Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Faut-il vraiment en préciser le contenu ?

Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Lundi 05 Oct 2009 18:10

Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue (.pdf)


Un texte écrit par "Soutien mutuel face aux violences", groupe lyonnais d’entraide militante face aux situations individuelles difficiles suite à une manif ou d’autres violences "hors du commun". Il aborde la garde-à-vue selon un point de vue rarement exploré, les états émotionnels par lesquels on passe dans cette situation. Il sera complété par une rencontre au Cedrats le 29 octobre à 20h.

Plus précisément nous parlerons ici essentiellement des différents états que l’on peut traverser lorsque l’on vit une garde-à-vue ou simplement un contrôle d’identité. La manière de traiter le sujet ne sera pas juridique comme plusieurs brochures l’ont déjà décrit mais bien du côté de l’individu-e qui traverse une épreuve humaine.

L’arrestation

Premier temps celui de l’arrestation. Elle est parfois inattendue et vient alors nous déstabiliser au moment où on s’y attend le moins. Elle peut se faire dans la violence ou d’une manière en apparence plus « soft ». On se sent souvent pris-e de cours dans ces cas là, face à des personnes qui agissent rapidement et sans nous expliquer les règles. On est alors mis-e dans une première situation d’infériorité qui va durer.

Concrètement, cela signifie que nous perdons notre liberté d’aller et de venir à notre guise. A partir du moment de l’arrestation et ce jusqu’à ce qu’on soit libre, tous nos déplacements, l’accès aux toilettes, se reposer, manger, etc… seront dictés par des policiers.

Durant le transfert au poste de police, les policiers vont nous menotter et en fonction du type d’arrestation lors d’une manifestation ou seul-e, les flics peuvent utiliser soit des menottes en métal soit en plastique.
Lors du menottage, les flics pour mieux nous dominer, peuvent les serrer très fort…

Rappelez-vous que durant tout le temps où vous serez détenu-e, les flics n’hésiteront pas à vous provoquer, à mentir pour vous humilier, vous rabaisser, pour vous faire dire n’importe quoi.

Arrivée au poste et interrogatoire

Second temps, l’arrivé-e au poste. On est mis-e « au frais » dans une cellule et là le temps va alterner entre attente et mise sous pression de la part des policiers. Durant la période d’attente on traverse plusieurs états : envie de sortir de là le plus vite possible, crainte d’être seul-e sans que les proches le sachent, sentiment d’insécurité par rapport à ce qui va suivre et au temps qu’on va rester, peur des conséquences, etc.. Et pour les mineur-e-s, une crainte supplémentaire, la réaction de la famille.

Les flics vont certainement vouloir nous ficher : on va nous faire passer des tests soit d’empreintes digitales, soit d’ADN, soit de photos anthropométriques. De fait, les limites sont floues, souvent on ne sait pas si on a le droit de refuser et quelles en sont les conséquences. On vit une fois de plus des moments d’incertitude et de tension.

Vient ensuite le temps de l’interrogatoire. On ressent l’envie de se soulager du « poids » de ce qui nous est reproché, de soumettre notre déclaration à la version qu’on attend de nous, malgré notre point de vue. On est mis-e dans une situation de confession. Comme avec les péchés, on nous demande d’avouer nos fautes pour gagner non pas le paradis mais une sortie rapide.
Le jeu du flic gentil et du flic méchant n’est pas innocent. En effet, on a envie de faire chuter la tension en étant docile. En réalité, toutes les cartes du jeu sont aux mains des personnes qui mènent l’interrogatoire.
Connaître ses droits par différents guides est dans ces moments une ressource importante pour moins se sentir en terrain inconnu et avoir des points de maîtrise dans la situation. Par exemple, savoir qu’on a le droit de ne pas répondre à ce qu’on nous présente comme obligatoire peut nous aider.

Plusieurs attitudes sont possibles :

1) ne pas parler du tout, sous la forme de « je n’ai rien à déclarer », et quand ils insistent « j’ai déjà répondu à cette question » ;

2) on invente une version qui nous convient et on s’y tient ;

3) on répond à tout et on coopère pour, éventuellement, subir le moins de pression possible (à vos risques et périls).

Ces approches se mélangent et se chevauchent le plus souvent pour une même personne.

Entre les interrogatoires peuvent se succéder des retours en cage, là se suivent des moments d’attente. On se sent parfois coupable de s’être laissé-e arrêter, on angoisse de ce qui nous est reproché, on s’en veut d’avoir parlé, on se sent perdu-e,…
Enfin on nous annonce soit qu’on va être relâché-e, soit qu’on va aller en garde-à-vue.

