndicats est une démarche volontaire et non une contrainte imposée par une majorité, quelle qu’elle soit. Elle résulte d’une proposition ou d’une demande d’aide d’un ou de plusieurs syndicats et de l’accord de tout qyndicat jugeant cette proposition recevable.

Ainsi, une confédération anarcho-syndicaliste fonctionnant en réseau serait constituée d’un ensemble de syndicats se reconnaissant dans un certain nombre de principes généraux communs, issus de débats ouverts et permanents. Toute autre structure regroupant des syndicats, à tout niveau, serait alors une instance de concertation, d’information, mais jamais une instance de décision. La cohérence de la confédération serait le produit de deux facteurs et de rien d’autre : la cohérence des relations entre les syndicats et leurs actions sur le terrain.

On le comprend aisément, ce type de fonctionnement génère une confédération dynamique. La réalité de la confédération est la résultante de l’action réelle et de l’inter-réaction des syndicats. Le réseau ne garantit pas contre toute prise de pouvoir, mais il limite fortement la prise de pouvoir car il n’existe alors aucun autre lieu de décision que le syndicat.

2 _ Le réseau s’oppose-t-il au fédéralisme ?

Très souvent, les militants libertaires ont une image partielle et déformée du réseau. Celle-ci provient d’une part de la période des années 70/80 pendant laquelle des groupes dits "autonomes" ont mené des expériences souvent forts critiquables (positionnement politique obscur, dérive autoritaire...). Même s’ils n’ont pas fait référence directement à ce concept, on parle parfois de ces groupes en terme de réseaux. Les critiques qu’on peut leur faire ne tiennent pas à leur pratique restreinte du réseau mais bien à leur manque d’analyse et d’objectifs politiques. D’autre part, le mot "réseau" est souvent utilisé pour décrire des relations cachées, semi-clandestines, entre des personnes ou des groupes. Il est clair que ces rapports occultes introduisent des possibilités de manipulation dans toute une organisation. Des militants qui échangent périodiquement des informations, des idées (quelle que soit la forme utilisée : déplacements, "tournées des popotes", téléphone...) constituent un réseau. En soi, de tels échanges n’ont rien de choquant, et d’ailleurs, ils sont peut-être inévitables. Ce qui est très critiquable, c’est l’utilisation qui peut en être faite (travail de sape, construction artificielle d’un rapport de force interne...). Or, cette utilisation ne découle pas du réseau mais de son caractère caché. En officialisant le réseau, en le mettant "sur la table", en rendant accessible les informations qui y circulent à tout adhérent, on ne garde que l’aspect dynamique du réseau en neutralisant les aspects pervers évoqués ci-dessus.

Enfin, pour certains militants, le réseau évoque inévitablement ... la pagaille. Or, un réseau, comme tout mode d’organisation, peut-être plus ou moins fortement structuré. Par exemple, rien ne s’oppose à ce que, dans un réseau, des protocoles fixent par consensus les modalités de circulation de l’information.

De fait, contrairement aux idées reçues, le réseau non seulement ne s’oppose pas au fédéralisme, mais il en constitue une des formes possibles. Il ne fait pas obstacle à la solidarité et il favorise l’échange car il est débarrassé des lourdeurs du passage obligé par des instances souvent difficiles à réunir pour diverses raisons. A la norme, édictée périodiquement par un congrès ou une instance après un débat plus ou moins formel, le réseau oppose la dynamique du débat permanent conduisant à un consensus qui seul permet l’action concertée efficace.

ANARCHO-SYNDICALISME & RESEAU

A partir d’une analyse de la société de classe actuelle et de ses fonctionnements (formes de domination, rôle du spectacle de la contestation, lutte des classes...), l’anarcho-syndicalisme définit des stratégies pour combattre et abattre le totalitarisme capitaliste et étatique (position idéologique de rupture avec le système, rejet des structures collaborant avec le pouvoir ou défendant un mode d’organisation autoritaire et hiérarchique, action directe, solidarité de classe, ...) et pour organiser la société future (autogestion, communisme libertaire...). Les moyens à utiliser doivent répondre à la réalité présente et être conformes aux objectifs à atteindre. C’est pourquoi le fédéralisme doit être une constante de nos organisations et le réseau peut se révéler une façon utile de le pratiquer.

