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Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Mardi 06 Jan 2009 0:28
par NOSOTROS
Pour lancer la discussion sur le retour en force de l'étatisme auquel il faut se préparer (cf discussions à ce sujet commencées à etre ébauchées), et alimenter la réflexion, je reposte ici un texte paru sur un blog de libération :

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http://philosophie.blogs.liberation.fr/ ... ertai.html

Gauche libertaire contre gauche étatique
Par François Noudelmann •



Les récentes reconfigurations de la gauche française effraient sans doute les stratèges socialistes mais elles montrent qu'un débat idéologique est en cours. Le Nouveau Parti Anticapitaliste, le Parti de Gauche, le Nouvel Espace Progressiste sont autant de démarquages à l'égard de partis dont la seule stratégie reste le maintien de leurs bastions électoraux. Cependant ce regain politique se développe sur le terrain plutôt balisé d'un marxisme orthodoxe jamais disparu en France et qui retrouve de la vigueur en dénonçant pêle-mêle la compromission libérale des sociaux-démocrates et l'hérésie du gauchisme soixante-huitard.

La gauche libertaire est la grande absente de la redistribution des formations progressistes. Mais que désigne au juste ce mot de "libertaire" un peu flou, repris tant par des anarchistes révolutionnaires que par des libertariens de droite? On peut en rappeler le spectre à travers les concepts et les combats qui l'ont porté il y a quarante ans: l'autogestion, la critique du travail, l'émancipation des mœurs, l'anti-étatisme. Cette inspiration fédérait des luttes hétérogènes : celles des ouvriers de Lip, des régionalistes, des féministes, des homosexuels, des immigrés. Elle accueillait ces mouvements revendicatifs sans les reléguer à des contradictions secondaires du capitalisme.

Cette frange libertaire a subi un laminage idéologique depuis deux décennies. Son éviction s'est exercée sur deux fronts. Par le côté gauche elle a été renvoyée à l'anarchisme de l'ultra gauche (les anarchistes "purs" comme les monarchistes purs qu'on désignait par ce terme d'ultras). Anti-pouvoir, destructionniste, cette mouvance politique indéfinissable (car "le drapeau noir, c'est encore un drapeau", déplorait Léo Ferré) s'apparente à une tradition nihiliste venue du XIXe siècle avec ses Ravachols, ses légendes russes ou, pour les plus glorieux, à ses héros de la guerre d'Espagne. N'en reste plus que le drapeau de la CNT dont la nostalgie flotte sur les manifestations étudiantes.

Mais c'est par le côté droit que l'inspiration libertaire a connu son plus fort matraquage. Elle a été associée au libéralisme, du moins dans son sens français, exclusivement économique, au détriment des diverses pensées libérales anglaises et de ce que signifie politiquement le terme de "liberal" outre-Atlantique. Le républicanisme français, qui domine tant à gauche qu'à droite, a promu cet amalgame selon lequel le libéralisme économique aurait réalisé les idéaux de mai 68, avec sa critique de l'autorité et son ambition émancipatrice, ouvrant la porte à l'enfant-roi et à la dépense incontrôlée, à l'individualisme et aux profits immoraux.

Des dizaines d'auteurs et des centaines de livres, de la psychanalyse à la science politique et à la philosophie, déclinent ce thème inlassablement, criant à la débâcle et appelant implicitement à la restauration. Il est piquant de constater que le président Sarkozy a repris cette rengaine aussi bien à la droite conservatrice qu'à la gauche anticapitaliste la plus orthodoxe (et dont Serge Audier a montré l'alliance objective dans La pensée anti-68). À cause de cette OPA négative, "antilibéral" et "antilibertaire" sont devenus synonymes. S'appuyant sur quelques doctes sociologues, les marxistes orthodoxes sont revenus à leurs fondamentaux, une analyse classiste et déterministe des mouvements sociaux, reléguant les autonomies libertaires à des revendications petites-bourgeoises. Cependant, faute d'identifier clairement un prolétariat uniformément dominé, c'est l'État qu'ils défendent désormais contre le capitalisme.

Depuis le thatchérisme, une logique libérale visant à briser les services publics et toutes les protections sociales a gagné l'Europe. L'empire du marché et la dérégulation généralisée ont été promus sous les noms de la modernisation et de la liberté. Quoi de plus naturel alors que d'être suspicieux face à toute réforme qui se pare de l'autonomie quand son but réel consiste à démanteler les organismes destinés au bien commun? Cependant il s'agit encore d'un rapt idéologique : car la liberté du capitalisme se présente en une version pauvre et passive, celle d'une absence de contrainte, avatar d'une vieille lune, la liberté d'indépendance. En revanche la liberté active de l'esprit libertaire suppose la responsabilité, elle promeut l'invention de formes sociales fondées sur l'assentiment individuel et collectif.

La préservation urgente des services publics menacés a conduit la gauche à une stratégie exclusivement défensive et étatiste. Conservatrice par force, elle en est venue à défendre ce qu'autrefois elle contestait. Dans l'éducation, domaine autrefois privilégié pour la réflexion de gauche, les motifs de la contestation ont été inversés: les lycéens manifestent contre le contrôle continu au baccalauréat et contre l'abandon des filières disciplinaires, les étudiants contre l'harmonisation européenne des diplômes puis contre l'autonomie des universités, les professeurs contre la fin des concours nationaux et des tutelles ministérielles. Encore une fois les réformes contestées suivent des logiques comptables à court terme que la gauche doit condamner. Mais celle-ci a perdu sa puissance de contre-proposition et n'a plus d'autre argument que de s'en remettre au modèle de l'État surpuissant qui contrôle, protège et légitime. Où sont passés les modèles alternatifs qui étaient la marque d'une pensée de gauche?

