Rapport sur les circonstances qui ont conduit à l’arrestation des Anarchistes de Belgrade et à l’accusation de terrorisme internationalLE CAS DES 6 DE BELGRADE.Dans la nuit du 24 au 25 août 2009, après 6H du matin, 2 cocktails molotov ont été lancés contre l’ambassade grecque à Belgrade. Les conséquences se résument à une fenêtre cassée et à quelques dommages en façade, mais le feu ne s’est pas propagé à l’intérieur et a été rapidement éteint. Au cours de cette "attaque", aucune personne n’a physiquement été mise en danger parce qu’il n’y avait personne dans l’ambassade à ce moment-là et ce même matin, le personnel de l’ambassade a pu travailler normalement.
Les responsables de l’ambassade ont confirmé que les dommages étaient superficiels :
"L’ambassade fonctionne sans problème. Nous établissons des visas et travaillons avec le public dans des conditions normales."
Le ministère de l’intérieur serbe (MUP) a contacté les responsables grecs pour s’assurer que tout était en ordre et pour condamner l’attaque. L’après-midi du 25 août, le jusqu’alors inconnu groupe anarchiste "Crni Ilija" (Soleil Noir) revendiqua l’attaque et transmis le communiqué suivant à la presse :
"Notre compagnon, Todoris Iliopoulos, qui fut arrêté pendant le soulèvement populaire de Grèce en décembre 2008, fait la grève de la faim depuis 46 jours pour exiger sa libération. Pendant qu’il lutte pour la liberté, l’état grec organise un procès fabriqué de toutes pièces contre notre compagnon Todoris.
Les anarchistes de Belgrade se sont joints aux compagnons de Grèce et du monde entier pour des actions de solidarité et demander sa libération. C’est pour cela que les membres de notre groupe ont attaqué l’ambassade de Grèce à Belgrade avec des cocktails molotov pendant la nuit. Nous continuerons nos activités jusqu’à la libération de notre compagnon Iliopoulos. Liberté pour Todoris ! " Groupe anarchiste crni ilija.
Todoris Iliopoulos fut pris le 22 décembre 2008 pendant les événements d’Athènes qui commencèrent après que la police tue Alexandros Grigoropoulos, 15 ans, dans le quartier d’Excharchia le 15 décembre. Il était en prison jusqu’au 25 août, jour ou il fut mis en liberté conditionnelle. Il est accusé de 2 actes criminels (une attaque au cocktail M contre la police et d’autres délits). Pendant tout le temps de son incarcération, Iliopoulos protesta contre toutes les charges, basées uniquement sur les accusations de la police. Il a commencé sa grève de la faim le 10 juillet 2009. Lorsque le danger pour sa santé devint évident, après 40 jours de grève de la faim, on lança à travers divers sites web anarchistes, un appel en faveur de "l’action pour la libération de Iliopoulos" et on organisa diverses activités incluant des discussions, de la propagande et des meetings en faveur de la libération immédiate de Todoris Iliopoulos. Il fut planifié que ces activités démarrassent le 24 août à 20H.
La pression des médias-la préparation de la farce appelée "terrorisme".Le président serbe, Boris Tadic, a condamné l’incident et dans une conversation avec l’ambassadeur grec en Serbie, Dimostenis Stodis, il menaça que l’état prendrait toutes les mesures nécessaires pour localiser et punir les responsables.
Ceci annonçait, effectivement, le procès politique contre les 6 de Belgrade. Les médias serbes, sur ordre de l’Etat, ont focalisé leur communication afin de neutraliser et éliminer la moindre expression critique ou gauchisante. Il y eu des spéculations autour d’un supposé complot terroriste orchestré par des sites web anarchistes ; après quoi, c’est dans ce contexte qu’il fut fait mention de la foire du livre anarchiste des Balkans qui eut lieu en juillet 2009, où, insinua-t-on, que se prépara l’attaque contre l’ambassade grecque et finalement une "source proche de l’enquête" déclara à la presse que cette attaque peut être considérée comme un acte terroriste. Les avocats de la défense "bien informés" ont, aussi, insinués que les anarchistes serbes ont commis cet acte pour pouvoir obtenir un appui logistique et financier des anarchistes grecs. Zoran Dragisic, agrégé de l’université d’études sur la sécurité, et un des fondateurs du parti social-démocrate serbe, a considéré qu’il s’agit d’une attaque organisée et qui cache des intentions politiques :
"Nos forces de sécurité doivent prendre ce groupe au sérieux. Un autre problème est que l’ambassade d’un pays ami a été attaquée.
