Mais il y a des guillemets donc un bémol.Et c'est un texte qui a quasiment 100 ans alors la signification des mots a parfois changé.
et Malatesta apporte pas mal de réponse interressantes.
BILAN GLOBAL DE LA SOLIDARITÉ
D’APRÈS LE TREMBLEMENT DE TERRE
DU 12 JANVIER
Dans les premiers jours qui suivirent le tremblement de terre du 12 janvier 2010 passé, nous reçûmes des messages provenant de camarades et amis de toutes parts. Comme nous l’avons toujours dit, la solidarité est pour nous une attitude, un comportement extrêmement important dans la lutte qui nous occupe, une composante essentielle dans la bataille, où l’aspect politique actif demeure prioritaire – discussions / rapprochements sur la ligne à adopter, et continuer de construire, stratégie / tactique… - mais où l’aspect sympathisant garde également toute son importance.
Dès connaissance de l’abîme du 12 janvier, ce sont interrogations, inquiétudes paniquées, profondes et aveugles tristesses qui apparaissaient dans les trop simples messages exprimés. Nous ne saurons jamais trouver les mots pour exprimer notre reconnaissance. Les paroles que nous trouvions une fois la communication quelque peu retrouvée nous aidèrent tellement en effet à nous relever et à nous réorganiser. Cet appui moral nous apporta donc énormément et fut déterminant en ces moments si troublants. C’est en ce sens que nous voulons aujourd’hui renouveler notre sincère appréciation devant ces gestes si spontanément et totalement exprimés.
Au même moment, les personnalités et organisations en rapport avec nous depuis longtemps et qui avaient toujours lutté dans notre même direction, commencèrent à répondre à l’appel d’aide financière que nous avions lancé sur notre site web. Cet argent vint nous joindre à notre compte bancaire de Port-au-Prince (voir notre site web www.batayouvriye.org où nous relatons les montants jusqu’ici arrivés). En plus de l’argent, nous sûmes également de la tellement entière participation des ouvriers des différentes organisations amies, les ouvriers qui, comme nous le savons si bien, n’ont pas grand grand-chose pour vivre et qui, de manière si vive, ont tous contribué à aider leurs frères de classe : sentiment humain majeur s’il en est. À leurs yeux, nous n’aurons pas de mots non plus pour exprimer notre gratitude, sauf reconfirmer que, venant d’eux : nous le savions déjà. C’est pourquoi c’est pour eux, d’abord, ainsi qu’à tous nos amis qui ont tellement contribué à nous relever que nous présentons aujourd’hui ce bilan global sur l’utilisation de l’argent reçu en signe de solidarité, pour que vous tous preniez connaissance de nos pratiques, les comprendre et, à partir de cette relation, continuer à participer avec nous dans la lutte.
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Suite au tremblement de terre, c’est non seulement sans électricité, sans eau, sans transport que nous nous retrouvions mais également sans possibilité de communiquer ! Même si certains camarades eurent à parcourir de longues distances à pied en vue de rétablir les principaux contacts et avoir une orientation commune, c’est individuellement que nous avons agi. Pratiquement, aucun de nos principaux responsables n’est décédé, il n’y eu pas non plus trop de blessés graves (même si quelques uns souffrirent de forts impacts) mais plusieurs perdirent maison et membres de leur famille. Sans moyens réels de survie (nourriture, eau… mais aussi médicaments, premiers soins…), comme dans la majorité des situations populaires, c’est avec les ongles que nous fonctionnions. Dans ces premiers moments, la plupart de nos camarades eurent à emprunter de l’argent pour simplement survivre avec leur famille et chercher à retrouver ce qui se pouvait dans les maisons détruites ou fissurées (vêtements, souliers, documents…), à soigner les blessés, retrouver leurs morts, les enlever de dessous les décombres, les enterrer… aider d’autres connaissances ou voisinage à faire de même, et essayer, malgré toutes les difficultés, d’organiser un minimum, à partir du fonctionnement que l’expérience de lutte nous laisse à tous. La toute première solidarité financière qui nous parvint fut donc à remettre ces emprunts réalisés et continuer plus ou moins à fonctionner de la sorte.
Le second moment fut celui de chercher à sortir des toiles, draps ou autres cartons de fortune pour se trouver une tente ou tout au moins une bâche. Notre présence aux campements s’imposait de plus en plus, non seulement pour y apporter tout notre soutien mais déjà pour y définir l’orientation politique adéquate selon notre point de vue (voir notre « Déclaration » du moment). Ceci aussi demanda beaucoup d’argent : pour les transports qui avaient alors quadruplé, pour l’organisation et la mise en place de la lutte concrète, pour chercher à organiser des campements « un peu moins mal ». Certains camarades qui pour diverses raisons ne pouvaient soutenir le rythme durent se rendre en milieu rural d’où ils provenaient. Ce qui, à nouveau, coûta de l’argent. Mais, là encore, les familles paysannes ne pouvant se responsabiliser de cette nouvelle et inattendue charge supplémentaire, ils durent retourner à la capitale. En résumé : cette période peut se caractériser par de nombreux et coûteux déplacements, très souvent stériles.
