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Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Jeudi 25 Sep 2014 22:47
par diogène
Les travailleurs de la santé en lutte

Ce mardi 23 septembre était organisée une journée d'action nationale des travailleurs de la santé et, dans une moindre mesure, du secteur social et médico-social, contre l'austérité vécue dans ces secteurs. C'est un fait relativement connu que la situation dans les hôpitaux est catastrophique : le manque de moyens dans ce secteur se traduit par une insuffisance de personnel pour faire face à l'accueil et au soin des patients, par une pression énorme sur ces travailleurs (surcharge de travail, journées à rallonge, non-remplacement lors des congés, précarité, etc.). De fait, dans les hôpitaux, les patients comme les travailleurs sont en grande souffrance. Et cette situation n'est pas prête de s'améliorer car ce sont toujours plus de sacrifices qui sont exigés par les autorités de tutelle (les ARS, Agences Régionales de Santé), dont les ordres sont appliqués avec zèles par les directions.

Nombreux sont les établissements qui subissent actuellement des plans de « modernisation », impliquant de nouvelles baisses d'effectifs, fermeture de services, suppression de jours de RTT... sans parler des salaires au rabais des salariés les moins qualifiés. Face à cette situation, un mouvement de contestation et de résistance semble prendre forme. Tout est parti de la lutte des travailleurs de l'EPSM (Établissement Public de Santé Mentale, ancien Bon Sauveur) de Caen.

La lutte de l'EPSM de Caen

Depuis plus d'un an maintenant, les travailleurs de l'EPSM de Caen sont en lutte contre un plan de modernisation souhaité par leur direction. Ce plan comprend notamment la suppression de nombreux postes (une cinquantaine) et la suppression de 5 jours de RTT. Refusant ce coup de rabot dans leur établissement, les travailleurs sont assez massivement entrés en résistance contre ce plan, en multipliant les actions. Ils ont notamment plusieurs fois bloqué les instances (comme le Comité d’Établissement), empêchant ainsi l'adoption du plan, ou filtré les admissions à de nombreuses reprises. La direction a très vite adopté une position très autoritaire, allant jusqu'à envoyer les flics intervenir aux portes de l'établissement pour déloger par la force les travailleurs en lutte. Début septembre, la direction, excédée par tant de résistance et de détermination, décide de tenir le Comité d’Établissement... directement à l'ARS, c'est-à-dire hors de l'établissement, une première ! Les salariés n'ont pas lâché pour autant et se sont rendus en nombre sur place. Là-bas, ils étaient attendus par une rangée de flics en tenue de maintien de « l'ordre ». Ainsi, le Comité d’Établissement devait se tenir sous protection policière ! Une fois de plus, il n'a pu se tenir.

Quelques jours plus tard, les salariés engagent une nouvelle action, en décidant d'occuper la direction. Cette occupation ne durera qu'un jour, un communiqué sera diffusé, intitulé: « la direction, c'est nous! ». Ces derniers jours, la direction a porté l'affaire en justice, en référé, au tribunal administratif. Résultat des courses : le juge ordonne de cesser toute occupation des lieux, tout blocage ou obstacle à l'admission des patients, sous peine d'intervention des forces de l'ordre et d'amendes. Les sections syndicales engagées dans le mouvement (Sud et CGT) doivent en outre verser 1000 euros de frais. Le coup est dur mais les travailleurs n'entendent pas s'arrêter là pour autant : une autre assemblée générale est prévue dans les jours qui viennent pour envisager de nouvelles actions.

Journée d'action du 23 septembre

Plus d'une centaine de personnes sont parties de Caen pour participer à la manifestation de Paris, en majorité des salariés en lutte de l'EPSM, d'autres hôpitaux de la région (CHU de Caen, Vire, Lisieux, ...) et quelques rares travailleurs du médico-social. Le rassemblement est prévu à 11h devant le ministère de la santé. Entre 1 500 et 2 000 personnes sont présentes, venues de plus de 80 établissements de toute la France. Bien entendu, le ministère est une fois de plus sous bonne protection (police nationale + gendarmes mobiles, en grand nombres par rapport aux effectifs de manifestants). Les discours s'enchaînent, de salariés en lutte, mais aussi et surtout de représentants syndicaux et même de politiques, toujours à l'affût d'un mouvement à soutenir pour redorer leur blason.

