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Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Samedi 22 Jan 2011 18:11
par AnarSonore
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Les deux volumes des Ecrits, parus chez L’Insomniaque, participent pleinement, en 1995, à la redécouverte et surtout à une meilleure connaissance de l’illégaliste Jacob. Ces deux livres forment un ensemble relativement cohérent d’environ 800 pages. Cohérent et original, l’ouvrage est agrémenté d’une fort riche iconographie et surtout de deux disques compacts dans lesquels nous pouvons entendre des scènes jouées par les membres de cette petite maison d’édition de Montreuil et retraçant les principaux épisodes de la vie de Jacob (les vols, le procès d’Amiens, le bagne). Dans ces deux cd aussi, le lecteur-auditeur écoute des chansons ouvertement anarchistes interprétées dans une vaste palette de style musicaux : du free-jazz pour La bande à riquiqui de Jean-Baptiste Clément, de la variété pour Le grand crack d’Eugène Pottier, du punk-rock pour La cellule de Jules Clarenson. Neuf ans plus tard, la réédition augmentée des Ecrits reprend le principe du livre-disque. L’éditeur n’a pas pris soin dans ce volume unique de 848 pages de justifier la présence une nouvelle fois d’un cd. Les chansons y dominent cette fois-ci nettement sur les textes lus (par Pierre Valentin Berthier et Robert Passas, décédé en 1996) ou joués. Léon Pélissard, de la bande des Travailleurs de la Nuit, donne deux morceaux à l’album : La Diane du prolétaire et Conseils à un pègre. Schultz, des Parabellum et ici de la Clinik, interprète magistralement Les Traine-misère de l’auteur du Temps des Cerises, tandis que Daniel Denécheau et Patrick Denain, après avoir chanté les deux morceaux de Pélissard, enregistrent Le transporté, morceaux évoquant - comme son titre l’indique - le bagne et ses joyeusetés. On retrouve également dans ce cd un grand nombre de morceaux précédemment enregistrés. Le Jacoblog et Anarsonore vont vous permettre d’écouter, jusqu’en novembre 2011, l’ensemble de ces titres, de manière régulière, à raison de trois morceaux par mois, entrecoupés d’articles et d’interviews.

Ecrits, volume I
L’Insomniaque
1995

p.19 : INTRODUCTION
Les disques
Au cours de nos recherches, nous avions réuni d’autres documents écrits, non pas de Jacob mais sur lui. Nous les avons classés, puis réécrits sous forme de say­nètes. Il nous semblait dommage de ne pas nous servir de cette masse de renseigne­ments qui, s’ils n’avaient pas été écrits par Jacob lui-même, n’en demeuraient pas moins d’une grande richesse. Le support sonore nous semblait être un bon moyen d’illustrer les écrits par ces documents.

Le premier disque comporte la .mise en scène des épisodes suivants :
- La fausse perquisition au mont-de-piété de Marseille.
- Une réunion de la bande totalement fictive mais dont les éléments sont empruntés aux témoignages de Jacob qu’Alain Sergent a recueillis auprès de lui.
- Le procès d’Amiens dont nous avons essayé de reconstituer les moments les plus importants.
Le deuxième disque contient:
- Une interview imaginée par le journaliste Victor Méric auprès de Jacob dans la prison d’Amiens juste après le procès.
- Le témoignage du commandant Michel sur Jacob qu’il fit paraître dans Confessions sous le titre de Mes bagnards.
- Le récit de l’affaire Capeletti et de la tentative d’évasion de Joseph Ferrand.
- Une scène entre Jacob et le cuisinier forçat Lemerle dans laquelle ce dernier lui livre une bonne recette de cervelle.
- La rencontre entre Jacob et Dieudonné autour d’une tentative d’évasion.
- Une intervention du docteur Rousseau qui relate sa rencontre avec Jacob.
- Le témoignage de Marie Berthou recueilli par Louis Roubaud pendant la cam­pagne en faveur de la libération de son fils.
- La rencontre fictive entre Jacob et un jeune homme sur le marché d’Issoudun.
- Les derniers hommages de M. Passas et M. Berthier à leur ami commun, qu’ils ont bien voulu lire eux-mêmes.
Par ailleurs, des chansons ponctuent chaque épisode; si la plupart des paroles sont d’époque, leur adaptation en est originale.

