Revendications immédiates et projet utopiste

Sommier théorique et affinités idéologiques !

Messagepar peyo » Lundi 25 Juin 2007 14:38

Anonymous a écrit:et si ma tante en avait on l'appelerait mon oncle ...

Tu passes ton temps à hurler, quand on de donne des éléments factuels (reproduction de journaux, extraits de site web, ...) "vous n'argumentez pas" et patin coufin ...

Par contre tes démonstrations sont appuyées sur des ragots (le moustachu de périgueux qui distribue du pinard dans les manifs ...) ou sur de la politique-fiction comme ci dessus.

Peyo, le roi de la Nov-Langue (la guerre c'est la paix, la liberté c'est l'esclavage) ...



juste pour te faire comprendre que ce ne sont pas les grandes idées qui ont conduit à la revolution en russie. idem pour les guerres. avec l'armée de metier, les mobilisations anti guerre se sont raréfiées. tu pouvais mobiliser sur ce theme plus facilement que chacun risquait d'y aller.
peyo
 

Messagepar adrien » Lundi 25 Juin 2007 15:54

ha ? tu fais adhérer des gens à un truc idéologique en leur parlant seulement de base de classe, à eux de deviner l'idéologie derrière ??


Je ne suis pas d’accord avec la manière donc tu poses les choses. Un syndicat n’est pas un "truc idéologique". C’est un regroupement de travailleurs qui défend des intérêts communs. Cette association se fait sur une base professionnelle. En effet, la première chose que les travailleurs ont en commun ce sont les conditions d’exploitations qu’ils partagent sur leur lieu de travail. C’est donc à partir d’une nécessité matérielle : se défendre face au patron, que les travailleurs se regroupent et s’organisent collectivement et non à partir de discours idéologiques abstraits. Le fondement de l’adhésion syndicale est donc l’appartenance de classe plus que l’idéologie. Historiquement, à ma connaissance il n’y a jamais eu de regroupement syndical sur la seule base idéologique d’ailleurs. En revanche, il est évident que toute idéologique n’est pas absente du syndicat. Il y a une nuance entre dire : l’idéologie n’a pas sa place au sein du syndicat et l’idéologie n’est pas la base du regroupement syndical. Bien sur que l’idéologie est présente au sein du syndicat c’est tout d’abord nécessaire pour lutter contre une éventuelle bureaucratie. Ensuite, au cours de son évolution, il est évident que au sein du regroupement syndical des débats idéologiques se posent du fait d’actions communes, de liens avec d’autres groupes politiques. D’ailleurs il est logique qu’un militant libertaire défende au sein de son syndicat les idées anarchistes tout comme il est nécessaire que le syndicat fasse de la politique. Mais la base de l’adhésion syndicale c’est la solidarité face au patron et non une base idéologique.

Là où je ne crois pas être d'accord avec la CNT/AIT, c'est que son approche "globaliste" de la lutte rime avec unité organisationnelle pour elle.

Oui, dès que tu auras le temps, ca m'interesserai d'avoir ton point de vue là dessus.


Je pense que l’approche globaliste de la lutte qui est commune à tous les libertaires (et devrait même l’être à l’ensemble des révolutionnaires du fait de la nécessité d’articuler les types de revendications) n’implique pas l’unité organisationnelle. A chaque type de lutte, à chaque but, un type d’organisation est toujours plus adaptée qu’un autre. Par exemple, pour lutter face au patron le cadre syndical est plus approprié que le cadre politique. En revanche pour promouvoir le projet anarchiste, une organisation politique est plus adaptée. Dans le premier cas, le but recherché nécessite une organisation autour des revendications immédiates. Dans le second, autour de mots d’ordre révolutionnaire. L’existence de deux espaces organiques distincts pour présenter de manière complémentaire les deux types d’approches m’apparaît la solution la plus adéquate. Car vouloir concentrer les deux approches dans un même espace génère des frustrations (réformisme pour les uns, gauchisme pour les autres). L’important est de ne pas établir de hiérarchie entre les organisations et de ne pas être en contradiction entre revendications immédiates et révolutionnaires (ce qui suppose une interaction entre les deux lieux organisationnel).
(Sans oublier le principal risque avec l'unité organisationnelle qui est de retomber dans une sorte de Grand Syndicat Unique sur le mode du parti unique bolchévik. D'autant si le rôle post-révolutionnaire du syndicat est d'opérer une syndicalisation des moyens de production....)

Peux tu réduire la révolution russe à ce seul slogan ? Il y avait certe des revendications de pain mais il y avait aussi des revendications de liberté, contre l'autocratisme tsariste et surtout contre la guerre ... L'idéologie n'était pas loin ...

Si tu prends les processus révolutionnaires qui ont secoué l'europe en 1848, c'étaient aussi des revendications immédiates ... mais POLITIQUES (pour la démocratie).


Je ne réduis pas la révolution russe ce slogan, ni même à des revendications immédiates. Je dis en revanche que la révolution russe trouve son origine dans celles-ci. Ce sont à partir de ces revendications immédiates que se sont formées les revendications révolutionnaires. Et historiquement tous les processus révolutionnaires trouvent leur origine dans des revendications immédiates.

Sinon je pense avoir répondu à la fin de ton message plus haut.
adrien
 
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Messagepar douddu » Lundi 25 Juin 2007 18:22

Adrien,

Un syndicat n’est pas un "truc idéologique". C’est un regroupement de travailleurs qui défend des intérêts communs. Cette association se fait sur une base professionnelle.


Il est quand même grotesque d'adopter un ton si docte pour dire de pareilles conneries . il est de notoriété publique que le syndicalisme ne défend qu'une chose : Les intêrêts du patronnat et de l'état , ton postulat de base est faux .

Ensuite tu t'obstines a nous parler de syndicalisme alors même que ici nous sommes des anarchosyndicalistes c'est a dire, entre autres, des adversaires des syndicats , parcequ'ils ne sont rien d'autres que des rouages du systéme .

