Sinon pour info d'autres textes de présentation d'autres syndicats, pour information :
Charte de l'Union locale de Caen
Les organisations anarcho-syndicalistes ont une double fonction. Premièrement, la lutte révolutionnaire pour l'amélioration économique et sociale dans la société capitaliste existante. Deuxièmement, l'éducation par eux-mêmes des exploités et opprimés afin qu'ils puissent accomplir la complète autogestion de la production et de la distribution par la socialisation des richesses.
Conscient que la lutte en entreprise est importante, l'anarcho-syndicalisme ne limite pas son action à celle-ci mais l'étend à tous les rapports et modes : production, consommation, administration… car c'est l'ensemble du champ social qui est visé.
L'anarcho-syndicalisme est opposé à tout monopole social ou économique. Il ne recherche pas la conquête du pouvoir politique, mais plutôt l'abolition complète de toute fonction étatique dans la vie de la société. En conséquence, il rejette toute activité parlementaire et autre collaboration avec le corps législatif. Il représente des organisations en lutte sur le lieu de travail et une communauté indépendante opposée à tous les partis politiques et les bureaucraties syndicales.
En conséquence, l'anarcho-syndicalisme appelle les opprimés et les exploités à agir en dehors des structures de collaboration, des appareils politiques et syndicaux, qui concourent au maintien de l'ordre bourgeois, en créant des comités indépendants de lutte : seul moyen permettant de dépasser les clivages, l'emprise des jeux politiciens, les divisions induits par les partis et syndicats. Ces comités unifient donc les exploités dans leurs intérêts communs au delà des sensibilités particulières. Les comités doivent se lier selon les principes du fédéralisme anti-autoritaire, de façon à établir une véritable résistance populaire autonome, seule capable de créer un véritable rapport de force.
L'anarcho-syndicalisme a pour moyen l'action directe sous toutes ses formes : occupations, grèves, boycotts, sabotages, grèves générales, etc. Pour assurer la participation complète de tous, aussi bien dans la lutte actuelle que dans la future autogestion de la société, il s'oppose au centralisme dans ses organisations et s'organise sur la base du fédéralisme libertaire. A tous les niveaux, il s'établit sans hiérarchie et avec une entière liberté d'initiative aux groupes locaux et régionaux. Toutes les instances de la confédération des travailleurs consistent en délégués révocables et mandatés pour une action déterminée par les assemblées locales de travailleurs.
L'anarcho-syndicalisme rejette toutes les frontières politiques et nationales arbitrairement créées. S'opposant à l'idée d'Etat-nation et constatant que l'espèce humaine est une, il rejette toute forme de nationalisme. Il se réclame de l'universalisme libertaire : les mêmes droits, devoirs, libertés, et l'égalité pour tous. Reprenant le principe "prolétaires du monde : unissez-vous !", l'anarcho-syndicalisme œuvre donc pour que les exploités, les opprimés construisent une "fédération des terriens " sur les bases de l'égalité, tant des droits qu'économique et sociale.
L'anarcho-syndicalisme s'oppose à toutes attitudes et institutions faisant obstacle au principe d'égalité et combat les idéologies légitimant tout système social hiérarchique de domination et d'exploitation. Il défend une idéologie égalitariste d'éthique libertaire.
Constatant que les ordres politique, économique et idéologique sont consubstantiels au système actuel, il affirme qu'il ne saurait exister de transformations sociales sans modification de ces ordres.
L'anarcho-syndicalisme fait sien le principe de pensée et d'action globale. Il propose de substituer à l'économie capitaliste, une économie socialisée et planifiée ; au mode politique étatique, quelque soit le régime, une organisation politique basée sur le fédéralisme libertaire ; aux idéologies autoritaires et de domination, une idéologie égalitariste ; de façon que s'accomplissent les droits de tous et de chacun, en tous lieux, afin de décider, contrôler sa vie et son environnement.