Quand l’ « aide » impérialiste commença à arriver de manière plus soutenue, débuta une troisième phase, celle de la LUTTE proprement dite. Là encore, notre « Déclaration » du moment décrit celles que nous pensions principales et qui se menèrent effectivement. Ce fut alors que la solidarité financière qui nous parvint de manière plus constante et de montants plus importants nous aida à fonctionner de nouveau de façon adéquate. Rencontres dans nos locaux (même fissurés), dans les campements, dans les quartiers encore debout, dans les zones rurales avoisinantes qui pouvaient apporter un quelconque appui à la situation de la capitale, dans diverses provinces où nous sommes implantés afin de les mettre en phase avec les lieux affectés et, ainsi, pouvoir de façon unifiée retourner à attaquer la scène politique, sur laquelle nous avions entamé la focalisation de manière nationale peu avant le tremblement de terre. Par-dessus les difficultés, ce travail fortifia considérablement notre organisation. En effet, la solidarité financière, alors régulière, nous permis de réaliser deux rencontres nationales d’importance et diverses partielles, de préparation chaque fois. Et, alors, penser à retrouver les nécessaires mobilisations qui s’imposaient devant la situation globale de plus en plus tendue.
En effet, faire face à la situation économique, politique, idéologique et sociale globale, nous amena directement à la mobilisation de rigueur. Celle des Campements du 28 avril, celles du Premier mai, la dernière du 18 mai… ensemble de pratiques (en soi mais aussi avec tous les détails accompagnant : banderoles, affiches, interventions, bulletins, déplacements, concentrations, solidarité avec les organisations alliées…) qui ne nous fut possible que grâce à la solidarité financière que nous recevions, de cette solidarité de classe qui nous permit – peut-être surtout – de rester fermes sur notre ligne fondamentale, avec notre capacité de fonctionnement retrouvée. En ces moments, remettre sur pied notre capacité de diffusion (laptops, risographes, photocopieuses, papier, encre, génératrices, mégaphones, systèmes de son… tout ce qui avait été grandement affecté) nous fut clé.
Cette période fut très longue. Nous devions diriger le financement sur les mobilisations et autres rapports politiques en cours mais en même temps continuer d’aider tous ceux qui se trouvaient encore en grandes difficultés (militants proches mais également familles, amis, voisins, nouveaux contacts, nouveaux intégrés… également affectés). Sans compter que, dans certains endroits, des écoles de fortune avaient ré-ouvert leurs portes… : livres donc, uniformes, fournitures classiques… Montant très important. Ce fut alors aussi que nous avons commencé à réparé ce qui pouvait l’être dans les maisons fissurées, les locaux affectés et les écoles que nous tenons en milieu rural parfois touchées ou carrément détruites.
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Sans être entré dans les détails des différentes activités ou pratiques que nous avons eu à réaliser et que nous réalisons encore, c’est globalement l’orientation que nous avons donné à la solidarité financière reçue durant ces six mois passés. Aujourd’hui, se présente un nouveau moment, celui de la « reconstruction ». De tous, c’est peut-être le plus complexe, le plus grave, le plus déterminant pour l’avenir du pays, pour la vie des travailleurs et des masses populaires en général. Afin de l’affronter, un nouvel accord entre les forces du Camp du Peuple doit se matérialiser. La solidarité international y jouera encore un rôle important tant politiquement que financièrement. C’est pourquoi nous tenons à renouveler notre appel en ce sens, pour une solidarité encore plus agissante et nue mobilisation commune encore mieux coordonnée. La lutte ne fait que commencer !
Nous ne terminerons notre bilan global sans saluer le courage de nos camarades mais aussi celui de nos amis alliés qui eux-aussi tout autant affectés se sont relevés de même et ont repris la lutte de manière valeureuse. Cela sera, en fait, la seule façon que nous aurons pour nous permettre de faire face à la domination / exploitation / occupation-tutelle qui nous affecte aujourd’hui et qui se propose de s’élargir encore plus, par dessus les cadavres de nos morts.
BATAY OUVRIYE
Port-au-Prince, 2 juillet 2010
SOLIDARITE a écrit:Avec le nouveau drame que connait Haiti, peut être pourrait on relancer l'appel à la solidarité ?