la lutte des enseignants du printemps 2008

Pour relier les luttes entre elles et les étendre...

la lutte des enseignants du printemps 2008

Messagepar N. ROUSSELOT » Mercredi 13 Aoû 2008 15:26

[i]Nous sommes groupe de réflexion qui s'est constitué à Toulouse lors des luttes de novembre 2007 qui s'est donné le nom de Comité de Réflexion Communiste. Nous avons été amenés à aborder toute une série de sujets, en particulier le sens de la lutte que les enseignants ont mené au printemps 2008. Nous avons pensé intéressant de faire passer sur votre forum le compte-rendu que nous avons fait de cette discussion dans la mesure où cela permettrait une discussion plus large que celle que nous avons eu dans le comité. Voilà ce compte-rendu :




L'école, l'enseignement, les grèves et la position des communistes.

Compte tenu du mouvement en cours, il nous a paru intéressant d'aborder le sujet de l'école, tant au niveau théorique que pratique. J'ai moi-même participé à une AG d'enseignants dans un lycée de Toulouse.

Les orateurs (syndicalistes pour la plupart) exigeaient la restitution des postes supprimés, l'engagement de nouveaux professeurs et une hausse de budget alloué, bien sûr au nom de sa sainteté le service public (c'est à dire l'État).

Nous avons d'abord parlé de la structure de l'école actuelle ainsi que de travaux en pédagogie, en sociologie et en psychologie s'y rapportant. Puis, nous avons dénoncé les mots d'ordre : les syndicats cloisonnent la lutte afin de garder le contrôle des masses. Nous avons finalement discuté du rôle joués par ces derniers dans le mouvement, parlé de la logique Étatique, du positionnement communiste et des perspectives.


- Le budget de l'enseignement public pour un lycéen est de plus de 800 euros par mois, soit l'équivalent de deux ou trois élèves par professeur. Quant on voit le niveau culturel de l'aristocratie du 19ème siècle (éducation avec précepteur), on ne peut que constater le gâchis monstrueux d'argent vu les résultats actuels du niveau d'instruction d'un jeune de 20 ans.


- L'objectif d'un cours scolaire est l'acquisition de connaissances réputées mesurables. Cependant, un 10/20 pour passer en classe supérieure ne correspond à rien, cette moitié de connaissance étant inconnu. Elle englobe selon les élèves un contenu différent rendant une continuité pédagogique impossible.
De plus, la notation actuelle a une fonction de classement des élèves, qui va dès le plus jeune âge caractériser les “bons” et les “mauvais”, image qui sera intériorisée. Elle n'est en définitive qu'un système d'humiliation public et de reproduction social.


- Bourdieu, après avoir exposé les statistiques de la reproduction sociale, montre qu'elles sont décidées par la cohérence entre l'espace de socialisation que constituent la famille et l'école. S'ils correspondent, l'élève sera adapté, supportera et réussira. Si ces milieux ne correspondent pas, l'enfant rejettera l'institution scolaire et la famille. Cette dernière pouvant maintenir plus longtemps la cohésion, car elle possède une pression affective sur l'enfant. En rejetant sa famille à l'adolescence, l'enfant risque de se trouver isolé, ayant déchiré les principaux tissus de socialisation existant à son âge.
L'éducation doit être globale au sens le plus humaniste du terme. Il ne doit pas exister de concurrence entre la famille et l'école.
Pour détruire cette concurrence, il faut détruire les concurrents : l'enfant n'est pas un objet et n'appartient à personne, surtout pas à sa famille. La possession d'un enfant ne découle pas logiquement de la reproduction des parents. Son éducation doit être assurée par une multitude encadrée par des spécialistes. Il n'y a rien de plus pathologique que d'avoir seulement 2 modèles d'identification dans les premiers âges.


- L'enseignement et l'apprentissage sont peu efficaces, renforçant les disparités entre élèves : ceux qui peuvent être aidés (capital culturel, économique et social des familles) et les autres. Les méthodes défient tous les travaux de pédagogie ainsi que les recherches extrêmement poussées depuis les années 50 et avant, sur le fonctionnement de la mémoire, sur la profondeur de traitement sur le type d'apprentissage dans le domaine de la cognitive par exemple. La mémoire doit être exercée de façon journalière, mais le travail global de l'élève ne doit pas consister en du bachotage. Il saura son cours pour l'examen, l'oubliera 2 mois plus tard et sera handicapé face aux nouveaux enseignements.
L'apprentissage ne doit pas être massé mais distribué, c'est à dire coupé très régulièrement par des modifications du type de travail demandé pour reposer les aires cérébrales impliquées dans chaque effort.
L'enseignement doit être global : connaissance de son esprit, de son corps , construction du lien social, enseignement des sciences humaines dès le stade ou la pensée peut être abstraite (11-12 ans) etc. L'enfant doit pouvoir comprendre la dynamique de ses processus mentaux pour avoir un contrôle conscient dessus. Notre société développe expodentiellement des cas limites, c'est à dire à la limite du dénie de réalité ce qui est très inquiétant¹.


- L'acquisition des connaissances est dynamique, son organisation variées selon l'anamnèse des individus. Ceux-ci ne peuvent apprendre un cours figé, structuré par la personne du professeur. L'enseignement doit se dérouler en interaction, afin que chacun recrée la connaissance selon l'organisation de ses représentations. Le prof n'est là que pour veiller à la rigueur des raisonnements et à leurs remises en cause perpétuelle afin d'engendrer une réélaboration continue, une construction au niveau intra du savoir sur un mode critique.
La meilleure technique d'apprentissage est d'enseigner, donc de créer sa propre structure de connaissance. L'objet se reconstruit perpétuellement car les autres élèves vont prendre différents chemins pour leurs compréhensions. Il faudra saisir les nouveaux éléments renvoyés et les intégrer. La connaissance avec ses multiples prolongements acquiert ainsi une solidité à toute épreuve.
Plus une représentation a des liens solides et contient de nombreux éléments, plus le rapport à l'objet est riche et plus la connaissance est pérenne². Les enfants doivent enseigner à des élèves plus jeunes qu'eux. Selon l'âge et le type d'enfant, le cours pourra être plus ou moins long, plus ou moins complexe, avec plus ou moins d'élèves à charge, avec un soutien d'un professeur ou non. Cette méthode permet également le développement de la production orale, la présentation de soi à l'autre, le rapport social. Dès 8 ans, peut-être moins, l'enfant peut faire des cours d'1/4 d'heure à 5-6 élèves avec une aide au début. Ce principe doit s'appliquer à toutes les études. Est aussi à étudier les alternatives à la typologie fermée enseigné-enseignant.
La notation doit ainsi comporter 3 niveaux : acquis, non acquis, en capacité d'enseigner.


- Le rapport de l'élève et du professeur se déroule sur un mode de soumission, de l'autorité connaissante et de l'élève ignorant, tabula rasa dans lequel il faut introduire les bienfaits de notre civilisation.
Le paradigme de désinstitionnalisation, c'est à dire du démantèlement des statuts par la concurrence des professionnels fait observer la montée d'idéologies réactionnaires³. Le statut (prof, policier, médecin etc) ne suffit plus à démontrer la compétence. L'univers de consommation, donc de consommateurs entraîne une exigence de ceux-ci qui, sans être compétent, vont juger de la qualité de service.
Au lieu d'analyser cette remise en cause du statut comme une évolution logique du système capitaliste dans la concurrence internationale du travail, on va parler de fin de l'autorité, trouver des boucs émissaires, et regarder avec bienveillance la relation de soumission de l'élève et l'idolâtrie de l'instituteur de village d'autrefois. Le prof ne doit pas être respecté parce qu'il a le statut de prof, mais parce que c'est un être humain. Il ne doit pas enseigner parce qu'il est prof, mais parce qu'il a des compétences particulières. En effet, il ne doit pas être le nouveau père construisant l'ensemble de l'être à venir (comme si il ne l'était pas encore), mais doit permettre le développement d'acquisitions précises. Sur les autres aspects de la personne, il est aussi en situation d'apprenant de la personne humaine dans ses contacts sociaux avec l'élève.