Caen, le 19 mars 2005
LES RAISONS DE LA COLERE
Partout, tous les jours, que ce soit sur notre lieu de vie, notre lieu de travail, en discutant avec nos voisins, les raisons de se révolter ne manquent pas :
- Au « sud », les trois quarts de l’humanité souffrent de faim et de guerre dans la plus complète indifférence et le mépris le plus total des élites. Chaque jour, 30 000 enfants meurent de faim.
- Dans nos contrées occidentales, salariés, précaires, chômeurs, étudiants, lycéens, retraités..., sommes tous livrés à la même logique marchande qui impose précarisation, flexibilisation, et nous dépossède totalement de nos vies, de notre liberté d’action.
On nous divise en inventant des cloisonnements et des identités imaginaires : jeunes/vieux, français/ étrangers, travailleurs/chômeurs... selon la bonne vieille tactique de diviser pour mieux régner. L’individualisme et le communautarisme ne font que renforcer les égoïsmes individuels ou collectifs, au détriment de la solidarité universelle.
Les politiciens continuent de nous bercer d’illusions avec leurs alliés syndicalistes. Ils sont impuissants pour enrayer la destruction de la planète, mais d’ailleurs, le veulent-ils ? Seule importe pour eux la « place » et la compétition électorale. Gouvernements, députés, patrons, syndicalistes, Églises et clergé, institutions représentatives... : tous nous envoient dans le mur. Quant aux déambulateurs de la contestation-spectacle, ils nous rejouent encore la carte « citoyenne » appelant de leurs vœux un État plus social, et un capitalisme à « visage humain ».
À chaque élection, les politiciens nous ressortent le mythe que l’État pourrait garantir nos droits, s’il était dirigé par des hommes politiques vertueux. Outre que cette espèce d’oiseau rare n’a jamais été observée sur terre, c’est oublier la nature même de l’État qui est avant tout un outil au service de la classe dirigeante et du capitalisme. Les États, garants de cet ordre économique et autoritaire, n’ont de cesse de contrôler, réprimer, enfermer, écraser... Leurs officines, docilement intégrées (partis, syndicats...), ne sont que la voix de leur maître, et en rien des vecteurs efficaces de transformations sociales.
La société reste donc organisée économiquement sur la propriété privée (ressources naturelles, marchandises, moyens de production, technologies), sur l’échange par l’argent, sur la concurrence et la compétition, sur le profit comme but, sur l’exploitation des femmes, des hommes et des enfants. L’éducation et l’instruction scolaire nient elles aussi la liberté et pratiquent sans vergogne la sélection et l’exclusion sociale (par exemple : l’histoire enseignée est celle du pouvoir). La culture de « masse » et de consommation s’érige comme supplétif au bonheur. La pub nous assomme de slogans : « Consommez, vous serez libre et heureux ! ».
Pourtant, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, l’Histoire n’est pas finie.
Partout sur la planète, des gens luttent contre l’oppression, et l’émancipation de l’humanité reste à conquérir.
Nous ne devons pas douter de nos capacités collectives à transformer ce monde, mais nous ne devons pas reproduire les erreurs du passé. Ce ne sera pas en recréant les mêmes institutions (État, gouvernement, partis politiques, Églises, syndicats...) que nous nous libérerons, mais en développant l’autonomie des exploités et des opprimés.
Pour cela, nous pensons que le développement de structures auto-organisées, selon les principes anarchistes, participent de ce mouvement révolutionnaire qui reste à construire.
Loin d’établir un catalogue des méfaits induits par le capitalisme, notre analyse reste globale car nous pensons que toutes les oppressions, qu’elles soient économiques, politiques ou idéologiques, se croisent et se renforcent.
Nous voulons contribuer à redonner un sens collectif aux luttes, sortir de l’individualisme pour développer les résistances collectives. Cela passe notamment par la transmission de la mémoire des mouvements sociaux, pour reconstruire l’Utopie d’un projet global, le communisme anarchiste.