La garde-à-vue

En cas de garde-à-vue, on sait qu’on est là pour un temps indéfini mais qu’il sera de toute façon toujours trop long. On nous signifie nos droits et ensuite on a normalement la possibilité d’appeler un-e proche ainsi que de rencontrer un-e avocat-e et un médecin. Il est fortement conseillé de le faire. Le fait de savoir que des personnes sont au courant de notre situation et vont se mobiliser peut être d’un grand réconfort, en même temps qu’une source de tension pour les mineur-e-s.

Pendant la garde à vue, les limites cessent d’être identifiées. Le temps passé seul-e en cellule sert à nous cuisiner pour la déposition qui suivra, à mettre nos nerfs à l’épreuve et ainsi à nous mettre en situation de faiblesse. Cette épreuve peut être accompagnée de nombreuses humiliations gratuites : fouille intégrale avant d’entrer dans la cellule, coups, blagues dégradantes et injures, allusions. Il y a mille et une façons de traumatiser quelqu’un-e sans laisser de traces visibles… C’est plus un climat d’insécurité, de menaces, d’humiliation qui prévaut.

Ce ne sont pas les policiers qui ont le pouvoir de décider de notre sort selon notre comportement (parler plus, être docile), contrairement à ce qu’ils affirment. En réalité, notre destin est entre les mains d’un magistrat instructeur qui décide de la longueur de notre garde-à-vue. Par contre c’est nous qui décidons d’accepter ou non la comparution immédiate.
Il est fortement conseillé de ne pas accepter la comparution immédiate, pour avoir le temps de préparer son dossier avec un-e avocat-e. Le contraire de ce que conseillent les flics !

Souvent, il y a un nouvel interrogatoire qui clôt la garde-à-vue, sous menace (fictive) de la prolonger ou en vous promettant que vous allez être libéré-e bientôt. Il s’agit de ne pas être dupe de ces manipulations et de garder sa langue encore une fois. Viendra peut-être alors réellement le temps de la sortie. A l’issue de la détention, les policiers savent que nous sommes épuisé-e-s et à bout et que parfois, on peut-être tenté-e de vouloir sortir le plus vite possible.

Une fois sorti-e

Si on est seul-e, il est important de ne pas le rester et d’aller voir quelqu’un-e de confiance et prêt-e à nous accueillir. On peut ressentir
l’envie de passer à autre chose en se douchant, en changeant de vêtements, etc. Il est important de se faire plaisir en mangeant bien, en se mettant dans un environnement familier ou protecteur. Ne pas hésiter à partager son récit et ses émotions avec une ou des personnes de confiance, à rester avec elles le temps qu’il faudra. Un peu de chaleur humaine fera du bien.
Si on le juge utile (traces de coups, préjudice moral, état de choc…) il faut aller consulter un médecin, qui pourra nous donner des jours d’ITT.

Soutien mutuel face aux violences vous invite à témoigner pour compléter les pistes données, soit directement dans le forum, soit par mail.

contact : soutienmutuel@riseup.net

http://rebellyon.info/Les-differentes-etapes.html
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar a léo » Lundi 19 Oct 2009 19:49

Salut,
j'ai trouvé l'article interressant,
je voudrais savoir concernant les avocats et la confiance que l'on peut leur apporter.
En gros, une situation où on est en "délit" doit t'on tout expliquer a l'avocat sans retenue ?
a léo
 
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Lundi 19 Oct 2009 20:09

Quand tu es entre les mains de l'Etat, prudence absolue à la base. Après si tu as l'avocat militant dont tu connais la qualité (pour l'avoir vu à l'oeuvre lors de procès et qui ne traîne pas de casseroles) et que tu as la certitude d'être dans un lieu sûr (donc pas dans un commissariat), tu peux en effet t'ouvrir (dans un comico, va à l'essentiel à voix basse au milieu d'une conversation normale) sinon le silence c'est encore la meilleure option même lors de fortes pressions policières. Les 3 tourangeaux qui ont fait de la préventive avant d'être lâchés par la justice en sont le meilleur exemple (quand bien même la très forte pression policière en ait fait partiellement craqué un). Faut savoir gérer son temps de GAV et penser à la sortie...
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar a léo » Lundi 19 Oct 2009 20:29

Salut nico

Ils ne sont pas soumis au secret profesionnel ?