Ton ignorance du fait social va juqu'a sous entendre que des anarchistes pourraient militer au sein de ces syndicats . Ces gens là si libertaires soient ils , deviennent ipso facto des ennemis des exploités car au mieux ils cautionnent cette escroquerie et au pire ils y participent .
douddu
 

Messagepar douddu » Lundi 25 Juin 2007 18:49

Je ne réduis pas la révolution russe ce slogan, ni même à des revendications immédiates. Je dis en revanche que la révolution russe trouve son origine dans celles-ci. Ce sont à partir de ces revendications immédiates que se sont formées les revendications révolutionnaires. Et historiquement tous les processus révolutionnaires trouvent leur origine dans des revendications immédiates.


Idem que précédémment les narodniki, qui ont ensuite donné naissance aus SR de gauche , étaient originaire de la grande bourgeoisie moscovite ; ils étaient mus par des nobles idéaux , qui apparemment dépassent largement ton entendement .

Le mécanisme pyramidal que tu décris traduit bien que tu hiérarchises les aspirations immédiates et les aspirations révolutionnaires, (c'est ce que dis federica , ainsi on va droit a une orga a deux niveaux, ceux qui sont conscients et les autres qui luttent pour des miettes ) .

en introduisant cette dichotomie tu renvoies la révolution aux calendes grecques . Tu laisses du temps au pouvoir, chose précieuse en matiére de lutte sociale . Comme les réformistes savent si bien le faire . Par exemple , c'est l'action fondamentale de la social démocratie allemande , laquelle a commencé par exterminer les révolutionnaires pour finir par abdiquer devant hitler .

Tiens a propos , les marins de Kiel , le fer de lance de la révolution de 1918 ne sont jamais allé au front , par contre ce sont avec les troupes revenues du front que les opérations de maintien de l'ordre on été menées a berlin .

On peut donc se demander en quoi le projet révolutionnaire ne serait pas une revendication immédiate : Ne serait ce que pour une question de survie de l'humanité .
douddu
 

Messagepar peyo » Lundi 25 Juin 2007 19:03

douddu a écrit:Adrien,

Un syndicat n’est pas un "truc idéologique". C’est un regroupement de travailleurs qui défend des intérêts communs. Cette association se fait sur une base professionnelle.


Il est quand même grotesque d'adopter un ton si docte pour dire de pareilles conneries . il est de notoriété publique que le syndicalisme ne défend qu'une chose : Les intêrêts du patronnat et de l'état , ton postulat de base est faux .

Ensuite tu t'obstines a nous parler de syndicalisme alors même que ici nous sommes des anarchosyndicalistes c'est a dire, entre autres, des adversaires des syndicats , parcequ'ils ne sont rien d'autres que des rouages du systéme .

Ton ignorance du fait social va juqu'a sous entendre que des anarchistes pourraient militer au sein de ces syndicats . Ces gens là si libertaires soient ils , deviennent ipso facto des ennemis des exploités car au mieux ils cautionnent cette escroquerie et au pire ils y participent .



c'est edifiant. un anarcho syndicaliste, un anar, ne peut etre que l'ennemi des syndicats.
peyo
 

Messagepar douddu » Lundi 25 Juin 2007 19:18

Et je continuerai donc en rappelant le rôle du "syndicat le plus révolutionnaire" . En 1968 la CGT a fait rentrer les ouvriers dans les usines pour deux quignons de pain .

E 1944 et 1945 c'est toujours la CGT qui a remis le france au travail

pourquoi s'étonner ? elle a fait bien pire ! La CGT a rallié l'union sacrée en 1914 , guerre qui a fait deux millions de morts parmi les prolos français , des gamins âgés de 20 ans en moyenne !

briseuse de gréve en 1968, aile marchante de la bourgeoise en 1944 , carrément va ten guerre en 1914 . Voilà quel fut dans le siécle le rôle du plus grand syndicat français . Dois je parler de la JOC ? de LA CGC ?

les anarchistes qui depuis 1914 cautionnent cette mascarade, savent tout cela . Ils marchent sur deux millions de cadavres, sur les illusions perdues de 1944 et 1968 , ils sont des traitres a la classe ouvriére , ni plus ni moins .
douddu
 

Messagepar Federica_M » Lundi 25 Juin 2007 21:10

> tu pouvais mobiliser sur ce theme plus facilement que chacun risquait d'y aller.


Et rien de tel qu'un bon régime fasciste pour doper l'antifascisme tant que tu y es ... Peyo, palme d'or de la connerie poids lourd ...
Federica_M
 
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Messagepar peyo » Mardi 26 Juin 2007 5:58

Federica_M a écrit:> tu pouvais mobiliser sur ce theme plus facilement que chacun risquait d'y aller.


Et rien de tel qu'un bon régime fasciste pour doper l'antifascisme tant que tu y es ... Peyo, palme d'or de la connerie poids lourd ...



he bien oui, c'est comme cela dans la réalité pour qui analyse.
difficle de faire faire à des appelés ce que l'on peut obtenir par l'engagement. l'anti militarisme s'est cassé la gueule avec la fin du service militaire. il est beaucoup plus facile desormais d'envoyer des types en kakis en afghanistan et ailleurs. les types qui y vont y gagnent leur salaire, leur retraite et payent leur credit baraque en faisant ce "boulot". rien à voir avec le trouffion que l'on envoyait en algerie pour que dalle et dont les parents et amis se mobilisaient pour reclamer le retour.
mais pour ce que cela ne devienne pas trop couteux, il faut un peu de pauvreté pour trouver des volontaires à l'engagement pour pas cher dans les banlieues pauvres. c'est ainsi que l'arméee us recrute dans les ghettos et depuis peu à la sortie des prisons. en esperant que tu ais compris. :?
peyo
 

Messagepar Invité » Mardi 26 Juin 2007 16:11

> Et rien de tel qu'un bon régime fasciste pour doper l'antifascisme tant que tu y es

he bien oui, c'est comme cela dans la réalité pour qui analyse.


parce que tu appelles cela une analyse ???

Remarques je comprends mieux maintenant certains de tes posts ... Vive la politique du pire alors !
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Messagepar Invité » Mardi 26 Juin 2007 21:02

douddu, nous ne parlons pas de la même chose. Tu reprends selon moi la faiblesse du discours antisyndical qui consiste à amalgamer le principe du regroupement syndical et la bureaucratie syndicale. J'essayerais d'y revenir....
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Messagepar Un autonome » Mercredi 27 Juin 2007 11:43

Ce sujet de discussion se prénomme bien "Revendications immédiates et projet utopiste".