Comme l’union fait la force, nous nous organisons en un réseau fédéral, qui nous permet d’échanger des analyses et des expériences, et aussi de nous renforcer mutuellement avec ceux qui partagent un point de vue révolutionnaire.
Au quotidien, nous prenons part aux luttes contre la domination sous toute ses formes, qu’elle s’exerce sur notre lieu de travail, dans notre cité ou lieu de vie, en utilisant les outils de l’action directe et de la solidarité.
Les militants du SIPN
Texte de réflexion pour la discussion de Toulouse :
Anarchosyndicalisme !
ANARCHOSYNDICALISME !
lundi 27 novembre 2006 par cnt ait
Les soubresauts sociaux qui agitent le monde, l’assèchement progressif du marécage de la contestation sociale traditionnelle, la réapparition récente dans ce pays de courants de lutte radicaux, mouvementistes, parfois antiautoritaires, les interrogations du mouvement libertaire hexagonal et spécialement de notre propre organisation ; tout ceci nous conduit aujourd’hui à synthétiser ici quelques-unes unes de nos réflexions, et à présenter, (ici :
http://www.cntaittoulouse.lautre.net/ar ... article=88) la conception de l’anarchosyndicalisme qui nous anime, élaborée à partir de textes écrits par des militants cénétistes d’ici et d’ailleurs, discutés et publiés au fil des ans par l’Union régionale Midi-Pyrénées de la CNT/AIT. Ces textes ont été regroupés par thème, en réponse aux principales questions qui font actuellement débat dans le mouvement.
Mais rappelons d’abord nos évidences.
En premier lieu, nous affirmons que nous vivons dans un monde de classe où une minorité organisée exploite et asservit l’immense majorité de l’humanité. Qu’on le nomme capitalisme, société marchande ou domination, ce système assure sa pérennité par la coercition (armée, police, justice, prison, psychiatrie), la dépendance (contrôle de l’énergie et des échanges de biens, salariat, privatisation des systèmes de production) et le conditionnement (médias, lois, culture de consommation, religions, nationalismes). Ici, l’organisation de la domination repose sur la "démocratie" mais n’a d’autre objectif que de garantir l’ordre social. En fonction des besoins de ce système qui ne vise que le profit, à tout moment cette "démocratie" peut glisser vers la dictature ou même y basculer carrément.
En second lieu, sans mythe du grand soir, sans nihilisme aucun, nous affirmons que ce système de domination ne se réforme pas, qu’il s’abat. La rupture totale et définitive est la condition indispensable pour pouvoir bâtir un monde nouveau. La révolution n’est pas un bel espoir révolu, c’est un nouveau, intense et inévitable moment d’histoire à venir. Sans romantisme ni concession aux modes, fussent-elles celles du rouge-et-noir, nous affirmons que l’anarchie n’est ni le chaos, ni l’utopie et que le communisme libertaire est la voie vers une vie sans profit ni domination. Nous sommes clairement révolutionnaires.
Enfin, en tant qu’anarchosyndicalistes, nous oeuvrons avec la classe des exploités au renversement de ce vieux monde et à l’émergence d’un monde nouveau où l’organisation matérielle et sociale des individus se fera sur la base de la liberté, du partage et de la solidarité. Nous sommes contre l’État, les partis, les églises et toutes les organisations autoritaires et hiérarchiques. Nous sommes avec tous les exploités en lutte (au travail, à l’école, dans la rue) contre les méfaits liberticides et mortifères de cette société. Nous sommes pour l’organisation autonome des luttes sans parti ni délégué syndical, en assemblée générale, et la pratique de l’action directe (action collective, sans intermédiaire).
Pour nous, l’anarchosyndicalisme, c’est la mise en pratique de ces idées. A la base de chacun de nos actes militants, il y a le refus absolu de toute délégation de pouvoir, de toute représentation déléguée ou désignée, de tout compromis.
