Riveira demande :"la CNT-AIT refusant la dichotomie social/politique, doit et peut rester autonome et vierge de toute influence extérieure ?"
En fait, le principe de l'autonomie du syndicat par rapport à l'organisaiton politique est un concept hérité de la Chartes d'Amiens (1906). Selon ce concept, il est reconnu un rôle positif aux organisations politiques "qui, en dehors et à côté [du syndicat], peuvent poursuivre en toute liberté la transformation sociale ".
Les expériences du mouvement révolutionnaire issues de la période 1914-1917 (social chauvinisme et union sacrée des partis socialistes en 1914, massacre des révolutionnaires allemands par le social démocrate Noske en 1918, révolution russe et dictature bolchévique de 1917, ...) ont montré que permettre librement aux partis politiques de poursuivre leurs oeuvres était néfaste pour les travailleurs. Depuis cette péridoe, il est clair que les organisations politiques ne sont pas des instruments de transformation sociale.
C'est ce qui explique que dès le congrès de refondation de l'AIT en 1922, les organisations syndicalistes révolutionnaires présentes se sont prononcées non pour l'AUTONOMIE du syndicat par rapport aux partis mais pour leur INDEPENDANCE. Il n'y a plus le lien de subordination que permet l'autonomie. Et pour les structures de l'AIT, les partis politiques sont même considérés comme des ENNEMIS des travailleurs, qu'il faut combattre au même titre que l'Etat ou le capitalisme (dont ils ne sont qu'un rouage).
La remarque de la CNT AIT "vierge de toute influence extérieure " est intéressante. Elle nous renvoie à l'image (de "puriste") que les observateurs extérieurs peuvent avoir de notre organisation. Il faudra certainement un jour qu'en interne on discute de savoir si cette image nous convient ou pas.
Quoiqu'il en soit, elle révèle que nos réelles positions politiques sont finalement méconnues.
En effet, je soutiens que la CNT AIT est l'organisation du spectre anarchiste qui a bénéficié le plus largement d'influence extérieures et qui s'en est enrichie. Par exemple, on trouvera dans la rubrique "autonomie populaire" du site
http://cnt-ait.info, des textes de Pannekoek, un affreux marxiste
!
De même l'influence situationniste est perceptible dans notre critique de la représentativité et du spectacle.
Enfin, nous sommes les premiers à avoir traduit en français des textes de Lopenz Arango sur la FORA Argentine et l'anarchisme ouvrier, qui était un courant anarchiste a peu près inconnu jusque là en France. Le texte sur l'autonomie populaire est une bonne synthèse de notre position politique, entre syndicalisme révolutionnaire français, anarchosyndicalisme espagnol et anarchisme ouvrier argentin.
Lire également les textes des groupes tels que Nada ou Négatif - qui sont anti syndicalistes ce qui pourrait amener des esprits obtus à nous qualifier de la façon
- que nous reprenons sur notre site également.
La CNT AIT n'est donc pas vierge d'influences extérieures, mais ses influences viennent du milieu révolutionnaire.
Maintentant, c'est sur que nous essayons, autant que faire possible, de rester vierge d'influences du système dominant. Oui, nous resistons à la pénétration de notre pensée par des idées reformistes, ce qui explique notamment que nous sommes contre toute délégation de pouvoir par le système représentatif.
Et c'est précisément ce qui nous différencie des groupes que tu cites (FA, AL) : ils sont incapables de résister à la pression de l'ordre dominant. Cela est visible chaque fois que la pression politique ou sociale est un peu plus élevée que la normale : ils appellent à votre Chirac, ils appelent à voter NON au référendum, ils manifestent avec le PS à propos des banlieues et appellent à la police de proximité, ... Plus généralement, ils signent les pétitions avec le PC et la LCR (se mettant ainsi du côté des réformards et des futurs Noske), certains se présentent même aux élections municipales, et tous sont pour les élections professionnelles quand ils ne sont pas représentants élus aux DP, CE etc ... Bref, pour le coup AL, FA (et même Vignoles) sont quasi incapables d'avoir une activité autonome (justement !) et se retrouvent toujours à la traine des autres organisations - formant la queue libertaire des cortèges "unitaires".
Effectivement,la CNT AIT entends bien se préserver de ce gerne d'influence nefaste !
Maintentant, un membre de la FA ou de l'AL peut il adhérer à la CNT ? Oui, si il se reconnait dans ses principes, tactiques et finalités. Mais il ya fort à parier que tôt ou tard le dit compagnon se trouvera dans un situation de contradiction personnelle qui lui sera intenable tellement les positions politiques des uns et des autres sont finalement divergentes.