Quel constat pouvons-nous faire de la situation actuelle:

- La formation des professeurs est mauvaise. Ils font très peu de pédagogie, pas de psychologie du développement ni de psychologie cognitive (fonctionnement mémoire, apprentissage, intelligence, etc). Le CAPES n'est que de l'ingurgitation donc fonctionne sur du bachotage critiqué ci-avant.


- Il faut détruire malgré les résistances la question du statut et la remplacer par celle de compétence. Elle doit se vérifier régulièrement, tant sur le plan des connaissances que sur le plan psychologique.


- L'argent alloué est largement suffisant, il est même excessif compte tenu des résultats obtenus. Le problème est au niveau de l'organisation des ressources, de la bureaucratie scolaire et des postes inutiles.




A partir de tout ce que nous avons dit, il est évident que l’organisation du système éducatif est mauvaise, c’est-à-dire forme mal l’ensemble des individus tout en gaspillant beaucoup de ressources.
Mais vouloir que le capitalisme transforme le système éducatif pour le rendre plus efficace est totalement idéaliste.
Le seul moteur actuel de transformation de l'école est que la situation de crise mondiale du système capitaliste et de concurrence exacerbée entre pays nécessite pour tous les Etats de dépenser moins.
Alors que la crise du capitalisme entraîne une marginalisation toujours plus grande d’une partie de la société, l’éducation nationale ne peut que se dégrader pour certains. La suppression de postes participe de cette dégradation (c’est la raison pour laquelle de plus en plus de parents – y compris les profs – mettent leurs enfants dans des écoles privées). La rationalisation de l’Etat se déroule au niveau de toutes ses dépenses (santé, éducation , justice). Il doit aussi créer – s’il en a les moyens – des pôles d’éducation et de recherches pointues afin de permettre la création d’entreprises compétitives nationales comme il en existe en Allemagne sur le secteur des machines-outils.


Cela signifie que la dégradation des conditions de travail des professeurs est le vrai moteur actuel des combats. En mettant en avant des revendications sur la qualité du service public, les syndicats veulent que la lutte se cantonne à des revendications corporatistes empêchant les profs de se positionner sur le plan de l’attaque générale des conditions de vie et de travail qui est communes à l’ensemble des travailleurs. Il est clair que c’est là où les profs sont les plus attaqués (la où le plus de postes sont supprimés) que la lutte a été la plus importante, rien donc à voir avec la défense d'un service public croulant.
Les communistes n’ont évidemment pas à soutenir la suppression des postes au nom de la nécessité de la rationalisation de l’Etat bourgeois, ni au nom du développement du tutorat. Nous savons qu’un système éducatif le plus efficace possible qui permette le développement de la personnalité dans son ensemble ne sera possible que dans une société communiste.
Les communistes doivent participer à la lutte des professeurs comme ils doivent participer aux combats de tous les personnes attaquées par l’Etat bourgeois. Toute lutte est une expérience pour les travailleurs, tant sur le plan de l’organisation que sur le plan des liens interprofessionnels et de la conscience de classe.



Le rôle des communistes est :
- de faire et diffuser une analyse de la situation, démontrer que les réformes correspondent à un plan de rigueur et est une nécessité pour le capital français dans sa concurrence avec les autres capitaux nationaux.
- De montrer qu’une victoire n’est que temporaire, que les concessions seront pour la bourgeoisie de moins en moins possible, que le nœud coulant se resserre de plus en plus.
Il faut un minimum d’air pour pouvoir encore crier.
Le réformisme gauchiste est en dehors de toute réalité dans le capitalisme mondial en crise dans lequel nous vivons.



Les caractéristiques de la grève actuelle montrent bien que la question de la qualité du service public n’est qu’une tentative pour dévoyer les objectifs de la lutte.
Cette lutte sur les conditions de travail fait partie de la lutte du prolétariat, le système capitaliste étant divisé en deux classes antagonistes, cette dernière s'opposant à la bourgeoisie. Dans la période actuelle, si le prolétariat n’existe pas encore comme classe pour soi (c‘est-à-dire ayant la conscience d’être une classe), il existe toujours en soi, c’est-à-dire comme exploitée par l’élite dirigeante capitaliste. Il faut travailler à ce qu’il comprenne la nécessité de son regroupement, le prolétariat étant par sa place dans les rapports de production, le seul pouvant renverser le système capitaliste dans son ensemble.



N. ROUSSELOT




Notes:
Les notes suivantes sont des explications rapides de notions ou de paradigmes complexes. Une bibliographie sera ajouté par la suite afin d'approfondir le sujet pour ceux le souhaitant, les éléments théoriques ne provenant évidemment pas de moi.


¹ Les processus mentaux prennent existence au travers d'une force qui les meut. Celle-ci cherche à se résorber par l'investissement qui porte le potentiel le plus important de décharge. Ce potentiel est différent selon chaque individu. Il est déterminé par les fixations ontologiques, c'est à dire les excitations importantes de la vie des personnes. Il y a donc des fixations particulières au niveau des stades psychosexuels.
Ces fixations relèvent de la sexualité infantile et sont donc refoulées.
La tension se résorbera sur d'autres objets, se déplaçant sur des chaînes associatives, car les éléments refoulés, interdit de passage dans la conscience ne peuvent être investis. Le moi n'est sensé n'accepter la pulsion qu'en la conformant à la réalité et aux exigences surmoiques. Il va devoir trouver un compromis. L'association sera suffisamment éloignée pour être méconnaissable et tolérée par le surmoi dans la conscience, ce qui entraîne symptômes, actes manqués, rêves par exemple, mais suffisamment proche pour satisfaire à la pulsion.
Cette tendance à la décharge est irrépressible. Ne connaissant pas l'investissement pulsionnel d'origine, on ne peut refuser la satisfaction produite en faisant volontairement le deuil de l'élément refoulé, ou en résorbant véritablement l'excitation à la place du déchargement limité de l'investissement compromis. Cette décharge se réactive sans fin, l'investissement originel étant frustré.
Suite à la mise au jour pulsionnel, l'individu peut quitter la répétition symptomatique qui crée souffrance. Il peut tolérer la jouissance de base ou l'interdire consciemment permettant de libérer une quantité d'énergie qui devient à disposition. Cette dynamique est à l'opposé d'un contrôle inconscient, réflexe et incompréhensible.
Un cas limite est une personne qui a son moi envahi par la pulsion, celle-ci cherchant le plaisir immédiat et total sans prise compte de la réalité.
Ce moi est envahi car il est trop faible. Il se met alors au service de la pulsion.
La réalité n'est pas méconnu comme dans la psychose, mais elle est fuite, provoquant par exemple des symptômes de type addiction, mise en danger de soi, isolement, dépression, surinvestissement d'un objet a fonction anaclitique comme dans la perversion etc. Nous ne somme pas dans la pensée “je ne sais pas”, mais dans celle du “je sais bien mais quand même”.