Pour nous, l’anarchosyndicalisme, c’est la solidarité entre exploités pour combattre le pouvoir et s’en débarrasser une fois pour toutes. Notre futur, c’est le communisme libertaire. Notre présent, c’est l’auto-organisation et l’autogestion dans les luttes comme dans la vie, sans délégué, sans leader et sans pouvoir. C’est pourquoi, nous appelons à la solidarité. Solidarité entre les salariés en lutte dans les entreprises, entre les chômeurs et les salariés, entre les fichés et les sans-papiers, entre les légaux et les clandestins, entre tous les exploités. Etudiants, salariés, précaires, chômeurs, résistants au travail, exclus de tout, unissons nos luttes !
[pour accéder à ces textes cliquer sur
http://www.cntaittoulouse.lautre.net/ar ... article=88]
Voter est ce agir , p1
La violence des masses est-elle contre-révolutionnaire ?, p2
Le syndicalisme doit-il être non-idéologique ?, p3
Les syndicats réformistes sont-ils un "mal nécessaire" ?, p4
L’unité, avec qui ?, p5
Comment de telles structures doivent-elles fonctionner ?, p6
Qui a besoin de la représentativité ?, p7
Que représentent les revendications immédiates ?, p8
Quel mode d’organisation construisons-nous ?, p9
Texte sur l'organisation proposé par les compagnons russes et traduit par les compagnons de Caen :
Organisation révolutionnaire et révolution sociale
COMMUNISME ANARCHISTE
Nous sommes « communistes » au sens non vulgaire et non caricatural, à l'inverse de ce qui apparaît à tout bout de champ dans les pages de livres d’histoire et des médias (« régime communiste », « Etat communiste », « parti communiste », etc.). Le véritable communisme est d’essence anarchiste : antiétatique (affirmation de la disparition de l’Etat) et anti-autoritaire. Cela signifie la commune libre et l'association des individus. Quand les opprimés et les exploités décident ensemble, dans les assemblées générales, comment ils vivent et ce qu'ils font pour s’entraider. Quand ils utilisent et mettent en commun par la collectivisation et la socialisation tous les biens et les produits de la terre, selon les mots du poète anarchiste du XVIIIème siècle, Sylvain Maréchal : « On utilise la lumière du soleil qui brille pour tous. » Malheureusement, en 1917, le sens de ce terme a été détourné et dénaturé par les bolcheviks, devenant ensuite la risée du reste du monde.
ASSEMBLEES GENERALES, PIERRE ANGULAIRE DE LA SOCIÉTÉ LIBRE
Nous sommes « communistes » dans nos idées, dans le but pour lequel nous œuvrons ; nous le sommes également dans notre lutte même. Nous sommes convaincus que, seules, les assemblées générales des usines, des services et des habitants de quartiers ou de localités doivent décider comment organiser les grèves (ou les révoltes), les manifestations et les meetings ; comment résister face à la répression des forces coercitives du système. Elles doivent décider, elles-mêmes, sans les représentants autoproclamés des partis, des syndicats, des députés ou des juges. C’est-à-dire rejeter toute forme de bureaucratie. De telles assemblées générales souveraines sont un gage de succès dans la lutte actuelle, mais aussi un prototype, voire une pierre angulaire de la société libre.
Anarchistes, si vous êtes pour les assemblées générales, puisque vous y voyez une pierre angulaire de la société libre, pourquoi considérez-vous nécessaire la création de « l'organisation anarchiste ouvrière » ? Le lecteur peut alors se demander à quoi servent de telles assemblées.