Il faut neutraliser tous ces groupes de gauche et de droite qui utilisent la violence. Les forces de sécurité doivent surveiller tous les groupes suspects et incarcérer toute personne utilisant la violence. Si l’état ne peut pas les arrêter, ceci indiquerait qu’ils sont plus puissants que l’état lui-même. C’est, alors, à eux que nous devrions payer des impôts plutôt qu’à l’état. Il ne peut pas être question de se demander si l’état peut faire ceci, mais, l’état doit le faire.
Les groupes anarchistes et fascistes sont une menace pour l’ordre public. Du point de vue de la sécurité, peu importe les différences idéologiques qui puissent exister entre eux ; tous violent la loi. Il faut procéder à l’arrestation, aux poursuites et à l’inculpation de charges importantes et les activités des organisations doivent être surveillées, c’est le travail de l’agence de sécurité (BIA)."
Dragisic affirma auss que ces activités peuvent évoluer vers des actes de terrorisme et qu’il ne faut pas les sous-estimer. Bozidar Spasic (l’ancien chef de l’UBDA) considère que l’objet principal de cette action était d’attirer l’attention des anarchistes grecs :
"Une telle attaque ne peut pas être réalisée sans une bonne préparation, sans observer la sécurité du bâtiment de l’ambassade pendant une période d’au moins 10 jours, par une présence physique ou bien dans les cafés des alentours pendant ce laps de temps. C’est préoccupant qu’il n’y ait eu aucune réaction des forces de sécurité de l’établissement et aucune coopération entre polices grecque et serbe à propos des anarchistes dans leurs pays respectifs."
Il ajoute : Les anarchistes en Grèce se sont renforcés d’une telle manière qu’ils sont capables de séquestrer des chefs d’entreprise grecs et d’attaquer les banques pour pouvoir financer leurs attaques. Pour cette raison, on les qualifie de terroristes de 1° rang comme ETA et IRA. Jusqu’à ce que se produise le cas de ’’crni ilija’’, les actes violents en serbie de la part de groupes anarchistes étaient inconnus. Les activités des anarchistes serbes sont bien connues du public comme, par exemple, des meetings dans les universités et devant les usines, l’organisation d’événements culturels et la participation dans la contestation ouvrière et étudiante.
L’arrestation, l’enquête et l’accusation de terrorisme.Les adhérents de l’ASI-AIT, Sanja Dojkic, Ratibor Trivunac, Tadej Kurepa et Ivan Vulovic ont été arrêtés le 3 septembre 2009 et accusés d’actes criminels entraînant un danger public. Ils furent mis en garde à vue pendant 48H dans un commissariat. La police a mis en détention nos compagnons, d’une façon brutale, en entrant dans les maisons sans permission et en menaçant les familles. Le jour suivant, le 4 septembre, on arrêta Nikola Mitrovic qui n’est pas membre de l’ASI-AIT et la police annonça qu’elle était aussi à la recherche de Ivan Savic, lui aussi non-membre de l’ASI-AIT. Le juge a déclaré que leurs actes constituent des actes de terrorisme qui peuvent être punis de 3 à 15 ans de prison.
Les compagnons détenus purent contacter leurs avocats et les familles purent leur rendre visite une fois tous les 15 jours. Toute autre visite ou communication avec le public et la communication entre détenus ne furent pas permises.
