quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

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quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

Messagepar NOSOTROS » Dimanche 05 Avr 2009 23:14

Société d’hier et réalité d’aujourd’hui : quelle présence dans le monde pour les libertaires ?

(Texte de synthèse écrit par un des participants à la suite de une réunion débat de militants de différents horizons anarchistes. Ce texte est une invitation au débat le plus large !)

La fin d’une époque ?

La crise sociale qui traverse depuis plus de trente ans les sociétés où sévit le capitalisme avancé est
en train de se doubler d’une crise économique majeure dont l’ampleur reste actuellement inconnue pour
une bonne part. Mais cette crise économique est plus grave que ne le laissent entendre les spécialistes
des idées courbes appelés couramment économistes. Il ne s’agit pas d’une crise financière seulement,
mais bien d’une crise de surproduction liée à la paupérisation et, par conséquent, à la difficulté pour les
capitalistes de trouver des nouveaux marchés. Quelque soit l’issue de cette crise, on peut déjà dire qu’elle
devrait se solder par un appauvrissement supplémentaire des classes populaires et des classes
moyennes du fait de la socialisation des pertes (en quoi consiste effectivement la nationalisation du
système bancaire), mais aussi en raison du chômage. Par ailleurs, cet état de crise risque de renforcer
encore la domination et la violence d’Etat.

On aurait tort en effet de penser que le capitalisme, à la faveur de la crise actuelle, pourrait s’écrouler
de lui-même. L’exemple argentin a montré que le capitalisme pouvait se relever après s’être effondré. En
2001-2002, une fuite des capitaux a provoqué la faillite du système bancaire argentin et la paralysie de
l’économie du pays. Les travailleurs ont même, de fait, assurés de façon autonome la gestion de leur
entreprise après que les capitalistes se sont évaporés dans la nature pour ne pas avoir à régler la note de
la facture : faire tourner une machine économique devenue temporairement non rentable. Mais cette
pratique de l’autogestion, « apolitique » dans bien des cas, était plus une façon pour les travailleurs de
gérer en réalité la crise que de passer à une appropriation collective des moyens de production dans le
but de socialiser l’économie. En l’absence d’une réelle volonté politique de liquider le capitalisme du côté
des travailleurs, l’Etat a pu reprendre la main. Finalement, les patrons, en s’appuyant sur l’Etat, ont pu
contrôler à nouveau les moyens de production et exproprier les groupes de travailleurs qui avaient
spontanément mis en pratique l’autogestion pour des problèmes tenant à la question de la survie en
période de crise aigue. Sans un mouvement d’opposition radicale organisé, le capitalisme peut donc se
relever d’une crise qu’il a provoqué en raison d’une forme de rationalité irrationnelle pour ne pas dire
délirante.

Quand le capitalisme prend de l’avance….

Après les grèves de 1995, les plus optimistes d’entre nous ont parlé d’un retour de la classe ouvrière
sur la scène politique. Mais avec le recule, et après les échecs des grèves de 2001 sur les retraites et
l’incapacité à développer une riposte collective face à l’offensive capitaliste, ont peut se demander si
décembre 1995 n’a pas marqué la fin d’une époque plutôt qu’une continuité. Ce n’est pas que les
antagonismes sociaux ou les intérêts de classe aient disparu, c’est plutôt que nous regardons passer le
train des « réformes » imposé par les capitalistes et leurs représentants politiques en restant coincés sur
le quai… Chômage de masse, intérim, temps partiel, précarisation, individualisation du travail, heures sup,
exploitation intensive de la force de travail, flexibilité ; s’il fallait désigner la grande figure de notre triste
époque, le grand artisan de notre monde, il faudrait assurément citer le Capital plutôt qu’une quelconque
classe révolutionnaire. En même temps, les métamorphoses du travail ont provoqué l’irruption de
nouvelles formes de luttes : mouvements de travailleurs précaires, des sans papiers, des mal logés. Elles
ont parfois débouché sur l’action directe : occupation sauvage de logement, réquisition de marchandises,
appropriations collectives et sauvages, gratuité ou auto réduction. Par ailleurs, ces mouvements ont
souvent tenté de s’auto-organiser en faisant le choix de collectifs, de comités ou de coordinations. On a
même vu apparaître en certaine occasion le mot d’ordre de convergence des luttes. Le mouvement
libertaire peut donc y voir à juste titre une réapparition de certaines des idées qu’il a toujours
encouragées. Toutefois, faute d’avoir pu donner un contenu politique radical à l’idée de convergence des
luttes et de coordonner les efforts, ces pratiques et ses formes d’auto-organisation, mêmes timides, n’ont
pu être ni politisées ni diffusées très largement. Ces nouvelles formes de contestation politique ont
semblé un temps se cristalliser autour du mouvement altermondialiste. Mais outre la répression et la
normalisation dont il a fait l’objet, il n’a pu se dégager d’une ambiguïté fondatrice du mouvement : lutte
contre le libéralisme ou contre le capitalisme, remise en cause du fétichisme marchand ou abolition du
salariat ? Finalement, le mouvement altermondialiste n’a pas réussi à être autre chose qu’un moment de
la société spectaculaire marchande en donnant l’illusion d’incarner un nouvel internationalisme. Faute
d’avoir pu s’enraciner dans des luttes réelles, il n’est resté qu’une chimère apparaissant le temps d’un
forum mondial ou d’une réunion des grands de ce monde.