² Une connaissance est un ensemble d'éléments liés ensemble qui s'organisent en chaîne signifiante (ce que j'écris à l'instant a un sens car que je déplace mon attention sur des mots liés entre eux pas ces fameuses chaînes).
L'ancrage des signifiés est déterminé par le nombre de liens que ceux-ci ont avec d'autres. La chose chien est plus ancrée que le mot suprachiasmatique* par exemple. L'ancrage est aussi déterminé par la force, l'intensité des liens, chien est bien ancré car lié symboliquement au signifié animal qui contient une charge affective importante car j'ai été mordu par une bête étant petit. Ces signifiés sont liés a leurs signifiants, ce qui donne un sens à ces choses et en fait des mots, signifiant qui sont composés d'éléments acoustiques, moteurs, et kinesthésiques. Ces mots sont liés à d'autres avec les mêmes différents types d'ancrage qu'entraînent leurs liaisons.
L'organisation en structure de ces éléments disparates forme une représentation (cf Abric, Moscovici), l'organisation des représentations une connaissance.
La liaison et la déliaison/réorganisation est permanente car nous sommes toujours en proie à des excitations nouvelles reformant en continu les objets. Ces derniers sont constitués par de multiples éléments et leurs significations sont déterminées par l'organisation, la structure que forment ces éléments.
La pensée est ainsi différente selon les individus, les impressions qu'ils subissent étant disparates même si l'on retrouve des similitudes. Donner une structure préétablie d'une connaissance complique ainsi l'ancrage car demande une réorganisation complète impossible. Des éléments seront simplement cloisonnés pour éviter une dissonance avec ce qu'on doit apprendre.
Au contraire, une intégration d'éléments et une organisation individuelle est plus efficace, le prof étant là pour contrôler sa cohérence. Enseigner oblige a structurer sa connaissance de façon logique, chronologique, didactique. Il permet de clarifier où sont les trous dans la construction car on doit présenter son élaboration du début à la fin. La remise en cause de la structure par les paires permet de comprendre les mauvaises liaisons faites et de les reconstruire, elle permet aussi d'ajouter des éléments à la connaissance qu'on n'avait pas imaginé pour solidifier un élément (par une illustration par exemple), ou le résorber. La représentation enrichie par ses liaisons deviendra pérenne et ne sera pas éliminée par les contradictions qu'elle posera lors de la réactivation d'éléments cloisonnés à l'époque qui s'était révélés dissonants.

³ La monté d'idéologies réactionnaires correspond au fameux “c'était mieux avant”, “il faut remettre de l'autorité”, “on ne respecte plus rien” etc. La désinstitionnalisation est qu'un statut par lui même ne signe plus la compétence et n'est plus respecté comme tel. C'est un processus qui s'explique par le développement de la société de consommation, donc de consommateurs exigeants de ce qu'ils consomment. S'ajoute à ceci la concurrence (donc marketing) quant à la qualité de service.
C'est un processus qui se développe. On ne revient pas en arrière, surtout avec le développement des moyens de communication permettant ces remises en cause.

*Noyau hypothalamique contenant l'horloge chronobiologique chez l'animal.
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Messagepar N. ROUSSELOT » Mercredi 13 Aoû 2008 15:57

j'ai intégré mes notes au précédant texte et j'ai retravaillé pas mal de points. Je me suis un peu précipité à le publier. Il date d'il y a quelques mois, et je me suis aperçu qu'il était bancal à pas mal d'endroit.
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Messagepar NOSOTROS » Mercredi 13 Aoû 2008 17:44

bonjour et bienvenue !

pour faciliter la lecture et la circulation, si ce texte existe "mis en forme" (pdf, word, open, etc ...) est ce que tu peux l'envoyer à contact@cnt-ait.info

Merci.
Capitalismo delenda est
NOSOTROS
 
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Messagepar N. ROUSSELOT » Mercredi 13 Aoû 2008 18:23

texte rectifié
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Re: la lutte des enseignants du printemps 2008

Messagepar clown » Mercredi 13 Aoû 2008 22:44

N. ROUSSELOT a écrit:la classe ouvrière étant par sa place dans les rapports de production, la seule pouvant renverser le système capitaliste dans son ensemble.


déterminisme marxiste, quand tu nous tiens...

Je dis ça sans méchanceté hein, je partage certains points développés dans le texte, même si ça mélange pas mal de choses. Ma réponse est pas très constructive, certes, mais en même temps, il faudrait commenter ce texte point par point, et ca ferait...comment dire.....très professeur

:wink:
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 7:34

Salut,

la classe ouvrière, n'est pas la même chose que les ouvriers. Cette dénomination signe une place particulière dans les rapports de production.

Loi lechapelier de 1791, "libère" le travail des corporations et permet à chacun d'acheter ou de vendre sa force de travail.
De même, la propriété privé est décrété comme droit sacré (donc non légiférable par les hommes).

Donc, considérant la reproduction sociale, il y a ceux qui ont de l'argent pour acheter la force de travail, ceux qui n'en n'ont pas et qui vont la vendre. Il n'y a ainsi que 2 classes fondamentales dans la société, les exploiteurs et les les exploités, la bourgeoisie et le prolétariat.

Vous allez me dire que c'est un peu simpliste car de nombreux groupes sociaux ont des intérêts différents comme la petite bourgeoisie, la paysannerie etc. Et bien la révolution se produit quand tous ces gens se rendent compte qu'ils sont sur le même bateau et qu'ils ont les même intérêts : 1917, c'est le ralliement des paysans aux bolchéviques (qui prônaient la terre aux paysans tout de suite), et une coupure dans la petite bourgeoisie entre soutien ou pas de la bourgeoisie. C'est à ce propos que je parlais de classe pour soi (conscience de classe), et de classe en soi (existence de la classe).

La petite bourgeoisie est mouvante, elle se prolétarise ou s'embourgeoise.

Je ne lance pas le sujet de 1917 ou du bochévisme qui n'est qu'un courant du marxisme, mais c'est un exemple, il y a bien eu la révolution en 17.

La question du lumpenprolétariat est particulière. Ce qu'en a dit Marx (ou Lénine) dresse les poils à beaucoup d'anarchistes : Lénine dit qu'il faut en exécuter 10/jour, Marx qu'ils sont des parasites et des traître à la classe ouvrière et qu'il faut les écarter.
Il faut remplacer dans le contexte, le lumpen de l'époque survit par un capitalisme parallèle, illégale et donc mafieux. Il est ainsi opportuniste, et se rangera du côté de ceux le payant le mieux. C'est ce qui produit à l'époque où ceux-ci sont utilisés comme provocateurs par la police. Il doivent donc être écartés.
Actuellement, une partie est potentiellement intégrable dans le mouvement révolutionnaire, l'autre présente quelques dangers expliqués ci-avant.

Je m'excuse encore pour le texte qui a été fait il y a quelques mois et que je retravaille actuellement, je me suis un peu précipité, ne serait-il pas possible de l'effacer, pour que je remette le nouveau avec une autre mise en page et une meilleur forme??
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Messagepar clown » Jeudi 14 Aoû 2008 11:11

Normalement tu peux le faire toi-même, il y a des fonctions, en haut à droite de ton post initial: "citer", "éditer", "supprimer"; tu peux cliquer sur éditer et modifier la forme de ton texte.



pour en revenir à ce que tu dis, est-ce que tu penses que des employés de bureau (ou des profs) font partie de ce que tu appelles "la classe ouvrière", ou penses-tu que cette partie du salariat n'a qu'une "fonction" de ralliement à la classe ouvrière, qui est pour les marxistes le sujet révolutionnaire ?

Tu dis que la petite-bourgeoisie est mouvante, certes, mais tout ce que l'on considère comme des classes est mouvant, sauf peut-être la haute bourgeoisie, qui tend à conserver une certaine homogénéité (et encore) et pour le coup, une conscience de classe, une classe "pour soi".

Ce que tu appelle "la classe ouvrière" ( au sens "classe pour soi") est aussi mouvante et n'existe plus actuellement, ou du moins ne manifeste pas cette conscience, dans le sens ou elle ne va pas dire "nous, le prolétariat", ou "nous, la classe ouvrière" termes qui se sont effacés du paysage; la réalité réapparait sous des termes que l'on entend encore dans la bouche des salariés (et pas seulement des ouvriers): "exploitation" revient souvent, ou "patrons voyous", mais cette dernière n'est pas très porteuse, parce qu'elle sous-entend qu'il y a de bons et gentils patrons.

Le problème est de savoir si il faut renouer avec un "langage de classe" pour réintroduire ces termes dans le langage courant des populations, ou s'il faut centrer ses attaques sur l'oppression en elle-même, problème plus général (donc plus global) que le simple antagonisme prolétariat-capital. Pour ma part je me situe dans la deuxième optique.
clown
 
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 13:48

Ok merci, le texte est tout retravaillé, j'aurais dû le relire car il date de quelques mois, je me suis aperçu de fautes ou de choses très mal dites.

Je me suis effectivement quelque peu trompé, il vaut mieux employer le terme de prolétariat, qui englobe tous les travailleurs dans la situation d'exploité. Les employés ou prof en font donc partie de fait. Après, ils n'en n'ont pas forcément conscience.