Commençons par le simple constat que les assemblées générales sont très rares dans la Russie contemporaine. La lutte est menée et conduite, ici, le plus souvent par les politiciens des partis et les bureaucrates syndicaux. Leur comité syndical décide de tous les aspects de la grève. Les ouvriers ne se réunissent que pour confirmer les décisions déjà prises par ce comité syndical. D’après eux, la masse, « incompétente », n'est pas capable de s’organiser par elle-même – leur opinion est, hélas, devenue banale. Brisons cette triste tradition coûte que coûte ! C’est pour cela qu’il est d'une importance vitale d’unir les opprimés et les exploités qui défendent le principe de souveraineté des assemblées générales.
Cependant, ces assemblées générales seules ne suffisent pas à ce jour, ce d’autant plus qu’elles ne se réunissent que lorsqu’une grève sérieuse éclate. Le pouvoir se manifeste très vite par les représentants des partis et des syndicats. Ceux-ci arrivent à prendre toutes les décisions sur la conduite de la lutte. Ce sont eux qui parlent, délibèrent et négocient avec les patrons et les autorités pour conclure des alliances sur les dos des travailleurs... Les opprimés et les exploités ne deviennent donc que des figurants, comme toujours sous le capitalisme. Outre ce phénomène, les masses « abdiquent » parfois même de leur souveraineté, confiant le soin de penser et de décider aux petits chefs improvisés et aux bureaucrates syndicaux.
Pourquoi ces choses se passent-elles ainsi ?
Les assemblées générales sont généralement un lieu où se prennent les décisions, mais elles ne sont pas une fin en soi. On peut prendre des décisions très différentes, dans cette agora, qui sont contradictoires, voire incompatibles avec les intérêts des exploités et des opprimés en lutte. La forme est fondamentale, le contenu aussi, comme leur harmonie. Car le contenu des décisions est déterminé par ceux qui y participent par leurs besoins, leurs désirs, leurs idées et leurs convictions. Tout ceci dépend d'eux.
Bien sûr, l'homme est un être social (c’est sa spécifié biologique, si on veut). Son comportement est évidemment structuré par de multiples rapports qui peuvent impulser une profonde entraide et la solidarité. Mais les millénaires d’autorité, de domination et de propriété ont gravement déteint sur sa personnalité. Grâce à des vecteurs idéologiques (concurrence à outrance, poursuite d’avantages privés, égoïsme bestial, conformisme plat et consumérisme pervers), le capitalisme a largement contribué à aller dans cette direction. De plus, aujourd’hui, une fraction significative des exploités et des opprimés est prête à échanger sa liberté contre du confort, à se contenter des miettes acquises au prix d'efforts minimaux et, autant que possible, sans recourir à la lutte. Elle ne veut en aucun cas rompre avec le capitalisme.
Par conséquent, si nous voulons que les assemblées générales restent un lieu libre et indépendant, pour que les exploités et les opprimés soient maîtres de leur lutte et de leur destinée, tous les partisans de ce choix doivent s'unir résolument afin de le défendre. Pour mener à bien cette ambition, nous avons besoin d’une organisation révolutionnaire qui unit dans ses rangs les opprimés et les exploités qui veulent lutter consciemment pour le triomphe de la liberté, de la solidarité et de l'acratie. Si, dès à présent, peu de personnes rejoignent cette organisation révolutionnaire, nous sommes persuadés que nos idées convaincront tôt ou tard, dans un premier temps, une fraction significative des opprimés et des exploités.
NI PARTI NI GROUPE SPECIFIQUE IDEOLOGIQUE
Est-ce que ça signifie que les partisans du « communisme libre » doivent créer un parti politique pour lutter contre le capitalisme sous toutes ses formes ?
Le mot parti contient en lui-même ce que nous refusons. Il signifie ni plus ni moins qu’une « parti-e » du peuple agit pour défendre ses propres intérêts de classe. Un parti se forme par ceux qui prétendent aux postes de chefs afin d’être des représentants institués. Ceux-ci veulent que les exploités et les opprimés leur confient le rôle de conduire la lutte. Les membres d’un parti agissent toujours selon les instructions venues d'en haut, même quand, par exemple, ils agissent à la base en direction du milieu populaire. – « Confiez-nous la représentation de vos intérêts. Nous ferons alors… » disent-ils aux opprimés et aux exploités.