Paul

A TITRE D EXEMPLE

Imaginons qu’un syndicat propose une action commune pour dénoncer le rôle joué par Attac dans la récupération des luttes par le pouvoir. Un syndicat émet cette proposition et le fait savoir aux autres. Chaque syndicat intéressé en discute en interne et lors de rencontres entre syndicats ou entre militants, puis se prononce. S’il est d’accord sur le principe, il énonce ce qu’il compte entreprendre, ce qu’il met à la disposition des autres, ce qu’il propose comme idée d’action, pour être un des acteurs de cette démarche. Le succès de cette action ne dépend que du nombre et du travail effectif des syndicats ayant répondu favorablement à cette proposition et ayant effectivement réalisé des actions dans ce sens.

Si un syndicat n’est pas d’accord, il ne participera pas à cette action. Il se posera la question : doit-il laisser les autres faire cette action qu’il n’approuve pas ? Doit-il la combattre car elle s’oppose, d’après lui, aux principes de bases de l’anarcho-syndicalisme ? Dans ce cas, il peut choisir la forme qui lui semble la plus adaptée : proposition de poursuite du débat sur le fond, arrêt de sa collaboration avec les syndicats menant cette action, retrait de la confédération...

__________________
Et par ailleurs le dossier "Réseau" sur AnarSonore:
:arrow: http://anarsonore.free.fr/spip.php?mot30
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Messagepar NOSOTROS » Mercredi 14 Jan 2009 1:49

Et puis tant qu'à tout faire évoluer, pourquoi au fait un réseau uniquement de ce que vous appelez "syndicats " ?


Précisement, dans l'état actuel des réflexions, certains pensent que le réseau doit rassembler ce qu'ils appelent (faute de mieux) des groupes. (ce qui nous vaut d'être taxés de traitre à l'anarchosyndicalisme :-) )

Or dans l'AIT toutes les organisations ne sont pas systématiquement structurées en "syndicats". La FORA par exemple se structure en "société ouvrières de résistance".

A mon avis il reste un terme à inventer, mais je pense qu'il émergera dans la lutte. C'est vrai que pour le moment il reste encore de vieilles habitudes :-)

Parce qu'il est très difficile de définir ce qu'est l'"existence réelle" d'un collectif. Qu'est ce qu'"exister d'une façon ou d'une autre " ? Bien sur on peut donner des exemples précis de collectif ou de syndicat qui "existe " et de celui qui n'existe " pas du tout", mais au delà, sur quels critères globaux ?


Le critère global c'est avoir un minimum d'activité sociale. Si la seule participation du groupe au réseau c'est d'inonder les moyens de communication de lettres d'insultes, sans jamais rien produire ni en terme de réflexion/contribution (si on peut pas toujours être dans la rue, on peut toujours faire fonctionner ses méninges ...) et si la seule présence physique c'est non pas les luttes mais les congrès internes pour se comporter en procureur et demander l'exclusion de tel groupe ou tel autre, on est plus dans le parasitisme qu'autre chose ...

Après les choses se règlent par les échanges mutuels.

En cas de désaccords, l'idée n'est pas de les supprimer, mais d'essayer de trouver des moyens de médiations sans qu'il y ait trop de blocage global, et d'accepter l'idée de séparation en cas de désaccord essentiel. Quelque chose de modulaire en quelque sorte. Et s'il n'y a plus de liant entre les modules, et bien ils reprennent leur indépendance.

Donc en cas de conflit sur l'"existence ", ce sera immédiatement insoluble, et ce d'autant plus qu'on voit assez mal qui irait vérifier cette existence sur le terrain, sur quelle base, d'ailleurs son avis serait plus important que celui des gens qui pensent exister en tant que collectif.


Ce n'est pas tant insoluble que ça. Un réseau c'est un ensemble de noeuds, qui sont reliés les uns aux autres par des liens (comme un filet si tu veux). Ce qui constitue ces liens ce sont les informations (1) qui sont échangées dans le réseau. En l'absence de lien, le noeud n'existe pas, du moins pour le réseau.