Et bien … Ce texte de Jean Picard ne peut que correspondre à ce sujet :

DES REVENDICATIONS A L’UTOPIE

Les revendications immédiates, c’est-à-dire celles qui visent à l’amélioration des conditions d’existences ou de certaines couches sociales, et cela dans le cadre capitaliste, apparaissent parfois comme contradictoires avec l’idée de révolution.
Première contradiction : négocier avec l’Etat et le patronat de meilleurs avantages consiste à négocier le taux d’exploitation. Cela ne participe pas à détruire la cause du « couple oppression/exploitation », c’est-à-dire le couple « Etat/patronat ». Négocier son taux d’exploitation, c’est soi-même autoriser la bourgeoisie à exploiter. C’est légitimer son oppresseur que de négocier avec lui la forme et le niveau de son oppression.
Deuxième contradiction : les revendications immédiates sont intégrables par le capitalisme. En restant dans la logique du capitalisme et, par contre coup, dans les possibilités qu’il offre avec un peu de soi-disant "réalisme et pragmatisme", on saura très vite ramener des revendications à un niveau acceptable, et là encore "réaliste et pragmatique". "Ne nous conduisons pas comme les extrémistes démagos !!!" n’arrêtent pas de nous répéter les bons syndicalistes respectables et responsables. Réalisme et pragmatisme doivent faire leurs œuvres pour conserver les revendications dans les limites possibles des contraintes de l’économie capitaliste. A savoir limiter les coûts salariaux pour que les productions soient compétitives sur le marché, maintenir des équilibres budgétaires afin de diminuer la pression fiscale, surveiller la balance des paiements, etc.
Troisième contradiction : les revendications immédiates peuvent sauver le capitalisme et sa bourgeoisie, lorsque les dynamiques de lutte rentrent dans une phase critique. En effet, l’agitation va obliger le patronat et l’Etat à lâcher de la monnaie. Celle-ci équivaut à faire des achats, donc à augmenter le pouvoir d’achat des ménages. Les dépenses des ménages vont stimuler la croissance qui, pendant un à deux ans, laissera croire à une embellie de l’économie.
La satisfaction de certaines revendications, puisque l’Etat et le patronat peuvent satisfaire les gens en lutte, ramènera la paix sociale, sauvant politiquement le capitalisme. En lâchant quelques miettes aux gens en lutte, la bourgeoisie espère sauver l’essentiel sachant qu’elle pourra reprendre petit à petit ce qu’elle aura lâché.
Le plus bel exemple récent, c’est Mai 1968 où le patronat et l’Etat, relayés par les valets du syndicalisme réformiste, se sont empressés de juguler l’action et la démocratie directe, la grève générale, la crise politique qui menaçaient le capitalisme, en octroyant des avantages jamais égalés : les fameux "Accords de Grenelle", ces derniers réduits à ce jour comme "peau de chagrin". Une fois le calme revenu, la bourgeoisie sait reprendre ses affaires : un peu d’inflation, une augmentation des impôts et de la productivité (cadences, horaires, automatisation, nouvelles organisations de la production) ; des restrictions salariales, les années suivantes, (salaires, prestations sociales, retraites, etc.) rogneront les avantages acquis. Profitant du calme et de la passivité, le patronat purgera ses entreprises des militants révolutionnaires, et renforcera l’emprise du syndicalisme réformiste plus "réaliste" et "consensuel".
Pourtant nous devons défendre, incorporer et agir avec la dynamique des revendications immédiates. La lutte revendicative peut être évolutive. On démarre sur du revendicatif mais on ne sait pas où cela va aboutir. Cela commence et peut évoluer ainsi : nous sommes dans une situation atone, peu de luttes, l’expérience et l’histoire du mouvement ouvrier ne sont plus transmises à de nombreux salariés. Politiquement, partis et syndicats n’entretiennent que méfiance. On ne croit pas à un changement profond, pire, il n’est pas dans la conscience de chacun d’hypothèses autres que la société présente. La norme comportementale admise et qui est défendue est celle de la classe dominante : l’individualisme est de règle, marqué par la désyndicalisation, la dépolitisation et un consensus social.
Mais voilà, l’oppression sous toutes ses formes gagne du terrain. Les difficultés s’entassent, les possibilités de faire son trou disparaissent, comme celles d’accéder aux échelons supérieurs de l’échelle sociale. La lutte pour la survie se généralise, le sentiment d’injustice grandit. Ras le bol, on n’a plus le choix, il faut se battre !
Le mécanisme psychologique qui conduit de la passivité à l’activisme s’enclenche. Comme nous sommes dans une phase encore réaliste, cause de la dépolitisation, les gens réclament au système en place la satisfaction de leurs exigences, ces exigences sont elles-mêmes, par réalisme, peu importantes, du moins au départ.
La phase revendicative s’enclenche. Pour peu que des succès soient, ici où là, enregistrés, d’autres réclament ces mêmes avantages, individuellement ou collectivement, d’autres luttes apparaissent, d’autres succès jouent sur le développement de ces luttes, bientôt, celles-ci pullulent, c’est la phase de généralisation. Pendant cette phase, les luttes revendicatives vont être placées devant un dilemme : soit chaque conflit progresse de son côté, sur ses objectifs propres, et par rapport à une défense catégorielle ou corporatiste, ce qui revient souvent à lutter contre d’autres catégories ou corporations et en définitive à lutter contre ses intérêts de classe, ce qui arrange bien le pouvoir ; soit la situation amène les gens en lutte (et les structures de lutte) à se croiser, se rencontrer, à débattre voire même à s’opposer et les revendications s’entrechoquent. Alors, si la situation est mûre tant au niveau social qu’au niveau de la maturité politique, l’unité doit et peut se frayer son chemin car I’unité est une nécessité vitale pour la dynamique des luttes.
Reste à formuler cette unité et le contenu unitaire ou unifiant. Il appartient à chaque organisation de souscrire à un soutien ou à un rejet de ce contenu revendicatif. Mais, à mon avis, l’unité revendicative des luttes ne peut se faire que dans l’optique d’une revendication qui soit généralisée, c’est à dire valable pour tous, égalitaire ou tendant vers l’égalité, rejetant tout ce qui n’est valable que pour une catégorie professionnelle. Ceci est un exemple de ce qu’un anarcho-syndicaliste doit défendre.
Je précise aussi que, pour nous, unité ne veut pas dire uniformité. Nous défendons le principe de l’unité dans la diversité (diversité des pratiques de luttes, des actions menées, des analyses par exemple...). L’important, c’est l’unité à la base des travailleurs, des chômeurs et des étudiants, dans des comités de lutte ou de grève autogérés et coordonnés sur des revendications elles aussi unifiantes.
La phase d’unification, si elle s’impose, modifie profondément la situation et la perception des choses. En effet, cela signifie que le chacun pour soi, le catégoriel, le corporatisme sont dépassés puisqu’il s’agit enfin de s’unir.
Cette exigence nécessite et induit par exemple que les collectifs de chômeurs ne se contentent plus de revendiquer pour eux quelques avantages, mais pour l’ensemble des chômeurs des droits nouveaux, pour les salariés et pour les étudiants idem. On ne se bat plus pour le droit au logement dans telle ou telle ville mais pour le droit au logement pour tous ; on ne réclame plus la gratuité d’inscription dans telle fac mais dans toutes les facultés ; on ne réclame plus de meilleures conditions salariales dans telle usine ou secteur d’activité mais pour l’ensemble des salariés : on se bat au niveau national pour des conventions nationales.