Imagine que t'as fait un truc qui và t'amener en cabane...
Le seul qui est censé connaitre la loi et t'aider au mieux serait l'avocat.
Son plaidoyé est en fonction de ce que tu lui "confesses"

Même dans cette situation il vaut mieux ne pas décrire la situation réelle de ta "faute" ?


Je sais pas si je m'exprime bien, mes seules connaissances dans ce domaine c'est ce qu'on voit à la tv :roll: ,
on sait pas l'avenir et peut être que je me trouverai un jour dans cette situation,
d'où le besoin de savoir a qui dans ces moments on peut faire confiance :mrgreen:
a léo
 
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Lundi 19 Oct 2009 20:37

Secret professionnel, oui, mais la plupart des avocats ne sont pas fâchés avec les flics. D'autre part, tu ne peux savoir s'il n'y a pas un micro pour pouvoir t'écouter sans parler de l'oreille indiscrète. Bref, pas de paranoïa, la prudence suffit : un bon militant est un taiseux. Parler de ce qu'on a fait et voir ce qu'on risque, on peut le faire avec des militants de confiance avant d'aller voir avec l'avocat sauf en cas d'avocat militant (assez rare un avocat efficace sans casserole, en plus il prend l'aide juridictionnelle le cas échéant, rare l'oiseau :roll: ) avec qui on peut préparer sa ligne de défense. Après c'est chaque ville sa spécificité de son barreau. Enfin et surtout, connaître les praticiens hospitaliers pas complaisant avec les forces de l'ordre (c'est pas trop difficile à trouver, ce qui l'est plus, c'est un praticien hospitalier qui va avoir la démarche par ex de prendre des photos des violences policières et qui va te donner le nombre réel d'ITT auxquelles tu as le droit et non le simple résultat administratif d'une fracture + une hématome de 5 cms par ex.).

De toute façon, pour dédramatiser et lever les fantasmes, discute en avec plusieurs militants d'âge et d'expérience différentes, ça te permettra de te faire une idée et éventuellement un carnet d'adresse (avocat, médecin etc.).
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar a léo » Lundi 19 Oct 2009 20:58

ok merci :wink:

C'est une bonne idée de voir avec des militants pour le carnet d'adresse.
Je connais pas encore beaucoup de monde mais çà và venir :mrgreen:

Merci pour ton aide, de toute façon je ne fais plus confiance dans ce monde, donc être taiseux :D çà me và.
J'me doutais bien qu'il y aurait aussi un blèm avec les avocats... :?
a léo
 
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar NOSOTROS » Jeudi 22 Oct 2009 23:30

La meilleure de choses c'est encore de ne pas avoir à faire avec un avocat, c'est à dire à ne pas se faire prendre. En évitant de faire des conneries au fond inutile si ce n'est une prise de risque sans rapport avec l'objectif politique (et plus avec des rites de passages de maturité entre l'adolescence et l'age adulte) et autres pièges à con, on évite déjà une grande part des problèmes.

Après pour la prise de risque il y a différentes formes de sport qui de plus permettent d'entretenir la forme, c qui ne nuti pas à la lutte.
Capitalismo delenda est
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar wiecha » Lundi 02 Nov 2009 21:01

Pendant la garde à vue , l'avocat tu le vois très peu de temps, de toute façon.

Et il faut garder à l'esprit qu'un avocat reste ...un avocat avec son regard de juriste sur les choses, militant ou pas.
Si ce regard peeut être utile pour trouver des "failles" légales ( PV mal rédigés ou vice de procédure ), la garde à vue est un moment politique de ta vie, la continuité d'une action, et donc, tu es le mieux placé pour savoir ce que tu peux faire de la situation telle qu'elle est.

Une garde à vue, c'est comme tout ça se prévoit et ça se prépare. Et , en ce qui me concerne, je pense qu'avant chaque action, avant chaque manif , doit être discutée collectivement la question " qu'est ce qu'on fait si on se retrouve au comico". T'as ton choix en tant qu'individu face à certains trucs, mais en même temps, savoir à peu près ce que vont déclarer ou pas les autres, quel genre de stratégie sera adoptée, de mon expérience , ça évite plein de couacs et d'angoisse dedans et dehors.

Genre, écrire dans un communiqué qu'untel , camarade bien connu a été arrêté, alors que le "bien connu " en question a prétendu passer par là par hasard.

Ou se creuser la tête pour savoir ce que les autres peuvent dire et flipper de dire un truc contradictoire.