La solitude de certains penseurs qui ont continué à imaginer ces alternatives témoigne d'un tel effacement. Parmi eux, André Gorz (1923-2007), découvert par les médias à l'occasion de son suicide, a pourtant réfléchi au-delà des utopies 68, avec ses Adieux au prolétariat (1980) ou ses Métamorphoses du travail (1988), à une écologie politique fondée sur des pratiques d'autonomie à tous les niveaux de la société. Il n'avait pas besoin de jouer Bakounine contre Marx pour penser la sortie du capitalisme sans le retour du tout-État. Formé à la philosophie sartrienne, il savait qu'on peut être marxiste tout en affirmant la liberté pratique des humains dans l'Histoire.

L'oubli de la gauche libertaire dans la recomposition politique française n'est pas surprenant car elle n'a pas vocation à s'inscrire dans un parti, même si autrefois le PSU l'incarnait. On la retrouve parfois dans la constellation écologiste, et surtout dans la société civile et les associations qui luttent sur des terrains négligés par les partis institués. La résistance qui s'organise contre la traque des étrangers ou les mobilisations sur Internet contre les mesures sécuritaires du gouvernement, notamment dans le domaine psychopathologique, manifestent cette inspiration anti-autoritaire à la marge d'un républicanisme français dévoyé en étatisme, voire en nationalisme. La liberté y retrouve son sens politique, elle dit moins l'absence de règles que l'espoir d'une autre civilité.

MessagePosté: Samedi 10 Jan 2009 14:10
par riveira
Qu'en dire ?

Une problématique floue, un point de vue désincarné d'intellectuel, sans enracinement dans la lutte concrète, lutte de classe évidemment, une opposition superficielle entre gauche étatique et gauche libertaire, réduite en réalité dans l'article à la complémentarité pouvoir/contre-pouvoir, états/mouvementisme associatif.

Aucune radicalité. Aucune piste ouverte.

En creux, on imagine notre philosophe assez à l'aise aux milieux des alternatifs et autres alters, une gauche plus "décentralisatrice" que libertaire.

MessagePosté: Samedi 10 Jan 2009 16:58
par NOSOTROS
une opposition superficielle entre gauche étatique et gauche libertaire, réduite en réalité dans l'article à la complémentarité pouvoir/contre-pouvoir, états/mouvementisme associatif.


Oui. Mais justement, n'est ce pas là tout le discours d'un soit disant néo plateformisme (AL ici en France), dont les textes sont truffés de références à la nécessaire construction de contre pouvoirs, et précisément en s'appuyant sur ce mouvementisme ?

N'est ce pas là un autre écueil qui se profile : la contestation balisée, autorisée, car finalement - comme tu le dis - complémentaire ? (un peu comme le bouffon pour le roi. Pas l'un sans l'autre ...)

MessagePosté: Dimanche 11 Jan 2009 9:40
par riveira
Je ne connais pas assez les pratiques concrètes d'AL en interne comme sur les luttes pour me prononcer vraiment sur ce que tu dis.

Par contre je lis régulièrement leur presse, leur projet CL, leur manifeste... et il en ressort que si leur stratégie repose en effet sur la participation aux multiples mouvements sociaux (assos, syndicats, coordinations...) afin de pouvoir y porter une pratique CL, ils affirment que le renversement de l'etat bourgeois est nécessaire, donc la révolution.

On peut comprendre la même chose de leur analyse des insuffisances de la pratique de la CNT dans la révolution espagnole. Leur position est proche de celle des Amis de Durutti...

Pour ma part je pense que c'est plutôt une certaine gauche réformiste autogestionnaire qui se contente de ces contre-pouvoirs (la mouvance écolo, les ex PSU, certains alters...) ainsi que, peut être, les libertaires de type OLS, ou Holloway, dont l'insistance sur le mouvementisme fait l'impasse sur la destruction de l'état bourgeois, destruction qu'ils espèrent contourner, qu'ils aimeraient dissoudre dans les multiples contre pouvoirs comme par enchantement, une sorte de grignotage progressif de l'espace marchand par les zones libérées... bref une sorte de néo-réformisme qui ne dit pas son nom.

Pour ces derniers, je pense que leur position est due à la très compréhensible peur de voir une révolution tourner au totalitarisme, au centralisme...

En réalité, je pense que réformisme et libertaire font souvent bon ménage.

On peut le constater chaque semaine en lisant le ML : derrière un verbiage radical, on sent bien que la FA ne se donne absolument pas les moyens théoriques et pratiques de faire une quelconque révolution. Beaucoup de vitupérations pour finir par faire l'apologie de FO, et de l'ouverture de squatts. C'est une posture existentielle, mais celle-ci ne peut se développer qu'au sein d'une démocratie bourgeoise.

On peut le constater aussi dans les prises de position du Mouvement libertaire Cubain par exemple, qui au travers des déclarations du fils ou petit-fisl de Guevara semble souhaiter l'avènement d'une sorte de social-démocratie radicale à Cuba qui permettra selon lui de développer une société civile, des contre-pouvoirs, des syndicats indépendants, des assos... premiers pas vers une prise de pouvoir des gens sur leur vie.

Sur ce dernier point, peut-être a-t-il raison d'ailleurs. Comment passer d'une société où l'état despotique a stérilisé tout le tissu social à une société d'auto-organisation ? C'est une question difficile, mais il semble que le MLC n'envisage d'y répondre que par la remise en selle du réformisme.

MessagePosté: Dimanche 11 Jan 2009 14:30
par NOSOTROS
Toute le stratégie d'AL est organisée autour de la construction de ces contre-pouvoirs ...