CD 1, Ecrits Insomniaque, 1995 :
1) Le mont de piété
2) La bande à riquiqui
3) Une réunion de la bande
4) La java des bons enfants
5) Première partie du procès
6) Deuxième partie du procès
7) Le grand Krack

CD 2, Ecrits, Insomniaque, 1995 :
1) Jacob et Méric
2) Ne dérangeons pas le monde
3) La cellule
4) La recette de la cervelle
5) Une rencontre avec Dieudonné
6) Le docteur Rousseau
7) Quoi le gaz ?
8) Une mère
9) L’usine
10) Le marché

CD 3, Ecrits, réédition Insomniaque, 2004 :
1) Introduction
2) Conseils à un pègre
3) La bande à riquiqui
4) La cellule
5) Le transporté
6) Quoi le gaz ?
7) Le grand Krack
8) L’usine
9) La rue des bons enfants
10) Les traîne-misère
11) La Diane du prolétaire
12) Le procès d’Amiens
13) Morceau caché

Programmation :

- Janvier 2011 :
Le Mont de piété
La bande à Riquiqui
Une réunion des Travailleurs

- Février 2011 :
La rue des Bons Enfants
Le procès 1
Le procès 2

- Mars 2011 :
Le grand crack
Jacob et Méric
Ne dérangeons pas lemonde

- Avril 2011 :
Le commandant Michel
La cellule
La recette de la cervelle

- Mai 2011 :
Rencontre avec Dieudonné
Le Docteur Rousseau
Quoi le gaz?

- Juin 2011 :
Une mère
L’usine
Le marché

- Septembre 2011 :
Introduction du cd 2004
Conseils à un pègre
Le transporté

- Octobre 2011:
Les traîne-misère
La Diane du prolétaire
Le procès d’Amiens

- Novembre 2011:
Marius et Pierre Valentin Berthier
Marius et Robert Passas

Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Samedi 22 Jan 2011 18:13
par AnarSonore
Le mont de piété

Commis le 31 mars 1899, le vol du Mont de Piété de Marseille est mis à jour le lendemain, 1er avril, ce qui, selon le mot d’Alexis Danan dans le magazine Voilà en 1935, fit rire la cité phocéenne « jusqu’aux larmes, et toute la France avec elle ». Repris maintes fois dans des biographies romancées de l’illégaliste, dans des bandes dessinées, les sources manquent pourtant sur ce truculent larcin. Quelques notes de police, dont celle du commissaire spécial de Marseille en date du 10 juin 1899, nous autorise à identifier avec sureté (sic) les quatre personnes ayant commis le forfait.

Arthur Roques, le plus vieux, revêt les habits du commissaire Jules Pons, nom qu’il emprunte à sa généalogie familiale. Il est assisté d’Alexandre Jacob, de Louis Maurel et … de Joseph Jacob, le père d’Alexandre. Cet épisode charnière pour l’illégaliste, révélant une mise en scène soignée et des qualités évidentes d’organisation et de sang froid, devient en 1995 le premier morceau du premier des deux CD des Écrits. L’Insomniaque indique d’ailleurs que la saynète “a été écrite à partir du livre d’Alain Sergent et d’un article paru dans le Petit Parisien du 02 avril 1899.” Elle est jouée par certains des membres de la petite maison d’édition de Montreuil.