Vers 14 heures, une partie du rassemblement se met en mouvement pour se rendre à l'hôpital Cochin où une assemblée générale est prévue. C'est en cortège que nous y allons : celui-ci s'engouffre dans le métro (c'est gratuit pour les cortèges !), manifestant jusque dans les rames de métro (!), puis ressort quelques stations plus loin pour se rendre au lieu de l'AG. Environ 200 personnes sont présentes ; beaucoup sont syndiquées (Sud, CGT), d'autres non, majoritairement du secteur santé, mais des travailleurs sociaux et même intermittents ou chômeurs sont également présents. Cette AG se présente comme une assemblée générale du mouvement de « convergences des hôpitaux en lutte contre l'hostérité ». C'est la troisième du genre (la première ayant eu lieu en avril à Caen à l'appel des travailleurs de l'EPSM). Sont abordées la position vis à vis de la CGT, qui semble, au niveau de la fédé santé, freiner des quatre fers, malgré la forte implication de certaines sections dans les hôpitaux. Puis les perspectives d'actions pour construire et amplifier la mobilisation. Plusieurs interventions rappellent la nécessité de converger avec d'autres secteurs qui connaissent la même situation que les hôpitaux, notamment le secteur médico-social (qui ne connaît pas de réelle mobilisation actuellement). Certains insistent également sur l'importance de trouver le soutien des patients (surtout par le biais des associations d'usagers, représentées dans l'AG). Mais il est aussi rappelé que les hôpitaux en lutte restent minoritaires et qu'il convient aussi d'élargir le mouvement dans les hôpitaux. Toutes ces idées semblent faire consensus. Pour les modalités d'actions, plusieurs cibles sont évoqués : la FHF (Fédération Hospitalière de France), les ARS (Agences Régionales de Santé)... Après débat, il est convenu de se joindre à la journée de mobilisation du 16 octobre (appelée initialement par la seule CGT) ; des actions locales devraient être organisées ce jour. La coordination de convergences des hôpitaux en lutte devrait donc s'y joindre en tant que telle. Il a été adopté un appel à tous les travailleurs hospitaliers à refuser de répondre au téléphone lorsque les employeurs les contactent sur leur repos pour venir travailler.

A propos de cette lutte

Ce qui est notable dans ce mouvement, c'est la forme qu'il a prise, les outils dont il s'est doté : un fonctionnement en assemblées générales nationales, régulières, qui sont le lieu de construction et de coordination du mouvement. Ces assemblées apparaissent par la suite sous leur nom propre, « la convergence des hôpitaux en lutte contre l'hostérité ». Elle a vocation a être autonome vis à vis des organisations syndicales (bien que de nombreux syndicalistes y participent et contribuent à la faire vivre). Notons que nombres de syndicalistes de la CGT sont très mobilisés dans leur établissement et impliqués dans ce mouvement assembléiste et se heurtent à leurs instances nationales (fédérales, confédérales) qui se refusent à toute implication dans un mouvement qu'elles ne contrôlent pas !

Ainsi, cette journée nationale du 23 septembre était bien une initiative des assemblées de convergence ; le niveau de mobilisation est donc à analyser par ce biais. La réalité de la mobilisation dans les hôpitaux reste limitée à quelques établissements (comme l'EPSM de Caen). Comme cela a été dit pendant l'AG, il faut alors la construire au sein des établissements pour lui donner du corps. Et si l'élargissement au social et médico-social est là dans le discours, il est loin d'être une réalité ! Car, actuellement, ce secteur n'est absolument pas mobilisé (encore une fois, mises à part quelques luttes sporadiques très localisées). Et s'il nous faut insister sur la convergence des secteurs, ce n'est pas seulement une question de posture, mais bien une nécessité pour une lutte forte et victorieuse. De la même manière, rechercher le soutien de la population est indispensable dans la création du rapport de force (et cela ne consiste pas seulement à avoir le soutien d'associations de représentants d'usagers !). Ce qui implique de parler autant des conditions de travail dégradées que de la question de l'accès aux soins et de la qualité de ceux-ci. Et de fait, l'austérité qui touche les secteurs sanitaire et médico-social a les mêmes origines que celle qui exploite, opprime quotidiennement des millions de travailleurs, de chômeurs, souvent jusqu'à... les rendre malades ! Le capitalisme détruit la santé et la dignité humaine, c'est de ce constat qu'il faudra partir pour créer une résistance plus globale des opprimés.