Cf leur dernier Congrès :


http://www.alternativelibertaire.org/spip.php?article2112

IXe congrès d’Alternative libertaire - Saint-Denis, mai 2008

Pouvoir populaire contre pouvoir d’Etat
Alternative libertaire et le jeu institutionnel


9.0 Contre-pouvoir, double pouvoir, pouvoir populaire


9.1 Depuis 1789, nombre de révolutions modernes et de situations prérévolutionnaires ont été marquées par la montée en puissance d’un double pouvoir : un pouvoir d’État affaibli et désemparé face à la montée d’un pouvoir populaire auto-organisé, quelle que soit l’appellation que se donnent ses organes – conseils, soviets, comités, assemblées populaires…

9.2 Dans ces situations, l’objectif des révolutionnaires libertaires est non pas de prendre le pouvoir d’État et d’assumer un rôle gouvernemental, mais d’aider le pouvoir populaire à prendre conscience de lui-même, à se doter de ses propres institutions, à concurrencer puis à se substituer au pouvoir d’État.

9.3 Dans la situation présente – non révolutionnaire – l’objectif des révolutionnaires libertaires portent une stratégie fondée sur les contre-pouvoirs et leur fédération.

9.4 Ces contre-pouvoirs peuvent exister dans tous les lieux de vie et d’activité des classes dominées : lieux de production, quartiers, lieux de formation. Ils prennent aujourd’hui la forme de syndicats et associations de lutte, comités de quartier indépendants, etc. L’essentiel est le caractère de masse et de classe de ces contre-pouvoirs. « De classe », c’est-à-dire organisant des salarié-e-s n’ayant pas de contrôle ni en amont ni en aval sur l’objet de leur production ; « de masse », c’est-à-dire organisant ces salarié-e-s sans préjuger de leurs options idéologiques, sur la seule base de leur revendications communes.

9.5 Ces contre-pouvoirs sont l’outil essentiel pour mener les luttes sociales d’aujourd’hui. Nous souhaitons qu’ils soient l’embryon du double pouvoir de demain et du pouvoir populaire d’après-demain.


Leur position est proche de celle des Amis de Durutti...


Quelle mystification !

Ca c'est ce qu'aimerait nous faire croire AL ... Il suffit de lire leurs réolutions de congrès comme celle ci dessus pour être convaincu du contraire ...

Il ne suffit pas d'avoir publié un texte pour pouvoir se revendiquer de l'esprit des auteurs ...

MessagePosté: Dimanche 11 Jan 2009 15:09
par riveira
Disosn que nous ne comprenons pas les phrases de la même façon. Je veux bien concéder qu'il y a comme... une ellypse dans ce texte, qui n'aide pas à clarifier les choses.

Mais ce que je comprends c'est ça :

- aujourd'hui, contre-pouvoirs multiples (sociaux, syndicaux, locaux...). les gens luttent, se prennent en main eux-mêmes, ne délèguent pas leur intérêts, ne font pas confiance aux policiens pour régler leurs problèmes. Le débouché de la luttes, c'est la victoire de la lutte.

- demain, en période de montée révolutionnaire, ces contre-pouvoirs multipliés finissent par constituer une situation de double pouvoir : Un pouvoir issu des urnes, qui continue de représenter les intérêts bourgeois, mais qui n'arrive plus à imposer ses lois et un pouvoir issu des conseils, des collectifs de lutte, qui dirige les usines occupées, les quartiers occupés, ... qui représente le pouvoir insurgé.

C'est la situation classique, russie en 17 avec l'opposition constituante/soviets ou espagnole pouvoir républicain/communes aragon, entreprises autogérées, milices ouvrières...

Là où AL entretien le flou, c'est dans le passage magique entre cette situation de double pouvoir, qui ne peut durer indéfiniment, et le pouvoir de la base qui devient le pouvoir légitime unique.

Entre temps, il faut qu'il y ait eu destruction de l'appareil d'état bourgeois, de sa police, de son armée... ce que la CNt espagnole ou la FAI n'on su/pu/voulu faire.

Mais ce que veut dire AL, c'est que c'est bien le pouvoir de la base, les conseils, collectrifs de lutte qui doivent devenir l'embryon de pouvoir populaire, et non un parti ou un cartel de partis qui va s'installer de nouveau au centre d'un appareil d'état et gouverner par décrets.

Voilà ce que je comprends. Mais dis-moi si je me trompe.

MessagePosté: Dimanche 11 Jan 2009 15:54
par NOSOTROS
Je ne sais pas si tu te trompes.

Mais ce que veut dire AL, c'est que c'est bien le pouvoir de la base, les conseils, collectrifs de lutte qui doivent devenir l'embryon de pouvoir populaire, et non un parti ou un cartel de partis qui va s'installer de nouveau au centre d'un appareil d'état et gouverner par décrets.


Sauf qu'une nouvelle bureaucratie peut tout à fait surgir spontannément de ces "conseils" et autres collectifs, sans qu'il y ait eu au préalable de parti ou de cartels de partis magouilleurs. (Solidarnosc me parait etre un exemple).

Ce que je comprends en ce qui me concerne des textes d'Al, et ce que je vois de leurs pratiques, c'est que je n'ai pas la même conception qu'eux du "pouvoir".

Disons qu'il y a deux types de "pouvoir" : le pouvoir-faire (la capacité à faire) et le pouvoir-sur (la direction d'un mouvement).

ce que je comprends de toute les lectures de textes et d'AL, c'est qu'ils sont dans le "pouvoir-sur". Ce qu'ils appellent le "double pouvoir", c'est la concurrence entre deux "pouvoirs surs". Cela me parait particulièrement explicite quand tu vois leur pratique syndicale : ils sont à fond dans le jeu de l'encadrement syndical (ne serait ce qu'à SUD) et ne remettent nullement en cause le "pouvoir-sur" des syndicats sur les travailleurs qu'ils sont censés représenter. Au contraire ...

Pour moi, AL n'a aucune espèce d'ambiguité : ils revendiquent le "pouvoir sur", et donc ne sauraient en rien être considérés comme anarchistes ...

le rôle des révolutonnaires anarchistes n'est pas de former des "alters" pouvoirs-sur, mais au contraire de libérer les conditions autonomes du pouvoir-faire individuel et collectif, excellent garde fou car antinomique du pouvoir-sur.