Donc, si on prend une situation extreme d'un groupe local qui existe, qui aurait une activité locale, mais n'émettrait aucun signal vers le réseau, manifestant ainsi son désintérêt à être fédéré avec d'autre, il est hors champ. (il vit pour soi si tu veux, et dans ce cas là on va pas le forcer à se féderer).

Après ce qui fait la force des liens du réseau, c'est la qualité de l'information échangée. Un groupe qui n'échangerait comme information que des lettres d'insultes contre la terre entière, serait effectivement vite déconnecté du réseau, car les autres noeuds cesseraient les liens.

C'est donc un processus dynamique : les liens entre groupes ne fonctionnent que tant qu'ils sont alimentés par les groupes participants, et que tant que chacun y trouve un intérêt mutuel.

Les liens ne sont pas maintenus artificiellement en vie par un système de soins palliatifs qui finissent par bouffer tout ton temps et ton énergie. Et si l'intérêt mutuel disparait, la structure ne se pérenise pas "parce que c'est comme ça". (L'idée c'est que la structure reste l'outil et ne devienne pas l'objectif. C'est une approche fonctionnelle et non plus organique au sens mécaniste [cf le livre de Besnard sur le Monde Nouveau ...])

Pourquoi la question se cristalise t elle sur la notion de réseau ?


Parce que l'AIT a ses rites et ses codes. Et que dans la lutte de pouvoir dans laquelle l'autre partie veut nous entrainer, il est important dans le dossier à charge qu'elle est en train de monter pour intenter un éventuel procès en sorcellerie devant l'AIT, elle puisse démontrer que nous fautons en ne respectant pas, selon la formule interne consacrée "les principes, tactiques et finalités de l'anarcosyndicalisme". Le fédéralisme est un de ces principes de base. Il est donc primordial qu'ils puissent démontrer que l'organisation en réseau s'oppose au fédéralisme. Ce sur quoi je leur souhaite bonne chance ! :-)


(1) au sens large. En anglais on parlerait d'intelligence. ca recouvre le savoir, le savoir faire, les opinions, du descriptif et du quantitatif, etc ... c'est global en fait
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Messagepar bloedverwant » Mercredi 14 Jan 2009 17:56

Une discussion vivante :D

Pour y ajouter mes reflections:
Je veux pas y parler au nom de toute CNT Lille, mais je pense que nous, nous nous inscrivons dans le strategie réseau, plus que dans le strategie centralisé. Les raisons pour ça sont, à mon avis, diversifié:

-Premièrement, nous ne sommes pas une section "française", mais une section bi-nationale. Alors, soyons belge ET française, nous ne pouvons pas nous inscriver dans une logique centralisé française. Par exemple, si nous suivions le congrès à Pau, nous devons faire du campagne pour l'abstention, mais en Belgicque, il n'y a pas d'élections pour l'instant!

-Deuxièmement, Pau, c'est l'autre côté de l'univers pour nous. S'ils tiennent un congrès, il est virtuellement impossible d'y aller. J'ai pas de problème avec un congrès, mais on ne peut pas expecter que ceux qui n'y peuvent pas aller doivent suivre les résolutions.

-Troisièmement, moi, pour ma part, je ne trouve pas que le "réseau", ça cause du concurrention. Je pense que nous pouvons dire d'avoir des bonnes contactes avec quelques groupes en France, Paris pour en nommer un, et sans leur aide, nous ne serions jamais où nous sommes aujourd'hui. Alors, ces contacts ce ne sont jamais inscrite dans une logique de centralisation, mais dans des rapports d'entraide. Jamais il y avait été une 'comité centrale française du CNT-AIT' qui a dit: faut les aider, ils veuillent créer une syndicat. Non, nous avons pris l'initiatve nous mêmes, à la base, et nous ont tourné vers nos contactes en France pour effectivement l'organiser.