Ce texte est bien parce qu'il ne décrète pas une stratégie qui serait la bonne face aux flics qui t'interrogent. Le truc du "taiseux" , y'en a pour qui ça va fonctionner, d'autres préfèrent répondre, mais de manière concise et relire et corriger trente fois leur déposition sans refuser de la signer. Ca met parfois les flics en porte à faux, parce que la plupart à la base détestent avoir à écrire ce que tu dis à la lettre, te font le coup du "bon, en résumé.." , et sont tout étonnés de ne pas avoir affaire à la réponse type du militant " je n'ai rien à déclarer".

Donc l'avocat en garde à vue , à mon sens, ce qui compte c'est pas que ce soit un ténor du barreau mais quelqu'un qui va être prêt à faire passer les infos du dehors au dedans et inversement, à se faire chier à passer des coups de fils pour prévenir les uns et les autres. Son utilité, c'est avant tout facteur.

Dernier conseil : ne pas se fier à l'étiquette "avocat militant". La question, c'est la disponibilité et dans ce domaine tu peux avoir de très mauvaises surprises avec des avocats qui font leur beurre avec la défense des militants, aiment bien causer aux médias... Parce que si ton affaire est trop banale , que t'es pas un people de la subversion, tu peux vite te retrouver en rade, parce que l'avocat en question a des causes plus prestigieuses à assurer. J'ai rencontré par hasard, en assistant à des comparutions immédiates de droit commun des commis d'office plus motivés que bien des grands défenseurs des droits de l'homme.
wiecha
 
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Mardi 17 Nov 2009 19:07

20minutes - 17 nov. 2009

Les gardes à vue françaises seraient illégales ?

JUSTICE - Le bâtonnier de Paris, qui représente 21.000 avocats, appelle l’ensemble de la profession à faire annuler toutes les procédures...

Depuis un arrêt pris par la Cour européenne des Droits de l'homme, les gardes à vue seraient illégales. C'est ce que révèle France Info ce mardi matin. «Selon Christian Charrière-Bournazel qui s’appuie sur un arrêt du 13 octobre 2009 de la Cour européenne des Droits de l’homme, la France ne respecte pas les droits de la défense dès la première heure de la garde à vue», rapporte le site.

Dans deux décisions, rendues en novembre 2008 et le mois dernier, la Cour européenne renforce les droits des gardés à vue et précise que, dès qu’il est privé de liberté, un accusé doit bénéficier d’un avocat pour organiser sa défense et préparer des interrogatoires. Or ce droit n'apparaît pas dans la loi française.

Une information que dément le ministère de la Justice. «Nous ne partageons pas du tout l'avis et l'analyse de Christian Charrière-Bournazel», rétorque Arthur Dreyfuss, porte-parole adjoint du garde des Sceaux, interrogé par 20minutes.fr. «L'arrêt de la Cour européenne condamne le système judiciaire turc, qui n'a rien à voir avec le système judiciaire français. La lecture de l'arrêt dit qu'un accusé doit avoir un avocat au plus vite, or ça tombe bien, c'est ce que prévoit le Code pénal français depuis dix ans.»

«Je ne parlerai qu’en présence de mon avocat»

En réalité, c'est plus compliqué que cela. Le droit français autorise certes une courte visite de l’avocat, d'une demi-heure, pour vérifier que son client n'a pas subi de mauvais traitements. Mais le magistrat n’a pas accès au dossier de son client.

Le bâtonnier de Paris estime donc que les gardes à vue à la française sont, au regard du droit européen, tout simplement illégales. «Des avocats se sont déjà constitués en association pour faire annuler les procédures», indique France Info. L’une de ces associations vient d'être créée sous le nom «Je ne parlerai qu’en présence de mon avocat».

Pierre-Olivier Sur, l'un des fondateurs de l'association se félicite de l'appel à la mobilisation lancé par le bâtonnier de Paris. «La France et la Belgique sont les dernières démocraties occidentales à ne pas appliquer les règles», explique-t-il à 20minutes.fr. L'avocat attend maintenant qu'un magistrat se saissise des conclusions qu'il a rédigées et circularisées et prononce l'annulation des procèdures.
Nico37
 
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Samedi 25 Sep 2010 18:16

Guide du manifestant arrêté (2009)

Le FAQ de la Garde à Vue

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur la Garde à Vue... ou tout ce qu'il faut faire en Garde à Vue :

Combien de temps ?