MessagePosté: Lundi 12 Jan 2009 9:02
par riveira
Sauf qu'une nouvelle bureaucratie peut tout à fait surgir spontannément de ces "conseils" et autres collectifs, sans qu'il y ait eu au préalable de parti ou de cartels de partis magouilleurs. (Solidarnosc me parait etre un exemple).


Oui, c'est le risque du réel. Même sans magouilles, même sans idéologie autoritaire, des collectifs, des conseils... peuvent secréter des bureaucraties, des mandatés qui sont reconduits ad vitam aeternam, des gens qui ne veulent pas les remplacer... des gens pour qui la lutte est tout, y ont consacré toute leur vie (Durutti, révolutionnaire professionnel ?), et d'autres qui s'en balancent...
On ne peut même pas magnifier une forme (les conseils), ou un courant politique, nous ne pouvons qu'essayer de prévoir des pratiques les plus démocratiques possibles, des contre-feux, des mises en garde.

Par contre, nous savons quand même au sujet de Solidarnosc, qu'il était manipulé en partie depuis le début (Walesa, agent de la police d'état, il l'a lui-même écrit).

Sur la pratique d'AL, comme je l'ai dit, je ne peux juger, je ne les croise pas assez souvent.

Par contre :

Pour moi, AL n'a aucune espèce d'ambiguité : ils revendiquent le "pouvoir sur", et donc ne sauraient en rien être considérés comme anarchistes ...


Moi je n'ai jamais vu, lu, qu'AL revendiquaient le "pouvoir sur", mais simplement pensaient qu'il fallait pousser à l'auto-organisation, tisser des liens transversaux entre les luttes, dépasser les bureaucraties... et que de tout façon ils ne se revendiquent pas non plus eux-mêmes comme anarchistes, mais simplement issus du mouvement ouvrier libertaire, communiste libertaire et qu'ils se revendiquent plus largement d'un socialisme autogestionnaire.

C'est aussi ma position, au sein des collectifs de lutte auquels je participe.

La révolution à venir ne sera pas anarchiste, trotskyste, maoïste, anarcho-sndicaliste...

Chacun ira avec ses illusions, et beaucoup y perdront leurs illusions passées (les réformistes, les républicains,...). Ce sera un grand bordel, un grand brassage, et les recompositions, les lignes de clivages nouvelles se feront à ce moment là.

Certains seront peut-être mieux armés parce qu'ils auront un peu étudié l'histoire révolutionnaire, mais ce n'est même pas sûrs.

A suivre...

MessagePosté: Lundi 12 Jan 2009 15:31
par NOSOTROS
Sur Solidarnosc, peut être je ne sais pas.

Moi je n'ai jamais vu, lu, qu'AL revendiquaient le "pouvoir sur", mais simplement pensaient qu'il fallait pousser à l'auto-organisation, tisser des liens transversaux entre les luttes, dépasser les bureaucraties...



Ils poussent à l'auto organisation en participants aux syndicats institutionnels et en briguant les postes de bureaucrates ? (dépasser les bureaucrates pour prendre leur place sans doute ...)

Ce n'est pas sérieux ...

et que de tout façon ils ne se revendiquent pas non plus eux-mêmes comme anarchistes, mais simplement issus du mouvement ouvrier libertaire, communiste libertaire et qu'ils se revendiquent plus largement d'un socialisme autogestionnaire.


Il me semble que c'est ce que j'ai dis, même si c'est avec d'autres mots... :-)

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Mardi 24 Mar 2009 7:16
par Gorter
Je n'avais pas encore été sur ce débat et je le trouve très intéressant !

Il y a toujours cette question entre Gauche libertaire et Gauche étatiste.

Les marxistes vulgaires (staliniens, trotskistes, maoïstes...) sans parler des réformistes et nationalistes de gauche (PS, PG, MRC, PG, Alternatifs, Verts, régionalistes et indépendantistes divers...), sont tous des partisans de l'Etat, tout puissant et régulateur du Capital, et ce comme finalité (sic).

Pour les tenants "marxiens" de l'idéal révolutionnaire, à l'image de la Gauche communiste dans ses composantes plurielles, l'Etat ne doit être qu'une période de "transition" à partir d'un changement radical de société au sein du capitalisme, et ce afin d'aller vers le communisme auto-organisé et antiautoritaire.

Cette période de transition est particulièrement délicate et risquée si elle ne prend pas l'amplitude internationaliste ou A-nationale qu'elle doit avoir, car comme Bakounine avait pu l'écrire judicieusement, si il y a échec la situation peut tourner rapidement et pour de multiples raisons vers l'autoritarisme bureaucratique. Ce fut le cas en Russie avec la dégénérescence bureaucratique de la révolution menant à la contre-révolution stalinienne.

Sinon, voici en quelques lignes sur la question de l'Etat (en période de transition révolutionnaire) ce que Engels pouvait en écrire :

La question de l'État
Engels à A. Bebel
Londres, 16-18 mars 1875


[Le projet de programme de Gotha] a transformé le libre État populaire en État libre. Du point de vue grammatical, un État libre est celui qui est libre à l'égard de ses citoyens, autrement dit un État à gouvernement despotique. Il faudrait laisser tomber un tel bavardage sur l'État, surtout après la Commune qui n'était plus un État au sens propre. L'État populaire, les anarchistes nous l'ont assez jeté à la tête, bien que l'ouvrage de Marx contre Proudhon et ensuite le Manifeste disent expressément qu'avec l'instauration du régime socialiste l'État se dissout de lui-même et finit par disparaître.

L' « État » n'étant qu'une institution transitoire, dont on se sert dans la lutte durant la révolution pour réprimer de force ses adversaires, il est parfaitement absurde de parler de « libre État populaire ».