Peu importe de quel parti il s'agit, parlementaire, d'avant-garde ou les deux. Dans le premier cas, les dirigeants tentent de représenter les intérêts des différentes classes de la société en promettant tout et n’importe quoi, mais en ne satisfaisant exclusivement que les détenteurs de la richesse et du pouvoir. Dans le deuxième cas, les dirigeants s’autoproclament comme une minorité éclairée du peuple, une élite naturelle qui n'est pas comprise et estimée par les maîtres du moment. Cependant, les objectifs et les tâches de ces partis sont toujours les mêmes : s'emparer du pouvoir, installer un gouvernement et abandonner continuellement, au final, les intérêts des opprimés et des exploités.
Nous n'avons pas l'intention de construire un parti politique. Nous ne voulons pas rester non plus un groupe idéologique de propagande qui se limite à la diffusion simple de nos idées, bien que nous soyons parfois forcés de commencer de cette manière. C'est trop peu pour nous de fréquenter la masse là où elle se trouve et de lui parler. Il est insuffisant pour nous d'aller aux meetings et aux assemblées générales des grévistes ou des habitants. Nous ne voulons certainement pas être un groupe idéologique qui produit des analyses, en synthétisant l'expérience de la lutte et en faisant la leçon aux frères de classe - guidés et dirigés de ses hauteurs scientifiques ou culturelles avec plus ou moins de morgue.
La théorie est morte sans la pratique. La conceptualisation pure dans une tour d`ivoire est impuissante sans une réelle confrontation dans le champ social, d’où l’on dégage l’enseignement de l’expérience. Des idées (a fortiori les nôtres, celles du « communisme anarchiste ») ne peuvent qu’avancer dans le monde que lorsqu’elles sont capables de générer une force sociale. Cela sous-entend, logiquement, que le mouvement social reprenne à son compte plusieurs de nos idées telles que l’acratie et l’action directe, avec l’idéal de liberté. Nous aspirons à ce que le mouvement social détruise ce système pour le remplacer par un nouveau.
La lutte contre le monde actuel de l’autorité, de la domination, de l’exploitation et de l'injustice commence en résistant contre chaque atteinte à notre vie et à notre liberté : des grèves pour l'augmentation du salaire, la diminution du temps de travail, la réduction de notre exploitation, par conséquent, et l’accroissement du temps libre, pour notre auto-développement ; des rassemblements contre la construction de maisons pour les riches et contre la replanification commerciale des quartiers où nous habitons ; de l'opposition contre la construction et l'installation des industries produisant des énergies nuisibles à notre santé et à la nature. Autrement dit, elle commence par des actions au moyen desquelles les opprimés et les exploités défendent leurs droits et leurs intérêts de classe, jusqu`à pouvoir changer le système social.
Cela concerne avant tout la sphère du travail, qui nous asservit à chaque instant. C’est-à-dire dans la place que nous occupons au niveau du procès de fabrication, de production et de reproduction du capital (le lieu où nous vivons et où nous faisons nos études)... Notre absence de droits se trouve là où demeure le fondement de notre esclavage de tous les jours : l’extraction de la plus-value placée centralement dans l'immense mécanisme totalitaire de notre humiliation et de notre servitude. Nous passons la plupart de notre vie au travail, en vendant notre corps et notre cerveau pour un maigre salaire. Nous dépensons, ensuite, le reste du temps pour reprendre un peu d’haleine, nous détendre, bien dormir, nous mettre en « ordre relatif » et repartir afin d’être plus productifs et rentables. Nous sommes ravalés au rôle d'une machine qui est juste l’appendice d’autres machines de métal et de plastique. C'est précisément là où nous créons la plupart des biens indispensables pour la vie que nous dépendons totalement de n'importe quel caprice de nos maîtres (patron ou chef), qui usurpent les biens sociaux réalisés par nous-mêmes à leur seul profit… C'est pourquoi nous tentons de mettre la sphère du travail (l'entreprise ou le service où nous travaillons, l'école ou l'université où nous étudions) au centre de notre résistance contre le capital et l'Etat, qui nous oppriment, sans nier pour autant tous les autres aspects de la domination : le consumérisme, l’enfermement, la religion, la famille, etc.