Le prolétariat se définit par sa place dans les rapports de production, place où elle vend sa force de travail. Le marxisme considère qu'il n'y a que 2 classes fondamentales, après il y a des sous divisions.

Effectivement les classes pour soi sont mouvantes (la conscience qu'on a d'être tel ou tel), par contre, la division sociale du travail (la place dans les rapport de production : employé, patron-employé, grand patron, actionnaire etc) reste à peu près stable, donc la classe en soi. Je trouve la distinction pour soi/en soi importante car permet justement de définir ce qu'est une classe.

Au niveau de la classe ouvrière, elle est considérée comme une partie du prolétariat particulièrement en place de faire la révolution et de la conduire, car c'est elle qui a le levier le plus puissant face à la bourgeoisie : arrêter la production industrielle. Le fait que les paysans s'arrêtent de travailler (et donc affame les villes), étant beaucoup moins probable au 19ème, ceux-ci étant plus en arrière intellectuellement et sur les évènements (aucun moyen de com) à la campagne par rapport aux villes.

Il y a aujourd'hui en France 7 millions d'ouvriers (je crois), ce qui représente 20% de la population active. Mais une grande partie des travailleurs bossent dans les services, dans la bureaucratie ou sont au chômage.la situation est ainsi très différente (en France) qu'au 19ème siècle et c'est sûr que beaucoup de choses sont a actualiser comme sur le rôle des syndicats, les médias, la situation des chômeurs (qui ne sont plus comme au 19ème de vilain "mafieux opportunistes) ou même notre propagande (dire a un prof qu'il fait partie du prolétarait n'est effectivement pas très porteur).

La révolution dépend plus des conditions matérielles des populations que de la propagande. Elle paraît ainsi plus probable dans des pays en voie de développement (avec Etat constitué), en essor industriel (concentration des travailleurs). La place de la classe ouvrière y prend beaucoup d'importance (Chine par exemple).

Les théorie ne sont évidemment pas des bibles, et elle doivent évoluer en regard des nouvelles connaissances et évolutions du monde. Je ne me fige pas évidemment dans Marx.

Il me semble que l'ait revendique comme moyen révolutionnaire la grève de masse. L'analyse de Rosa Luxemburg sur 1905 est très intéressante à ce sujet. Même marxiste, elle défend ce points de vue et explique que cette action peut être utilisé comme arme. C'est un livre retraçant l'histoire des grèves de Russie de 1896 à 1905, montrant la progressive solidarité des ouvriers entre eux. 1905, une goutte d'eau fait tout déborder (1 ouvrier viré), l'usine se met en grève, toute les autres aussi par solidarité, les soviets se créent, c'est assez magnifique.

De toute façon, ce ne sont pas les théories ou la propagandes qui sont les principaux vecteurs de la lutte, mais le creux à l'estomac...
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 14 Aoû 2008 13:53

Le marxisme considère qu'il n'y a que 2 classes fondamentales, après il y a des sous divisions.


Bien que n'étant pas marxiste, il me semble qu'il y a aussi les paysans, qui sont une autre classe ... Non ?


[Sinon, juste pour aborder un point de vue de méthode et éviter les ambiguités, les gens qui interviennent ici le font en leur nom et non pour un groupe ou une organisation. Il ne faut donc pas considérer qu'il s'agit de réponses ou positions "de l'AIT". (d'ailleurs tu verras que sur le forum il y a autant de AITiste que d'extérieurs qui interviennent ...) Le forum est un outil mis à disposition par le groupe de Caen de l'AIT pour favoriser le débat entre révolutionnaires]
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 14:16

Dans le manifeste du partie communiste, Marx dit qu'il y a 2 classes fondamentales, c'est à dire qu'il y en a d'autres, mais que ces 2 là résument les rapports de production (exploités/exploiteurs).

Les paysans quand ce sont des petits propriétaires paysans (même si ils sont très pauvres) font partie de la petite bourgeoisie, comme les commerçants, ils sont exploiteurs ET exploités (toujours au sens des rapports de productions). C'est une classe intermédiaire.

Dans ce cas, selon le plus grand intérêt, ils se rallieront ou pas au prolétariat lors de la révolution.

Un prof, un employé, etc ne possède rien de ses outils de production et est salarié par un patron (qui peut être l'Etat), et fait donc partie de fait du prolétariat.
Après, il peut ne jamais s'en rendre compte et avoir des idées réactionnaires.
Le terme de classe permet de décrire une division du travail ainsi que de définir qui possède le pouvoir et qui peut potentiellement s'y opposer. En réalité, une partie seulement du prolétariat sera révolutionnaire, mais bon, quand c'est la guerre civile, on doit se positionner dans un camp ou dans l'autre car on est sinon de toute façon un traître.
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 14 Aoû 2008 14:29

Un prof, un employé, etc ne possède rien de ses outils de production


C'est plus compliqué aujourd'hui il me semble :

- par la participation des employés possèdent des actions de leur boite et formellement sont aussi propriétaires (au moins partiellement) de l'outil de production. Cf. ce qui s'est passé suite à l'affaire Kerviel où ce sont les employés actionnaires (et je ne parle pas ici des présidents de conseils d'administration qui sont formellement des employés mais bien des petits employés) qui ont le plus trinqué.

- les profs ont souvent une double activité : salariés dans l'éducation nationale, employé ou indépendant pour donner des cours privés en dehors des heures de travail ...

Je crois en effet comme Clown qu'en plus de la position dans le rapport de production, il faut enrichir l'approche en la croisant avec la notion de domination.
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 14:49

Je reconnais que je reste quelque peu au 19ème.

Le capital a été depuis ouvert aux particuliers et n'appartient plus aux "100 familles". On pourrait de plus considérer tout le monde est propriétaire d'entreprise, la banque se servant de notre argent pour placer en bourse.

Les classes n'ont effectivement plus leur "pureté" d'avant. Il faut simplement considérer que dans les pays occidentaux, s'est produit un fort développement de la petite bourgeoisie au dépend d'un véritable prolétariat (qui par contre est plus important dans d'autres pays), ce que ne pensait pas Marx.

La notion de domination est effectivement dans cette configuration bonne à prendre, car cela va déterminer qui se ralliera à la révolution et qui ne s'y ralliera pas.

Le soucis, c'est que parler d'embourgeoisement (alors que concrètement la personne n'est pas forcément plus riche ; même si elle a du capital, ou de la propriété foncière, elle peut crouler sous les dettes), ou de paupérisation (et justement pas prolétarisation) des petits bourgeois est très connoté.

Mais il faut reconnaître que le prolétariat au sens strict (qui n'a que son travail à vendre) est par sa situation, la classe la plus prompte à être révolutionnaire.

Quand au lumpen, il faut évidemment revoir la théorie quant à l'évolution de nos sociétés.
N. ROUSSELOT
 
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 14 Aoû 2008 17:13

pour appronfondir le point de vue des anarchistes dont l'AIT se réclame (l'anarchisme ouvrier, qui n'a plus grand chose à voir avec l'anarchosyndicalisme européen ), je t'invite à lire la brochure sur la FORA. C'est un texte écrit dans les années 20 (c'est plus récent que le XIX mais pas tellement plus :-) )

LA FORA : ORGANISATION OUVRIERE ANARCHISTE

http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=127


Je copie colle ici quelques (longs) extraits :
II

Chaque jour, la position des anarchistes partisans des organisations spécifiques nous semble plus contradictoire : cet anarchisme élude les fondamentaux de la doctrine pour se fixer sur des facteurs secondaires. La contradiction de cette tactique n’apparaît pas seulement dans les faits ; elle finit par se manifester également dans la doctrine. Cette dernière devient tellement élastique que, tout en se voulant universelle, elle réussi le tour de passe-passe de faire abstraction de l’universalité des facteurs qui déterminent l’état de choses actuel !

La spécialisation des activités révolutionnaires en secteurs cloisonnés conduit à l’étroitesse dogmatique et à un anarchisme de secte, qui confond les effets avec les causes du mal-être social, et qui, forcément, ne donne pas naissance à des mouvements vigoureux, impulsés par les anarchistes.