Un militant de la CNT-AIT Caen

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Vendredi 26 Sep 2014 21:11
par lucien
Le tract A Caen, la révolte ? a notamment été diffusé à l'occasion de la journée d'action du 23 septembre.

A CAEN, LA REVOLTE ?

Si, pour certains, c'est une cruelle désillusion, pour d'autres, c'était une évidence, les faits sont là : après plus de deux ans de ce gouvernement dit « socialiste », la situation des classes populaires continue de se dégrader, dans la continuité du précédent quinquennat. Gouvernés par la gauche ou la droite, travailleurs chômeurs ou retraités subissent toujours les attaques contre leur condition : pouvoir d'achat en baisse, précarité généralisée, épuisement, pressions, chantage au chômage, etc…

A les entendre, nous serions responsables de leur crise : coût du travail trop élevé, manque de compétitivité, avantages, etc. Ben voyons ! De leur coté, élus, patrons, financiers, se portent bien, merci pour eux. Et avec leurs discours, ils voudraient nous faire accepter l'inacceptable :

- plus de pression sur les chômeurs, de plus en plus nombreux et accusés d'être responsables de leur propre misère et qui, pour quelques clopinettes permettant à peine de survivre, subissent contrôle systématique, harcèlement, travail forcé

- pour les travailleurs, gel voire baisse des salaires, diminution des jours de repos, augmentation de la productivité, du temps de travail

- pour les retraités, stagnation des pensions

- droits sociaux (allocations, bourses...) et services publique sur la sellette

Malgré le mécontentement général, il n’apparaît pourtant pas aujourd'hui de mouvement à la hauteur de la gravité de la situation. Que faire ? L'alternance politique droite/gauche a largement démontré son incapacité à nous sortir de cette situation - le veulent-ils vraiment ? Certains pensent alors que le Front National, avec son discours volontariste et prétendument anti-système, peut être une alternative. Mais il ne faut pas se leurrer : ce parti défend lui-aussi l'oppression et l'exploitation, avec toujours, malgré un récent lissage de son discours, une tendance à l'autoritarisme et à la xénophobie. Il est clair que la solution n'est pas dans les partis politiques, qui ne se chamaillent entre eux que pour se placer ou se maintenir au pouvoir : ne plaçons aucun espoir dans l'urne !

La seule réponse possible, c'est nous-mêmes, travailleurs, précaires, chômeurs, étudiants, usagers, qui la détenons. En refusant de se résigner, en prenant conscience que la situation que nous subissons ne se maintient que parce que nous les laissons faire, nous pouvons résister à ces attaques. Et résister ne peut être un acte individuel ; c'est pourquoi il faut nous organiser pour lutter, par et pour nous-mêmes : organisons des assemblées générales de travailleurs, chômeurs, étudiants ; des assemblées populaires ; des comités de lutte et de quartier... tous ces outils qui permettent de décider nous-mêmes des moyens à mettre en place pour résister (grèves, manifestations, occupations, etc.).

Ils nous harcèlent quotidiennement : il faut renverser la vapeur et les harceler à notre tour ! Ils veulent nous diviser pour mieux nous soumettre ? Au contraire, au-delà des différences de statuts et de catégories, c'est par notre unité et par la convergence de nos luttes, que nous les abattrons ! Tous exploités ? Alors tous contre les exploiteurs !

Organisons la résistance populaire, par et pour nous-mêmes, sur nos lieux de travail, dans nos villes, partout où c'est possible !

cnt-ait
BP 2010 14089 CAEN CEDEX
http//cnt.ait.caen.free.fr
cnt.ait.caen@free.fr

La cnt-ait est constituée de travailleurs, de précaires, de chômeurs, d'étudiants, de retraités... décidés à lutter, par et pour nous-mêmes, contre l'oppression, sans permanent, ni subvention.
Version pdf ici.

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Lundi 29 Sep 2014 13:54
par Lambros
Chouette !

Une question me vient cependant... Faut-il soutenir les luttes d'HP ?