Je pense que je peux dire que nous sommes une section très autonome, et que les contacts, pour nous, c'est pas une nécessité, mais une possibilité. C'est peut-être à cause de la largeur du groupe (pas grand :P ), mais je pense que c'est aussi à cause du position un peu ambigu que nous avons. Nous sommes bi-national, et en Belge nous sommes en plus bi-lingue (ce qui n'est plus evident ici avec toutes les problèmes communautaire). En plus, la Belgique est du nouveau terrain pour l'anarcho-syndicalisme et le context est un peu différent. Dans la logique de Pau, je me demande où est la place de notre groupe? Dans la logique réseau, la position se define automatiquement. Le résultat, c'est que nous pouvons nous concentrer sur l'élargement du groupe et le propagande, et éviter des discussions de bureaucratie.
(Si je comprenne bien leur organisation, je pense que nous ressemblent beaucoup à une section de FORA?)

Alors, comme point final, je pense que les deux systèmes ont ces mérites. Pour nous, le réseau est sans doute le meilleur système. Mais dans une pays, une tactique centralisé peut être effectif de temps en temps. Pour l'abstention, une campagne nationale est nécessaire. Mais je pense que, si on doit départer d'une système, le réseau est le meilleur, car ça se passe à la base. Si on a besoin du centralisation pour une lutte, alors le faisons avec l'accord de la base, et faisons le temporel.

(Et en plus, je me demande s'il n'est pas urgente que le CNT-AIT y ouvre une sérieuse discussion, pour éviter des ruptures et des scissions. Les différences sont quand même trop marginale pour s'y battre!)

PS: Pour ceux qui disent le réseau est une système capitaliste: est-ce que la centralisation n'est pas une système étatique? Alors, si ça c'est le fondamment du discussion, je ne vois pas pourquoi l'un serait mieux que l'autre.
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Messagepar jipé » Jeudi 15 Jan 2009 14:54

Dire que le réseau c'est du fédéralisme est malhonnête, d'ailleurs si c'était la même chose il n'y aurait pas de débat.
Quand je dis que l'idée de réseau est minoritaire c'est que le dernier congrès a très massivement rejeté la motion proposée puis retirée au dernier moment par Toulouse. Je sais qu'aujourd'hui il y a une tendance à refaire l'histoire et de dire que ce n'était pas une motion, il suffit de lire le cahier de motion pour voir qu'il s'agissait bien d'une motion déposée dans les temps voulus pour modifier les statuts.
Que des gens soient partisans du réseau c'est leur droit, qu'ils proposent un changement de statuts aussi. Ce qui n'est pas normal c'est de nous imposer dans les faits ce fonctionnement alors que nous n'en voulons pas. Les syndicats de la CNT sont liés entre eux par les statuts et les accords de congrès, si des syndicats ne veulent pas les respecter, les nient et les bafouent délibérément, l'honnêteté voudraient qu'ils décident de s'en aller.
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Messagepar douddu » Jeudi 15 Jan 2009 15:45

On comprend bien comment notre ami de la CNT AIT de Pau appréhende les motions de débats a l'intérieur de l'organisation : Pour lui ce n'est surtout pas un moyen de réflexion et d' élaboration collective , c'est une façon de jouer comme dans les syndicats classiques , minos/majos .

Quand jipé écrit
Quand je dis que l'idée de réseau est minoritaire c'est que le dernier congrès a très massivement rejeté la motion proposée puis retirée au dernier moment par Toulouse


C'est a se tordre de rire :

Trés massivement ?
Sur plus de 20 syndicats déclarés a la CNT AIT , 10 ont voté contre la motion de Toulouse .
Mais si l'on suit la logique de jipé, et qui consiste a exclure les " minoritaires " sur la question, c'est le syndicat de Montpellier qu'il faut pousser a la porte , ils n'ont obtenu que cinq voix pour leur contre motion ! :lol:

Mais trêve de pitreries , cette logique n'est absolument pas digne de l'anarchosyndicalisme , car c'est mettre la pression sur tous les débats novateurs .

C'est certain que sur le sujet des débats la CNT AIT de Pau ne court aucun risque , avec des motions aussi originales que celle sur l'antimilitarisme Pau arrivera toujours a obtenir une majorité écrasante : C'est ce prix , celui de la sclérose , que jipé veut nous faire payer pour qu'il puisse se faire valoir comme la représentant de la tendance majoritaire de la section française au sein de l'AIT ........
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 15 Jan 2009 17:08

Dire que le réseau c'est du fédéralisme est malhonnête, d'ailleurs si c'était la même chose il n'y aurait pas de débat.