Les idées ne doivent pas être élaborées simplement pour trouver des réponses aux questions ponctuelles d’un moment transitoire, mais aller vers l’élaboration d’une nouvelle conscience universelle. Pour cela, il est nécessaire que les anarchiste soient dans le peuple ; qu’ils puissent se faire les interprètes de sa douleur, de sa misère mais aussi de ses désirs collectifs.

Ce réalisme dans la propagande et dans l’action révolutionnaire peut-il dénaturer la substance philosophique de l’Anarchisme ? Certains prétendent que la "prolétarisation" de l’Anarchisme est un danger car les conceptions philosophiques, définies par nos précurseurs, seraient pratiquement inaccessibles à l’intellect de l’ouvrier manuel. Ils font semblant d’ignorer que les Bakounine, Kropotkine, Reclus, Salvochéa, etc, ont popularisé eux-mêmes leurs idées dans le prolétariat et que la majorité des propagandistes anarchistes ont été ou sont des travailleurs ou se sont totalement identifiés à la classe des travailleurs.

La tendance à ne voir dans l’anarchisme qu’une philosophie, qu’une doctrine située au-dessus des préoccupations quotidiennes, qu’un principe inaccessible à la majorité, porte en elle la négation des valeurs éthiques de notre doctrine. Il n’est pas possible de parler de rénovation sociale en mettant de côté le prolétariat ou en le traitant comme un sujet d’étude, un animal de laboratoire. Les idées révolutionnaires doivent s’incarner dans l’âme populaire, traduire les aspirations collectives, embrasser l’ensemble humain, ses souffrances, ses infortunes et ses espérances.

La pratique de l’anarchisme "fractionné", qui élude le problème essentiel -la lutte contre le capitalisme et de l’Etat- pour centrer la critique sur des aspects précis du problème social (antimilitarisme, féminisme...), conduit souvent ceux qui emploient ce procédé à la négation de toute lutte sociale réelle. Il y a pourtant une base commune à tous les anarchistes : la lutte contre l’autorité, contre le système économique, qui génèrent la violence et l’oppression organisées. Comment méconnaître l’oppression économique, fait aussi réel que palpable ? Refuser d’intervenir dans les luttes ouvrières, en alléguant que le contact avec les masses ouvrières tâcherait la blancheur immaculée de l’idéal, c’est transformer l’anarchisme en un jeu philosophique, un simple sujet de littérature.

Il y a des courants anarchistes qui se spécialisent exclusivement sur un thème, et qui n’analysent les problèmes sociaux qu’au travers du filtre de leur spécialité. Par exemple, nous avons des individualistes qui exhibent leur "superhumanité" comme une décoration et qui portent un regard méprisant sur la vile racaille. Nous avons aussi des organisations spécifiques -antimilitariste, végétarienne, antialcoolique, rationaliste, ...- qui font passer l’avenir de l’humanité par la solution de "leur problème".

Nous ne nions pas l’importance que peut revêtir, en un moment donné et dans un milieu propice, l’exagération d’un des nombreux vices du système, et donc la systématisation de la propagande suivant un axe antimilitariste, antireligieux, ... Ce que nous combattons, en tant que déviation de la doctrine révolutionnaire, ce sont les dérives d’un certain anarchisme qui isole tel ou tel facteur, en ignorant que ce facteur se rattache à un phénomène social unique.

La synthèse du mouvement anarchiste peut facilement être trouvée dans la globalisation de tous les facteurs politiques, économiques et éthiques qui contribuent à donner sa physionomie à la cause unique, bien connue : l’exploitation de l’homme par l’homme. C’est donc sur la base de cette réalité sociale globale, et non sur une des différentes facettes de cette réalité, que l’anarchisme doit définir le sens de sa propagande et de son action révolutionnaire. Et c’est parce que cette réalité est globale que nous pouvons être à la fois syndicalistes et anarchistes, c’est-à-dire œuvrer dans les luttes à caractère économique comme membres d’une organisation prolétarienne et, en même temps, propager dans le syndicat des idées qui amplifient le domaine de l’action dans le champ de la lutte de classe. Pour que ces deux tâches soient complémentaires, -pour que les nécessités quotidiennes ne l’emportent pas indéfiniment sur les préoccupations idéologiques- il faut porter nos principes dans le mouvement ouvrier et impulser la lutte des travailleurs dans un sens clairement révolutionnaire. Les syndicats orientés par les anarchistes doivent être en même temps des écoles, des groupes d’action, des centres culturels, ... regroupant toutes les aspirations qui convergent vers la solution du problème unique : la transformation de la société contemporaine.

Ce qui fait obstacle à cette conception, ce n’est pas tant les différences, de tempérament, de goûts, etc. que l’absence dans le mouvement du niveau de compréhension nécessaire pour être capable d’appréhender le problème social dans sa globalité. Cet obstacle existe partout. En Europe, il constitue un rempart insurmontable, élevé par les anarchistes eux-mêmes dans le mouvement ouvrier.

La conception qui est la nôtre, en Argentine, d’un "mouvement ouvrier anarchiste" résulte de l’analyse du processus suivi durant un demi siècle par les idées socialistes et de l’étude des luttes du prolétariat pendant cette même période. En Argentine, il n’y a pas de différence substantielle entre le syndicat et le groupe anarchiste ; les deux remplissent la même mission de propagande, même s’ils se gèrent de façon différente. Les syndicats sont constitués d’ouvriers d’un même métier, les groupes remplissent des fonctions de propagande là où, pour quelque raison que ce soit, l’organisation ouvrière n’existe pas. Mais, dès que cela est possible, le travail de prosélytisme anarchiste est fait directement par le syndicat, ce qui explique pourquoi la propagande doctrinale et l’action professionnelle des travailleurs se complètent.

Nous avons en notre faveur l’expérience d’un mouvement qui ne se fractionne pas en fonction des différents aspects du problème social, sans que pour cela il oublie de les prendre en compte. C’est cette expérience constructive qui inspire nos critiques contre l’anarchisme de chapelle et de secte, si en vogue dans la majorité des pays.

Est-ce que la clarification sur ce point n’amènerait pas les anarchistes à trouver la base commune de leurs activités futures ?
III

Quand nous signalons l’importance, pour l’anarchisme militant, du retour à l’activité dans le mouvement ouvrier, nous exprimons le souhait de reprendre le combat là où s’interrompit la tradition révolutionnaire de la Première Internationale. Nous ne faisons pas référence au concept classiste qui anima cette première tentative d’union fraternelle entre toutes les victimes du joug capitaliste. Ce que nous revendiquons dans l’Internationalisme d’il y a un demi-siècle, ce n’est pas la force instinctive qui lui a donné des apparences révolutionnaires, mais très précisément la doctrine qui amena des orientations idéologiques à ce regroupement d’individus dont le point de départ était la satisfaction des nécessités les plus urgentes. Cela veut dire que nous voyons en Bakounine l’interprète d’une conception opposée à la doctrine marxiste et à la tendance manifestée par les socialistes autoritaires de subordonner les problèmes éthiques au facteur économique.

Nous considérons cependant que le bakounisme n’est pas une doctrine achevée. C’est sur la base de l’esprit subversif de Bakounine et non par rapport à l’éventail de ses conceptions tactiques -répondant presque toujours au caractère transitoire des phénomènes sociaux- que nous devons construire l’Internationale et notre propagande dans le mouvement ouvrier. Il est intéressant dans cette perspective de souligner que l’échec de la Première internationale était un événement inévitable, indépendant des luttes personnelles qui l’agitèrent pendant sa courte existence. Même sans l’inimitié entre Marx et Bakounine, la scission se serait produite entre les autoritaires et les libertaires. Ils étaient dans les mêmes organisations, mais sans avoir entre eux un véritable lien de solidarité.