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Lundi 29 Sep 2014 22:32
par lucien
Ralala, le souci de la droiture ! C'est pourtant toi qui affirmais en juillet qu'il "faut aller dans les luttes, toutes celles qui peuvent porter une graine". :wink:

Je crois que ça s'applique aussi dans ce domaine, qui n'est d'ailleurs pas exempt d'expériences autogestionnaires (parfois certes franchement chaotiques mais n'empêche !). Je ne vais pas refuser d'y aller au prétexte que les travailleurs en lutte se contenteraient d'une mobilisation contre des baisses d'effectifs qui auront des répercussions sur la prise en charge des patients ! Un discours anarchosyndicaliste - globaliser la lutte, etc., cf. le tract - peut y être porté, ce qui n'empêche pas d'avoir à l'esprit ou d'aborder toutes les critiques ou les perspectives que l'on peut souhaiter (je ne le ferai par contre pas pour une mobilisation de policiers !). Je n'ai pas des masses de références en la matière mais je me réfère, encore, à Félix Guattari. Je cite :

Une autre "justice", une autre "éducation", une autre "santé mentale", etc., ne pourront devenir possible que le jour où des systèmes communautaires et autogestionnaires réorganiseront radicalement le champ social et économique. Il ne sera plus question, alors, de tenir pour responsable quelqu'un pour un acte délictueux, d'un acte social ou anormal, mais d'explorer les multiples ramifications sociales et politiques qu'il met en jeu pour les mobiliser, y compris sur des terrains qu'elles prétendent n'être pas de leur ressort. Il ne sera plus question non plus, de laisser s'exercer le despotisme pervers des juges, des pédagogues, des psychiatres, des représentants de l'ordre et des bureaucrates de toute sorte. L'ère des spécialistes et des délégués s'effacera devant d'autres formes de division du travail qui n'auront plus pour finalité la reproduction des normes socio-économiques mais le désir de vivre partout où il se cherche.

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mardi 30 Sep 2014 9:48
par Lambros
Tain tu fliques mes postes petit délégué syndical :wink:

Pas mal la citation, mais la question est sur le fond: doit-on se mobiliser pour sauver des prisons ? J'en discutais avec une activiste de la CLE : il faudra tout refaire, les hôpitaux aussi alors pourquoi les soutenir ? Je disais que le principe d'un hôpital ça me convient (un endroit pour soigner des gens) mais celui de l'HP non. Si tu te bas pas dans une grève des flics, pourquoi pas dans une grève de matons, de HP, de centrale nucléaire (et d'abattoir en ce qui le concerne ahah) ?

Après cette lutte a l'air chouette, mais pour l'HP je sais pas. faudrait qu'on en cause localement !

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mardi 30 Sep 2014 10:06
par kuhing
Lambros a écrit: doit-on se mobiliser pour sauver des prisons ? !


Ben si c'est pour sauver des emplois de salariés ...
Ah le syndicalisme ...

:arrow:

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mardi 30 Sep 2014 13:35
par Lambros
Non reste, on peut faire une intersyndicale !

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mardi 30 Sep 2014 13:56
par kuhing
Lambros a écrit:Non reste, on peut faire une intersyndicale !


ok mais à condition que j'en sois le trésorier.
( j'ai pas mal de frais en ce moment )

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mardi 30 Sep 2014 21:48
par lucien
Comme je l'ai précisé, le milieu de la psychiatrie n'est pas vierge de toute expérimentation alternative comme la vie en communauté où "patients" et "praticiens" se placent au même niveau (on peut parler de La Borde mais y'en a d'autres). C'est semble-t-il moins le cas dans la police ou dans la pénitentiaire, où il y a a priori assez peu de possibilité d'expérience autogestionnaire... Et je ne parle pas de sociologie dans ces différents métiers. Quant aux travailleurs du nucléaire, si une centrale ferme demain, pourquoi ne pas se mobiliser pour que ceux-ci soient recasés ? Etre contre le nucléaire implique-t-il d'être contre ses travailleurs ? Conseilles-tu de fuir les luttes où l'anarchosyndicalisme serait en terrain hostile ?

Enfin, je précise que je ne flique pas : je retiens ce qui se dit, ce qui semble une bonne base pour le dialogue. :mrgreen:

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 9:18
par l autre
Kuhing prend pas la tréso mais le poste de secrétaire car pour un syndicat c est lui l autorisé du compte et de touts actes juridiques en se sens :wink:. toute action dans le cadre de ce système est périlleuse, vu que cela implique des contradictions, mais ne rien faire et aussi un abyme de contradiction. Ce qui ai a noter c est que les anarcosyndicalistes ne nient les contradictions et difficultés de l action dans le cadre actuel. la plupart des luttes se confrontent a cette réalité. dans le cadre santé social la logique du système et l abandon pure et simple de personnes a l exclusion et l errance . Que faire ( sans Vladimir) ? pour mémoire la critique asilaire etc a surgit a l intérieur du corps soignant . Je renvois :sur la pensée révolutionnaire au sujet feu a toutes les prisons. Etre en position dans un conflit pour stimuler; co élaborer, porter,contibuer une réflexion globale n est il pas le que faire?