La garde à vue dure sous le régime ordinaire vingt-quatre heures, renouvelables une fois, soit quarante-huit heures. Pour certaine infractions (terrorisme, stupéfiants) ou circonstances aggravantes (bande organisée), elle peut être étendue jusqu’à quatre-vingt-seize heures, voire dans le cas d’un risque d’attentat, à cent quarante-quatre heures.

Où ?

Normalement dans un local de police ou de gendarmerie, mais en fait dans n’importe quel lieu où les nécessités de l’enquête implique que vous soyez retenu à la disposition des enquêteurs (scène de crime, etc.)

Par qui ?

La mesure vous sera notifiée par un officier de police judiciaire (OPJ) ou par son agent. Ce fonctionnaire gradé de la gendarmerie ou de la police agit de son propre chef, sur instruction du procureur ou du juge d’instruction. En revanche, c’est le procureur qui prendra normalement la décision de prolongation, comme celle de lever la mesure.
Retenu, êtes-vous coupable ?

Non, le placement en garde à vue implique simple- ment que vous êtes suspecté d’avoir commis ou d’avoir tenté de commettre une infraction. En d’autres termes, cela devrait exclure les gardes à vue de simples témoins.

Doit-on répondre aux questions ?

Théoriquement, cela vaut mieux, mais rien ne vous y oblige, le droit au silence ayant été reconnu par la Cour européenne des droits de l’homme dont les décisions s’imposent en France. Naturellement, vous n’avez pas d’avantage à vous expliquer sur les raisons éventuelles de votre silence.

Avez-vous des droits dans le cadre de la garde à vue ?

Oui, et ils doivent vous être notifié sous peine d’annulation de la mesure. Attention, si tel n’a pas été le cas, ne signez pas un procès-verbal qui mentionnerait que vos droits ont été portés à votre connaissance.

Quels sont ces droits ?

Il s’agit :

• du droit à être informé de la nature de l’infraction qui motive votre présence en garde à vue ; • du droit à être examiné par un médecin ;
• du droit à vous entretenir avec un avocat (ces deux derniers droits seront renouvelés en cas de prolongation) ;
• du droit de faire prévenir un proche (attention il s’agit de la personne avec qui vous vivez habituelle- ment ou l’un de vos parents en ligne directe, l’un de vos frères et sœurs ou votre employeur) ;
• du droit à être informé des suites de l’enquête.

Quelle attitude adopter en garde à vue ?

Le calme et la courtoisie, en dépit des circonstances particulièrement désagréable, seront vos meilleurs alliés. Attention : les injures peuvent vous conduire à être poursuivi pour outrage.

Est-il vraiment utile de s’entretenir avec un avocat ?

Oui, absolument, même si les enquêteurs vous conseillent officieusement de vous en passer car cela risquerait « de prendre du temps pour rien ». L’avocat pourra par exemple faire des observations écrites versées au dossier s’il s’aperçoit que vous avez subi des mauvais traitements.

Si vous êtes convoqué, mieux vaut arriver avec, sur vous, les coordonnées de votre avocat (télécopie, cabinet, portable), que vous pourrez remettre aux enquêteurs. Rien ne saurait entraver votre capacité à choisir librement votre défenseur, même si les policiers ne sont astreints qu’à une simple obligation de moyen pour le contacter.

Si l’avocat que vous avez désigné est injoignable, acceptez qu’il en soit commis un d’office.

Si vous êtes convoqué au commissariat, munissez-vous :
- de vos papiers d’identité ;
- de vos ordonnances et de vos médicaments en quantité suffisante si vous êtes sous traitement ;
- de petites sommes d’argent comportant de la monnaie pour que les enquêteurs puissent aller vous chercher à manger ou à boire dans un distributeur automatique ;
- de cigarettes, si vous êtes fumeur, les enquêteurs s’arrangeant dans la plupart des cas pour vous accor- der des pauses à cet effet ;
- de la nourriture énergétique, non dangereuse ou salissante (bananes par exemple).

Si vous êtes convoqués au commissariat, ne venez pas avec :
- ceintures, lacets, colliers, montres, cravates, boutons de manchette qui vous seront retirés ;
- votre téléphone portable (qui pourra être exploité) ;
- des vêtements de rechange ou des produits d’hygiène car il n’est pas sûr que le local permette de se laver ou de se changer.

Pourra-t-on prendre vos empreintes ?