L’imagination sociale radicale contre la répétition du même

En ces temps de rupture, l’ancien voisine avec le nouveau et nous nous attachons parfois à des
fétiches : le mythe de la révolution espagnole, l’esthétique de l’émeute, le syndicalisme comme mode
d’organisation privilégié des travailleurs. Revenir sur l’histoire du mouvement anarchiste peut nous
permettre d’y voir plus clair.

A la fin du 20e siècle, les anarchistes sont dans l’impasse politique. Les attentats et l’individualisme
anarchiste, la propagande par le fait, ont échoué. Le banditisme social n’a plus le soutien qu’il avait dans le
prolétariat au début du siècle. Dans ce contexte, les anarchistes sont entrés en masse dans les syndicats
ouvriers en voie de constitution pour en faire émanation, la forme d’organisation naturelle du mouvement
ouvrier. Mieux : ils ont donné un contenu politique à l’organisation avec le syndicalisme révolutionnaire et
le mythe de la grève générale. A cette époque, les anarchistes ont su faire preuve d’une imaginale sociale
radicale en inventant un espace d’opposition politique original et en phase avec les des besoins des
travailleurs, notamment ceux de l’industrie. Si les anarchistes veulent continuer à jouer un rôle politique
dans la lutte anticapitaliste et pour l’émancipation sociale et politique, ils vont devoir faire preuve de la
même imagination politique créative. Les syndicats sont devenus des bureaucraties plus jalouses de
leurs intérêts que de l’idée de libération sociale ? Les partis politiques transforment les espoirs
révolutionnaires en machines de guerre qui dévorent ses enfants ?

Créons des espaces d’opposition politique inédits !

L’actualité récente montre que, en certaines occasions, l’imagination populaire peut se mettre à
l’œuvre. C’est ce qui s’est passé lors que la révolte de la région de Oaxaca au Mexique en 2006. Les
habitants insurgés ont remis à l’ordre du jour la démocratie directe en établissant une assemblée
populaire souveraine ayant pour devise liberté et dignité. Les autorités ont mis six mois à reprendre le
contrôle de la région et à réimposer le régime politique et social légal. Sans vouloir enjoliver la réalité, les
insurgés ont su réactualiser dans le présent les principes de la Commune, de la libre association et du
fédéralisme en mettant fin, même de façon temporaire, à la division des opprimés, et notamment à la
séparation entre la ville et les campagnes, le mouvement indigène et les luttes urbaines. La preuve s’il en
est que le vieux rêve bouge encore, même quand les feux semblent éteints…

Cette étincelle qui attend de devenir flamme et incendie dit notre révolte de ne posséder qu’un destin
et notre volonté inassouvie de conquérir quelque chose comme une vie pleinement vécue. Cette utopie
révolutionnaire, nous pouvons bien encore l’appeler socialisme libertaire ou communisme anarchiste.
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Re: quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

Messagepar manouche du soir » Lundi 06 Avr 2009 12:04

Tres bon texte!
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Re: quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

Messagepar douddu » Lundi 06 Avr 2009 15:22

oui ,

après les échecs des grèves de 2001 sur les retraites


Plutôt 2003 non ?
douddu
 

Re: quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

Messagepar NOSOTROS » Lundi 06 Avr 2009 20:55

C'était pour voir ceux qui ont vraiment lu ! :-)
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Re: quelle présence libertaire dans le monde aujourd’hui ?

Messagepar manouche du soir » Mardi 07 Avr 2009 0:49

j'agonise :oops:
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