Cette politique unitaire doit amener la construction d’un front de lutte commune aux chômeurs, étudiants et salariés. L’unification modifie aussi les contenus revendicatifs : petits rapports de forces, petites revendications, gros rapports de forces, grandes revendications. Les revendications deviennent plus importantes, plus générales et exigeantes. Découvrant leur force et les moyens que donne l’unité, les luttes s’amplifient et se radicalisent. La lutte devient générale et ses techniques se multiplient, qui vont de la grève à l’occupation des usines, des facs, des administrations et, en passant, par toutes sortes de manifestations, jusqu’à la désobéissance civile, etc.
Cela gagne tout le système social, la situation devient critique et peut basculer dans une toute autre problématique. Les gens en lutte commencent à critiquer et rejeter à la bourgeoisie, ils s’attaquent à son fric, au système qui permet ce fric et leur oppression. La cause des inégalités, à savoir le capitalisme et l’Etat, est dénoncée. Les lois et organismes de ce dernier, les tribunaux, le Parlement, le gouvernement, la police, l’armée, les politiciens... sont saisis comme garants du système et, en tant que tels, conspués.
La phase de politisation dans laquelle nous entrons prépare d’autres combats. La bourgeoisie le sait et est tentée de laisser pourrir la situation mais cela risque de devenir dangereux. Il lui reste à jouer le jeu en cédant sur des revendications dans l’espoir de ramener le calme, car la rupture n’est pas encore consommée, nous sommes encore dans une logique revendicative (voir plus haut). Les syndicats réformistes accourent aux tables de négociations, voulues par le gouvernement et le patronat pour étudier avec eux les réponses à ces revendications. Soit les gens en lutte obtiennent satisfaction et le calme revient, soit ça coince, il n’y a pas d’accord et les désordres continuent. La situation devient prérévolutionnaire, les gens en lutte s’attaquent au gouvernement, à l’Etat, aux partis, voire aux syndicats réformistes. Les valeurs morales, éthiques de la bourgeoisie sont contestées, une contre-idéologie apparaît : solidarité, anti-étatisme, recherche d’être autrement et d’autre chose qui se traduit par une nouvelle signification de l’existence et des rapports sociaux, etc.
La phase idéologique est avancée. En cas d’échec des négociations, se préparent, et se tissent, les alliances. La bourgeoisie va tenter de faire bloc et elle le fera avec le patronat, les partis de droite, les hauts dirigeants des administrations et des corps d’Etat. La bourgeoisie décrète la mobilisation générale de tout ce qui peut la soutenir. Reste à bien appréhender les positions des pontes des partis de gauche et des bureaucrates des appareils syndicaux traditionnels impliqués dans ces luttes. En règle générale, la gauche politico-syndicale fera de la surenchère verbale, exigera de meilleures réformes et la satisfaction des revendications. Tout cela pour faire croire aux gens en lutte qu’elle soutient leurs exigences, qu’elle représente leurs intérêts. Si la masse en lutte se laisse duper, les réformistes vont utiliser leur influence pour orienter la lutte dans la voie légaliste et institutionnelle en proposant par exemple : l’idée d’un gouvernement d’union nationale (ou de salut public) de type "front populaire". Ce gouvernement dont l’objectif sera, grâce à quelques réformettes, de distribuer quelques miettes et autres menus avantages aux gens en lutte dans l’espoir que ces concessions et la promesse de futures lois, censées leur apporter entière satisfaction par les moyens légaux, ramèneront le calme.
Parallèlement, cette gauche tentera de limiter la lutte aux seules revendications matérielles et immédiates et essayera de diviser les gens en lutte. Par le biais des syndicats, elle jouera de son influence pour éviter les liaisons entre salariés, étudiants, chômeurs.... bloquant toutes les actions de solidarité, limitant les objectifs de lutte aux entreprises, dénonçant l’aventurisme révolutionnaire. Il ne reste plus aux gens en lutte qu’à stopper leur action et à attendre monts et merveilles de ce gouvernement populaire qui, les luttes se désagrégeant, pourra tranquillement trahir ses engagements.
Car la gauche politico-syndicale n’a pas pour but d’abattre le capitalisme et ses inégalités. Cette gauche n’est qu’une composante de la bourgeoisie comprenant des élus, des permanents syndicaux : tous ceux qui peuvent se reconnaître membre d’une petite et moyenne bourgeoisie. Ses intérêts matériels dépendent donc du cadre capitaliste, une révolution sociale libertaire ôterait avantages et pouvoirs aux membres de cette classe. En dernier recours, elle combattra toute poussée révolutionnaire et s’alliera aux forces conservatrices. Si la gauche ne suffit pas à canaliser les luttes dans le maintien de l’ordre établi, la bourgeoisie pourra toujours se lancer dans l’aventure dictatoriale avec ou sans la bénédiction légale du parlement.
La phase idéologique ayant, si possible et en connaissance de cause, fait son chemin, les temps sont favorables pour mettre en place les moyens concrets d’une autre société (et donc d’une autre culture) capable de satisfaire les nouvelles exigences matérielles et éthiques. La mise en place de cette autre société pourrait être appelée la phase utopique. Bien évidemment, ce processus peut aboutir ou bien capoter, mais rien ne permet de prévoir à l’avance son issue.
Il est clair que ce raisonnement par phases n’est là que pour illustrer ma vision des choses. Dans la réalité, les différentes phases se mêlent, se chevauchent, s’interpénètrent. Chaque phase contient déjà en elle-même une partie des éléments qui peut l’amener au niveau de développement supérieur. La lutte connaît certes des avancées mais aussi des reculs. Les grèves générales peuvent se succéder ou bien laisser la place à un mouvement extrêmement diffus et tenace qui pratique le harcèlement sur une grande échelle. Les hypothèses sont évidemment multiples. La réalité et les conditions concrètes de la lutte des classes nous éclaireront sur la conduite à tenir.
VIVE LA GREVE GENERALE,
VIVE LA PHASE UTOPIQUE
Ainsi, nous voyons bien qu’au départ la logique revendicative n’est pas pour ou contre le capitalisme, elle serait même plutôt liée au cadre existant. Mais la logique revendicative, en évoluant, peut déboucher sur une crise sociale majeure.
L’autre aspect des revendications immédiates, c’est le refus d’attendre des lendemains qui chantent et les grands soirs, le refus des promesses de paradis de toutes sortes, le refus de mots d’ordre du genre "soyez sages et patients, demain ce sera mieux". Ce stoïcisme social consiste en définitive à vouloir maintenir le cadre social.
La revendication immédiate modifie la base matérielle des sociétés et des individus et, par là même, leurs idées et références. Car je suis de ceux qui pensent que la base matérielle des sociétés, des collectifs et des individus jouent dans leurs perceptions et représentations des choses. Je ne pense pas que la grande misère signifie révolte et grande conscience révolutionnaire. Partant de l’adage "ventre affamé n’a point d’oreilles", je suis convaincu que la grande misère ne laisse pas place à des analyses profondes, car celle-ci rend trop faible, trop démuni, trop astreint à la survie. Il faut un certain degré de confort matériel pour se préoccuper d’autre chose que du bol alimentaire.