Les poursuites sous le coup des lois anti-terroristes se mirent en marche et on associa le groupe ’’crni ilija’’ à des organisations terroristes comme al-quaïda, l’IRA ou l’ETA.
Immédiatement après, la police publia les photos des détenus, les désignant, d’entrée, comme coupables. Le porte-parole du procureur Tomo Zoric, déclara que
"les investigations devront montrer si ceci a été un acte terroriste ou un acte qui a causé un danger généralisé. Ce qui est sûr, c’est qu’on les accusera d’un crime."
Après cette accusation, Zoran Dragisic, déclara que
"nous devons prendre en compte que les anarchistes ont une espèce d’internationale. Cependant, on ne sait pas, exactement, jusqu’à quel point il peut y avoir un rapport entre ceux qui lancèrent les cocktails molotov contre l’ambassade grecque et les anarchistes grecs, bien qu’ils disent dans leur communiqué que l’acte fut commis en lien avec la situation en Grèce et, donc, c’est de là que pourrait découler ce lien. Cependant, la question à poser est de savoir si ce lien existe réellement et si l’attaque contre l’ambassade grecque a un lien avec le mouvement anarchiste international."
Vladimir Todoric, dans une revue légale, déclare que
"lancer des cocktails molotov pour des raisons politiques contre l’ambassade grecque, celle-ci étant extra-territoriale, rejoint quelques-unes des conditions assimilées au terrorisme international",
pendant que d’un autre côté, l’avocat Dragoljub Todorovic, conseiller des accusés, a dit que, dans ce cas, quelques-unes des conditions ne se réalisent pas, que l’ambassade n’a pas subi de dommages importants et qu’ils furent commis la nuit sans intention de blesser qui que ce soit. L’avocat Radonja Dubljevic, qui représente un des accusés, a déclaré que, dans ce cas, il y a des fautes (ou des manques) de logique.
"La 1°, c’est que les procédures avant le procès, menées à terme par la police, traitèrent le crime comme une source de danger généralisé, qui entraîne une peine maxi de 5 ans de prison. Il faut se demander ce qui s’est passé dans l’intervalle entre la garde à vue policière et le tribunal."
Dubijevic ajouta que le procureur n’a pas pris en compte les définitions propres du terrorisme et que les cocktails molotov, ou ce qui fut lancé contre l’ambassade grecque, est qualifié de crime plus grave que l’incendie de l’ambassade nord-américaine de février 2008 qui causa la mort d’une personne. Dans ce cas-là, on accusa un individu d’avoir causé un danger généralisé, crime entraînant une peine de 1 à 6 ans de prison, alors que le terrorisme international coûte de 3 à 15 ans. Ce crime est un des plus problématiques et il est considéré équivalent au génocide et aux crimes de guerre.
La définition du terrorisme consiste dans l’usage prémédité de la violence illégale ou de la menace de violence pour créer un climat de peur et pouvoir atteindre des objectifs politiques, idéologiques ou religieux.
Les 4 points du terrorisme sont :
- 1) Les objectifs sont, normalement, politiques, soit pour obtenir un changement de régime, soit pour changer de leader politique, soit pour faire sécession de certains territoires.
- 2) L’usage de la violence ou la menace d’utiliser celle-ci.
- 3) Les victimes sont, normalement, des citoyens innocents.
- 4) Il n’y a pas de lien direct entre les terroristes et les victimes, ce qui veut dire que l’attaque n’est pas dirigée contre les victimes, mais, qu’elle est conçue pour envoyer un message à la communauté en général.
Les réactions publiques.Le 06 septembre, il y eut une protestation en solidarité avec les détenus devant la fac de philo à Belgrade. Le 11 septembre, un groupe de professeurs de l’université de Belgrade envoya un communiqué collectif pour protester contre les circonstances de l’arrestation et la mise en accusation des personnes impliquées. Ils rejettent la qualification de terrorisme et déclarent que ce type d’accusation répond, uniquement, à la volonté de quelques politiciens de donner de la force à l’électorat public. Ils jugent que les poursuites rehaussent les sentiments nationalistes et chauvins dans la société.