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Dimanche 23 Jan 2011 10:50
par AnarSonore
La bande à Riquiqui

Toute ressemblance avec un haut personnage de l’état (sic) serait purement fortuite et nous ne pouvons que sourire devant un si bel anachronisme. Mindenhol vagyok ! Si L’Insomniaque a inclus La bande à Riquiqui dans le premiers de deux cd accompagnant, en 1995, les Ecrits de Jacob, c’est que le texte de Jean-Baptiste Clément, écrit en 1885, illustre parfaitement le principe de lutte des classes opposant une bourgeoisie triomphante, arrogante et pourtant minoritaire, à la masse des prolétaires dont elle usurpe les fruits de son travail. Finalement, la chanson met en lumière les conséquences du principe proudhonien de propriété et désigne l’ennemi - victime à dévaliser pour les Travailleurs de la Nuit.

Préalablement, elle avait déjà été mise en musique par M. Debaisieux et chantée par Bernard Haillant en 1971 dans un double 45 tours consacré aux chansons ouvrières. La version de L’Insomniaque est orchestrée, dans un style free jazz, par le groupe Prout Ensemble et interprétée aux flûtes par Yannick Le Goff, aux clarinettes par Samuel Maître, à la caisse claire par Manuel Vidal et au chant par Jean-Claude Asselin.

La bande à Riquiqui
Bien qu’on nous dise en république
Qui tient encore comme autrefois
La finance et la politique,
Les hauts grades et les bons emplois,
Qui s’enrichit et fait ripaille,
Qui met le peuple sur la paille ?
C’est qui ? C’est qui ?
Toujours la bande à Riquiqui !
Qui fait l’assaut des ministères
pour s’engraisser à nos dépens,
Qui joue encore au militaire
avec la peau de nos enfants,
Qui ne rêve que plaies et bosses
Pourvu qu’on fasse bien la noce ?
C’est qui ? C’est qui ?
Toujours la bande à Riquiqui !
Qui conspire avec la calotte
Et tous les mangeurs de bon dieu,
Pour faire une France bigote,
Une république de gueux,
Qui rit avec la sainte clique
Au crochet de la république ?
C’est qui ? C’est qui ?
Toujours la bande à Riquiqui !
Qui se fait pitre et Saltimbanque
pour décrocher le plus de voix,
Qui fait du prêt et de la banque
Comme Cartouche au coin d’un bois,
Et par un train grande vitesse
Qui file un jour avec la caisse ?
C’est qui ? C’est qui ?
Toujours la bande à Riquiqui !
Qui possède toutes les mines,
l’outillage et les capitaux,
le sol fertile et les usines,
l’air, le soleil et les châteaux,
Et qui se moque à panse pleine
Que le peuple meure à la peine ?
C’est qui ? C’est qui ?
Toujours la bande à Riquiqui !

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Samedi 29 Jan 2011 12:48
par AnarSonore
Une réunion de Travailleurs

Aussi fictive et improbable qu’elle eût pu être, cette réunion des Travailleurs de la Nuit, jouée par quelques-uns des Insomniaques ne manque pas pour autant d’intérêt. Comme l’indique la maison d’édition dans le mini livret de présentation du premier des deux cd accompagnant les Ecrits de Jacob, version 1995, “les éléments qu’elle révèle sont inspirés de ce que Jacob a raconté à Alain Sergent et des textes de Pélissard, Clarenson et Baudy que le journal Germinal fit paraître en 1905” (on trouvera l’ensemble de ces textes dans les colonnes de ce blog).

Et, lorsque ce morceau évoque quelques-uns des cambriolages commis par ces illégalistes, comme celui perpétré chez Pierre Loti par exemple, les acteurs ne commettent pas l’erreur de tomber dans le sensationnel et l’extraordinaire. Pas d’allusion donc à un quelconque gentleman cambrioleur. L’auditeur retrouvera, en revanche, tout au long de cette longue saynète, l’organisation et les motivations politiques d’une bande d’anarchistes oeuvrant pour la Cause. Paris, 1902, dans l’appartement de Jacob et de Rose Roux, Jules Clarenson, Marie Jacob, Marius Baudy, Joseph Ferrand, Léon Pélissard et Honoré Bonnefoy accueillent un petit nouveau, rencontré aux Causeries Populaires de Libertad : Félix Bour.

