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Messagepar AnarSonore » Mardi 16 Juin 2009 11:18

Deux cents personnes dînent ensemble pour garder en France l'oeuvre de Debord
LE MONDE | 13.06.09 | 18h17 • Mis à jour le 13.06.09 | 18h17

Le compte à rebours est enclenché. Et le temps file vite. Depuis le 29 janvier, date à laquelle la ministre de la culture, Christine Albanel, a classé "trésor national" les archives de Guy Debord (1931-1994), le chef de file du mouvement situationniste, l'Etat dispose de trente mois pour rassembler l'argent nécessaire afin d'acquérir ce fonds inventorié par le libraire parisien Benoît Forgeot.

Outre le manuscrit autographe de La Société du spectacle (paru en 1967, disponible en "Folio"), ce fonds comprend une collection de notes de lectures, deux cahiers dans lesquels Guy Debord a inscrit ses rêves, tout ce qui concerne le Jeu de la guerre, avec un des cinq exemplaires de l'ouvrage qui a été pilonné, le manuscrit de son dernier projet de livre, toutes ses notes concernant le cinéma, de gros dossiers concernant l'édition, et l'ensemble de sa correspondance.
Passé le délai de deux ans et demi, ce fonds, dont l'intégrité a été préservée par Alice Debord, veuve de l'écrivain et détentrice des droits moraux sur l'oeuvre, pourrait migrer outre-Atlantique et être acquis par des universités américaines, très friandes de ce type de documents, comme celle de Yale, qui est déjà sur les rangs.

La valeur de ces archives est difficile à évaluer, mais elle dépasse plusieurs centaines de milliers d'euros. Afin de réunir une partie de la somme, Bruno Racine, président de la Bibliothèque nationale de France (BNF) a décidé de faire appel à des mécènes en les réunissant autour d'un dîner de prestige. Ce dîner de gala aura lieu le lundi 15 juin, sur le site François-Mitterrand, dans le prestigieux hall des Globes. Cette façon de lever des fonds est directement inspirée par les méthodes des fondations et musées américains, qui sollicitent ainsi de richissimes donateurs.

" Nous réunissons une fois par an tous nos grands mécènes dans un cadre prestigieux", explique le président de la BNF. En 2008, l 'argent récolté (autour de 200 000 euros) avait permis à la Bibliothèque d'acquérir une pièce unique de l'artiste allemand Anselm Kieffer, un hommage au poète Paul Celan, ainsi qu'un lot de lettres de Marcel Proust.

DEUX CENTS COUVERTS

Cette année, la crise promet de se faire un peu sentir, mais près de deux cents couverts payants sont déjà réservés (soit un peu plus que l'an passé) pour le dîner organisé par M. Racine et le banquier Jean-Claude Meyer, président du Cercle de la BNF. Cristaux , porcelaines, bordeaux classés et mets subtils sont au menu.

Le montant du couvert est fixé à 500 euros, mais les dons sont laissés à la discrétion des entreprises ou des personnes. "Il y a un plancher, mais pas de plafond", précise M. Racine. Certaines entreprises ou fondations comme Total, Veolia ou Roederer (qui offre le champagne) ont réservé une ou plusieurs tables de douze couverts.

Parmi les convives qui ont aussi pris leur rond de serviette figurent Sotheby's, les galeries d'art Ropac, Templon, la famille Boissonnat, via la Fondation Clarence. Pour les entreprises qui font des bénéfices, l'opération est intéressante, car les dons sont fiscalement déductibles à hauteur de 90 % ; pour les particuliers, le seuil est fixé à 60 %.

Le conseil d'administration du Cercle de la BNF comprend aussi de généreux donateurs, dont les plus réguliers sont Nahed Ojjeh, la veuve du richissime marchand d'armes Akram Ojjeh, le cofondateur de la maison de couture Saint Laurent, Pierre Bergé, mais aussi le patron du Groupe Rivaud, Edouard de Ribes, le collectionneur Pierre Leroy, cogérant du groupe Lagardère - tous sont du dîner. Cette année, le Cercle a aussi créé un prix de la BNF , doté de 10 000 euros pour soutenir la recherche contemporaine qui sera remis le même soir.

Au nombre des invités seront présents la ministre de la culture, Christine Albanel, qui peut autoriser le fonds du patrimoine à contribuer à l'achat, mais aussi la veuve de l'écrivain, qui a accepté que le manuscrit de La Société du spectacle soit exposé aux yeux des donateurs potentiels, pendant le dîner. D'autres oeuvres patrimoniales récemment acquises seront aussi présentées, comme L'Histoire de la belle Mélusine, de Jean d'Arras, de 1479, ou le manuscrit de L'Ecume des jours, de Boris Vian.

Les généreux donateurs mordront-ils à l'hameçon ? Réponse le 15 juin au soir. Mais déjà ce dîner a un avant-goût délicieux. C'est peu dire qu'entre ces mécènes et la pensée anticapitaliste et anticonsumériste de Guy Debord, il y a un fossé culturel. Bruno Racine doit bien aller chercher l'argent où il est. Et il rappelle : "La BNF ne va pas acquérir uniquement les fonds d'auteurs qui défendent l'ordre établi."

Alain Beuve-Méry
Article paru dans l'édition du 14.06.09.
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