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 11:07
par Lambros
@ Lucien : oui il existe des expériences alternatives dans la psychiatrie, mais l'HP c'est pas trop ça... et je n'ai jamais vu de travailleurs-euses d'HP y réfléchir et proposer... Pour le nucléaire, je disais que je ne lutterais pas pour le maintien des emplois. Autre exemple : une lutte à Ford Visteon de nos compa@s en Espagne, je me rappelle on avait soutenu, mais une compagne avait dit : il faudrait aussi, au-delà de lutter contre les licenciements, réfléchir à ce qu'illes produisent et comment.

lucien a écrit:Conseilles-tu de fuir les luttes où l'anarchosyndicalisme serait en terrain hostile ?

Non parce que à part les luttes que l'on mène, toute lutte nous est hostile par ici... Par contre je fuis les luttes nationalistes, et celles qui revendiquent un enfermement ou un tri des personnes, mais ça c'est ma position individuelle.
Exemple : AG étudiante UNEF-Solidaires étudiant-es hier, on y va avec un compagnon. 500 personnes. La présentation, une étudiante non syndiquée dit "On finira par voter, dans le respect de la démocratie étudiante". Bon bah tas 2 mecs qui explosent de rire, on est passé pour des nazis :lol:

lucien a écrit:Enfin, je précise que je ne flique pas : je retiens ce qui se dit, ce qui semble une bonne base pour le dialogue

Et oh on se croirait au CE !

@l'autre: plutôt d'accord.

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 11:29
par reno
je trouve un peu grossier l'amalgame entre la prison et l'hopital psy. De fait, que le traitement fait aux personnes en souffrance psychique ai souvent été, et reste souvent repressif, c'est un fait. Pour autant, au niveau des fonctions, celle de la prison est indéniablement la repression,celle de l'hopital est bien de soigner ( même en psychiatrie). C'est notamment pourquoi comme le rappelle l'autre les principales critiques du coté repressif (que lambros relaie à juste titre) en psychiatrie provient de soignants eux-mêmes. Et pour discuter régulièrement avec des personnels soignant d'hp, ils défendent bien souvent un accompagnement humain de qualité, au nom d'une éthique du soin, contre un système procédurier, repressif et normatif. Voila pourquoi et comment ils faut s'associer à ces travailleurs en lutte.
Enfin, la critique de toutes les institutions actuelles dont le travail s'appuie sur la relation peut être du même ordre (cad dans le soin, l'éducatif, l'enseignement,le travail social). Pour exemple, l'éducation nationale comme machine à broyer et a trier c'est pas mal non plus! Pour autant prenons nous une posture qui se refuse à soutenir tous ces travailleurs?
Pour finir, je ne suis pas sur qu'aujourd'hui la principale critique à faire à la psychiatrie soit l'enfermement, mais plutot la négation par les autorités de la primauté de la relation dans le travail soignant, là ou on écrase soignants et soignés sous un système de procédure oppressant générateur de souffrance dans les établissement. Il faut réactualiser ses fiches, et la critique!

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 12:51
par kuhing
D'accord avec reno sur ce point.
La psychiatrie est une des disciplines médicales où il reste le plus de zones d'ombres qu'ailleurs et, c'est normal vu la complexité du cerveau humain et des interactions qui le font réagir de telle ou telle façon.
Les traitements restent dans la plupart des cas symptomatologiques c'est à dire que l'on arrive plus ou moins à diminuer la manifestation et la souffrance due à une affection sans pouvoir en guérir la cause réelle.
Mais psychiatres ( même si j'en connais pas mal de mauvais ) et infirmiers psy hospitaliers restent des équipes soignantes malgré les difficultés de tous ordres rencontrées.
Rien à voir avec la fonction répressive de la prison.

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 14:42
par Lambros
Sauf que les 1ers HP ont été ouverts pour (contre) les anorexiques afin de faire passer la pilule (ahah) aux gens. Relire Valérie Valère. Il y aussi le fait qu'il n'y ait plus de lutte anti-psychiatrie depuis des années en fRance. Lutte dans laquelle les anarchistes étaient partie prenante, et aujourd'hui on lutte pour humaniser les traitements psychiatriques, dire notre recul... Alors qui l'HP a pas une fonction répressive ouverte, pour moi clairement c'est réprimer ce qui est considéré comme "anormal".