Ce qui est malhonnete, c'est de faire croire que le fonctionnement pyramidal que tu pratique, Jipé, est du fédéralisme.

Les messages que tu postes ici, et par lesquels tu exprime ta conception de l'organisation, permettent à chacun de se faire une opinion ...

Quand je dis que l'idée de réseau est minoritaire


D'une part Douddu a montré que cette position n'est pas aussi minoritaire que tu sembles le dire si on parle en nombre de syndicat.

Mais on pourrait aussi aborder la question de ce que représentent chacun de ces syndicats : quand tu sais qu'en nombre d'adhérent le SIPN (pourtant pas bien gros) a plus d'adhérent que toute la région paris-nord et ses trois syndicats réunis, on rigole doucement sur la notion de "majorité / minorité" ...
(même si nous ne fonctionnons pas avec ce genre de cadre de référence)

Ce qui n'est pas normal c'est de nous imposer dans les faits ce fonctionnement alors que nous n'en voulons pas.


Oui, franchement c'est dégueulasse d'imposer à JP de venir ici déblatérer sa haine !

Comme c'est dégueulasse d'imposer au syndicat de Pau de cosigner tout ce qui traine avec l'UNSA, ou de prendre la défense de l'UNEF parce que son local a été dégueulassé par des étudiants en colère.

Les syndicats de la CNT sont liés entre eux par les statuts et les accords de congrès, si des syndicats ne veulent pas les respecter, les nient et les bafouent délibérément, l'honnêteté voudraient qu'ils décident de s'en aller.


Il ya quelques temps de cela, le syndicat de Pau n'a pas respecté les accords de congrès relatifs à la presse régionale. Ils ne sont pas sentis "liés" par ces accords.

Personne n'a demandé alors au syndicat de Pau ni de partir ni son exclusion ...

C'est quand même formidable ce double discours ... Et après tu oses venir nous parler d'honneteté ?

Ceci dit, pour moi les accords entre syndicats doivent les libérer et non les lier. Mais chacun sa conception de l'organisation ...
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Messagepar wiecha » Jeudi 15 Jan 2009 23:59

Salut,

C'est un peu difficile d'intervenir dans le débat ici, parce qu'évidemment, au délà de la question du réseau, il y manifestement bien d'autres affrontements en cours.

Donc je précise que ce que je peux dire n'a pas vocation à être une prise de position dans le conflit , mais uniquement à mettre en perspective cette notion de "réseau".

Après la scission d'AC!, nous étions persuadés que ce "fonctionnement en réseau" que vous décrivez dans les textes ci-dessus nous permettrait d'évoluer dans le bon sens. Mais ça n'a pas du tout marché en fait.

Quand on porte le même nom entre des collectifs locaux, de fait on est liés, qu'on le soit par le biais d'une "fédération" ou d'un "réseau". Et comme celui-ci ne fonctionne pas en vase clos mais interagit avec le monde, quand un certain nombre de collectifs locaux décident d'une campagne ou d'alliances communes, de fait, c'est bien tout le réseau qui est engagé, et même les collectifs qui ne participent pas.

Et quand il y a désaccord, même dans le cadre du respect des grands principes du réseau , en fait l'absence de cadre ou trancher, après débats mène à des situations assez insolubles d'ou les prises de pouvoir ne sont pas exclues.

Bon, j'ai du mal à exprimer ça de manière théorique , donc prenons un exemple.

Les collectifs A, B, et C décident de mener une campagne commune avec une organisation extérieure. Pour des raisons diverses, les collectifs D et E considèrent que c'est une énorme erreur.

Mais il se trouve que l'organisation Y est dotée de moyens de communication puissants, et signe elle au niveau national. Très vite, ce qui apparait par exemple dans les médias, qui simplifient tout, c'est que Y et le "réseau " travaillent ensemble.

De plus D et E bien implantés localement sont eux en affrontement avec l'organisation Y ce qui pose d'énormes problèmes à A, B, et C et a forcément des répercussions sur la qualité de leur alliance.