En effet, si le prolétariat a besoin de l'État, ce n'est point pour instaurer la liberté, mais pour réprimer ses adversaires, et sitôt qu'il pourra être question de liberté, l'État aura cessé d'exister en tant que tel. En conséquence, nous proposerions de mettre partout à la place du mot « État » le mot « communauté », (Gemeinwesen), excellent vieux mot allemand répondant fort bien au mot français « Commune »...

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Samedi 28 Mar 2009 0:01
par lucien
Gorter a écrit:Cette période de transition est particulièrement délicate et risquée si elle ne prend pas l'amplitude internationaliste ou A-nationale qu'elle doit avoir, car comme Bakounine avait pu l'écrire judicieusement, si il y a échec la situation peut tourner rapidement et pour de multiples raisons vers l'autoritarisme bureaucratique. Ce fut le cas en Russie avec la dégénérescence bureaucratique de la révolution menant à la contre-révolution stalinienne.

Sinon, voici en quelques lignes sur la question de l'Etat (en période de transition révolutionnaire) ce que Engels pouvait en écrire :

La question de l'État
Engels à A. Bebel
Londres, 16-18 mars 1875


[Le projet de programme de Gotha] a transformé le libre État populaire en État libre. Du point de vue grammatical, un État libre est celui qui est libre à l'égard de ses citoyens, autrement dit un État à gouvernement despotique. Il faudrait laisser tomber un tel bavardage sur l'État, surtout après la Commune qui n'était plus un État au sens propre. L'État populaire, les anarchistes nous l'ont assez jeté à la tête, bien que l'ouvrage de Marx contre Proudhon et ensuite le Manifeste disent expressément qu'avec l'instauration du régime socialiste l'État se dissout de lui-même et finit par disparaître.

L' « État » n'étant qu'une institution transitoire, dont on se sert dans la lutte durant la révolution pour réprimer de force ses adversaires, il est parfaitement absurde de parler de « libre État populaire ».

En effet, si le prolétariat a besoin de l'État, ce n'est point pour instaurer la liberté, mais pour réprimer ses adversaires, et sitôt qu'il pourra être question de liberté, l'État aura cessé d'exister en tant que tel. En conséquence, nous proposerions de mettre partout à la place du mot « État » le mot « communauté », (Gemeinwesen), excellent vieux mot allemand répondant fort bien au mot français « Commune »...
Cher Gorter,
Pourrais-tu m'expliquer comment ta période transitoire peut-elle éviter la sclérose et le maintien d'une structure autoritaire par une simple "amplitude internationaliste ou A-nationale" ?
Quant à Bakounine, j'aurai choisi un autre passage judicieux : "Lorsqu'au nom de la révolution on veut faire de l'Etat, ne fut-ce que de l'Etat provisoire, on fait de la réaction et on travaille pour le despotisme, non pour la liberté, pour l'institution du privilège contre l'égalité". Mais tu fais bien de citer Engels, qui remet Bakounine à sa place par un argument limpide : "... avec l'instauration du régime socialiste l'État se dissout de lui-même et finit par disparaître" (Engels aurait même rajouté : "disparu, pfffuit ", démonstration reprise plus tard dans une chanson...). Au fait, l'instauration du régime socialiste, c'est avant ou après la période transitoire ?
En gros, la gauche communiste est transitoirement étatiste mais à visée libertaire (c'est le sujet...) ?

"[Bakounine] veut éliminer ce que Marx lui-même, dans un moment d'anarchisme réthorique et théorique opportuniste avait appelé une "superstructure parasitaire"". Gaston Leval, La pensée constructive de Bakounine.

A Lucien...

MessagePosté: Dimanche 29 Mar 2009 11:46
par Gorter
La Gauche communiste, et là je parle plus particulièrement de ce que je peux savoir du CCI, n'est absolument pas étatiste, y compris sur le sujet de la période de transition qui n'est autre que la phase socialiste "antiautoritaire" (comités et conseils libres) devant permettre d'éliminer toutes les tares de l'idéologie bourgeoise capitaliste, dont l'Etat en est la plus sûre expression. En dehors de Marx et Engels, je t'invite aussi à consulter à ce sujet "Karl Marx" de Karl Korsch où via le matérialisme scientifique marxien par la pratique, est parfaitement explicité cette dite période de transition...

A ce sujet par le CCI :

http://fr.internationalism.org/brochures/pdt

http://fr.internationalism.org/french/r ... rique.html

Re: A Lucien...

MessagePosté: Dimanche 29 Mar 2009 17:49
par lucien
Gorter a écrit:La Gauche communiste, et là je parle plus particulièrement de ce que je peux savoir du CCI, n'est absolument pas étatiste, y compris sur le sujet de la période de transition qui n'est autre que la phase socialiste "antiautoritaire" (comités et conseils libres) devant permettre d'éliminer toutes les tares de l'idéologie bourgeoise capitaliste, dont l'Etat en est la plus sûre expression. En dehors de Marx et Engels, je t'invite aussi à consulter à ce sujet "Karl Marx" de Karl Korsch où via le matérialisme scientifique marxien par la pratique, est parfaitement explicité cette dite période de transition...

A ce sujet par le CCI :

http://fr.internationalism.org/brochures/pdt

http://fr.internationalism.org/french/r ... rique.html
Je vais lire avec attention les liens proposés car les justifications apportées me laissent sur la faim (comment une phase transitoire peut-elle être antiautoritaire si un Etat, peu importe son contrôle "ouvrier" est maintenu ?), quitte ensuite, si cela mérite éclaircissement, à créer un sujet "Le CCI et l'Etat" (on a légèrement dévié du sujet initial). Honnêtement, les positions du CCI quant à l'Etat et au Parti ne me paraissent pas compatibles avec l'antiautoritarisme... Alors tant mieux si je me trompe.