PAS DE SYNDICAT SANS IDÉOLOGIE
Quelqu'un pourrait nous suggérer d'entrer activement dans un syndicat ou d’en fonder un nouveau ? Nous devons répondre « non » !
Les syndicats ont émergé au XIXème siècle pour remplacer le plus souvent les associations des producteurs (les corps de métiers ou les unions), dissoutes et détruites par le capitalisme. En s'unissant dans les unions selon les professions, les ouvriers ont tenté de s’entraider dans le travail et la vie. Beaucoup de ces unions ont justement agi comme des sociétés de résistance en luttant pour l'augmentation des salaires, l'amélioration des conditions de travail et la diminution du temps de travail. Ces ouvriers ont également agi souvent de manière révolutionnaire, en menant des grèves agitatrices ou des grèves générales. Ils ont aussi favorisé l’émergence d’une culture ouvrière qui s’opposait au capitalisme. Car elle proclamait clairement et ouvertement une finalité révolutionnaire.
Néanmoins, toutes les organisations syndicales, y compris même les plus révolutionnaires, ont toujours eu une faiblesse. Elles ont été conçues en partant des conditions matérielles des travailleurs dans la société existante. Certes, celles-ci étaient liées au contexte d’horrible misère des deux siècles précédents. Le capitalisme n’entendait satisfaire aucun besoin des travailleurs, jusqu’à ce qu’il fût mis au pied du mur, à savoir : la possibilité d’en finir avec lui. Toutefois, cette épreuve a été perdue par les travailleurs. Il s’est trouvé que le capitalisme, dans sa variante industrielle, s’est restructuré par l’avènement du fordisme et du taylorisme. Ces derniers se sont caractérisés par « une production impersonnelle de masse », fondée sur le découpage et le chronométrage des tâches (parcellisation), l’apparition des chaînes ou des lignes de montage, etc. En se passant d’un certain « savoir-faire technique » des ouvriers, les capitalistes pouvaient donc réduire les frais de production. Des produits standards ont commencé à envahir le marché, en stimulant le jeu de l’offre et de la demande. La bourgeoisie humaniste et progressiste (via l’Etat) a été capable d’accepter un certain nombre de revendications immédiates des ouvriers. Elle y a parfaitement trouvé son compte : le taux de productivité s’est intensifié au maximum tout en pressurant davantage la force de travail par une diminution du temps de travail ; la masse salariale s’est élevée, tout en conservant et en réalisant d’énormes gains. Le mieux-être des travailleurs n’a pas forcément engendré la destruction du système.
En ne restant que dans le cadre de ce dernier, au lieu de lutter pour une autre société, les syndicats se sont également ouverts aux opprimés et aux exploités possédant des convictions très différentes, qui ne voulaient pas nécessairement risquer une rupture avec le capitalisme et l’Etat, préférant même chercher des maîtres plus conciliants, comme les chefs des partis socialistes, puis les bolcheviks. En confiant la lutte pour leurs intérêts aux mains de ces aventuriers avides de pouvoir, les membres des syndicats se sont limités volontairement à la défense du niveau de vie : le pouvoir d’achat (si l’on préfère). Une dualité a ainsi émergé : la lutte politique aux partis et la lutte économique aux syndicats. Ces derniers se sont peu à peu réorganisés selon le même schéma de la représentation parlementaire. Une bureaucratie a grandi et est devenue omnipotente à l’intérieur des organisations syndicales. Ces membres ont été rabaissés à de simples figurants : payeurs de cotisations et exécutants de décisions prises par la bureaucratie. Finalement, les syndicats sont aujourd’hui des appareils idéologiques d’Etat, bien qu’ils s’en défendent, soi-disant, au moyen du neutralisme idéologique (même le syndicalisme révolutionnaire).