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Samedi 19 Fév 2011 23:09
par AnarSonore
La rue des Bons Enfants

Des petits pas dandinés. Un air de musette sur les bords de la Marne ou sur les boulevards de la capitale. La java est une danse populaire apparaissant et se développant dans les années 1930. Celle des Bons Enfants fait référence à l’attentat d’Emile Henry commis le 08 novembre 1892. Cinq morts dans un commissariat, une marmite à renversement et des morceaux de poulets partout dans les décombres. La chanson n’a donc pu être écrite par Raymond Callemin de la bande à Bonnot.

Raymond la science embrasse la veuve le 24 avril 1913. C’est d’ailleurs cette année que l’œuvre de Souvestre et Allain connait la célébrité du fait de son adaptation cinématographique. Or il est fait allusion au génie du crime dans la chanson qui préfère attribuer cependant l’explosion à la « lutte des classes » plutôt qu’à « Fantomas ». La Java des Bons Enfants émane d’une facétie du situationniste Guy Debord. Elle apparait une première fois sur le disque Pour en finir avec le travail - chansons du prolétariat révolutionnaire, sorti chez RCA en 1973. Mise en musique par Francis Lemonnier, elle est interprétée par Jacques Marchais et a été de maintes fois reprises.

On peut ainsi la retrouver en 2003 sur l’album Noir … et rouge aussi un peu des Amis de ta femme ou encore sur l’album 71-86-21-36 des René Binamé sorti en 1996. Un an plus tôt, Olivier Cueto en donnait une magistrale interprétation dans le premier des deux cd accompagnant les Ecrits de Jacob chez L’Insomniaque. Ce n’est plus une Java d’ailleurs et quelques passages ont été changés par rapport au texte initial. « On vend tout au plus offrant » devient, par exemple, « Viande à vendre au plus offrant ». Ces passages ont été mis en gras ci-dessous.

La rue des bons Enfants

Dans la rue des Bons-Enfants,
Viande à vendre au plus offrant.
Y avait un commissariat,
Et maintenant il n’est plus là.
Une explosion fantastique,
N’en a pas laissé une brique,
On crut qu’c’était Fantômas,
Mais c’était la lutte des classes !
Un poulet zélé vint vite,
Il portait une marmite,
Qu’était à renversement,
Il la retourne imprudemment.
Badaboum !
L’inspecteur, le commissaire,
Mêlés aux poulets vulgaires,
Eclatent en fragments épars. Buvard.
Contrairement à ce qu’on croyait,
Y’en avait qui en avait,
L’étonnement est profond :
On les retrouve jusqu’au plafond.
Dans la rue des Bons-Enfants,
Viande à vendre au plus offrant.
L’avenir radieux prend place
Et le vieux monde est à la casse.

Voilà bien ce qu’il fallait,
Pour faire la guerre au palais,
Sache que ta meilleure amie,
Prolétaire, c’est la chimie.
Les socialos n’ont rien fait,
Pour abréger les forfaits,
De l’infamie capitaliste,
Heureusement vient l’anarchiste.
Il n’a pas de préjugés,
Les curés seront mangés,
Le travail, le pouvoir
Il le nie.
Encore quelques beaux efforts,
Et disons qu’on se fait fort,
De régler radicalement,
Le problème social en suspens.

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Samedi 26 Fév 2011 10:52
par AnarSonore
Le Procès d’Amiens - 1ère partie

La mise en scène du procès d’Amiens permet, comme l’affirme le livret de présentation du premier des deux cd accompagnant les Écrits de Jacob, de révéler la formidable rhétorique du voleur anarchiste. De facto, l’illégaliste peut, par une espèce d’inversion dialectique, mettre juges, avocats, jurés et témoins sur le banc des accusés. La saynète relatant cette comédie dramatique et judiciaire qui se tient du 8 au 22 mars 1905 est longue. Plus d’une demie heure ! C’est pourquoi l’équipe de l’Insomniaque a eu l’heureuse idée de la couper en deux et, dans cette première partie, nous pouvons ouïr une évocation de l’organisation de la bande des Travailleurs de la Nuit ainsi qu’un rappel des évènements qui ont conduit au démantèlement de la dite bande, nommé par la presse de l’époque “bande sinistre” ou encore “40 voleurs” ou encore “bandits d’Abbeville”.