Par exemple, il est aisé de constater que, par nécessité de production durant les deux dernières guerres, nombre de femmes quittèrent leur foyer, découvrant ainsi la bêtise de l’idéologie patronale qui faisait de l’homme le salarié et l’unique ressource financière de la famille. Elles découvrirent qu’elles pouvaient faire des choses similaires : l’entreprise, le salariat, et surtout la liberté de ne point être asservies à leur seigneur de mari. Du fait de la croissance, la féminisation de la main d’œuvre va s’accélérer en apportant aux femmes une certaine autonomie économique et plus d’indépendance. Les idées dites féministes n’avaient plus qu’à se répandre, d’où il s’ensuivit de sacrées modifications idéologiques et culturelles.
Le confort sanitaire a modifié l’idée d’hygiène et la perception corporelle, le confort médical, lui, a accentué la vision de la santé, des soins et du rôle de la protection médicale, de son éthique.
La réduction du temps de travail et la diminution relative de sa pénibilité nous fait cogiter sur le temps libre, les loisirs et le plaisir. Essayez aujourd’hui, d’expliquer que nous ne sommes là que pour produire et que le loisir est péché, je vous laisse deviner le résultat.
Que se soit au niveau individuel ou des couches sociales d’une société, la situation matérielle influe directement sur leurs idées, leurs perceptions et leurs représentations. On ne pense pas et on ne projette pas les mêmes idées à l’âge de pierre, du bronze ou de l’ordinateur. On n’a pas la même perception de la pauvreté en occident ou en Afrique, le jugement sur la question est forcément lié au contexte économique des pays.
Reste à déterminer ce qui doit être défendu, rejeté ou modifié au niveau matériel et idéologique. Vouloir rejeter, se détourner, voire refuser des revendications immédiates et, par là même, refuser d’agir sur les bases de la vie matérielle des travailleurs et des opprimés est à la fois criminel, illusoire et dangereux.
Criminel parce que niant le droit des plus opprimés à vivre mieux en refusant de saisir le rapport évolutif des luttes revendicatives dans les consciences. Nier le rapport « situation matérielle/concept idéologique » ne me semble que trop ambigu pour un syndicaliste.
Illusoire parce qu’une organisation révolutionnaire qui rejetterait tout aspect revendicatif n’aurait aucun impact dans des luttes sociales de classe et, de ce fait, ne servirait à rien. Car les masses se passeraient des services d’une telle organisation, en continuant quand même leurs luttes revendicatives.
Dangereux parce qu’une pareille organisation serait attaquée par ceux-là même qu’elle entendait défendre, pire même, elle constituerait une alliance de fait avec les contre révolutionnaires par son non-engagement.
Nous voyons bien la nécessité de la lutte revendicative, avec ses pièges, ses dangers, mais aussi avec ses perspectives positives. Seules les revendications qui s’écartent de nos principes tactiques et théoriques doivent être combattues. Tout ce qui concoure à l’amélioration des conditions de vie générales, au niveau économique, psychologique, physique... doit être entrepris. Tout ce qui tend à réduire le taux d’exploitation, même s’il ne le supprime pas, doit être poursuivi. Tout ce qui permet une société divisée en classes sociales doit être combattu.
Un autre constat peut s’imposer si la lutte revendicative suit plus ou moins notre logique de phases par accumulation d’expériences . Il ne suffit pas de plonger les gens dans telle ou telle situation pour que spontanément les réponses appropriées aux objectifs suivent mécaniquement. Il faut tenir compte du fait que l’individu agit et pense en fonction de ses objectifs, de ses références idéologiques personnelles et ambiantes, de son histoire relationnelle et sociale qui marque sa psychologie.
Il ne faut pas oublier que tous les individus n’ont pas la même expérience du conflit social. Nous avons ceux qui ont vécu des luttes radicales, mais limitées par le nombre des participants, restant à la phase des revendications et ceux qui ont vécu soit des révolutions ou des grèves généralisées du type « Mai 68 » n’en tirent pas les mêmes conclusions.
La capacité des politiciens à traiter les problèmes (manipulation, intox...) ou la manière de les traiter (répression...) interviennent également dans les processus de lutte. Aujourd’hui se pose à chaque génération la question des liens qui permettent de communiquer l’expérience des générations précédentes, car c’est l’accumulation et la transmission de toutes ces expériences qui rend possible d’adopter une unité théorique et tactique de masse.
Fort heureusement, l’acquisition de valeurs et de connaissances militantes est liée à l’expérience collective et historique. L’environnement social, économique et idéologique d’une classe marque la conscience de chaque individu de celle-ci. Voilà pourquoi on parle de traditions de luttes ouvrières, syndicales, politiques, de bastions ouvriers ou bourgeois, de milieux révolutionnaires ou réformistes.
Bien sûr, l’évolution du capitalisme, la disparition des vieux sites industriels font voler en éclats les lieux et les moyens de transmission de ces expériences de bagarres, ce qui rend très difficile la maturation, la quantification de ces différentes expériences de la lutte des classes, surtout à partir d’une problématique rupturiste. La brièveté des luttes et des structures (faute de perdurer) rend difficile le lien transformationnel et l’accumulation d’expériences nouvelles.
Le syndicalisme réformiste replié dans ses entreprises ne défend plus que de menus avantages. Il ne se soucie volontairement que très peu de faire jouer au mouvement syndicaliste ce qui fit son intérêt et son originalité. Après avoir détourné le syndicalisme de son véritable but, à savoir la défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs et leur émancipation par l’abolition du salariat et du capitalisme, les réformistes ont vidé le syndicat de son autre fonction vitale. Pour nous, les syndicats doivent être comme à leur origine des lieux d’éducation populaire et ouvrière ; c’est à dire des lieux où l’on doit défendre les valeurs, les principes et les idées véritablement socialistes et révolutionnaires.
Il reste maintenant à poser la question de savoir quelle est l’organisation syndicale capable de contester le capitalisme tant au niveau économique, politique, qu’idéologique, c’est-à-dire globalement ; capable d’assurer les liens transgénérationnels, l’autonomie des forces progressistes et l’indépendance vis-à-vis des partis politiques, sans aucune compromission avec les politiciens et les syndicalistes vendus à la bourgeoisie ; capable d’être présente à chacune des phases de la lutte et suffisamment pédagogique pour préparer aux tâches présentes et aux différentes phases successives.
À ce jour, je ne connais qu’un seul concept qui satisfasse ces exigences, c’est l’anarcho-syndicalisme, qu’une seule organisation qui le porte et le défende : la Confédération Nationale du Travail - section française de l’association internationale des travailleurs.
Un autonome
 