Oui, vos empreintes digitales et, pour la plupart des infractions, vos empreintes génétiques. Refusez de se soumettre à de tels prélèvements est puni d’un an de prison, de 15 000 euros d’amende et peut vous empêcher de bénéficier d’une remise de peine si vous êtes condamné ultérieurement à une peine de prison. En revanche, si à l’issue de votre garde à vue, vous êtes mis hors de cause, vous pourrez demander l’effacement des données vous concernant au FAED (fichier d’empreintes digitales), au FNAEG (fichier d’empreintes génétiques) et au STIC (fichier policier).

Peut-on enregistrer vos déclarations à votre insu ?

Non, la Cour de cassation a jugé que c’était un procédé déloyal de collecte de preuve ; vos déclarations doivent être consignées dans des procès- verbaux qui vous seront soumis au fur et à mesure pour signature.

Etes-vous forcer de signer les procès-verbaux ?

Non, ne signez pas si cela ne correspond pas à ce que vous avez voulu exprimer. En cas de refus, la loi a juste prévu que cela soit mentionné au P.V non signé.

Pouvez-vous être fouillé ?

Normalement, vous serez soumis à une palpation de sécurité qui a juste pour objet de vérifier que vos ne dissimulez pas un objet dangereux et qui doit être effectuée par quelqu’un du même sexe. Les fouilles doivent être réservées aux seuls cas où elles sont absolument nécessaires, étant rappelé que l’article 63-5 du code de procédure pénale dispose que « lorsqu’il est indispensable pour les nécessités de l’enquête de procéder à des investigations corporelles internes sur une personne gardée à vue, celles-ci ne peuvent être réalisées que par un médecin requis à cet effet ».

Pouvez-vous être menotté ?

Sauf nécessité, notamment lors de l’interpellation, il ne doit pas être fait usage des menottes. Les dispositions de l’article 803 du Code de procédure pénale à ce sujet sont très claires : « Nul ne peut être soumis au port des menottes ou des entraves que s’il est considéré soit comme dangereux pour autrui ou pour lui-même, soit comme susceptible de tenter de prendre la fuite.».

[strike]En cas de mauvais traitement, quels recours ?[/strike]

Vous pouvez les signaler à la Commission nationale de la déontologie de la sécurité (CNDS) par l’intermédiaire de votre député ou de votre sénateur. Vous pouvez également porter plainte dans un commissariat ou auprès du procureur de la République. Les violences ou mauvais traitements sont réprimées tant par le Code pénal que par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui est directement applicable devant les juridictions françaises. Après avoir épuisé toutes les voies de recours internes, vous pourrez saisir la Cour européenne des droits de l’homme, qui siège à Strasbourg.
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Samedi 23 Avr 2011 18:38

Garde à vue : ce qui change Par Elie et Dante, samedi 16 avril 2011 à 15:29 :: Actualisation du guide :: #16 :: rss

Quelques observations préalables sur la loi sur la garde à vue et les arrêts de la cour de cassation

La loi sur la garde à vue du 14 avril 2011 a été publiée le 16 avril au journal officiel. Entre-temps, le 15 avril, la cour de cassation a rendu quatre arrêts qui concernent la garde à vue.

Contrairement à ce qu’on a pu lire ici ou là, la réforme de la garde à vue ne rentre pas en vigueur aujourd’hui à cause des arrêts de la cour de cassation. La cour de cassation n’a pas le pouvoir de rendre la loi applicable plus tôt. La date d’entrée en vigueur de la réforme reste bien celle prévue par l’article 26 de la loi (« La présente loi entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant sa publication au Journal officiel et au plus tard le 1er juillet 2011 »). Vu que la loi a été publiée le 16 avril, elle entrera donc en vigueur le 1er juin.

Avant le 1er juin, on proposera donc sur ce blog une actualisation du chapitre sur la garde à vue de notre guide juridique.

Du coup, qu’est-ce qui change tout de suite dans la garde à vue ? Uniquement ce qui peut se déduire des arrêts de la cour de cassation.

La cour de cassation avait à se prononcer sur la question de savoir si des gardes à vue effectuées en suivant les dispositions de la loi actuelle étaient compatibles avec la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme. L’article 6 de cette convention traite du « droit à un procès équitable ». Cet article ne dit pas à proprement parler que toute personne en garde à vue à droit à l’assistance d’un avocat : c’est la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, qui siège à Strasbourg, qui a conduit à interpréter ce texte ainsi. Sur ce point, la cour de cassation suit l’interprétation de la cour de Strasbourg.