La politique unitaire de la Première Internationale ne peut plus être appliquée aujourd’hui. L’évolution idéologique du prolétariat ne s’est pas faite conformément à ce que prévoyait dans sa rigidité le dogme marxiste, mais a eu des manifestations éthiques diversifiées. Dans l’enfance du socialisme, il a pu être facile d’organiser la classe ouvrière sous un même drapeau. Seule existait une conception classiste rudimentaire -qui était plus un désir d’amélioration économique qu’un espoir conscient d’émancipation sociale. Pour parer à cela, certains ont proposé de faire du syndicalisme une doctrine intermédiaire, équidistante du marxisme et de l’anarchisme. Mais, l’ouvrier ne peut être une chose une chose quand il mange et une autre quand il pense ! D’autant que, c’est un fait prouvé, les "intérêts de classe" qui justifieraient une telle union n’émergent qu’à partir du moment où une minorité consciente parvient à leur donner une expression.

Le mouvement ouvrier suit un processus parallèle à l’évolution de la société. La réalité économique, par ce qu’elle impose quotidiennement aux esclaves du salariat, amène la classe ouvrière à ajuster son action aux impératifs monstrueux de l’économie. Mais, le fait que les travailleurs s’organisent en fonction de la structure économique du capitalisme ne veut pas dire que c’est dans ce modèle organisationnel que se trouve le modèle, l’objectif de la révolution !

Même si les besoins et les espoirs d’amélioration immédiate des hommes soumis à la même dure loi du salaire sont strictement communs, même si tous les travailleurs sont organisés sur le terrain de la lutte de classes, même s’ils luttent avec la même passion, ressentent la même haine pour l’exploitation et la tyrannie... quand se pose la question "comment abattre cette tyrannie", les divergences surgissent immédiatement. Le socialiste essayera toujours d’éviter des conflits graves : il proposera des mesures de conciliation, des arbitrages, des lois "protectrices", des transactions humiliantes. L’anarchiste, au contraire, soulignera la nécessité de poursuivre directement la lutte -tant qu’il y a de l’énergie pour cela-, et pas seulement contre l’exploiteur direct -le patron au centre d’un conflit en cause- mais aussi contre les lois qui protègent son avarice, contre l’autorité qui protége les exploiteurs. Et il reste encore la tendance intermédiaire : le syndicalisme de classe qui se veut neutre, car il serait au-dessus des idéologies. Quelle attitude ont les "syndicalistes" face aux conflits sociaux ? Ils cherchent toujours une solution acceptable, adaptée à l’apparence des "contingences économiques" du moment, de peur de contredire "la réalité". Les tendances syndicalistes, nées de la théorie neutraliste, ont fini par coller aux aspects les plus passagers de la réalité économique.

Ces faits nous amènent aux conclusions suivantes : une tactique unique au mouvement ouvrier n’est pas possible, et il est encore moins facile de trouver une base commune aux tendances qui divisent aujourd’hui le prolétariat. En particulier, nous affirmons que le syndicalisme échoue en tant que doctrine, en tant que principe classiste se voulant au dessus des tendances.

Actuellement, sur le plan international, le socialisme se divise en trois tendances bien définis. : la FSI d’Amsterdam, l’ISR de Moscou, l’AIT de Berlin, qui correspondent à la social-démocratie, au communisme bolchevique et à l’anarchisme. La division idéologique du prolétariat ne se résume pas à ses trois internationales. D’autres tendances autoritaires, politiques et confessionnelles, comme le cléricalisme et le fascisme, dominent une part du prolétariat, ... sans que la "conscience de classe" révèle aux esclaves du salariat les mensonges des démagogues, des partis et des églises !

Rappelons que, dans des pays comme la Hollande et l’Allemagne, toutes sortes d’organisations idéologiques -catholiques, protestantes, socialistes, bolcheviques, anarchistes, syndicalistes...- sont présentes dans le mouvement ouvrier. Peu ou prou, elles reposent toutes sur la notion de lutte des classes. Pourtant, elles ne coïncident pas entre elles, ni en ce qui concerne leurs théories, ni leurs tactiques ni leurs actions. Quelle valeur pouvons-nous alors accorder à ceux qui prêchent l’unité ouvrière au-dessus des hommes et des idées ?

Il n’est pas nécessaire de chercher d’autres exemples en Europe pour démontrer la tromperie de la politique unitaire. Dans les Amériques, toutes les nuances du mouvement ouvrier sont également représentées. Le courant internationaliste s’exprime dans deux tendances principales : autoritaire et libertaire.

Nous, anarchistes d’Argentine, luttons pour donner au mouvement ouvrier une traduction anarchiste. Nous ne nous obstinons pas à méconnaître la réalité ou à tordre les faits pour qu’ils correspondent à de vagues chimères unitaires. Nous n’avons pas non plus une politique de conciliation envers les ennemis occultes ou déclarés de l’anarchisme. C’est pour cela, qu’outre le danger capitaliste, nous soulignons la dangereuse tendance que constitue l’autoritarisme marxiste ainsi que la propension des syndicalistes neutres à confondre le fond du problème avec ses aspects contextuels.


Il n’y a rien de plus opposé à la réalité du mouvement ouvrier révolutionnaire que la théorie unitaire. Le concept d’unité ouvrière exprime l’amalgame d’hommes liés par nécessité et par un précaire instinct de défense. Elle serait un fait si chaque individu dépendait d’un intérêt commun et dépasserait les passions et les égoïsmes particuliers. Mais, comme le progrès social est caractérisé par les particularités, ou plus exactement par l’individualisation, comme il se déroule moyennant un développement partiel des capacités et pas en suivant un processus uniforme de sélection de classe, il en résulte que les classes économiques ne rentrent pas exactement dans les petites cases prévues par les théologiens marxistes.

L’unité ouvrière est une thaumaturgie qu’expliquent à leur manière les différents apôtres de la révolution classiste. Si l’individu est le résultat du milieu social dans lequel il vit, ces idées et sa volonté propre n’œuvrent pas comme déterminants pour le progrès humain. Nous admettrons clairement que leq contingences économiques seules déterminent l’action de l’homme qui sera dans ce cas inconsciente ou produite par des causes ignorées. Cette métaphysique matérialiste ne nous convainc pas. Quelle valeur a pour la marche du monde cette pulsion purement instinctive, "biologique", qui serait le seul déterminant de l’organisation ouvrière ? L’homme lutte pour son pain, pour la satisfaction de ses besoins, certes. Mais, dans cette lutte, il y a presque toujours une impulsion altruiste : le désir d’assurer leur pain à tous les hommes. C’est ce qui explique le mobile de la révolte, qui va bien au-delà de la couverture des besoins urgents et de la division de classe.

En conséquence, nous constatons que la politique d’unité ouvrière -essence du classisme- cache des projets de subordination du mouvement ouvrier à l’autorité des chefs politiques qui agissent tout autour de la sphère syndicale. Ceux qui exploitent les revendications du prolétariat à des fins électorales, ont déclaré la guerre aux idéologies qui affichent clairement leurs projets. Et, cependant, ils appliquent leur propre idéologie aux organisations prolétariennes tombées sous leur contrôle.

Si nous, anarchistes, nous parlons aussi de lutte de classes, c’est pour souligner la réalité du contraste qui existe dans les conditions intellectuelles, éthiques et économiques des hommes qui constituent une même société mais qui sont séparés par un antagonisme irréductible d’intérêts et de privilèges. Mais, si, à cause de cela, nous prétendions donner un fondement à une théorie classiste, subordonnée au développement économique du capitalisme, nous tomberions dans l’erreur d’attribuer des valeurs révolutionnaires au mécontentement passagers des affamés. Nous ne méconnaissons pas l’importance, pour l’évolution des peuples, de la faim, des épidémies et de la guerre. Ce que nous nions, c’est qu’il se constitue un processus évolutif linéaire, lié à ses phénomènes, indépendamment de toute idée. La misère, peut soulever une population, mais elle peut en écraser une autre. La guerre, peut provoquer une révolte chez un peuple, mais épuiser ses voisins. Et il y a des tremblements de rage, des secousses d’énergie, d’irrépressibles besoins qui conduisent les hommes au désespoir et à la paralysie et non à la révolution.