Messagepar Un autonome » Mercredi 27 Juin 2007 11:58

Il n’y a aucune illusion à nourrir sur les syndicats ! Ceci est un extrait du cahier 38 (Désobéissance civile et autonomie populaire : les autoréductions en Italie)

I. RVI (Renault véhicule industrie), grève de 1979 :

J’ai été amené, au cours de mes recherches, à feuilleter le mémoire d’histoire de Cédric Leroy, consacré à la décennie des grèves ouvrières : 1968-79. Je me suis arrêté sur le passage d’une grève à RVI-Caen, menée en mai-juin 1979, durant laquelle avaient flotté des drapeaux rouges et noirs. J’ai eu la chance de croiser un ancien militant du comité des travailleurs révolutionnaires, cité dans son mémoire. Cet individu m’a accordé un entretien, en juin 2005, pour témoigner de cette persistance à l’expression de la radicalité et de l’autonomie dans le mouvement ouvrier.
Paul Anton : En quelle année as-tu intégré RVI ?

M.B : 1974, au mois de juin, en tant qu’ouvrier spécialisé .

Paul Anton : Pourquoi as-tu entrepris cette démarche ?

M.B : J’ai décidé de quitter Moulinex pour rentrer à RVI, devenue une citadelle rouge depuis les événements de Mai 68. D’importantes luttes revendicatives se développaient.

Paul Anton : Est-ce qu’il y a eu une autre raison essentielle ?

M.B : La grande majorité des jeunes salariés de cette usine de camions ont été radicalisés par les événements de Mai 1968.

Paul Anton : Tu as constaté le résultat de la mixtion de la décentralisation, du baby-boum et du modèle fordiste.

M.B : Exact !

Paul Anton : Avais-tu une expérience de lutte ouvrière ?

M.B : J’en avais une puisque j’avais déjà travaillé à Moulinex où j’ai participé à plusieurs luttes très dures. Je tenais à préciser que j’avais été, dans un premier temps, un jeune lycéen imprégné par les événements de Mai 1968 : les manifestations impressionnantes, les occupations d’usines, les affrontements violents…

Paul Anton : As-tu rejoint un syndicat pendant cette époque ?

M.B : Oui, j’ai adhéré à la CFDT peu de temps après mon entrée à RVI.

Paul Anton : Ta prise de carte à la CFDT paraîtrait étonnante aujourd’hui.

M.B : Sûrement ! Mais, la CFDT était très combative à cette période. Un courant autogestionnaire existait même en son sein !

Paul Anton : Si nous revenions à RVI, que tu m’expliques la mise en place du comité des travailleurs révolutionnaires !

M.B : Volontiers. On observait que les syndicats n’incitaient pas à la lutte et qu’ils entendaient faire exprimer le mécontentement vers un jeu de soutien au programme commun de la gauche. Leur principal objectif était de le réorienter dans le mécanisme électoral et parlementaire pour mieux limiter, annihiler complètement, le recours à l’utilisation de la grève, qui s’accompagnait parfois d’autres actions des salariés contre les patrons et les petits chefs.

Paul Anton : Et l’impact ?

M.B : Nous l’aurons dès l’enclenchement du processus de lutte, en touchant un certain nombre de camarades syndiqués CGT, CFDT et non syndiqués.

Paul Anton : A propos de l’étiquetage politique ?

M.B : Il a été hétérogène : des trotskystes, des maoïstes, des libertaires et beaucoup de camarades qui ne se reconnaissaient dans aucun parti. Ce point commun nous a conduit à éditer des tracts, réalisés sur notre appréciation de la lutte en cours. Ceux-ci ont reçu un écho favorable chez les travailleurs combatifs.