OK avec Reno sur les autres critiques de profession.

Par contre, je suis pas pour analyser tout le cerveau humain, la science étant actuellement au service de l'Etat...

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 15:22
par kuhing
Lambros a écrit:Sauf que les 1ers HP ont été ouverts pour (contre) les anorexiques afin de faire passer la pilule (ahah) aux gens. Relire Valérie Valère. Il y aussi le fait qu'il n'y ait plus de lutte anti-psychiatrie depuis des années en fRance. Lutte dans laquelle les anarchistes étaient partie prenante, et aujourd'hui on lutte pour humaniser les traitements psychiatriques, dire notre recul... Alors qui l'HP a pas une fonction répressive ouverte, pour moi clairement c'est réprimer ce qui est considéré comme "anormal".

OK avec Reno sur les autres critiques de profession.

Par contre, je suis pas pour analyser tout le cerveau humain, la science étant actuellement au service de l'Etat...


Alors pas d'accord du tout avec toi Lambros sur ce point..

Les maladies mentales sont des réalités qui ne sont pas " je suis un marginal qui refuse de m'adapter au moule social existant " (et l'HP est là pour formater)
Cela ne veut pas dire non plus que l'environnement social n'a pas sa part à prendre dans les affections mentales.

Mais la schizophrénie, les affections bi-polaires , la démence (...) sont des maladies qui existent en tant que telles et qui occasionnent des souffrances intenses pour l'individu qui en est atteint et aussi pour son entourage.
Il faut au moins essayer de réduire cette souffrance si on est pour le moment pas en mesure d'en guérir la cause.
Et, si on veut un jour espérer guérir la cause, il faut savoir précisément comment le cerveau et tout l'organisme fonctionnent.
Nous ne sommes qu'une grosse machine physico-chimique ( je te conseille en cela la lecture du livre de J-P Changeux "L'homme neuronal" )
Tâcher d'en comprendre les mécanismes n'a rien à voir avec être au service de l'Etat.
Au contraire, s'il y avait les budgets suffisants pour la recherche, on comprendrait plus vite. Et quand l'argent ne régira pas tout ce qui se fait ou pas ( si ça arrive un jour) , ça ira encore plus rapidement.
Pour exemple on vient à peine de découvrir que la schizophrénie n'aurait pas une origine traumatique dans l'éducation de l'enfant ( comme on le supposait plus ou moins ) mais bien un dérèglement génétique donc chimique.
Quand on en saura plus peut-être que l'on pourra la guérir vraiment.
Mais pour cela on ne peut pas se contenter de dire "la science c'est de la merde au service de l'Etat" ( c'est un raisonnement à réactualiser comme il est dit plus haut )

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 18:23
par Lambros
Je suis pas forcément d'accord.

kuhing a écrit:Mais la schizophrénie, les affections bi-polaires , la démence (...) sont des maladies qui existent en tant que telles et qui occasionnent des souffrances intenses pour l'individu qui en est atteint et aussi pour son entourage.

Ont-elles toujours existé ? Non. Par exemple, les troubles bi-polaires, j'ai choppé un bouquin médical dessus. Bah c'est rempli de merde, tu le lis tu es bi-polaire obligé. Et il est dit que le seul moyen de s'en sortir, c'est cacheton.

kuhing a écrit:Au contraire, s'il y avait les budgets suffisants pour la recherche, on comprendrait plus vite.

Qui fournit les budgets ? Le privé, ou l'Etat. Un sympathisant du syndicat est chercheur. Il est bien embêté: c'est Limagrain ou je sais plus qui qui finance, c'est plus l'Etat. Mais la recherche était déjà pas indépendante avec l'Etat. Penses-tu que c'est par un financement étatique de la recherche qu'on trouvera des solutions ? J'ai une petite maladie pas mortelle du tout mais pas soignable, parce que personne n'a ça. Donc pas de recherche, d'Etat ou pas. (comme quoi tu vois, un anarchosyndicaliste est pas réformiste :wink: )

kuhing a écrit:Mais pour cela on ne peut pas se contenter de dire "la science c'est de la merde au service de l'Etat" ( c'est un raisonnement à réactualiser comme il est dit plus haut