De plus, deux révolutions provoqués par la conquête du pain peuvent suivre deux voies divergentes. Il n’existe pas de parallélisme entre les mouvements de la classe ouvrière dans tous les pays, même entre ceux qui semblent proches sur le plan social et économique, parce que des facteurs idéologiques, qui prévalent sur les intérêts immédiats, modifient les orientations révolutionnaires.

Les différences entre les différents secteurs du mouvement ouvrier sont de plus en plus marquées. Le processus de différenciation idéologique, qui détermine la conduite des individus, s’observe même dans leurs journaux de propagande, qui limitent pourtant leurs propos à "des objectifs immédiats". Tous les travailleurs auraient-ils les mêmes besoins, souffriraient-ils des mêmes injustices, dépendraient-ils du même maître ... ils n’ont pas tous la même culture, les mêmes capacités, les mêmes idées. Conséquence logique : c’est sur le terrain des interprétations que le problème se pose, pour déterminer par quel chemin il faudra mener l’action collective pour mettre fin au règne de l’exploitation et de l’opprobre.

C’est en fonction de ces interprétations -pas tant sur le "pourquoi" de l’exploitation mais sur le "comment" y mettre fin- que les différents courants du mouvement ouvrier définissent leur doctrine particulière. L’équivalence des intérêts n’est pas égale à l’équivalence des opinions, des idées, des volontés. Ces dernières sont toujours supérieures aux premières car l’homme qui lutte est plus inspiré par ce qu’il pense que par ce qu’il sent. Cela veut dire qu’une masse de malheureux peut suivre, sous l’impulsion de ses besoins immédiats, une trajectoire révolutionnaire. Mais elle l’interrompt, la fait stagner, la paralyse aussitôt que ce besoin purement physique est satisfait. A l’inverse, une minorité consciente n’abandonne pas la lutte parce qu’elle a obtenu la satisfaction d’un objectif immédiat, au contraire, elle base sur cette réussite une stratégie dirigée vers l’émancipation totale.

Ces divergences de motivations et d’objectifs expliquent la désagrégation des conglomérats syndicaux unis "organiquement" par une discipline. Mais posons-nous la question : la variété et les différences que les idées introduisent dans le mouvement ouvrier sont-elles un mal ? Il est des anarchistes qui s’obstinent à ignorer ce fait naturel en soutenant comme "nécessaire par force" la conjonction de toutes les énergies du prolétariat dans un organisme représentatif de la classe. En réalité, ceux qui pensent ainsi se nient en tant qu’individus et s’excluent du processus qui détermine l’évolution véritable du mouvement révolutionnaire.

Les différents courants du mouvement ouvrier représentent, sur la scène de ce qu’on appelle la lutte des classes, une variété de motivations révolutionnaires, de degrés de conscience, d’états idéologiques. Et les travailleurs apportent à la lutte des opinions, des initiatives, des idées qui divergent de l’uniformisation classiste ... et cela, parce que l’interprétation des problèmes sociaux n’est pas identique pour un catholique et pour un socialiste, pour un autoritaire et un libertaire, pour un individu passif ou pour un rebelle.
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 14 Aoû 2008 17:13

CF aussi :

Anarchisme Globaliste contre "syndicalisme révolutionnaire"

http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=1442
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 18:05

Je vais lire tes textes, je voulais juste corriger quelque peu ce que je viens de dire sur les classes après quelques relectures.

Un bourgeois est quelqu'un qui possède ses moyens de production.
Un petit bourgeois en possède mais à titre plus réduit et travaille dans sa propre entreprise comme petit patron (commerçants, etc).

Le fait de posséder des actions ne signifie pas la possession des moyens de productions car la personne ne les contrôle en rien. C'est juste une part insignifiante du capital, un bout de papier qui n'a pas d'influence sur la direction de l'entreprise. Les prof, et tout les salarié font donc partie du prolétariat.

Je te réponds plus amplement tout à l'heure, ainsi que sur le texte que tu m'as envoyé.
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Messagepar clown » Jeudi 14 Aoû 2008 18:44

Le problème de toutes ces définitions, c'est que ca reste du seul domaine de l'économie, ce qui façonne donc une vision économiste.

un bourgeois est-ce seulement "celui qui possède ses moyens de production" ?

Pour moi, c'est quelqu'un qui a de la thune, certes, de la propriété à revendre, mais c'est plus que ça, sans faire dans la caricature simpliste, je pense qu'il y a une mentalité bourgeoise (et de l'embourgeoisement aussi par ailleurs), une sociabilité bourgeoise, une culture bourgeoise, des espaces bourgeois.

Ce qui fait qu'on peut changer des rapports de production sans changer la face -et le fond- du monde pour autant, ce n'est pas automatique, si l'on en reste à l'économisme.

je sors un peu du débat
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 19:24

En fait on différencie 3 dimensions dans une classe qu'il faut croiser pour savoir de qui on parle :

-la classe économique est la division des hommes selon leur possessions économiques, il y a donc la classe ouvrière, la classe des commerçant, des médecins etc. C'est celle dont tu parles. il y a des classes de bourgeois avec une mentalité bourgeoise etc. Ce sont les milieux économiques.

-il y a la classe sociale qui se détermine selon les rapports de production (division bourgeois/petit bourgeois/prolétariat).

-La classe historique, les 2 classes fondamentales, exploitants/exploités dans les rapports de productions bourgeois (salariat), personnes possédant ou pas les moyens de production.

Tu vas me dire que c'est finalement le premier type de classe qui fait qu'on est plutôt révolutionnaire ou pas. En fait, le pouvoir appartient aux bourgeois seulement en tant que classe sociale. En possédant les moyens de production, ils possèdent le pouvoir car c'est eux qui conduisent la voiture.

Si crise économique, tu vas voir tous les gens qui ont de la thune qui seront ruinés et qui seront dans la même situation économique qu'un ouvrier. Le bourgeois, lui s'en sort car il a suffisamment d'argent pour en avoir dans différents paniers. C'est pourquoi un bourgeois économique est un prolétaire social, ses possessions étant bancal (même si il aura plus tendance a se lumpeniser, car par son éducation il reste opportuniste).

Problème pour eux, l'essence, c'est nous, mais il faut en prendre conscience, pour les démettre il faut pas refuser de remplir une voiture, mais toutes les voitures et exproprier le conducteur pour prendre sa place.

Une petite citation à ce sujet : "il faut rendre l'oppression plus dure encore par la conscience de l'oppression, et la honte plus honteuse encore en la livrant à la publicité"
Marx.

A ce sujet, Bourdieu (sociologue marxiste mort il y a peu) a un peu élargi le champ des catégorisations des individus en ajoutant au capital économique des personne, le capital culturel et social qui permet mieux de cibler les groupes sociaux.

Je m'excuse pour mes imprécisions et fautes théoriques, je ne suis pas expert dans la théorie marxiste et n'en connais que les grandes lignes.
N. ROUSSELOT
 
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Messagepar NOSOTROS » Jeudi 14 Aoû 2008 19:56

En possédant les moyens de production, ils possèdent le pouvoir car c'est eux qui conduisent la voiture.


A mon avis tu fais fausse route ;-)

Car la voiture, précisément, c'est nous qui la conduisons pour eux !

Ils possèdent le pouvoir parce qu'ils nous disent où aller et qu'ils nous maintiennent sous leur emprise psychologique en nous faisons croire que nous avons besoin de la voiture pour avancer.

Il "suffit" que le chauffeur refuse de monter dans la voiture, ou qu'il décide d'aller où bon lui semble pour que le pouvoir du maitre s'effondre.

C'est pourquoi le travail à mener pour les révolutionnaires est avant tout idéologique. Faire prendre conscience à tout un chacun de ses capacités, de sa dignité d'être humain et de sa nécessaire coopération avec son prochain, dans des rapports de liberté, égalité, fraternité. (après il y en a qui ne se laisserons pas convaincre comme ça ... mais c'est un autre sujet ...)


Problème pour eux, l'essence, c'est nous, mais il faut en prendre conscience, pour les démettre il faut pas refuser de remplir une voiture, mais toutes les voitures et exproprier le conducteur pour prendre sa place.