Paul Anton : Quelle méthode d’intervention utilisiez-vous ?

M.B : Défiants vis-à-vis des appareils syndicaux, les membres du comité des travailleurs révolutionnaires privilégiaient la discrétion, en diffusant les tracts subrepticement, à l’intérieur des ateliers par exemple. Nous intervenions de manière individuelle mais coordonnée lors des assemblées générales, des meetings et des débrayages d’ateliers. Nous insistions sur le fait de promouvoir un mode de fonctionnement qui privilégie la constitution d’un comité ou d’un collectif de lutte, pour stimuler une hausse des revendications. Nous exprimions aussi les idées d’autogestion, de contrôle ouvrier, du refus de produire de l'équipement militaire et le rejet de l’idéologie du travail salarié…

Paul Anton : Bref, l’idée des soviets !

M.B : Vraisemblablement !

Paul Anton : Combien étiez-vous à cet instant ?

M.B : Environ une centaine de membres actifs, mais il m’aurait été difficile d’évaluer le nombre des sympathisants. Je pense qu’il a pu se chiffrer à quelques centaines. Notre impact s’amplifiera pendant la phase dure du conflit. Le comité des travailleurs révolutionnaires, via les piquets de grève, deviendra ouvertement la structure organisatrice et référenciée parmi les travailleurs combatifs. Aucune décision ne pouvait se prendre en dehors du cadre des assemblées générales. Le comité des travailleurs révolutionnaires a été, à ce moment, en adéquation totale avec la lutte. La propagande anarchiste s’est manifestée. Certains grévistes ont découvert qu’ils partageaient une large sympathie pour cette idéologie. C’est pour cela qu’apparaît le drapeau noir à coté du drapeau rouge pendant toute la durée des piquets de grève ! Ils seront hissés en haut du mât tandis que plusieurs milliers de grévistes entonneront l’Internationale ! La CGT, outrée, a tenté d’imposer la présence du drapeau tricolore. Les grévistes l’ont brûlé car ils admettaient que ces deux couleurs : le rouge (le mouvement ouvrier) et le noir (l’anarchisme) !

Paul Anton : les syndicats ont-ils eu une posture unanime ?

M.B : La CGT et FO ont été très embarrassées et la CFDT a soutenu le conflit tout en étant divisée. Le vrai problème était que celui-ci concernait les OS. Ce conflit n’arrivait pas à s’étendre aux autres salariés, dont une majorité inactive avait tergiversé sur le fait de soutenir ou de s’opposer au conflit, le bénéfice profitant à chacun en cas de victoire. Soucieux des élections syndicales, les syndicats se sont retrouvé écartelés entre une majorité inactive et une minorité offensive qui maintenait la tradition historique de lutte ouvrière à RVI. Les syndicats n’ont pas souhaité courir le risque de se mettre à dos l’une ou l’autre. Leur existence s’en trouvait liée.

Paul Anton : Le comité des travailleurs révolutionnaires dominait, si j’ai bien compris !

M.B : Oui, l’AG des piquets de grève menait la lutte et les syndicats se voyaient obligés de négocier indirectement avec le comité des travailleurs révolutionnaires. Je rajouterai que la démarche visant à la création du comité des travailleurs révolutionnaires ne s’est pas arrêtée qu’à RVI. Elle s’est mise en marche sur d’autres lieux : SMN, PTT, CHU, Moulinex. Une réelle dynamique d’auto-organisation s’est ébauchée vis-à-vis des syndicats et des partis politiques de gauche, qui posaient, à terme, leur légitimité à encadrer et représenter les exploités.

Paul Anton : Quelle a été l’analyse des grévistes ?

M.B : Ces derniers se sont posé le dilemme suivant : arrêter ou continuer ! Nous n’entraînions pas la totalité des salariés de notre côté. La direction avait joué sur le pourrissement et les syndicats s’étaient trouvés dans l’expectative. Les grévistes ont décidé de monter l’action d’un cran en proposant l’occupation de l’usine et ont envisagé d’étendre le conflit au niveau de l’agglomération. C’est à partir de ce moment là que la situation a changé très rapidement. La direction a essayé de mobiliser les non grévistes avec l’appui des cadres et de certains petits chefs. Lors d’une marche vers l’entrée principale de l’usine, ils ont tenté d’enfoncer le piquet de grève, qui tenait bon malgré les heurts violents.

Paul Anton : Que s’est-il passé ensuite ?

M.B : Les forces de l’ordre ont accompli leur besogne quelques temps plus tard, pour rétablir le libre accès à l’entreprise, en dégageant les camions qui obstruaient les entrées.

Paul Anton : Cédric Leroy a mentionné, dans son mémoire, l’intervention les forces de l’ordre à la demande effective des syndicats.

M.B : Il était tout à fait possible que les syndicats souhaitaient, d’une façon active ou passive, le concours de la police pour liquider ce conflit qu’ils ne maîtrisaient pas. Les relations entretenues par les deux camps ont d’ailleurs été de plus en plus inquiétantes, risquant d’instituer un climat très nuisible dans les conditions de travail. Il ne faut pas oublier que RVI était l’entreprise phare de la région. Je n’ai pas su si la CGT et FO sont intervenues directement. Mais si c’était la réalité : rien n’a filtré ! Au sujet de la CFDT, la polémique entre Guy Robert et Norbert A était connue. Guy Robert indiquait que Norbert A avait agi afin de favoriser l’intervention des forces de l’ordre.

Paul Anton : Qu’est-ce que vous avez décidé ?

M.B : Le comité des travailleurs révolutionnaires s’est fondu dans une structure dénommée « Débordement », en utilisant le même mode d’intervention. Son audience s’avérera importante pour continuer d’inquiéter les syndicats et la direction.

Paul Anton : Et la gauche est arrivée au bord du pouvoir ? Alors ? J’imagine que tu n’as pas fait la fête le 10 mai 1981 !

M.B : Avant cet événement, les syndicats, les partis de gauche, en y incluant l’extrême gauche trotskyste, ont placé leurs espoirs dans la réalisation du programme commun, contribuant largement à la démobilisation des travailleurs. Nous assistions à une décrue des luttes dures (ou directes). Cela a été le point mort ! « Débordement » a tenté de briser le mirage social-démocrate. Nous devions atteindre quelques années pour que celui-ci cesse.