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Dimanche 17 Mai 2009 9:35
par Tibo
Cette question de "qu'est-ce qui va bien se passer après la révolution?" est super compliquée. Dans le détail, aucun de nous je pense n'a la solution (en tout cas pas moi). Et la question de l'État est encore plus casse-gueule que les autres.
L'État est est le garant de la cohésion de la société. Dit comme ça, ça paraît bien mais en fait, comme nous le savons tous ici, l'État est une sacrée saloperie. "Garant de la cohésion de la société" ça veut dire concrètement qu'il fait tout pour que la société n'évolue pas, il est au service de la classe dominante pour imposer son ordre aux autres classes. Et cela l'arme à la main s'il le faut. Pas besoin de s'étendre sur la terreur bourgeoise.
Le discours des gauchistes sur "plus de nationalisations pour plus de justice sociale" est en cela une belle fumisterie qui veut nous attacher à notre pire ennemi.
La question est: "après la révolution, peut-on se passer du jour au lendemain de cette belle saloperie d'État?".
Je ne le crois pas. Tant qu'il existe des classes (et la révolution ne suffira pas à faire disparaitre d'un coup les classes), un État est malheureusement nécessaire. D'où un gros problème car cet État, même au main de révolutionnaire sincère, fera tout pour conserver le statu-quo, pour maintenir son ordre et son pouvoir sur le reste de l'humanité. Donc, que fait-on?
1) La Commune de Paris a montré que la classe ouvrière ne pouvait utiliser l'État bourgeois, qu'il fallait le détruire et en construire un tout différent.
2) C'est à dire? L'État doit être le produit des conseils territoriaux. Ces assemblées générales souveraines permanentes qui existent en période révolutionnaire. Dans ces conseils sont représentées toutes les couches non exploiteuses de la société (classe ouvrière mais aussi les commerçants par exemple).
3) A aucun moment les organisations révolutionnaires (quelles qu'elles soient) doivent se confondre avec l'État. En 1917, la parti Bolchévik est devenu l'État et il s'est fait gangréné par la nature profondément réactionnaire de cet État. Les orga révolutionnaires doivent être indépendantes de l'Etat si elles veulent avoir une chance de demeurer "révolutionnaire".
4) Il faut qu'une "force" (mais non pas celle des Jedis) foute sans cesse des coups de pieds au cul à cet État pour le forcer à avancer, pour l'empêcher d'essayer de garder le statu quo: ça c'est le rôle des conseils ouvriers. Le pouvoir de décision doit leur revenir. C'est assemblées générales permanentes souveraines qui ne rassemblent pas toutes les couches de la sociétés mais la classe ouvrière doit avoir le rôle décisionnelle. Comment? C'est ces assemblées qui doivent garder le contrôle des armes. (il y a donc une différence entre conseils ouvriers et conseils territoriaux).
5) Le but de tout ça, c'est que l'État (et les classes) disparaissent. La question est donc: la classe ouvrière est elle bien la première classe dans l'histoire à œuvrer à sa propre disparition?
6) Enfin, de toute façon, la Commune de Paris ou 1917 sont des maigres expériences comparé à ce qui nous attend si il y a bien une révolution victorieuse à l'échelle internationale. Ce sera pour nous tous un grand saut dans l'inconnu. Qu'elle que soit la forme que prendra la société (même s'il y a bien cette espèce de société à trois têtes: État/conseils territoriaux - Orga révolutionnaires - et surtout conseils ouvriers), ça finira un nœud de boudin s'il n'y a pas une vie révolutionnaire effervescente, si les discussions dans les AG permanentes cessent, si TOUTE la classe ouvrière et les couches non-exploiteuse cessent de se sentir concernée et impliquée.
En me relisant, je vois bien que j'ai voulu en dire beaucoup en peu de lignes et que c'est un peu indigeste, désolé. Cet article sera peut être plus clair: http://fr.internationalism.org/book/export/html/1262 (si vous tapez dans la barre de recherche sur le site du CCI "période de transition" vous verrez qu'il y a des articles contradictoires car nous avions eu à l'époque (enfin nous, moi j'étais pas né) un débat et des désaccords sur ce sujet...).

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Dimanche 17 Mai 2009 9:50
par NOSOTROS
"après la révolution, peut-on se passer du jour au lendemain de cette belle saloperie d'État?".
Je ne le crois pas. Tant qu'il existe des classes (et la révolution ne suffira pas à faire disparaitre d'un coup les classes), un État est malheureusement nécessaire.


Et bien moi au contraire je le crois. Voila, fin de la discussion.

les couches non exploiteuses de la société (classe ouvrière mais aussi les commerçants par exemple).


Groumph ... On voit que tu n'as jamais été salarié d'un commerçant !

Surprenant cette entorse à la vision en classe de la part d'un marxiste pur et dur ... Attention, tu vires Mao là !

Il faut qu'une "force" (mais non pas celle des Jedis)


Normal de ton point de vue, puisque l'empire contre attaque est un film anarchosyndicaliste (ceux qui suivent le forum savent de quoi je parle. Si si, j'en ferai la démonstration un jour ! Après la révolution peut être ?:lol:)

Sinon tu dis de façon liminaire, comme pour nous rassurer :

"qu'est-ce qui va bien se passer après la révolution?" ... Dans le détail, aucun de nous je pense n'a la solution (en tout cas pas moi)


puis tu ajoutes immédiatement après :

L'État doit être le produit des conseils territoriaux assemblées générales souveraines permanentes


et encore :

Il faut qu'une "force" (mais non pas celle des Jedis) ... ça c'est le rôle des conseils ouvriers.


Et bien dis donc pour quelqu'un qui n'a pas de solution, tu me sembles pourtant déjà savoir ce que DOIT être la société post révolutionnaire, que tu es déjà capable de dire à l'avance qu'elle sera organisée autour de trois pôles (Je te cite : " État/conseils territoriaux - Orga révolutionnaires - et surtout conseils ouvriers"

Ce n'est donc pas tant le "grand saut dans l'inconnu" dont tu nous parles avec frisson ...