Cette dernière dénomination fait bien entendu référence au cambriolage Tilloloy qui précède de peu le drame de Pont Rémy et l’arrestation de Jacob à Airaisnes le 22 avril 1903, et non pas en mars de cette année comme il est affirmé dans ce morceau. Deux ans plus tard, l’appel des 23 accusés qui comparaissent devant la cour d’assises de la Somme permet à la presse de faire ressurgir la peur des anarchistes, peur qui s’inscrit bien évidemment dans le cadre d’un climat d’insécurité largement entretenu par ces feuilles à cinq sous. Et si l’on entend Pélissard et Clarenson dans cette première partie, c’est bel et bien Jacob, Alexandre Marius, dit Escande, qui fait le spectacle au grand dam des honnêtes gens chargés de l’envoyer au bagne ou à l’échafaud.

Livret de présentation,
premier cd des Ecrits,
Insomniaque, 1995
Morceau 5 et 6 :
Le procès

les articles de presse de l’époque ont largement aidé à mettre en scène ce qu’un journaliste de l’époque qualifiait de procès renversé, “ce n’est pas la société représentée par les magistrats et les jurés qui jugent Jacob, chef des voleurs, c’est le chef des voleurs Jacob qui fait le procès de la société”. les déclarations des accusés sont rapportées avec le plus grand soin possible.

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Dimanche 27 Fév 2011 12:31
par AnarSonore
Le Procès d’Amiens - 2ème partie

Dans cette deuxième partie du procès d’Amiens, les comédiens amateurs de l’équipe de L’insomniaque poursuivent leur relation de la comédie judiciaire et dramatique, dans laquelle Alexandre Jacob joue le premier rôle. Ses diatribes contre la noblesse, le clergé, la rente et les militaires prouvent quoi qu’en ait pu dire la presse bourgeoise de l’époque, à l’image d’Henri Varennes dans Le Figaro, que l’on peut bien être anarchiste “quand on s’appelle Marius, qu’on a dans la voix, dans l’allure, dans le geste, la gaité méridionale et un besoin débordant de rigolade” (14 mars 1905).

L’article Illégaliste Parfaitement ! du n°22 du magazine Réfractions (printemps 2009) mettait justement en lumière les aspects politique du discours des anarchistes ayant manié qui la marmite à renversement, qui les outils du cambrioleur. Le propos d’Alexandre Jacob peut alors s’inscrire dans la justification politique du vol par le droit naturel à l’existence. Mais la saynète révèle encore les limites de la méthode employée par l’honnête cambrioleur qui, à force de provoquer nombre d’incidents, finit par être expulsé en compagnie d’un certain nombre des Travailleurs de la Nuit lors de la sixième audience, le mardi 14 mars 1905. La fin du procès, se déroulant sans le principal accusé, perd en intensité et nous pouvons alors entendre Maître Justal, défenseur de l’illégaliste, avant l’annonce de la condamnation de la troupe d’illégaliste.

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Re: Alexandre Jacob - Ecouter l'honnête

MessagePosté: Dimanche 20 Mar 2011 22:36
par AnarSonore
Le grand Krach

Nombre de textes d’Eugène Pottier sont dédiés à des personnalités issues soit de la Commune de Paris, soit du monde des chansonniers, soit encore du socialisme dit révolutionnaire. Ce sont justement les Chants révolutionnaires de l’auteur qui sont publiés l’année de sa mort en 1887. L’Internationale a ainsi été écrite pour Gustave Le Français, le seul communard qu’ait fréquenté Alexandre Jacob alors que l’honnête cambrioleur résidait à Paris sous les traits de Georges Escande entre 1901 et 1903. Avec le Grand Krach, Pottier écrit pour Gustave Rouanet, fils d’un proscrit du coup d’état du 2 décembre, journaliste virulent dans la presse socialiste de Paris, ardent défenseur des mineurs gréviste du bassin houiller des Cévennes en 1881.