Dans les 4 arrêts du 15 avril, la phrase essentielle à retenir est la suivante :

« Attendu que les Etats adhérents à cette Convention sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, sans attendre d’être attaqués devant elle ni d’avoir modifié leur législation ; que pour que le droit à un procès équitable consacré par l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales soit effectif et concret, il faut, en règle générale, que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la mesure et pendant ses interrogatoires ».

Cette phrase affirme deux choses :
- le droit à l’assistance d’un avocat des le début de la garde à vue et lors des interrogatoires
- le fait que ce droit doit être respecté tout de suite sans avoir à attendre le changement de la loi française.

Le premier point avait en fait déjà été affirmé par la cour de cassation dans des arrêts rendus par la chambre criminelle le 19 octobre 2010. Mais en revanche le deuxième point ne l’était pas. La chambre criminelle disait que, bien que l’article 6 impose la présence de l’avocat tout au long de la garde à vue, il fallait attendre le changement de loi pour que ce droit puisse être appliqué afin de « ne pas porter atteinte au principe de sécurité juridique et à la bonne administration de la justice ».

Il y a donc un changement de point de vue de la cour de cassation (on appelle ça un « revirement de jurisprudence ») accentué par le fait que « l’assemblée plénière », celle qui a pris les arrêts du 15 avril, a plus de poids au sein de la cour de cassation que « la chambre criminelle ». Finalement il est décidé qu’il n’y a pas à attendre l’entrée en vigueur de la nouvelle loi pour devoir respecter le principe de la présence de l’avocat tout au long de la garde à vue. C’est pour cette raison que les médias ont pu parler, par abus de langage, « d’application immédiate de la réforme sur la garde à vue ».

En fait, la cour de cassation ne dit pas que la règle doit changer, mais seulement que le principe du droit à l’assistance de l’avocat doit être respecté dès maintenant. Non pas « à partir de maintenant », d’ailleurs, ce qui veut dire qu’on pourrait contester en principe des gardes à vue qui ont déjà eu lieu et qui n’ont pas respecté ce droit : sauf que pour les contester, il faut suivre une certaine procédure et que si cette procédure n’a pas déjà été engagée, il est peut-être trop tard pour le faire.


Conseils pour la période du 15 avril au 1er juin 2011

Nous allons voir ce que les arrêts de la cour de cassation du 15 avril ont comme conséquences pour les gardes à vue qui vont avoir lieu entre le 15 avril et le 1er juin, et en tirer quelques conseils.

La phrase importante des arrêts de la cour de cassation est : « il faut, en règle générale, que la personne placée en garde à vue puisse bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la mesure et pendant ses interrogatoires. »

En l’état actuel de la loi, on a bien une intervention de l’avocat au début de la garde à vue, mais cette intervention se limite à un entretien d’une demi-heure avec le gardé à vue. L’avocat n’a pas accès au dossier et n’assiste pas aux interrogatoires.

Les arrêts du 15 avril sont très clairs sur un point : l’avocat doit pouvoir assister aux interrogatoires. Il ne s’agit cependant que d’une faculté à laquelle les personnes gardées à vue peuvent renoncer (les arrêts disent bien qu'il faut que la personne « puisse bénéficier » de l’assistance de l’avocat). Il y a gros à parier que les flics vont conseiller aux personnes de renoncer à ce droit en leur expliquant que leur garde à vue sera plus longue s’ils veulent qu’un avocat assiste aux interrogatoires. Notre conseil est de ne pas céder au chantage et d’exiger la présence d’un avocat, qui sera soit celui que la personne gardée à vue désigne (s’il peut être joint et accepte de venir), soit un commis d’office.

Il y a une chance, si aucun avocat ne peut venir, de pouvoir jouer sur une nullité de la garde à vue. Si personne ne peut dire, à l’heure actuelle, comment et à quelles conditions ces nullités seront vraiment efficaces, il serait dommage en tout cas de ne pas tenter le coup. Il est donc impératif d’exiger la présence d’un avocat. Mieux vaut passer quelques heures de plus en garde à vue et quelques mois en moins en prison que le contraire…

Ce qu’on appelle le « droit au silence » n’est en rien une nouveauté et a toujours existé. La seule chose qu’instaure la nouvelle loi c’est l’obligation pour les flics de préciser à la personne qu’elle a le droit de répondre aux questions posées, de faire des déclarations ou de garder le silence (obligation qui existait déjà à l’époque de la loi sur la présomption d’innocence mais avait été supprimée depuis).