C'est quand même rassurant d'avoir déjà tout planifié à l'avance. La révolution se chargera de régler les points de détails, c'est ça ?

Bon alors petit point de détail : ton Etat révolutionnaire, se fera t il dans des frontières nationales ? Je veux dire il y a des chances que la révolution commence en un point géographique donné et qu'elle ne déclenche pas immédiatement sur tous les territoires géographiques et tous les continents en même temps. On peut espérer qu'elle s'étende. La phase transitoire c'est aussi ça : une étape de progression géographique. Donc disons que par exemple elle atteigne le territoire géographique de la France, la Belgique, l'Espagne, la Suisse, y aura t il un seul Etat révolutionnaire centralisé qui s'occupera de gérer et administrer tout le territoire révolutionnaire ? Ou bien y aura t il des divisions géographiques (voire des sous Etats ?) dans le cadre des frontières actuellement existantes ? Et si la Corse - par exemple - veut faire secession, avoir son propre Etat avec ses propres conseils territoriaux comment faire ?

Les conseils territoriaux seront ils organisés dans le respect des frontières héritées de l'actuel découpage, ou bien on peut imaginer qu'ils se redécouperont en fonction des souhaits et des désirs de habitants ?

L'Etat révolutionnaire est il unique et indivisible ?

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Dimanche 17 Mai 2009 10:28
par goldfax
Je me garde ce sujet sous le coude... on va sûrement rire un peu... :twisted:

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Dimanche 17 Mai 2009 11:01
par Tibo
Merci les gars... Je ne comprends pas vos réponses, leur état d'esprit j'entends. Si on veut débattre, on ne doit pas chercher à se coincer, à marquer des points. Tout est résumé dans cette intervention de Goldfax:
goldfax a écrit:Je me garde ce sujet sous le coude... on va sûrement rire un peu... :twisted:


Moi je veux bien rire ensemble mais si on veut discuter et que votre seul but est de se foutre de ma poire, on est mal parti non ?

Même si je m'exprime mal, essayez de voir ce que je veux dire par exemple.

Par exemple, Nosotros, certaines des questions que tu soulèves sont intéressantes à mes yeux mais tu ne fais là que critiquer, exprime aussi ce que tu penses en positif pour qu'on avance. Propose.

Sur la question de "L'État unique et indivisible". Pour la Corse, je ne peux pas te répondre, c'est trop risqué :mrgreen:

Plus sérieusement, j'en sais rien. Comme tu le dis, la révolution ne va pas se faire partout en même temps. Cela va même peut être durer un moment. Si c'est en France et en Allemagne que ça part, l'unité géographique, ça marche. Mais si c'est en Italie et aux USA (on peut rêver) que ça prend d'abord, qu'est-ce qui se passe? J'en sais rien. Par contre, il va falloir que ça ne traine pas trop, que des coins ne se retrouvent pas trop longtemps isolés, sinon, ça va faire mal.

J'ai balayé vite fait comment je voyais les choses en gros pour après la révolution (bon, déjà, faut qu'on y arrive...): conseils territoriaux, conseils ouvriers, orgas, États... Mais avant d'en arriver là, la première question est "la révolution va-t-elle suffire par elle-même à créer un nouveau monde? Vivra-t-on dans une société sans classe, sans argent tout de suite après l'insurrection?". Et là, Nosotros a raison, on ne peut pas se contenter d'un "je crois" (ou d'un "je ne le crois pas" en l'occurrence).
J'ai remarqué que Nosotros insiste souvent sur l'importance du combat idéologique. C'est juste (moi j'appelle ça le développement de la conscience). La bourgeoisie a pris le pouvoir économiquement puis politiquement. Autrement dit, elle a construit son monde peu à peu puis a pris le pouvoir. Pour la classe ouvrière, je ne crois pas que ça puisse se passer comme ça. Nous n'avons pas de pouvoir économique dans cette société, nous ne sommes pas une classe exploiteuse (puis dominante) - et tant mieux ! - comme l'a été depuis le début la bourgeoisie. Nous devons d'abord faire la révolution (et donc évoluer d'abord collectivement dans nos têtes) puis après nous pourrons transformer peu à peu le monde, lutter à notre propre disparition en tant que classe pour construire une société sans classe (et ça va pas être évident).

Si maintenant, pour répondre, vous pouviez passer de :twisted: à :lol: ou même :? on arrivera peut être un jour à :idea: Sinon, c'est la bourgeoisie qui peut continuer de faire :mrgreen:

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Dimanche 17 Mai 2009 12:34
par NOSOTROS
Pour la Corse, je ne peux pas te répondre, c'est trop risqué :mrgreen:


C'est plus sage en effet ! :lol:

Plus sérieusement, j'en sais rien. Comme tu le dis, la révolution ne va pas se faire partout en même temps. Cela va même peut être durer un moment. Si c'est en France et en Allemagne que ça part, l'unité géographique, ça marche. Mais si c'est en Italie et aux USA (on peut rêver) que ça prend d'abord, qu'est-ce qui se passe? J'en sais rien


En effet. C'est bien là que l'on voit la différence entre "internationalisme" et "anationalisme", entre centralisme et fédéralisme.

Tu évoques la bourgeoisie dans ton message. La division en classe est en effet une part du problème. Mais ce n'est pas la seule. Car, idéologiquement, il y a des valeurs qui sous tendent la société, qui sont transverses à toutes les classes - et communément admises par tous, quelque soient leur position sociale, et qui sont à supprimer. Par exemple la hiérarchie, la compétition etc ... Et là il n'est pas question d'étape transitoire : c'est dès maintenant, dans nos groupes mêmes, qu'il faut les supprimer. Pas besoin d'attendre la révolution.