C'est la nouvelle religion, et nous avons affaire à une science d'Etat. Je dis pas que ça a toujours été le cas. Mais actuellement c'est ça. Et l'indépendance des chercheurs-euses, c'est le retour à la subvention d'Etat. (toi qui est végétarien, tu avais entendu parler du chercheur qui disait qu'on pouvait bouffer du poisson, parce qu'ils ressentent pas la douleur, sous prétexte qu'ils ont pas de terminaisons nerveuse... ? Il a jamais été à la pêche ce monsieur)

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Mercredi 01 Oct 2014 19:43
par kuhing
Oui Lambros ces maladies ont toujours existé même si elles n'ont été identifiées il n'y a pas très longtemps.
Mais les antibiotiques n'ont été découverts qu'en 1930 , c'est pour dire.
A posteriori, on peut dire qu'en décryptant les écrits et témoignages, des gens comme Socrate ou Van Gogh , parmi bien d'autres , étaient schizophrène ou bipolaire.
La schizophrénie dont il existe plusieurs formes se reconnaît à des symptômes communs : clivage des idées qui donne l'impression qu'il y a deux mondes, hallucinations auditives ou visuelles', paranoïa, repli sur soi, agressivité (..)

Les maladies mentales ne sont pas le fruit de l'imagination, elle existent vraiment, sont à l'origine de souffrances intenses et ont besoin d'être traitées même s'il ne s'agit le plus souvent que de calmer la douleur qu'elles induisent.
Parce qu'on ne les connaît pas encore assez bien.

Concernant la recherche, je n'ai pas dit que n'attendais des crédits de l'Etat pour qu'elle avance.
Je dis que l'Etat et le système ne permettent pas qu'elle avance .
Et je pense que seule une société sans argent et donc basée sur autre chose que la rentabilité financière permettra à la science, à laquelle je crois en tant que telle, d'avancer.
Nous en avons besoin non pas pour faire du profit financier mais pour vivre mieux.

Quant aux chercheurs qui racontent des conneries, c'est comme dans les autres domaines, il y en a.
Bien sur.

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Vendredi 03 Oct 2014 21:31
par lucien
Diffusion du tract "A Caen, la révolte ?" auprès du personnel entrant/sortant, ce vendredi, au CHU, lors du changement des équipes de la mi-journée.

Image

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Samedi 04 Oct 2014 22:47
par Lambros
Un compagnon du syndicat m'a envoyé ça, vous connaissez ? ça me semble hyper intéressant et ça vient de Caen

http://sous-la-cendre.info/2562/sortie-revue-micrurus

Re: Les travailleurs de la santé en lutte

MessagePosté: Dimanche 05 Oct 2014 11:52
par reno
Une petite contribution qui me semble intéressante, qui concerne plutôt le secteur social:

ALERTE…Par JOSEPH ROUZEL


ALERTE…


J’ai été diplômé comme ES en 86. J’avais déjà un certain âge et pas mal bourlingué : communauté en Espagne sous le règne de Franco, premiers accueils d’enfants en difficulté. Ce qui m’a poussé à penser la clinique éducative et la politique comme intimement liés. Il a fallu partir, menacés de mort après l’assassinat de Carrero Blanco, le premier ministre, en 73. Puis nous avons ouvert avec ma femme Geneviève un des premiers lieux d’accueil dans le Gers. Nous avons rédigé un texte parafé par le Préfet, précisant les engagements de part et d’autre. L’agrément comme « ferme thérapeutique » portait sur l’accueil de 9 enfants, adolescents ou adultes. J’y ai appris l’incontournable nécessité d’une clinique éducative du quotidien.

Le Docteur Jean Oury qui vient de nous quitter à 90 ans le 15 mai dernier, deux jours avant de décéder lançait encore aux équipes soignantes : le quotidien, le quotidien, ne lâchez pas, c’est là que ça se passe ! Un peu plus tard j’ai mené une enquête pour le Ministère des Affaires Sociales sur ce type de prise en charge, qui a abouti en 2002 à sa reconnaissance dans les textes. En formation à Saint Simon à Toulouse j’ai passé 3 années fabuleuses, à mettre des mots sur ce que j’avais vécu pendant ces années d’apprentissage d’un métier que comme beaucoup j’ai d’abord acquis « sur le tas ». On appelle ça de la théorie, ce qui n’est après tout qu’un point de vue (en grec theoria, que l’on trouve chez Platon, et qui signifie avant tout : contemplation !). J’ai exercé plusieurs années à Toulouse auprès de psychotiques adultes et enfants, de toxicomanes et de jeunes désinsérés. Puis je me suis consacré à l’enseignement. Formateur aux CEMEA de Toulouse, puis à l’IRTS de Montpellier, j’ai créé en 2000 l’Institut européen psychanalyse et travail social (PSYCHASOC). J’étais en désaccord avec ce que je voyais déjà poindre en formation : un effacement de la clinique au profit de savoirs savants qui encombrent les pensées et les actes. D’autre part je suis psychanalyste en cabinet depuis plus de 20 ans.