Pour notre part, nous avons toujours conseillé de garder le silence en garde à vue ou au maximum de faire des déclarations mais en aucun cas de répondre aux questions (les raisons sont exposées ici). Donc même si un avocat débarque, nous conseillons de ne pas répondre aux questions. Ce n’est pas parce que la personne gardée à vue a exigé la présence d’un avocat qu’elle a consenti à répondre à un interrogatoire. Quelle que soit la pression qu’exerceront les flics (voire l’avocat commis d’office) en vous recommandant de parler, n'y cédez pas: l’expérience montre que le silence reste la meilleure des armes en garde à vue.

Les arrêts sont muets sur un point important : la faculté, pour l’avocat, de consulter le dossier. La réforme qui entrera en vigueur en juin ne l’a pas prévu, sauf pour quelques pièces de procédure. Un bon avocat bataillera pour avoir accès à l’ensemble du dossier, ce que les flics lui refuseront sûrement et ce qui sera pour lui un point à mettre en avant pour contester la garde à vue ensuite. Bref, si votre commis d’office vous explique qu’il ne va pas demander à lire le dossier parce qu’il n’en a pas le droit, c’est que c’est un bouffon. Ne suivez alors aucun de ses conseils.

Les arrêts admettent que le droit à assistance d’un avocat dès le début de la garde à vue puisse connaître des restrictions dans certains cas (« en règle générale », disent les arrêts). La loi actuelle recense un certain nombre de cas (terrorisme, stups…) où la venue de l’avocat est différée. La loi qui entrera en vigueur le 1er juin reprend ces exceptions et en ajoute d’autres (en particulier les flics pourront demander le « report » de la présence de l’avocat lors des interrogatoires lorsque des « raisons impérieuses » l’exigeront…). Il semblerait que le gouvernement ait recommandé aux flics et aux procs d’appliquer les dispositions de la loi qui sera en vigueur en juin dès aujourd’hui, ce qui est plutôt étrange d'un point de vue juridique (mais c’est leur problème). Dans tous les cas, la formule « en règle générale » est vague et ne donne pas de précisions sur les cas où les flics peuvent s’opposer au droit à l’assistance de l’avocat : donc quand il y aura refus de leur part, quelles que soient les raisons invoquées, il y aura une possibilité de jouer là-dessus pour chercher une nullité. Là encore, c’est à l’avocat de faire ce boulot mais il sera utile de le rappeler aux commis d’office.

Pour conclure sur tout ça, disons en deux mots qu’on ne sait pas du tout ce que la présence d’un avocat au cours de la garde à vue va changer réellement, mais il convient de se méfier : certains avocats, parmi les commis d’office, risquent fort de prendre leur rôle « d’auxiliaires de justice » au mot et de se transformer en vrais auxiliaires des keufs, donnant des conseils qui au bout du compte vont enfoncer la personne au lieu de l’aider.

D’autre part, même en présence d’un avocat qui bataille un peu contre les flics, les choses seront loin d’être gagnées puisque la nouvelle loi prévoit tout simplement qu’un flic pourra demander à ce qu’un avocat qui le dérange un peu trop soit remplacé (article 8 de la loi, futur article 63-4-3 du code de procédure pénale). Pas sûrs que les flics ne cherchent pas à se débarrasser des gêneurs dès aujourd'hui, sans attendre le 15 juin.

Bref, dans l’absolu les arrêts du 15 avril et la réforme du 1er juin ne changent pas grand chose et surtout n’enlèvent pas le fait qu’il est préférable de se taire en garde à vue et de réserver ses explications à plus tard, après avoir pris une connaissance complète du dossier et des éléments à charge par l'intermédiaire d'un avocat de confiance.
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Re: Les différentes étapes émotionnelles de la garde-à-vue

Messagepar Nico37 » Jeudi 19 Mai 2011 19:38

Voici une version actualisée du guide juridique pour les manifestantEs.
Des modifications seront à effectuer dès juin en raison notamment de la loi sur la garde à vue et celle sur l'immigration...

Guide juridique A4 mai 2011 : https://mensch.coop/files/1589/Guide%20 ... 1%20A4.pdf

Guide juridique mai 2011 livret A5 : https://mensch.coop/files/1589/Guide%20 ... t%20A5.pdf

Pense-bête juridique mai 2011 : https://mensch.coop/files/1589/Pense-b% ... 202011.pdf
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