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Lundi 18 Mai 2009 22:33
par lucien
Tibo, je n'ai guère de temps pour te répondre sur ton Etat transitoire mais ta réponse me laisse penser que tu mets le doigt dans l'autoritarisme le plus notoire, ce qui serait dommage pour quelqu'un se revendiquant de l'anti-autoritarisme. Peut-être auras-tu l'occasion de préciser ta pensée.

Re: Gauche libertaire contre gauche étatique

MessagePosté: Mardi 19 Mai 2009 8:14
par goldfax
Tibo a écrit:La question est: "après la révolution, peut-on se passer du jour au lendemain de cette belle saloperie d'État?".
Je ne le crois pas. Tant qu'il existe des classes (et la révolution ne suffira pas à faire disparaitre d'un coup les classes), un État est malheureusement nécessaire. D'où un gros problème car cet État, même au main de révolutionnaire sincère, fera tout pour conserver le statu-quo, pour maintenir son ordre et son pouvoir sur le reste de l'humanité. Donc, que fait-on?


Que fait-on ? Déjà, on ne se résigne pas à croire que l'Etat est nécessaire pour une supposée période de transition. Comme l'URSS l'a démontré, l'Etat stalinien n'a été qu'une transition entre le féodalisme et le capitalisme. Doit-on répéter les mêmes stratégies inopérantes ?? "Je ne le crois pas."

Tibo a écrit:3) A aucun moment les organisations révolutionnaires (quelles qu'elles soient) doivent se confondre avec l'État. En 1917, la parti Bolchévik est devenu l'État et il s'est fait gangréné par la nature profondément réactionnaire de cet État. Les orga révolutionnaires doivent être indépendantes de l'Etat si elles veulent avoir une chance de demeurer "révolutionnaire".


Mais si l'Etat est par nature réactionnaire, cela veut dire qu'il faut le détruire et ne pas prétendre ne pas intégrer l'avant-garde que vous voulez créer à cet Etat. Que l'Etat soit bourgeois ou prétendument révolutionnaire, il est de même nature. Ne le crois-tu pas ? Ou alors tu n'as pas lu les bons livres. Plutôt que de t'attarder à lire les anthologies marxistes et CCIstes, tu devrais t'ouvrir sur d'autres lectures, tu comprendrais mieux pourquoi l'Etat doit être abattu au moment de la révolution.

Tibo a écrit:4) Il faut qu'une "force" (mais non pas celle des Jedis) foute sans cesse des coups de pieds au cul à cet État pour le forcer à avancer, pour l'empêcher d'essayer de garder le statu quo: ça c'est le rôle des conseils ouvriers. Le pouvoir de décision doit leur revenir. C'est assemblées générales permanentes souveraines qui ne rassemblent pas toutes les couches de la sociétés mais la classe ouvrière doit avoir le rôle décisionnelle. Comment? C'est ces assemblées qui doivent garder le contrôle des armes. (il y a donc une différence entre conseils ouvriers et conseils territoriaux).


Quel naïveté ! Tout ce que tu décris ici, c'est ni plus ni moins une sorte de réformisme en période de transition. Tu as beau critiquer le NPA et consorts, en fait, quand la nature de l'Etat changera soi-disant tu adopteras la même attitude que les trotskos vis-à-vis de l'Etat bourgeois. Quant au rôle des conseils, d'abord on ne sait pas si l'organisation sociale après la révolution ressemblera à ce que tu décris. Ensuite, comme tu le démontres, mais sans le dire, le fonctionnement Etat-conseil est compliqué. Alors pourquoi se charger les méninges avec l'Etat ?

Tibo a écrit:5) Le but de tout ça, c'est que l'État (et les classes) disparaissent. La question est donc: la classe ouvrière est elle bien la première classe dans l'histoire à œuvrer à sa propre disparition?


Non, les esclaves de l'antiquité ou ceux des périodes coloniales ont voulu ne plus être des esclaves, les serfs n'ont plus voulu être des serfs. Les bourgeois ont voulu le pouvoir et sont devenus l'aristocratie industrielle... Il y a plein d'exemples...

Tibo a écrit:6) Enfin, de toute façon, la Commune de Paris ou 1917 sont des maigres expériences comparé à ce qui nous attend si il y a bien une révolution victorieuse à l'échelle internationale. Ce sera pour nous tous un grand saut dans l'inconnu. Qu'elle que soit la forme que prendra la société (même s'il y a bien cette espèce de société à trois têtes: État/conseils territoriaux - Orga révolutionnaires - et surtout conseils ouvriers), ça finira un nœud de boudin s'il n'y a pas une vie révolutionnaire effervescente, si les discussions dans les AG permanentes cessent, si TOUTE la classe ouvrière et les couches non-exploiteuse cessent de se sentir concernée et impliquée.


C'est bien pour cela que pour dénouer tout cela, il ne faut pas rendre les choses plus compliquées qu'elles ne sont. Mort à l'Etat !


Tibo a écrit:Sur la question de "L'État unique et indivisible". Pour la Corse, je ne peux pas te répondre, c'est trop risqué :mrgreen:


Il faut que tu demandes à ton comité central pour nous répondre ?

Tibo a écrit:J'ai remarqué que Nosotros insiste souvent sur l'importance du combat idéologique. C'est juste (moi j'appelle ça le développement de la conscience). La bourgeoisie a pris le pouvoir économiquement puis politiquement. Autrement dit, elle a construit son monde peu à peu puis a pris le pouvoir.


Parce que tu crois que la bourgeoisie a procédé par étapes ? :shock:


lucien a écrit:Tibo, je n'ai guère de temps pour te répondre sur ton Etat transitoire mais ta réponse me laisse penser que tu mets le doigt dans l'autoritarisme le plus notoire, ce qui serait dommage pour quelqu'un se revendiquant de l'anti-autoritarisme. Peut-être auras-tu l'occasion de préciser ta pensée.


C'est vrai que c'est assez paradoxal...