Listes des manifestations à l’international.- 07 septembre 2009 : Pologne, Varsovie – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 07 septembre 2009 : Slovaquie, Bratislava – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 08 septembre 2009 : Portugal, Lisbonne – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 09 septembre 2009 : Croatie, Zadar – Collecte de dons dans la rue.
- 09 septembre 2009 : Autriche, Vienne – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 10 septembre 2009 : Slovénie, Ljubljana – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 11 septembre 2009 : Australie, Melbourne – Lettre de protestation remise au consul Serbe.
- 11 septembre 2009 : Autriche, Vienne – Seconde Protestation.
- 11 septembre 2009 : Grande-Bretagne, Londres – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 14 septembre 2009 : Croatie, Zadar – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 15 septembre 2009 : Russie, Moscou – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 15 septembre 2009 : Ukraine, Kiev – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 16 septembre 2009 : Grèce, Athènes / Thessalonique – Protestation devant l’ambassade / Consulat de Serbie.
- 18 septembre 2009 : Pays-bas, La Haye – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 18 septembre 2009 : Bulgarie, Sofia – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 18 septembre 2009 : Allemagne, Berlin – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 19 septembre 2009 : Grèce, Komotini - Protestation sur la place principale.
- 25 septembre 2009 : Macédoine, Skopje – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 25 septembre 2009 : Allemagne, Frankfurt - Protestation sur la place principale.
- 28 septembre 2009 : Grande-Bretagne, Londres – Seconde Protestation.
- 29 septembre 2009 : Hongrie, Budapest – Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 01 octobre 2009 : Suisse, Berne - Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 02 octobre 2009 : Espagne, Madrid - Protestation devant l’ambassade de Serbie.
- 03 octobre 2009 : Espagne, Madrid - Protestation sur la place principale.
- 04 octobre 2009 : Russie, Saint-Petersbourg – Protestation.
- 08 octobre 2009 : Italie, Trieste – Graffitis.
- 17 octobre : France, Paris - Protestation sur la place Beaubourg, occupation du centre culturel de Serbie.
- 19 octobre : Allemagne, Frankfurt – Protestation à la foire du livre.
- 22 octobre 2009 : Turquie, Ankara - Protestation devant l’ambassade de Serbie.
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- 03 décembre 2009 : France, Toulouse – Distribution de 3000 tracts, autour du stade, lors du match retour de foot-ball France-Serbie.
La volonté du gouvernement de criminaliser l’ASI-AIT s’est, clairement, affichée en septembre 2009, quand on laissa filtrer via quelques journaux que l’ASI utiliserait sa présence pendant la marche des fiertés LGBT pour se venger de la détention de leurs compagnons et qu’ils attaqueraient la police. De plus, avec la présence de groupes d’extrême-droite comme "1389" et "obraz", le gouvernement déclara que la marche des fiertés LGBT ne pouvait pas avoir lieu parce qu’il ne pouvait pas garantir la sécurité des participants. Le 20/09, la police arrêta 37 membres d’organisations d’extrême-droite, et, le 22/09, le ministère de la justice déclara qu’ils interdiraient toute organisation qui utiliserait des méthodes violentes pour arriver à ses fins. Le président de Serbie, Boris Tadic, annonça qu’on poursuivrait tous les extrémistes, de gauche ou de droite devant les tribunaux du pays. L’article 55 de la constitution de Serbie dit que le tribunal constitutionnel peut interdire toute association qui se consacrerait à bafouer l’ordre constitutionnel, la violation des droits des minorités ou des droits de l’homme, ou incitant à la haine raciale, nationale ou religieuse.
Le 3 novembre, fut approuvée à l’unanimité une décision du tribunal chargé du terrorisme international à l’encontre des 6 anarchistes de Belgrade. La décision du tribunal stipule, également, qu’il est possible que le crime se répète par l’affinité des détenus et prévenus avec l’ASI-AIT.