Mais le vieux communard ne pouvait pas se douter que l’homme, proche de Benoit Malon, émargerait à l’Aquarium des Bouffes-galette de 1893 à 1914 d’abord pour le compte des rad-soc, puis pour celui des Socialistes unifiés et enfin pour le parti socialiste de Jaurès.

Dans cette chanson, Eugène Pottier s’en prend aux mécanismes spéculatifs qui alimentent le triptyque capital - propriété - travail. L’usure qui en découle apparait ainsi comme le stade ultime d’un vol légal, celui du labeur prolétaire par le possédant bourgeois. Et, comme un prélude au Grand Soir, le système engendrerait sa propre perte, les bourses s’effondrant, les banques faisant faillite, les usines déversant une “farandole immense“ de “forçats libérés“.

Le Grand Krach, écrit à l’occasion de la grande dépression qui frappe l’Europe et le monde à la fin du XIXe siècle, ralentissement économique qui enrichit une minorité, peut aussi justifier les pratiques illégalistes dont Jean Maitron nous dit dans son histoire du Mouvement anarchiste en France qu’elles eurent un succès certain parmi les camarades après l’éphémère et néanmoins explosif épisode de la propagande par le fait. Quoi qu’il en soit, en déclarant n’approuver et n’avoir « usé du vol que comme moyen de révolte propre à combattre le plus inique de tous les vols : la propriété individuelle », Alexandre Jacob ne fait finalement qu’abonder dans le sens des propos du vieil Eugène.

Nous pouvons retrouver logiquement cette chanson dans le premier des deux cd accompagnant la première version des Ecrits du cambrioleur anarchiste en 1995. Et, comme une allusion à Bobby Lapointe, elle a été orchestrée par le duo Trois Ligne de Bling.

Le grand Krach

Texte d’Eugène Pottier,
Mis en musique par le duo Trois lignes de Bling


Au citoyen G. ROUANET.

Le grand Krack est bien proche,
Mais la vaste sacoche
De tous les suceurs d’or,
Parle jeu d’une pompe,
Jusqu’à ce qu’elle en rompe,
S’emplit, s’emplit encor.

La masse qui turbine
Sèche dans la débine
Comme un linge tordu.
La pompe trouve à boire,
Dans sa misère noire.
Des gouttes d’or fondu.

Bientôt, montagne énorme,
Le Capital se forme
Du travail non payé.
La sacoche se gonfle
Et le piston qui ronfle
N’est jamais enrayé.

Tout coule en or liquide,
Le cerveau qui se vide,
La moelle de nos os,
Les gaz, les mers, les nues,
Les forces inconnues,
L’épargne des gogos !

Ce vol se perpétue,
Épuise et prostitue
Ce vieux globe gâté.
Humanité souffrante,
Cette pompe aspirante,
C’est la Propriété.

Mais tout a sa mesure.
Dans le sac de l’Usure
Se déclare un grand trou.
Où trouver un refuge ?
Crevant comme un déluge,
Il pleut un argent fou.

A bas tous les commerces,
Il tombe des averses
De coupons lacérés.
Et l’on voit - pertes sèches -
Voltiger en flammèches
Tous les papiers timbrés.

Bravo ! la Banqueroute,
Sur la Bourse en déroute,
Roule ses flots amers.
On voit grossir les ondes,
Les forbans des deux mondes
Sombrent au fond des mers.

Au feu les budgets ivres !
Les Banques, les grands livres
S’embrasent à la fois.
Le ciel en devient rose,
Et cette apothéose
Ébahit les bourgeois.

Que peuvent-ils répondre ?
Le sol craqué et s’effondre
Sous leurs pas effarés ;
Et sur terre commence
La farandole immense
Des forçats libérés !

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