Autant je suis d'accord avec la première partie (prendre conscience puis refuser de remplir la voiture) autant la seconde partie me laisse perplexe : si la voiture (système éconmique productiviste) va droit dans le mur, à quoi bon vouloir prendre la place du conducteur ...

Les révolutionnaires ne rêvent pas tant de prendre le volant que de détruire la machine infernale qu'on nous fait passer pour le "char de l'économie". Nous devons imaginer d'autres possibles, même si c'est difficile. Nous ne faisons pas la révolution pour reproduire les rapports de production, sinon ce sera de nouveau l'échec comme en Russie 1917 et suite ... (c'est d'ailleurs le reproche fort juste émis par la FORA dès 1910 puis ensuite par les communistes de gauche contre le syndicalisme, qui ne peut être révolutionnaire car il tend à reproduire les rapports de production capitaliste !)
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 20:53

Oui, j'aurais pu prendre aussi cette image, mais je disais que le bourgeois conduisait car il décide de la direction. Hors c'est nous qui lui fournissons l'énergie, qui appuyons sur la pédale de l'accélérateur, si on arrête, la voiture n'avance plus et il peut toujours tourner le volant dans tous les sens.

Je ne défends pas une conduite identique du véhicule.

Actuellement, la possession privée des outils de production fait que les propriétaires produisent ce qu'il faut pour toujours gagner de l'argent.

C'est à dire qu'au lieu de produire un micro-onde qui dure 1000 ans, qui ne doivent être produit en conséquence qu'une fois et pour être libéré du travail de le produire, ils créent des produits de mauvaises qualités, qui se cassent, afin de reproduire éternellement la même chose.

On crée ainsi artificiellement du travail, et on ruine la planète de ses matières 1ère (il devient moins cher de reproduire un micro onde avec de nouvelles matières, plutôt que le recycler). Les bourgeois ainsi s'enrichissent, et nous, on travaille pour rien et on s'appauvrit.

Je précise que je ne défends pas l'utilisation du micro-onde.
Plein de produits (coûteux en matières, en énergie et en travail) sont inutile, je ne fais pas une sélection ici...

Par contre, je ne suis pas d'accord avec la position de renoncer à la production industrielle. Elle permet de remplacer les hommes par des machines sur des travaux pénible ainsi que de produire en masse.

Nous ne sommes plus 500 millions comme au moyen-âge.

Revenir à la charrue et aux bœuf = guerre civile, car c'est la famine.

La production doit être rationnelle : produire assez mais pas trop (pas de travail inutile, ne de ressources perdues). Pour cela, elle doit être contrôlée, mais pas par des intérêts privés.
Le reste du temps, c'est du loisir, on peut travailler si on veut, ou faire autre chose.

On est capable de produire suffisamment, pour qu'un humain, par sa naissance soit de fait nourrit, loger etc.
Ce n'est pas conditionnel, mais un droit fondamental, surtout vu le niveau technologique que nous avons atteint.
On ne travaille plus ainsi par survie, mais parce ce que ça nous plait.

Certains vont rétorquer que dans ce cas, personne ne fera rien. C'est faux, je ne passe pas ma vie à regarder mon mur, je crée et c'est ça qui me fait prendre existence parmi les autres hommes : par mon utilité sociale.

Travaux chiant : machines, ceux qui veulent, ou si nécessité, division des heures entre membres de la société (genre 1 jour/an).

Le reste : on est assez différent pour qu'il y ai des gens s'intéressant aux différentes choses (cultiver, soigner, éduquer, écrire etc).

Si il y quelque manque, il peut y avoir des incitations, mais elle ne doivent être non stockable, pour maintenir l'égalité entre les personnes.

Par le hasard de ma naissance, je suis plus ou moins intelligent, capable etc. Ce n'est pas une raison pour vivre plus misérablement qu'un autre. Par mon éducation, s'organise mon psychisme, et je n'en suis pas plus responsable etc.


Le rapport de production sous le capitalisme est le salariat.
Celui que je propose n'a rien à voir : il n'y a plus de salarié, à un certain moment, même plus d'argent (on a droit à tant de calories/jour, on prend ce qu'on veut au supermarché, possible de cumul pour faire une grosse fête, mais ce cumul est limité par exemple), il n'y a plus de classes économique ou social, mais des groupes culturels différents. Toute formation est gratuite considéré comme d'utilité sociale etc.

Les décisions sont par contre centralisés (ce que critique les anarchistes) pour avoir des choix économique cohérent, par voie démocratique à travers les soviets. Les élus sont évidemment révocables à tout moment.

Voilà, vite fait, c'est ça le communisme.
N. ROUSSELOT
 
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Messagepar N. ROUSSELOT » Jeudi 14 Aoû 2008 21:24

Je réponds rapidemment sur le 1er texte.
Je suis en accord avec pas mal de points. Sur l'internationnalisme, sur l'éducation, la propagande et le point central que constitue la conscience de classe, 1ère dans Marx (ce sont de toute façon les masses qui font la révolution).

Par contre, je trouve plutôt simplisme leurs conceptions du communisme, cantonnée au léninisme qui s'est crée et développée dans une situation très particulière.
Je fait quelques sitations ici que je commente.




"La pratique de l’anarchisme "fractionné", qui élude le problème essentiel -la lutte contre le capitalisme et de l’Etat- pour centrer la critique sur des aspects précis du problème social (antimilitarisme, féminisme...), conduit souvent ceux qui emploient ce procédé à la négation de toute lutte sociale réelle."


Tout a fait d'accord, la focalisation sur les tibétains exploités par exemple, voîle les centaines de minorités exploités là bas, mais aussi les chinois eux même..

Par contre, il est plus efficace d'avoir une division technique du travail selon les spécialités, mais la ligne politique globale et surtout le but doit être commun. Sinon, tous les sujets d'exploitation peuvent servir la propagande (et donc la prise de conscience).




"Les syndicats orientés par les anarchistes doivent être en même temps des écoles, des groupes d’action, des centres culturels",


rejoint mon texte, éducation globale, autonome et libérée des milieux sociaux comme la famille.



"Même sans l’inimitié entre Marx et Bakounine, la scission se serait produite entre les autoritaires et les libertaires."


C'est quand même hyper simpliste et catégoriel. Cf misère de la philosophie de Marx, réponse à philosophie de la misère de Bakounine.



"Pour parer à cela, certains ont proposé de faire du syndicalisme une doctrine intermédiaire, équidistante du marxisme et de l’anarchisme."

Trotsky, c'est une politique de l'entrisme (contrairement àla gauche italienne abstentionnisme) depuis le début : rentrer dans les syndicats, les partis etc pour avoir une tribune et s'inclure dans les mouvements ouvriers, je ne comprend pas la polémique ici.



"Le socialiste essayera toujours d’éviter des conflits graves : il proposera des mesures de conciliation, des arbitrages, des lois "protectrices", des transactions humiliantes."

ils faisaient ça les bolchéviques, rosa luxemburg??



"L’anarchiste, au contraire, soulignera la nécessité de poursuivre directement la lutte -tant qu’il y a de l’énergie pour cela",

bah non, si on est sûr de se faire massacrer, vaut mieux se retirer et garder ses forces pour la prochaine bataille, ça s'appelle la stratégie (cf 1905).



"Quelle attitude ont les "syndicalistes" face aux conflits sociaux ? Ils cherchent toujours une solution acceptable"


Ils sont au service de la bourgeoisie indirectement. Ils veulent conserver la directions des luttes, et pour cela les cloisonnent en corporations, puis ils signent sans l'accord avec la base. Bref, c'est de la trahison



"C’est pour cela, qu’outre le danger capitaliste, nous soulignons la dangereuse tendance que constitue l’autoritarisme marxiste ainsi que la propension des syndicalistes neutres à confondre le fond du problème avec ses aspects contextuels. "

ils ne faut pas confondre le léninisme, qui est un communisme de parti constitué d'élites, hyperhierarchisé, dont la base est aux ordres avec le marxisme. Cette organisation est a replacer dans le contexte de la guerre civile, mais cette question mérite tout un fil. Bien d'autres courants existent.
N. ROUSSELOT
 
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