Pourquoi raconter tout ça ? Papy fait de la résistance ? Oui et je suis en colère. Ce que nous avons construit durant des années, à bas bruit, en tâtonnant, chacun apportant sa pierre, est jeté aux orties, comme une vieille ferraille. Le positionnement d’un travailleur social au plus près des difficultés des usagers (parfois bien usagés !), la prise en compte de chacun un par un, le développement d’une clinique du sujet et de son insertion dans la communauté des hommes, le questionnement permanent des dimensions institutionnelles, politiques et éthiques d’un acte qui ne se soutient que d’une rencontre humaine. La dignité humaine, voilà ce que nous avons défendu pendant des lustres sur le terrain et en formation. Puis ça s’est déglingué. Sous les coups de boutoir d’une idéologie qui ne dit pas son nom, le capitalisme, et qui s’avance masqué sous les oripeaux d’un socialisme néo-libéral, cette construction fragile, où l’humain est au cœur du métier, vole en éclats. Le bras armé de ce système qui ravage la planète et toute forme de lien social promeut une marchandisation généralisée de toutes les activités humaines. Si dans notre secteur nous nous pensions l’abri, détrompons-nous.


Alors l’heure est grave. J’en voudrais pour preuve les textes récents sur la prise en charge des autistes, balayant tout ce qui s’est mis en œuvre en référence à la psychanalyse, au profit de méthodes cognitivo-comportementales. Depuis plus de 60 ans des professionnels éducatifs, soignants, médicaux œuvrent au quotidien auprès d’autistes. Ils s’appuient sur la psychanalyse, la psychiatrie humaniste, la psychologie clinique, la psychothérapie institutionnelle, où le sujet, au-delà de son symptôme, est au cœur de la prise en charge. Le symptôme fait alors signe d’un sujet et de sa position dans son rapport à autrui et non d’un dysfonctionnement à éradiquer, corriger, redresser. En formation, après moults changements ces dernières années, les projets de démantèlement sont déjà dans les tuyaux, sans concertation avec les professionnels. L’industrialisation du champ social, à travers des technologies de contrôle rétrogrades (démarche-qualité, normes iso, évaluations par le chiffre, audits en tous genres…) gagne du terrain et pousse à bout les professionnels. Ils ne seraient plus que les exécutants (autant dire les galériens) de politiques sociales elles-mêmes sous la coupe de financiers voraces : il y a encore du fric à se faire dans le secteur social, chantent les fonds de pension. Bref soit on sombre dans le désespoir et la plainte ; soit on entre en résistance. Une résistance qui ne soit pas nourrie de stérile opposition, mais inventive d’horizons nouveaux. Il est grand temps de clamer à qui de nos dirigeants ne veut rien entendre quelles formations nous voulons pour quel travail social dans quelle société.

Dans mon métier de formateur je me déplace dans nombre d’établissements sociaux et médicosociaux. Je suis effaré de voir des collègues muselés par des directions égarées par les sirènes d’un management inhumain ; cassés dans leurs projet et leurs prises de risque ; privés d’espaces de parole et d’élaboration ; à bout de souffle. Mais je rencontre aussi des équipes en lutte, debout, arrimées aux derniers bastions syndicaux qui ne se sont pas endormis.Toute la question aujourd’hui est de fédérer ces luttes.
L’humain n’est pas une marchandise ; le travail social non plus.


Joseph ROUZEL, Rouzel@psychasoc.com

source: site de l'ones
Pour la revue que tu mentionnes lambros j'avais vu ça aussi, mais je n'ai pas encore pris le temps de la lire. Je ne sais pas exactement qui la publie, même si j'ai une vague idée d'où ça peut venir. Je vais m'y pencher; c'est interessant d'avoir un regard libertaire sur le rapport à la santé, mais l'important est de pouvoir être aussi dans les luttes, qui sont le lieu où l'on peut justement aborder ces questions.