Bref, il y a de toute façon conflit, qui n'est pas forcément du aux appétits de pouvoir des uns et des autres, mais à undésaccord pas forcément définitif ou irréversible , mais qui n'est pas résolu immédiatement.

Dans la solution "centraliste", à un moment donné, le conflit est porté devant le congrès ou un autre nom peu importe, si les deux parties estiment que ça a assez duré et qu'il faut une position nationale. Dans le meilleur des cas, un modus vivendi est trouvé. Dans le pire, on tombe dans les réflexes de pouvoir "majorité " "minorité" et ça scissionne.

Mais dans le cadre du réseau, par expérience, il arrive que ce soit pire au sens ou la revendication de l'autonomie de ton collectif, de l'illégitimité de toute autre instance à trancher amène à ce qu'il n'y ait même pas confrontation ouverte. Et, en réalité les enjeux de pouvoir s'expriment quand même , mais de manière larvée dans les outils de "coordination" du réseau. Exemple type, tu as un site "national" ou chaque collectif a sa page. Et bien, les collectifs A; B, et C vont y publier un texte coimmun avec Y et le lendemain les collectifs Det E vont y publier un texte qui descend en flèche Y. Et généralement, ça continue comme ça longtemps, parce que les mécanismes par lesquels le "compagnon" devient un "adversaire " ne dépendent pas seulement de la "bonne volonté " des uns et des autres.

Les réseaux généralement n'explosent pas, ils implosent. petit à petit le boulot de coordination devient infaisable, car s'y déplacent les conflictualités qui ne sont pas élucidées ailleurs. Généralement si le conflit implique suffisamment de collectifs, les autres qui pour des raisons X ou Y ne le considèrent pas comme prioritaire désertent les lieux de coordination à cause de leur ambiance délétère, après quelques tentatives de médiation.

Bien sûr là je décris le pire. Mais mon impression, c'est que les théories du réseau reposenbt beaucoup sur la "bonne volonté " des participants, et qu'en réalité les rapports sociaux auxquels nous sommes "conditionnés " même en étant "anarchistes" ou libertaires font que cette "bonne volonté " est rarement au rendez vous en cas de conflit perçu comme prioritaire. Et dans ce cas là, l'absence de centralisme ne change pas grand chose tant qu'on porte tous le même nom qui symbolise quand même une certaine "responsablité collective " qu'on doit gérer ensemble de toute façon.

Bon je m'arrête là, j'espère qu'on y comprend quelque chose, parce que j'ai vraiment du mal à théoriser sur les formes d'organisation.
wiecha
 
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Messagepar NOSOTROS » Vendredi 16 Jan 2009 0:32

C'est un cas intéressant.

Il pose en fait la vraie question, quelque soit le mode d'organisation choisie : qu'est ce qui fait le lien entre les constituants du réseau ?

Nous postulons, dans le réseau que nous souhaitons construire, que ce qui réunit les groupes entre eux c'est un lien politique (ou idéologique). A savoir le fait de partager des valeurs politiques communes.

Ces valeurs politiques déterminent des modes d'opérations stratégiques et tactiques.

En fait, l'approche proposée par le réseau est "choquante" pour nos esprits latins car, dans la création du corpus juridique qui lie les groupes entre eux, elle ne se base pas sur une Code de Loi (style Code Napoléon) qui définit une fois pour toute la législation à laquelle tout un chacun est soumis. En fait, notre approche est beaucoup plus anglosaxonne, dans le sens où elle est essentiellement jurispriudentielle : c'est le contexte qui fait le cas, et l'appréciation se fait alors non plus de façon générale et définitive mais de façon circonstanciée. Dans cette approche, ce qui compte c'est l'élaboration de la Common law, qui relie les groupes les uns aux autres. Toutefois à la différence de la juridiction anglosaxonne, cette élaboration n'est pas l'objet de structures spécialisée, mais est le produit de l'activité et la réflection des groupes eux mêmes, au nom du principe anarchiste de refus de médiation.

Dans l'expérience du réseau AC que tu donnes, peut être qu'un des éléments qui a rendu difficile le lien de s'établir est que les groupes ne partagaient pas des positions idéologiques communes, au dela de la seule exécration des gauchistes qui ont pris le pouvoir dans la structure ?