Nous ne voulons pas de ce syndicalisme revendicatif qui négocie uniquement un meilleur taux de la valeur de la force de travail. Nous refusons de nous contenter de l'amélioration simple de notre situation d’esclave moderne. Nous n’acceptons pas que l’on parcellise, fragmente et cloisonne la lutte contre le système. L’idéologique, le politique, l’économique, le culturel… sont interdépendants, consubstantiels, voire dialectiquement et transversalement liés. Nous souhaitons vivre non seulement mieux, mais aussi autrement. Nous voulons juste être libres !
UNION OUVRIERE À FINALITÉ COMMUNISTE ANARCHISTE
L'organisation révolutionnaire que nous voulons construire n'est ni un parti et ni un syndicat. Elle est dans son mode d’organisation une union (ou association) ouvrière, rassemblant les travailleurs qui résistent contre l'exploitation et l'oppression de tous les jours, dans le cadre des revendications immédiates (énumérées précédemment), ces dernières n'étant pas une fin en soi. L’union ouvrière - ou plutôt, « sociétés ouvrières de résistance » - ne sont pas fondées uniquement que sur celles-ci. Elles sont seulement un moyen pour qu’ils prennent conscience de leur subjectivité (une classe en soi et pour soi), lorsqu’ils font preuve de solidarité et d’entraide pendant la lutte, lorsqu’ils en viennent à remettre en cause l’autorité, l’oppression, la propriété, l’inégalité, etc.
En défendant de front tous leurs droits, les travailleurs pourront seuls surmonter l’égoïsme, acquérir la dignité humaine en se réveillant de la léthargie séculaire et en se rendant compte aussi qu’il faut en finir entièrement avec le système capitaliste. C`est pourquoi nos sociétés ouvrières de résistance (professionnelles et interprofessionnelles) sont en même temps des organisations idéologiques dont la finalité est le « communisme anarchiste ».
Nous sommes donc pour l’union ouvrière qui regroupe les travailleurs pleinement conscients des principes du « communiste anarchiste ». C’est-à-dire qu’ils sont libres de toute forme de bureaucratie, de politicaillerie et d’arrivisme. Toutes leurs décisions sont prises dans les assemblées générales ou à l'échelle supérieure d'un niveau local par leurs mandatés. Ces derniers sont seulement la « voix » de ceux qui les ont désignés.
Ses unions ouvrières ont la vocation de réaliser un travail idéologique de propagande et culturel pour diffuser les principes et la finalité du « communisme anarchiste », en paroles et en actes. Ces unions ouvrières doivent être en capacité de préparer, mener des grèves et autres actions contre le joug du capital et de l'Etat. Notre but est que les travailleurs s’imbibent des positions du « communisme anarchiste », qu'ils commencent à penser et agir comme tel, indépendamment de nos unions ouvrières.
Alors, les assemblées générales créées par eux - aujourd’hui si rares et si instables - peuvent se transformer, dans le futur, en des structures régulières, constantes et permanentes issues de l'auto-organisation et de l'autogestion sur la base du communisme libre. Nous appellerons celles-ci les conseils, les soviets ou les assemblées populaires (selon les us et coutumes de chacun). Alors, en nous inspirant des idées et des principes du « communisme anarchiste », nous, les exploités et les opprimés, irons au grand soir, à l'assaut ultime des bastions de ce vieux monde.
Vadim, du KRAS-AIT Moscou avec la collaboration de la CNT-AIT Caen.