Paul Anton : La réaction des patrons ne s’est pas fait attendre !

M.B : Ils ont profité de la nouvelle période, avec l’appui tacite de la gauche politico-syndicale, afin de nettoyer les entreprises des éléments radicalisés et révolutionnaires, qui étaient mutés continuellement d’un poste à l’autre à RVI. La hiérarchie appliquait une logique de plus en plus disciplinaire, usant de techniques connues d’isolement, pour affaiblir psychologiquement les travailleurs combatifs. L’amoindrissement du rapport de force a permis à la direction de liquider le noyau révolutionnaire. Personnellement, comme d’autres, soumis à ce genre de traitement, j’ai choisi de quitter RVI en empochant l’indemnité de licenciement plutôt que d’attendre la faute grave.

Paul Anton : Ce qui explique en partie la faiblesse des luttes actuelles.

M.B : En effet, la réaction patronale s’est exercée minutieusement envers les éléments radicaux sur l’ensemble du territoire, surtout dans les établissements dits sensibles : les entreprises, les administrations, la fonction publique, etc. Tout cela a montré nettement qu’en dernier recours, la social-démocratie était l’allié du capital, n’hésitant pas à anéantir les forces révolutionnaires, pour que ce dernier continue de renforcer l’extraction de la plus-value garante du taux de profit.
Un autonome
 

Messagepar peyo » Mercredi 27 Juin 2007 14:17

un exemple parmis tant d'autres des manoeuvres des syndicats reformistes. tout le monde pourrait citer des cas de ce type. cela ne prouve rien.
peyo
 

Messagepar Un autonome » Jeudi 28 Juin 2007 11:45

peyo a écrit:un exemple parmis tant d'autres des manoeuvres des syndicats reformistes. tout le monde pourrait citer des cas de ce type. cela ne prouve rien.


Cela prouve une seule chose : on peut très bien se passer du fétichisme de la représentativité syndicale et de son fameux corollaire de la visibilité à toux prix. A moins d’être dans le dogmatisme, le sectarisme et l’archaïsme du passé (la vision de la CGT-SR du siècle dernier par exemple).
Un autonome
 

Messagepar peyo » Jeudi 28 Juin 2007 15:35

Un autonome a écrit:
peyo a écrit:un exemple parmis tant d'autres des manoeuvres des syndicats reformistes. tout le monde pourrait citer des cas de ce type. cela ne prouve rien.


Cela prouve une seule chose : on peut très bien se passer du fétichisme de la représentativité syndicale et de son fameux corollaire de la visibilité à toux prix. A moins d’être dans le dogmatisme, le sectarisme et l’archaïsme du passé (la vision de la CGT-SR du siècle dernier par exemple).



mais si des conseils ou coordinations informelles se mettaient en place dans les boites et que cela fonctionnait, je n'aurai rien contre. je n'y crois, c'est tout. de plus, je suis bien conscient que s'il y a revolution, il n'y aura pas que la cnt. d'autres orgas et/modes d'organisations seront là aussi et il faudra composer. et puis il faudra aussi des comités de quartiers, de villes, de regions..... je ne suis pas branché sur le seul syndicalisme de boite.
peyo
 

Messagepar goldfax » Jeudi 28 Juin 2007 18:50

Ma foi, je suis (pour une fois... faut le faire) assez d'accord avec ce que tu dis, Peyo. Le fait de venir sur le forum de l'AIT te rendrait-il plus intelligent ??? :lol:
goldfax
 

Messagepar peyo » Jeudi 28 Juin 2007 19:07

tu vois, bientot on va se tomber dans les bras en s'embrassant à la russe, ce que, en homphobe latent, je refuserais.
peyo
 

Messagepar goldfax » Jeudi 28 Juin 2007 19:12

:lol:
Je ne roule des pelles qu'aux intimes... :lol:
goldfax
 

Messagepar Federica_M » Jeudi 28 Juin 2007 19:51

mais si des conseils ou coordinations informelles se mettaient en place dans les boites et que cela fonctionnait, je n'aurai rien contre. je n'y crois, c'est tout.


C'est bien là la différence entre nous. Tu n'y crois pas, tu penses que ce n'est pas possible. Donc tu estimes que tous ceux qui y "croient" ont tort, refusent de voir la réalité, ne sont pas réalistes , etc ... Bref, ceux qui ne partagent pas tes opinions sont des cons...

Entre nous, passer pour une conne aux yeux d'un résigné qui accepte de s'intégrer dans le système, je m'en fous pas mal ... Le combat est ailleurs, avec ceux qui n'ont pas baissé les bras, qui gardent encore leur révolte et leur espoir.
Federica_M
 
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Messagepar peyo » Vendredi 29 Juin 2007 5:46

Federica_M a écrit:
mais si des conseils ou coordinations informelles se mettaient en place dans les boites et que cela fonctionnait, je n'aurai rien contre. je n'y crois, c'est tout.


C'est bien là la différence entre nous. Tu n'y crois pas, tu penses que ce n'est pas possible. Donc tu estimes que tous ceux qui y "croient" ont tort, refusent de voir la réalité, ne sont pas réalistes , etc ... Bref, ceux qui ne partagent pas tes opinions sont des cons...

Entre nous, passer pour une conne aux yeux d'un résigné qui accepte de s'intégrer dans le système, je m'en fous pas mal ... Le combat est ailleurs, avec ceux qui n'ont pas baissé les bras, qui gardent encore leur révolte et leur espoir.



je n'ai pas dit que les conseillistes étaient des cons. c'est encore ta lecture (mal) biaisée. mais ça me parait pas ce qu'il y a de plus adapté ou de plus efficace. quand aux coordinations, c'est bien mais je préfére quelque chose de plus perene. je ne suis en rien resigné. ou as tu lu ça? réaliste oui. je regarde mes contemporains et j'essaie de voir ce qu'on peut faire, ce qui pourrait marcher. et c'est vrai que le journalier espagnol qui ne possédait rien, meme pas une toit parfois, il était plus facile de le convaincre du bien fondé du communisme libertaire et du partage que le jeune con accro au tuning.
peyo
 

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