Car d'un point de vue idéologique les deux positions que tu indiques sont en effet incompatibles. Donc il est logique que le réseau se sépare en deux. Bien sur, on peut regretter que cela divise les forces. Mais ceux qui font le choix de s'allier avec la grosse orga le savent, et font leur choix en conséquence : ils font le choix de privilégier la liaison avec la grosse orga médiatique au lieu de privilégier la liaison avec les autres groupes. Donc ils manifestent leur volonté de rompre. Mais ce n'est pas un drame en soit. C'est des choix, ils doivent être assumés. A mon sens il ne faut pas privilégier l'unité au détriment de la clarté, surtout quand il n'y a absolument aucun enjeux rééls dans nos groupes. (on serait 3 millions de part et d'autre, dans une situation pré révolutionnaire, peut être que je verrai les choses différement. Mais aujourd'hui, dans la situation présente ...)

Après bien sur, il y aura des gueguerres sur les sigles, les couleurs, la taille du chat et l'age du capitaine. Mais c'est assez secondaire à mon sens, car ce qui compte c'est avant tout ce que tu produits localement. (nous avons en ce qui nous concerne une longue expérience maintenant de cegenre de chose : 15 ans après la scission, ca c'est decrispé. Ils font leurs trucs, avec leur approche et nous les notre avec notre spécificité. Les gens qui s'intéressent font bien la différence, même si on porte le même nom . Ce n'est plus vraiment un problème en fait.)

Les réseaux généralement n'explosent pas, ils implosent. petit à petit le boulot de coordination devient infaisable, car s'y déplacent les conflictualités qui ne sont pas élucidées ailleurs.


Ceci est vrai quelque soit le mode d'organisation.

En fait, comme tu le dis, ce qui fait imploser les organisations c'est l'absence de lieu où parler et dire les choses, mêmes désagréable.

Le réseau fédéral n'est pas opposé à la mise en place de lieu pour confronter et discuter, voire même polémiquer si besoin. Au contraire !

Par exemple, dans le fonctionnement actuel, les Congrès sont un lieu de pouvoir, où des motions sont proposées au vote, sans réelle discussion préalable. (le temps ne le permet pas). C'est le meilleur moyen justement pour cacher sous le tapis les sujets foireux, qui vont bien moisir et finir par exploser quand ils auront bien fermentés ...

Dans le réseau fédéral tel que nous le préconisont, le congrès n'est pas un lieu de décision/ affrontement rapport de force (motion A : combien de voix ?) mais au contraire un lieu de discussion. Donc bien un lieu pour mettre sur la table les sujets qui fachent, et éventuellement les déminer ...

Exemple type, tu as un site "national" ou chaque collectif a sa page. Et bien, les collectifs A; B, et C vont y publier un texte coimmun avec Y et le lendemain les collectifs Det E vont y publier un texte qui descend en flèche Y.


C'est pour cela que dans notre approche il n'y a plus de site "national", centralisé. Il y a des outils locaux, développés par le groupe, qui en a la responsabilité politique (et donc éditoriale). Ces outils sont mis à disposition des autres qui le souhaitent, mais le groupe qui le met en oeuvre en reste le responsable.

Il n'y a plus de parole centrale, mais des paroles autonomes (1). Et là où on voit si le réseau fonctionne c'est si les messages produits par le réseau sont discordants ou au contraire harmonieux (sur le même longueur d'onde) du point de vue politique.

Pour le moment ça marche plus ou moins, mais peut être aussi parce qu'il n'y a pas (encore :-) ) beaucoup de noeuds dans le réseau. La robustesse du modèle se vérifiera - ou pas - avec l'extension.


=========

(1) l'autonomie n'est pas l'indépendance. L'autonomie implique le fédéralisme, c'est à dire la référence à un cadre de valeur commun dont je parlais précédement. L'autonomie implique donc que les action d'un noeud du réseau ont des répercutions sur les autres noeuds, comme dans un filet : si tu tires sur un des noeuds du filet, les autres qui y sont reliés sont entrainés dans le mouvement)
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